Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Suez Recyclage et Valorisation a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler la délibération du 30 janvier 2020 par laquelle le conseil municipal de la commune de Yèbles a approuvé le plan local d'urbanisme.
Par un jugement n° 2006583 du 30 décembre 2022, le tribunal administratif de Melun a rejeté la demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 27 février 2023 et 24 juillet 2024, la société Suez Recyclage et Valorisation, représentée par Me Hercé, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Melun ;
2°) d'annuler la délibération du 30 janvier 2020 ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Yèbles une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier faute de comporter l'ensemble des signatures requises ;
- la consultation de la mission régionale d'autorité environnementale d'Ile-de-France est irrégulière dès lors qu'elle n'était pas en capacité, à la lecture du rapport de présentation, de se prononcer sur la bonne prise en compte de l'environnement et qu'elle aurait dû être consultée à nouveau sur le dossier complété ;
- l'enquête publique est irrégulière dès lors que le dossier soumis à l'enquête était incomplet et ne comportait pas l'avis de la mission régionale d'autorité environnementale d'Ile-de-France, ni la réponse écrite de la commune à cet avis ; en outre, le commissaire enquêteur n'a pas analysé l'ensemble des observations déposées par le public en méconnaissance des dispositions de l'article R. 123-19 du code de l'environnement dès lors que les observations qu'elle a formulées n'ont pas été analysées ;
- le rapport de présentation est insuffisant dès lors que les incidences environnementales et sanitaires résultant de l'ouverture à l'urbanisation des terrains d'implantation du pôle d'activités économiques ne sont pas suffisamment exposées, que les terrains d'emprise de la future zone d'activités économiques des " Portes de Yèbles " ne font l'objet d'aucune description dans le rapport de présentation, que le rapport de présentation se borne à développer des considérations générales sur de prétendus besoins de diversification de l'offre commerciale du territoire et qu'aucune étude permettant d'apprécier quantitativement et objectivement les besoins de la population, ni les effets de l'aménagement de cette zone d'activité, notamment en terme d'augmentation du trafic, n'a été réalisée ; enfin, aucune véritable analyse des enjeux environnementaux n'a été menée ;
- le classement des parcelles ZA 13 et ZA 14 est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il n'autorise pas l'extension du site de Soignolles-en-Brie tel que cela peut être prévu en application des dispositions de l'article R. 131-34 du code de l'urbanisme ; en outre, le choix d'ouvrir à l'urbanisation les terrains d'emprise du projet de zone d'activités économiques dites des " Portes de Yèbles " ne repose sur aucune véritable réflexion ou étude et l'ouverture à l'urbanisation des zones AUX et AUXA ;
- aucune étude ne justifie de la compatibilité des règles d'implantation dans la bande d'inconstructibilité située de part et d'autre de la route départementale RD 619 avec la prise en compte des nuisances, de la sécurité, de la qualité architecturale ainsi que de la qualité d'urbanisme et des paysages en méconnaissance des dispositions de l'article L. 111-8 du code de l'urbanisme ; l'étude produite par la commune n'a pas été réalisée à l'occasion de la procédure d'élaboration du plan local d'urbanisme et n'y a pas été annexée.
Par des mémoires en défenses, enregistrés les 5 décembre 2023 et 11 septembre 2024, la commune de Yèbles, représentée par la SELARL Landot et associés agissant par Me Polubocsko et Me Lenain, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la société Suez une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Palis De Koninck,
- les conclusions de Mme Dégardin, rapporteure publique,
- et les observations de Me Floury, représentant la société Suez Recyclage et Valorisation et de Me Lenain, représentant la commune de Yèbles.
