Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme E... B... épouse F... a demandé au tribunal administratif de Montreuil à titre principal, d'annuler la décision en date du 27 mars 2020 par laquelle le maire de la commune de Drancy a rejeté sa demande de reconnaissance d'imputabilité au service de sa pathologie à l'épaule droite et, à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise. Par un jugement n° 2007173 du 3 février 2023 le tribunal administratif de Montreuil a rejeté l'ensemble de ses demandes. Procédure devant la Cour : Par une requête, un mémoire complémentaire, des pièces complémentaires et un mémoire en réplique, enregistrés les 2 avril et 15 mai 2023, 4 et 20 mai et 28 juin 2024, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, Mme B..., représentée par Me Yturbide, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2007173 du 3 février 2023 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 27 mars 2020 du maire de la commune de Drancy rejetant sa demande de reconnaissance d'imputabilité au service de sa pathologie à l'épaule droite ; 2°) d'annuler cette décision ; 3°) de dire et juger que sa pathologie est bien une maladie professionnelle et subsidiairement, d'ordonner une expertise ; 4°) de mettre à la charge de la commune de Drancy la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Mme B... soutient que : - sa pathologie est imputable au service, dès lors qu'elle remplit les conditions prévues par le tableau des maladies professionnelles n° 57 annexé au livre IV du code de la sécurité sociale en raison de la nature de ses tâches nécessitant des mouvements répétés et forcés de l'épaule ; - tous les médecins ont estimé que sa pathologie relevait de la législation professionnelle à l'exception du médecin de la mairie de Drancy ; - si elle a bénéficié d'un poste aménagé, l'aménagement de son poste ne portait sur une pathologie à l'épaule mais aux jambes et au dos ; - la reconnaissance d'une maladie contractée en service n'est pas subordonnée à l'inscription de cette maladie sur un tableau de la maladie professionnelle ; - il n'y a pas de lien direct entre sa pathologie dégénérative articulaire bilatérale et la rupture de coiffe unilatérale. Par un mémoire en défense, enregistré le 3 juin 2024, la commune de Drancy, représentée par la SCP Goutal, Alibert et associés conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de la requérante sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir : - à titre principal, la requête est irrecevable, dès lors que, d'une part, elle ne conclut pas à l'annulation d'une décision identifiée et que, d'autre part, elle comporte des conclusions à fin d'injonction à titre principal ; - à titre subsidiaire, aucun des moyens de la requête n'est fondé. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la sécurité sociale ; - le code général de la fonction publique ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ; - le décret n° 72-1010 du 2 novembre 1972 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Boizot, - les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public, - et les observations de Me Silvani pour la commune de Drancy. Une note en délibéré a été présentée le 9 décembre 2024 pour la commune de Drancy par Me Kaczmarczyk. Considérant ce qui suit : 1. Mme B... épouse F..., adjointe technique territoriale principale titulaire, exerce ses fonctions à la commune de Drancy. Elle a sollicité le 20 décembre 2019 la reconnaissance de l'imputabilité au service de la pathologie affectant son épaule droite constatée à compter du 28 octobre 2019. Par un arrêté en date du 27 mars 2020, le maire de la commune de Drancy a rejeté sa demande. Par un ordonnance n° 2007799 du 8 avril 2021, le juge des référés du tribunal administratif de Montreuil a désigné à la demande de Mme B... épouse F... un expert pour statuer sur l'imputabilité au service de sa pathologie. Par un jugement n° 2007173 du 3 février 2023, dont Mme B... épouse F... interjette régulièrement appel, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 27 mars 2020 du maire de la commune de Drancy rejetant sa demande de reconnaissance d'imputabilité au service de sa pathologie à l'épaule droite. 2. Aux termes du IV de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, alors applicable : " (...) Est présumée imputable au service toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ce tableau. / Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée par un tableau peut être reconnue imputable au service lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est directement causée par l'exercice des fonctions. / Peut également être reconnue imputable au service une maladie non désignée dans les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions et qu'elle entraîne une incapacité permanente à un taux déterminé et évalué dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat. (...) ". Aux termes du A du tableau des maladies professionnelles n° 57, introduit par le décret n° 72-1010 du 2 novembre 1972 pris pour l'application de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale susvisé et annexé au livre IV du code de la sécurité sociale : " Rupture partielle ou transfixiante de la coiffe des rotateurs objectivée par IRM / Délai de prise en charge : 1 an (sous réserve d'une durée d'exposition d'un an) / Liste limitative des travaux susceptibles de provoquer ces maladies : travaux comportant des mouvements ou le maintien de l'épaule sans soutien en abduction avec un angle supérieure ou égal à 60° pendant au moins deux heures par jour en cumulé ou avec un angle supérieur ou égal à 90° pendant au moins une heure par jour en cumulé ". Les droits des agents publics en matière d'accident de service et de maladie professionnelle sont constitués à la date à laquelle l'accident est intervenu ou la maladie diagnostiquée. 