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31/12/2024 | FRANCE | N°24PA01781

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 7ème chambre, 31 décembre 2024, 24PA01781


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 19 septembre 2023 par laquelle le préfet de police a rejeté sa demande d'admission exceptionnelle au séjour.



Par un jugement n° 2326402/5-1 du 16 février 2024, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.



Procédure devant la Cour :



Par une requête, enregistrée le 17 avril 2024, M. B..., représenté par Me Nganga, dem

ande à la Cour :



1°) d'annuler ce jugement du 16 février 2024 ;



2°) d'annuler la décision du préfet de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 19 septembre 2023 par laquelle le préfet de police a rejeté sa demande d'admission exceptionnelle au séjour.

Par un jugement n° 2326402/5-1 du 16 février 2024, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 17 avril 2024, M. B..., représenté par Me Nganga, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 16 février 2024 ;

2°) d'annuler la décision du préfet de police du 19 septembre 2023 ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision attaquée n'est pas motivée ;

- elle est entachée d'une erreur de droit ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 juin 2024, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- le moyen tiré d'un défaut de motivation de la décision attaquée, soulevé pour la première fois en appel, est irrecevable ;

- les autres moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés ;

- à titre subsidiaire, il demande que le fondement du rejet de la demande de titre de séjour présentée au titre du travail, basé sur les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, soit remplacé par celui relatif au pouvoir discrétionnaire dont il dispose pour régulariser, en opportunité, la situation de tout étranger.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Tunisie en matière de séjour et de travail, fait à Paris le 17 mars 1988 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Desvigne-Repusseau a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par une décision du 19 septembre 2023, le préfet de police a rejeté la demande d'admission exceptionnelle au séjour présentée le 10 mars 2022 par M. B..., ressortissant tunisien né en 1980. Celui-ci fait appel du jugement du 16 février 2024 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

2. En premier lieu, M. B... n'avait, en première instance, présenté que des moyens de légalité interne contre la décision attaquée. Ainsi, comme le soutient à bon droit le préfet de police, le requérant n'est pas recevable, en appel, à soutenir que cette décision serait entachée d'un défaut de motivation, ce moyen reposant sur une cause juridique différente de celle qui fondait ses moyens de première instance. Par suite, ce moyen doit être écarté.

3. En second lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 / (...) ". Cet article est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée. Dès lors que l'article 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant tunisien souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 435-1 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-tunisien, au sens de l'article 11 de cet accord. Toutefois, si l'accord franco-tunisien ne prévoit pas, pour sa part, de semblables modalités d'admission exceptionnelle au séjour, il y a lieu d'observer que ses stipulations n'interdisent pas au préfet de délivrer un titre de séjour à un ressortissant tunisien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit. Il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation.

4. D'une part, M. B... ne peut utilement se prévaloir des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives à la délivrance d'un titre de séjour pour exercer une activité salariée dès lors que la délivrance d'un tel titre de séjour est exclusivement régie par les stipulations de l'article 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988, ni des stipulations de cet article dès lors qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment du formulaire de demande de titre de séjour produit en première instance par le préfet de police, que l'intéressé n'a pas sollicité un titre de séjour sur le fondement des stipulations de l'article 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 et que le préfet n'a pas examiné d'office sa demande au regard de celles-ci. Par suite, les moyens tirés d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation, qui sont inopérants en l'espèce, doivent être écartés.

5. D'autre part, il ressort des termes mêmes de la décision attaquée que pour rejeter la demande de titre de séjour de M. B... présentée au titre du travail, le préfet de police a relevé que les éléments dont l'intéressé se prévalait ne sont pas suffisants pour être regardés comme des motifs exceptionnels de nature à justifier son admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Or, il résulte de ce qui a été dit au point 3 que le préfet de police ne pouvait légalement se fonder sur les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour rejeter la demande d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié présentée par M. B....

6. Lorsqu'il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur un autre texte ou fondement légal que celui dont la méconnaissance est invoquée, le juge de l'excès de pouvoir peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision attaquée, sous réserve que l'intéressé ait disposé des garanties dont est assortie l'application du fondement légal sur lequel la décision aurait dû être prononcée. Une telle substitution relevant de l'office du juge, celui-ci peut y procéder de sa propre initiative, au vu des pièces du dossier, mais sous réserve, dans ce cas, d'avoir au préalable mis les parties à même de présenter des observations sur ce point.

7. Si le préfet de police a, ainsi qu'il a été dit au point 5, fondé de manière erronée sa décision sur l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il y a lieu, comme le sollicite à bon droit le préfet de police pour la première fois en appel, de substituer à ce fondement celui relatif au pouvoir discrétionnaire dont il dispose pour régulariser, en opportunité, la situation de tout étranger, dès lors que cette substitution de base légale n'a pas pour effet de priver M. B... des garanties de procédure qui lui sont offertes par la loi et que le préfet dispose du même pouvoir d'appréciation dans l'exercice de son pouvoir général de régularisation que lorsqu'il examine une demande d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié présentée sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

8. S'il ressort des pièces du dossier que le requérant réside en France de façon habituelle depuis le 9 janvier 2018 et qu'il y exerce de façon continue une activité salariée de vendeur depuis le 1er octobre 2018, ces seules circonstances ne sauraient faire regarder le préfet de police comme ayant entaché la décision attaquée d'une erreur manifeste d'appréciation en ne prenant pas vis-à-vis de M. B... de mesure de régularisation, ni comme ayant entaché sa décision d'une erreur de droit. Par suite, ces moyens doivent être écartés.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 10 décembre 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Auvray, président de chambre,

- Mme Hamon, présidente-assesseure,

- M. Desvigne-Repusseau, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 décembre 2024.

Le rapporteur,

M. DESVIGNE-REPUSSEAULe président,

B. AUVRAY

La greffière,

L. CHANA

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 24PA01781


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 24PA01781
Date de la décision : 31/12/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. AUVRAY
Rapporteur ?: M. Marc DESVIGNE-REPUSSEAU
Rapporteur public ?: Mme JURIN
Avocat(s) : NGANGA

Origine de la décision
Date de l'import : 05/01/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-12-31;24pa01781 ?
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