Considérant ce qui suit :
1. Par une délibération du 16 juin 2015, la commune de Yèbles a engagé une procédure d'élaboration d'un plan local d'urbanisme. Par une délibération du 13 septembre 2018, elle a arrêté un projet de plan local d'urbanisme qui a été soumis à enquête publique. Par une délibération du 30 janvier 2020, la commune de Yèbles a adopté son plan local d'urbanisme. La société Suez Recyclage et Valorisation, qui exploite une installation de stockage de déchets non dangereux sur le territoire de la commune voisine de Soignolles-en-Brie et souhaite l'étendre sur la commune de Yèbles, a saisi le tribunal administratif de Melun en vue d'obtenir l'annulation de cette délibération. Par le jugement du 30 décembre 2022 dont il est relevé appel, le tribunal administratif a rejeté la demande.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ".
3. Il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué a été signé conformément aux prescriptions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative. La circonstance que l'ampliation du jugement qui a été notifié à la société Suez Recyclage et Valorisation ne comporte pas ces signatures est sans incidence sur la régularité de ce jugement.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne le moyen tiré de l'irrégularité de l'avis de la mission régionale d'autorité environnementale d'Ile-de-France :
4. Aux termes de l'article L. 104-6 du code de l'urbanisme : " La personne publique qui élabore un des documents d'urbanisme mentionnés aux articles L. 104-1 et L. 104-2 transmet pour avis à l'autorité environnementale le projet de document et son rapport de présentation. ". Aux termes de l'article R. 104-25 du même code dans sa version applicable la date de la délibération contestée : " L'autorité environnementale formule un avis sur l'évaluation environnementale et le projet de document dans les trois mois suivant la date de sa saisine./ L'avis est, dès son adoption, mis en ligne et transmis à la personne publique responsable. Lorsqu'il est rendu par la mission régionale d'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable, il est transmis pour information au préfet de région lorsque le périmètre du document d'urbanisme est régional ou aux préfets de départements concernés dans les autres cas. Il est, s'il y a lieu, joint au dossier d'enquête publique ou mis à la disposition du public./ A défaut de s'être prononcée dans le délai indiqué au premier alinéa, l'autorité environnementale est réputée n'avoir aucune observation à formuler. Une information sur cette absence d'avis figure sur son site internet. ".
5. En l'espèce, en application des dispositions des articles L. 104-2 et R. 104-28 du code de l'urbanisme dans leur version applicable à la date de la délibération contestée, la mission régionale d'autorité environnementale d'Ile-de-France a été saisie et a considéré, dans une décision du 23 avril 2018, que le projet d'élaboration du plan local d'urbanisme de la commune de Yèbles nécessitait la réalisation d'une évaluation environnementale. Une fois cette évaluation réalisée, la commune a saisi la mission régionale d'autorité environnementale qui a rendu un avis le
20 décembre 2018. Aux termes de celui-ci, la mission régionale a considéré que le contenu du rapport de présentation qui lui était soumis devait être complété sur plusieurs points en intégrant les perspectives d'évolution de l'état initial de l'environnement et en ajoutant différents éléments concernant les enjeux environnementaux du plan. Si la mission est critique sur le contenu de l'évaluation environnementale, elle a émis un avis aux termes duquel elle a formulé plusieurs recommandations afin que la bonne information du public soit assurée. Ainsi, contrairement à ce que soutient la société Suez Recyclage et Valorisation, la circonstance que la mission régionale d'autorité environnementale a considéré que l'évaluation environnementale soumise à son examen comportait certaines insuffisances ne démontre pas à elle seule que cette autorité n'a pas été mise à même de se prononcer et de rendre un avis éclairé sur le projet qui lui était soumis. La commune n'était donc pas tenue de la saisir une nouvelle fois après qu'elle ait complété le rapport de présentation du plan local d'urbanisme pour tenir compte de ses recommandations. Le moyen tiré de l'irrégularité de l'avis rendu par la mission régionale de l'autorité environnementale d'Ile-de-France ne peut qu'être écarté.