3. Les dispositions de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale instituant une présomption d'origine professionnelle pour toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans des conditions mentionnées à ce tableau ont été rendues applicables aux fonctionnaires relevant de la fonction publique territoriale par l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d'activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique. 4. L'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, codifié à l'article L. 822-18 du code général de la fonction publique, est entré en vigueur, en tant qu'il s'applique à la fonction publique territoriale, à la date d'entrée en vigueur, le 13 avril 2019, du décret n° 2019-301 du 10 avril 2019 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique territoriale, décret par lequel le pouvoir réglementaire a pris les dispositions réglementaires nécessaires pour cette fonction publique. Mme B... épouse F... a sollicité la reconnaissance de l'imputabilité au service le 20 décembre 2019 en précisant que la première constatation médicale de la maladie a été faite le 28 octobre 2019. Eu égard à la date du diagnostic de la maladie les dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 dans leur rédaction issue de l'ordonnance du 19 janvier 2017 sont applicables. 5. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. 6. En l'espèce, la requérante soutient souffrir d'une pathologie à l'épaule droite, maladie répertoriée dans le tableau n° 57 annexé au livre IV du code de la sécurité sociale, dont la cause résiderait directement dans ses conditions de travail d'adjoint administratif au sein du service courrier, à la direction générale des services de la commune de Drancy. Il ressort de la radiographie des épaules effectuée le 12 octobre 2019 que Mme B... souffre d'une " relative déminéralisation osseuse globale avec un franc pincement de l'espace sous acrimonial à droite suggérant d'une rupture la coiffe des rotateurs ainsi que d'une arthrose acromio-claviculaire bilatérale et d'une petite calcification dystrophique trochantérienne gauche ". Ce diagnostic a été confirmé par une IRM de l'épaule droite qui a été réalisée le 21 novembre 2019, au terme de laquelle il a été conclu que Mme B... épouse F... souffrait d'une " rupture totale du tendon du supra-épineux rétracté à l'aplomb de la tête humérale avec probable fissuration de l'insertion du tendon de l'infra-épineux et un épanchement liquidien de moyenne abondance dans la bourse séreuse sous-acromio-deltoïdienne ainsi que d'arthrose acromio-claviculaire hypertrophique ". Au regard des pièces médicales concordantes produites, à la date du constat de la maladie, Mme B... souffre bien d'une rupture partielle ou transfixiante de la coiffe des rotateurs objectivée par IRM, maladie répertoriée dans le tableau n° 57 mentionné. 7. Pour refuser de reconnaître cette pathologie comme une maladie professionnelle, la commune de Drancy invoque l'expertise réalisée par le docteur D..., le 10 mars 2020, suite à la demande de déclaration de maladie professionnelle déposée le 20 décembre 2019 par Mme B... épouse F..., qui conclut que " les tâches décrites ne relèvent pas de travail prolongé plusieurs heures par jour, bras à 90° ou au-delà, que le profil de poste ne permet pas de rattacher sa pathologie de l'épaule droite à ne origine professionnelle et que la pathologie doit être prise en charge en maladie ordinaire ". 8. Toutefois, cette appréciation est contredite par le rapport d'expertise du docteur C... en date du 2 juillet 2021 diligentée par le tribunal administratif de Montreuil à la demande de Mme B... épouse F... qui se prononce en faveur de la reconnaissance de la maladie professionnelle au regard des documents médicaux communiqués et de la description de poste faite par l'intéressée. Il indique que " ses tâches consistent pour 90 % à réceptionner le courrier, le trier, ouvrir les plis et en orienter le contenu vers les services appropriés, scanner certains courriers et plis reçus, affranchir et aiguiller le courrier " et relève que l'analyse de ces tâches, à tout le moins celles constituées par l'affranchissement et le scannage, même effectuées depuis le bureau de la requérante ou un fauteuil surélevé mis à sa disposition, permet d'identifier au moins deux heures par jour ou en cumulé durant lesquelles Mme