En ce qui concerne le moyen tiré de l'insuffisance du rapport de présentation :
6. Aux termes de l'article L. 104-4 du code de l'urbanisme : " Le rapport de présentation des documents d'urbanisme mentionnés aux articles L. 104-1 et L. 104-2 : / 1° Décrit et évalue les incidences notables que peut avoir le document sur l'environnement ; / 2° Présente les mesures envisagées pour éviter, réduire et, dans la mesure du possible, compenser ces incidences négatives ; / 3° Expose les raisons pour lesquelles, notamment du point de vue de la protection de l'environnement, parmi les partis d'aménagement envisagés, le projet a été retenu ". Aux termes de l'article L. 104-5 du même code : " Le rapport de présentation contient les informations qui peuvent être raisonnablement exigées, compte tenu des connaissances et des méthodes d'évaluation existant à la date à laquelle est élaboré ou révisé le document, de son contenu et de son degré de précision et, le cas échéant, de l'existence d'autres documents ou plans relatifs à tout ou partie de la même zone géographique ou de procédures d'évaluation environnementale prévues à un stade ultérieur ".
7. Aux termes de l'article R*123-2-1 du code de l'urbanisme, alors en vigueur : " Lorsque le plan local d'urbanisme doit faire l'objet d'une évaluation environnementale conformément aux articles L. 121-10 et suivants, le rapport de présentation : 1° Expose le diagnostic prévu au deuxième alinéa de l'article L. 123-1-2 et décrit l'articulation du plan avec les autres documents d'urbanisme et les plans ou programmes mentionnés à l'article L. 122-4 du code de l'environnement avec lesquels il doit être compatible ou qu'il doit prendre en considération ; / 2° Analyse l'état initial de l'environnement et les perspectives de son évolution en exposant, notamment, les caractéristiques des zones susceptibles d'être touchées de manière notable par la mise en œuvre du plan ; / 3° Analyse les incidences notables prévisibles de la mise en œuvre du plan sur l'environnement et expose les conséquences éventuelles de l'adoption du plan sur la protection des zones revêtant une importance particulière pour l'environnement, en particulier l'évaluation des incidences Natura 2000 mentionnée à l'article L. 414-4 du code de l'environnement ; / 4° Explique les choix retenus pour établir le projet d'aménagement et de développement durables, au regard notamment des objectifs de protection de l'environnement établis au niveau international, communautaire ou national, et, le cas échéant, les raisons qui justifient le choix opéré au regard des solutions de substitution raisonnables tenant compte des objectifs et du champ d'application géographique du plan. Il expose les motifs de la délimitation des zones, des règles qui y sont applicables et des orientations d'aménagement. Il justifie l'institution des secteurs des zones urbaines où les constructions ou installations d'une superficie supérieure à un seuil défini par le règlement sont interdites en application du a de l'article
L. 123-2 ; / 5° Présente les mesures envisagées pour éviter, réduire et, si possible, compenser, s'il y a lieu, les conséquences dommageables de la mise en œuvre du plan sur l'environnement ; / 6° Définit les critères, indicateurs et modalités retenus pour l'analyse des résultats de l'application du plan prévue par l'article L. 123-12-2. Ils doivent permettre notamment de suivre les effets du plan sur l'environnement afin d'identifier, le cas échéant, à un stade précoce, les impacts négatifs imprévus et envisager, si nécessaire, les mesures appropriées ; / 7° Comprend un résumé non technique des éléments précédents et une description de la manière dont l'évaluation a été effectuée. / Le rapport de présentation est proportionné à l'importance du plan local d'urbanisme, aux effets de sa mise en œuvre ainsi qu'aux enjeux environnementaux de la zone considérée. / En cas de modification, de révision ou de mise en compatibilité dans les cas prévus aux articles R. 123-23-1, R. 123-23-2, R. 123-23-3, R. 123-23-4 et R. 300-15 à R. 300-27, du plan local d'urbanisme, le rapport de présentation est complété par l'exposé des motifs des changements apportés. / Le rapport de présentation peut se référer aux renseignements relatifs à l'environnement figurant dans d'autres études, plans ou documents ".