B... épouse F... doit maintenir les épaules à au moins 60° en abduction sans soutien, travaux qui correspondent à ceux identifiés par le tableau n° 57 des maladies professionnelles annexé au code de la sécurité sociale dans le cadre d'une rupture partielle ou transfixiante de la coiffe des rotateurs objectivée par IRM ou arthroscanner, que la requérante a travaillé à ce poste de 2015 à 2019 et que les premiers signes datent d'octobre 2019. Il en conclut que les " trois critères de reconnaissance de la maladie professionnelle 57A du régime général, dénommée " affections périarticulaires provoquées par certains gestes et posture de travail ", à savoir la désignation de la maladie, le délai de prises en charge et la liste limitative des travaux susceptibles de provoquer ces maladies sont bien remplis " et que le taux imputable à la maladie professionnelle est de vingt pour cent. 9. Cependant, Mme B... épouse F... ne peut, compte tenu de ce qui a été dit au point 5 du présent arrêt, se prévaloir directement de ce tableau. En effet, dans ses écritures en défense, la commune de Drancy conteste la nature des travaux effectués par l'intéressée, telle que ceux-ci ont été décrits par le docteur C..., dans un rapport en date du 29 novembre 2021 établi par le responsable du service santé - retraite de la direction des ressources humaines de la commune de Drancy. Il y est précisé d'une part, que la requérante travaille toujours en position assise et ne soulève aucune charge lourde et que ses collègues lui apportent le courrier qui est trié tous les matins pendant environ 15 minutes par deux agents. Il y est également mentionné que les rares fois où elle ouvre le courrier, elle a la possibilité de mettre son fauteuil à hauteur et qu'elle est dispensée de la distribution des pochettes dans les cases qui sont en hauteur. L'auteur du rapport signale aussi que Mme B... épouse F... est rarement préposée à l'affranchissement du courrier et que si, c'était le cas, elle n'est jamais seule pour effectuer cette opération qui occupe moins d'une heure par jour. Enfin, il est indiqué que pour scanner les documents, Mme B... épouse F... dispose d'un scan sur son bureau à hauteur des avants bras et qu'elle peut travailler les coudes sur le bureau. Ces allégations sont confirmées par des photos annexées au rapport et démontrent que la commune de Drancy a procédé à un aménagement du poste de travail de Mme B... conformément aux demandes du médecin du travail qui a conclu son aptitude. Si la requérante fait valoir qu'il a été procédé à un aménagement de son poste en raison de problèmes dorsaux et non au niveau des épaules, il n'en demeure pas moins que ces aménagements permettent de limiter la sollicitation des épaules et les mouvements répétitifs du bras au-dessus de la tête et à l'horizontale qui entraînent le pincement par la tête de l'humérus des muscles de la coiffe des rotateurs contre la partie supérieure de l'omoplate.
10. Par ailleurs, même si le certificat médical en date du 31 mars 2023 établi par le docteur A... indique qu'il n'existe pas de lien direct entre la pathologie dégénérative articulaire bilatérale et la rupture de coiffe unilatérale, et si Mme B... épouse F... soutient qu'elle accomplit certaines tâches qui seraient à l'origine de ses douleurs, ces éléments ne permettent pas de démontrer qu'elle serait amenée à effectuer des travaux comportant des mouvements ou le maintien de son épaule droite sans soutien en abduction dans les conditions et pendant les durées cumulées prévues par les dispositions précitées du tableau. Ainsi, elle ne caractérise, ni n'établit l'existence de circonstances particulières dans ses conditions de travail qui auraient directement et essentiellement concouru à la survenance de sa pathologie. Par suite, en prenant l'arrêté attaqué, le maire de la commune de Drancy n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983. 11. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées par la commune ni de diligenter une nouvelle expertise, que Mme B... épouse F... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. 12. Enfin, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Drancy, qui n'a pas la qualité de partie perdante, le versement de quelque somme que ce soit au titre des frais exposés par Mme B... épouse F... et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par la commune de Drancy sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : Article 1er : La requête de Mme B... épouse F... est rejetée.Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Drancy au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... B... épouse F... et à la commune de Drancy.Délibéré après l'audience du 6 décembre 2024, à laquelle siégeaient :- M. Carrère, président de la chambre,- Mme Boizot, première conseillère,- Mme Lorin, première conseillère.Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 20 décembre 2024. La rapporteure,S. BOIZOTLe président,S. CARRERE La greffière,C. DABERTLa République mande et ordonne au préfet de la Seine-Saint-Denis en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.N° 23PA01331 2