8. Contrairement à ce que soutient la société requérante, le rapport de présentation définit de manière suffisamment précise le terrain d'assiette de la future zone d'activités économiques " Les Portes de Yèbles ". Outre une représentation cartographiée, le rapport comporte une description littérale de laquelle il ressort que le terrain d'une superficie d'environ 28 hectares s'étend sur des espaces agricoles au sud de l'avenue de la gare, un espace bâti à vocation d'activités économiques au nord de la zone ceinturé par de l'espace en friche et des alignements d'arbres remarquables de part et d'autre de l'avenue de la gare. Le rapport de présentation expose, par ailleurs, les motifs pour lesquels la commune de Yèbles souhaite créer la zone d'activités économiques en question. A ce titre, il est indiqué que la démographie communale a connu un fort accroissement et que l'implantation de nouvelles activités économiques vise à pallier l'absence de tout commerce sur le territoire, à diversifier l'offre commerciale existante sur les communes limitrophes, à augmenter le nombre d'emplois proposé et à renforcer le pôle économique présent sur la commune voisine de Guignes.
9. Si la société Suez Recyclage et Valorisation soutient que le rapport de présentation ne présente pas les perspectives d'évolution de l'état initial de l'environnement, il est constant qu'il a été étoffé après l'avis de la mission régionale de l'autorité environnementale et comprend une partie numéro deux consacrée à l'analyse de l'état initial de l'environnement elle-même divisée en plusieurs sous-parties dédiées à la géomorphologie, au paysage communal et son cadre naturel, à la consommation des espaces naturels, agricoles ou forestiers, à la qualité de l'environnement et à la synthèse des enjeux environnementaux. Une carte représentant les différents enjeux environnementaux y est insérée. Les enjeux propres à la création de la zone d'activités économiques au regard des cours d'eau, des espaces naturels sensibles, des mares, des bois et des alignements d'arbre et l'incidence de celle-ci sont ensuite détaillés. Les effets de l'aménagement de cette zone sont exposés. Le rapport dresse notamment un bilan de la consommation des terres agricoles. Il décrit les mesures prévues pour prendre en compte les enjeux environnementaux plus particulièrement dans le cadre de la création de la zone d'activités des Portes de Yèbles : installation d'une bande plantée, aménagement d'espace vert et préservation des alignements d'arbres remarquables.
10. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que le rapport de présentation du plan local d'urbanisme serait insuffisant doit être écarté.
En ce qui concerne le moyen tiré de l'irrégularité de l'enquête publique :
11. En premier lieu, en application de l'article R. 153-8 du code de l'urbanisme dans sa version applicable : " Le dossier soumis à l'enquête publique est composé des pièces mentionnées à l'article R. 123-8 du code de l'environnement et comprend, en annexe, les différents avis recueillis dans le cadre de la procédure. ". Aux termes de l'article R. 104-25 du même code : " (...) L'avis est, dès son adoption, mis en ligne et transmis à la personne publique responsable. Lorsqu'il est rendu par la mission régionale d'autorité environnementale de l'inspection générale de l'environnement et du développement durable, il est transmis pour information au préfet de région lorsque le périmètre du document d'urbanisme est régional ou aux préfets de départements concernés dans les autres cas. Il est joint au dossier d'enquête publique ou mis à la disposition du public. (...) ". Enfin, en application de l'article R. 123-8 du code de l'environnement : " Le dossier soumis à l'enquête publique comprend les pièces et avis exigés par les législations et réglementations applicables au projet, plan ou programme. Le dossier comprend au moins :
1° (...)l 'avis de l'autorité environnementale mentionné au III de l'article L. 122-1 et à l'article
L. 122-7 du présent code ou à l'article L. 104-6 du code de l'urbanisme, ainsi que la réponse écrite du maître d'ouvrage à l'avis de l'autorité environnementale ; (...) ".
12. S'il appartient à l'autorité administrative de mettre à la disposition du public, pendant toute la durée de l'enquête, un dossier d'enquête publique comportant l'ensemble des documents mentionnés notamment l'avis de l'autorité environnementale et la réponse de la personne publique, la méconnaissance de ces dispositions n'est toutefois de nature à vicier la procédure et donc à entraîner l'illégalité de la décision prise à l'issue de l'enquête publique que si elle a pu avoir pour effet de nuire à l'information de l'ensemble des personnes intéressées ou si elle a été de nature à exercer une influence sur les résultats de l'enquête et, par suite, sur la décision de l'autorité administrative.
13. Il ressort des pièces du dossier en particulier du rapport d'enquête publique, et n'est pas sérieusement contesté, que le dossier soumis à l'enquête publique, au sujet duquel le commissaire-enquêteur n'a relevé aucune omission de pièces en listant celles figurant au dossier, comprenait notamment les avis des personnes publiques associées au rang desquelles le commissaire enquêteur a, à tort, rangé la mission régionale d'autorité environnementale, ainsi que " le mémoire en réponse " aux avis rendus par ces personnes publiques. Il ressort très clairement du rapport d'enquête, et plus particulièrement de sa partie 2.2.4 consacrée aux observations et avis des personnes publiques associées, que le commissaire enquêteur a fait état de l'avis réservé de la mission régionale d'autorité environnementale et en a synthétisé le contenu, rangeant la mission régionale dans les personnes publiques associées. Dans ces conditions, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que le dossier d'enquête publique aurait été incomplet faute de contenir l'avis de la mission régionale d'autorité environnementale et la réponse de la commune de Yèbles.
14. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 123-19 du code de l'urbanisme dans sa version applicable au présent litige : " Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête établit un rapport qui relate le déroulement de l'enquête et examine les observations recueillies. / Le rapport comporte le rappel de l'objet du projet, plan ou programme, la liste de l'ensemble des pièces figurant dans le dossier d'enquête, une synthèse des observations du public, une analyse des propositions produites durant l'enquête et, le cas échéant, les observations du responsable du projet, plan ou programme en réponse aux observations du public. (...) ".
15. Après avoir recueilli les observations du public, le commissaire-enquêteur doit exprimer un avis personnel. Il n'est pas tenu de répondre à chacune des observations qui lui ont été présentées ni de se conformer à l'opinion, même unanime, des personnes ayant participé à l'enquête.
16. En l'espèce, il ressort du rapport d'enquête publique que la société Suez a adressé au commissaire enquêteur un courrier visant à présenter des observations dans le cadre de la procédure d'élaboration du plan local d'urbanisme de la commune de Yèbles. Dans ce courrier annexé au rapport, la société faisait état de son projet d'extension sur la commune de Yèbles du site de stockage de déchets qu'elle exploite sur la commune voisine de Soignolles-en-Brie. Or, dans la mesure où le projet de plan local d'urbanisme soumis à enquête ne prévoyait pas l'implantation de cette activité sur des parcelles classées en zone A, le commissaire enquêteur a considéré que les observations formulées par la société étaient " hors PLU ". Il a néanmoins analysé les observations formulées et les a intégrées dans le tableau recensant l'ensemble des observations recueillies en y intégrant l'avis de la commune. Contrairement à ce que soutient la société Suez Recyclage Valorisation, le commissaire enquêteur n'a pas écarté son courrier d'observation sans y apporter de réponse.
17. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de l'enquête publique doit être écarté.
En ce qui concerne le moyen tiré des erreurs manifestes d'appréciation affectant le zonage du plan local d'urbanisme :
18. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.
19. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article R. 151-22 du code de
l'urbanisme : " Les zones agricoles sont dites " zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. ". Aux termes de l'article R. 151-2 de ce code: " Peuvent être autorisées, en zone A : 1° Les constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole ou au stockage et à l'entretien de matériel agricole par les coopératives d'utilisation de matériel agricole agréées au titre de l'article L. 525-1 du code rural et de la pêche maritime ; 2° Les constructions, installations, extensions ou annexes aux bâtiments d'habitation, changements de destination et aménagements prévus par les articles L. 151-11, L. 151-12 et
L. 151-13, dans les conditions fixées par ceux-ci. ". Il résulte de ces dispositions qu'une zone agricole, dite " zone A ", du plan local d'urbanisme a vocation à couvrir, en cohérence avec les orientations générales et les objectifs du projet d'aménagement et de développement durables, un secteur, équipé ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles.
20. D'autre part, aux termes de l'article R. 151-34 du code de l'urbanisme : " Dans les zones U, AU, A et N les documents graphiques du règlement font apparaître, s'il y a lieu : 1° Les secteurs où les nécessités du fonctionnement des services publics, de l'hygiène, de la protection contre les nuisances et de la préservation des ressources naturelles ou l'existence de risques naturels, de risques miniers ou de risques technologiques justifient que soient soumises à des conditions spéciales les constructions et installations de toute nature, permanentes ou non, les plantations, dépôts, affouillements, forages et exhaussements des sols ; (...) ".
21. Dans la zone A, le plan local d'urbanisme de la commune de Yèbles ne prévoit que l'édification de constructions et aménagements agricoles nécessaires à l'exploitation agricole, les travaux nécessaires à la maintenance ou à la modification des réseaux de transport d'énergie, les affouillements et exhaussements de sols nécessaires aux infrastructures routières et aux aires de stationnement ainsi que les extensions et annexes des constructions à usage d'habitation à condition qu'elles ne compromettent pas l'activité agricole.
22. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que les parcelles ZA 13 et ZA 14 sur lesquelles la société souhaite étendre le site de stockage de déchets qu'elle exploite ont été classées en zone A. Ces deux parcelles se situent dans une zone assez vaste, éloignée du bourg de la commune, ne comprenant que des espaces agricoles jusqu'alors classés en zone A par le plan d'occupation des sols dont était doté la collectivité et effectivement exploitées. Dans la mesure où il ressort du projet d'aménagement et de développement durables que la commune a pour objectif de préserver les terres agricoles sur son territoire, il ne ressort pas des pièces du dossier que le classement de ces deux parcelles en zone A serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation. Si la société Suez Recyclage Valorisation soutient que la commune aurait pu prévoir en application des dispositions de l'article R. 151-34 du code de l'urbanisme précité, en dépit du classement en zone A, la possibilité de construire dans cette zone un site de stockage de déchets qui lui aurait permis de procéder à l'extension souhaitée, le choix effectué par le conseil municipal de limiter les constructions autorisées à celles décrites au point 21 ne révèle pas une erreur manifeste d'appréciation.
23. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 151-20 du code de l'urbanisme applicable à la date de la délibération attaquée : " Les zones à urbaniser sont dites " zones AU ". Peuvent être classés en zone à urbaniser les secteurs destinés à être ouverts à l'urbanisation./ Lorsque les voies ouvertes au public et les réseaux d'eau, d'électricité et, le cas échéant, d'assainissement existant à la périphérie immédiate d'une zone AU ont une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter dans l'ensemble de cette zone et que des orientations d'aménagement et de programmation et, le cas échéant, le règlement en ont défini les conditions d'aménagement et d'équipement, les constructions y sont autorisées soit lors de la réalisation d'une opération d'aménagement d'ensemble, soit au fur et à mesure de la réalisation des équipements internes à la zone prévus par les orientations d'aménagement et de programmation et, le cas échéant, le règlement. / Lorsque les voies ouvertes au public et les réseaux d'eau, d'électricité et, le cas échéant, d'assainissement existant à la périphérie immédiate d'une zone AU n'ont pas une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter dans l'ensemble de cette zone, son ouverture à l'urbanisation est subordonnée à une modification ou à une révision du plan local d'urbanisme comportant notamment les orientations d'aménagement et de programmation de la zone. ".
24. Il ressort des pièces du dossier, notamment du rapport de présentation du plan local d'urbanisme et du projet d'aménagement et de développement durables que la commune souhaite permettre le développement d'activités commerciales sur son territoire. A ce titre, le rapport de présentation indique que les zones AUX et AUXA ont toutes deux pour vocation d'accueillir des activités économiques en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables. La circonstance, à la supposée établie, que la commune n'aurait pas engagé de " véritable réflexion ou étude " sur le développement de la future zone économique n'a aucune incidence sur la réalité de la volonté affichée et des objectifs retenus. Compte tenu du parti d'aménagement arrêté pour le territoire de la commune, de la situation existante et des perspectives d'avenir, le classement des parcelles destinées à accueillir la future zone d'activités économiques dans les zones AUX et AUXA n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions des articles
L. 116-6 et L. 111-8 du code de l'urbanisme :
25. Aux termes de l'article L. 116-6 du code de l'urbanisme : " " En dehors des espaces urbanisés des communes, les constructions ou installations sont interdites dans une bande de cent mètres de part et d'autre de l'axe des autoroutes, des routes express et des déviations au sens du code de la voirie routière et de soixante-quinze mètres de part et d'autre de l'axe des autres routes classées à grande circulation. ". Aux termes de l'article L. 111-8 du même code : " Le plan local d'urbanisme, ou un document d'urbanisme en tenant lieu, peut fixer des règles d'implantation différentes de celles prévues par l'article L. 111-6 lorsqu'il comporte une étude justifiant, en fonction des spécificités locales, que ces règles sont compatibles avec la prise en compte des nuisances, de la sécurité, de la qualité architecturale, ainsi que de la qualité de l'urbanisme et des paysages. ".
26. Il ressort des pièces du dossier que deux routes classées à grande circulation, la RD 619 et la RN 36, traversent la commune de Yèbles. En application des dispositions précitées du code de l'urbanisme, aucune construction ne peut être autorisée dans une bande de soixante-quinze mètres de part et d'autre de ces deux axes sauf à ce que le plan local d'urbanisme comporte une étude justifiant qu'il soit dérogé à cette règle d'inconstructibilité. En l'espèce, en dehors des parties de la commune déjà urbanisées dans cette bande, le plan local d'urbanisme prévoit dans
l'article 6 de la zone AUXA une dérogation à la règle d'inconstructibilité en vue de la création de la zone d'activités des Portes de Yèbles à l'entrée de la commune et autorise les constructions à dix mètres de la RD 619. Or, le plan local d'urbanisme ne comporte aucune étude permettant cette dérogation. S'il renvoie à plusieurs reprises à une étude d'entrée de ville annexée au rapport de présentation, aucune étude ne figure en annexe du plan local d'urbanisme. Faute pour ce plan de comporter l'étude exigée par l'article L. 111-8 du code d'urbanisme, il n'est pas justifié que les règles de constructibilité prévues à l'article 6 de la zone AUXA sont compatibles avec la prise en compte des nuisances, de la sécurité, de la qualité architecturale, ainsi que de la qualité de l'urbanisme et des paysages. Dans ces conditions, la société Suez Recyclage et Valorisation est uniquement fondée à soutenir que cet article 6 de la zone AUXA méconnaît les dispositions des articles L. 116-6 et L. 111-8 du code de l'urbanisme.
27. Il résulte de ce qui précède que l'article 6 de la zone AUXA du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Yèbles doit être annulé. La société Suez Recyclage et Valorisation est fondée, dans cette seule mesure, à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Sur les frais liés à l'instance :
28. Dans les circonstances de l'espèce, il ne paraît pas inéquitable de laisser à chacune des parties à l'instance la charge des frais qu'elle a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : L'article 6 de la zone AUXA du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Yèbles est annulé.
Article 2 : Le jugement n° 2006583 du 30 décembre 2022 du tribunal administratif de Melun est réformé en ce qu'il est contraire à l'article 1er ci-dessus.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête et les conclusions présentées par la commune de Yèbles au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.
Article 4 : Le présent jugement sera notifié à la société Suez Recyclage et Valorisation et à la commune de Yèbles.
Délibéré après l'audience du 19 décembre 2024 à laquelle siégeaient :
M. Philippe Delage, président,
Mme Marianne Julliard, présidente assesseure,
Mme Mélanie Palis De Koninck, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 janvier 2025.
La rapporteure,
M. PALIS DE KONINCK
Le président,
Ph. DELAGE Le greffier,
E. MOULIN
La République mande et ordonne au préfet de la Seine-et-Marne en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23PA00845