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17/01/2025 | FRANCE | N°23PA04059

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 9ème chambre, 17 janvier 2025, 23PA04059


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 5 juillet 2021 par laquelle la maire de Paris lui a refusé l'octroi d'une indemnité tendant à la prise en charge des frais d'entretien de sa tenue de travail et de condamner la Ville de Paris à lui verser la somme de 10 920 euros, ou à tout le moins la somme de 3 920 euros, assortie des intérêts au taux légal, à compter du 12 mai 2021, en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis.r>


Par un jugement n° 2118903 du 13 juillet 2023, le tribunal administratif de Pa...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 5 juillet 2021 par laquelle la maire de Paris lui a refusé l'octroi d'une indemnité tendant à la prise en charge des frais d'entretien de sa tenue de travail et de condamner la Ville de Paris à lui verser la somme de 10 920 euros, ou à tout le moins la somme de 3 920 euros, assortie des intérêts au taux légal, à compter du 12 mai 2021, en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis.

Par un jugement n° 2118903 du 13 juillet 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique qui n'a pas été communiqué, enregistrés les 13 septembre 2023 et 10 juin 2024, M. A..., représenté par Me Henni, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 13 juillet 2023 ;

2°) d'annuler la décision de la Ville de Paris du 5 juillet 2021 ;

3°) de condamner la Ville de Paris à lui verser la somme de 10 920 euros, ou en cas d'application de la prescription quadriennale la somme de 3 920 euros, assortie des intérêts au taux légal, à compter du 12 mai 2021, en réparation de ce préjudice ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les juges de première instance ont entaché leur jugement d'une erreur de droit ;

- en application des dispositions de l'article 108-1 de la loi du 26 janvier 1984, les règles en matière d'hygiène et de sécurité sont celles définies par le code du travail qui imposent la prise en charge par l'employeur des frais inhérents au nettoyage des tenues dont le port est rendu obligatoire ou est inhérent à l'emploi occupé ;

- la Ville de Paris a en conséquence commis une erreur de droit et une erreur d'appréciation en refusant la prise en charge des frais d'entretien de la tenue vestimentaire spécifique dont le port est rendu obligatoire en sa qualité d'agent d'accueil de surveillance au sein de la direction de la police municipale et de la prévention, aucune disposition ne conditionnant la prise en charge de ses frais à l'exercice de missions insalubres ;

- la décision attaquée est constitutive d'une rupture d'égalité avec les agents de la direction des espaces verts et de l'environnement, intégrés depuis 2016 à la direction de la police municipale et de la prévention, dont la seule mission est également la surveillance et qui bénéficient de la prise en charge du nettoyage de leur tenue de travail ;

- en refusant en prendre en charge les frais d'entretien de cette tenue de travail, la Ville de Paris a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;

- le préjudice financier constitué par les frais engagés pour le nettoyage de sa tenue de travail au titre de la période de 2008 à 2021 doit être indemnisé à hauteur de 10 920 euros, par référence à l'indemnité représentative de frais d'habillement de 70 euros versée aux fonctionnaires actifs de la police nationale pour une tenue est identique ou si la prescription quadriennale opposée par la ville de Paris est retenue, à hauteur de 3 920 euros depuis le 1er janvier 2017.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 mai 2024, la Ville de Paris, représentée par Me Falala, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. A... la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- les dispositions du code du travail invoquées par M. A... sont inopérantes ;

- le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité n'est pas fondé ;

- en l'absence de toute illégalité fautive, ses conclusions indemnitaires doivent être rejetées ;

- en tout état de cause, le montant du préjudice financier revendiqué ne saurait être calculé par comparaison à un régime applicable aux agents de la fonction publique d'Etat, les émoluments des fonctionnaires de la Ville de Paris étant fixés par délibération du conseil de Paris ;

- M. A... ne saurait se prévaloir d'une " prescription glissante ", la Ville étant fondée à lui opposer la prescription quadriennale résultant de l'article 1er de la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code général de la fonction publique ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée ;

- le décret n° 94-415 du 24 mai 1994 modifié ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lorin,

- les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public,

- et les observations de Me Goulard, substituant Me Falala, représentant la Ville de Paris.

Considérant ce qui suit :

1. Par une décision du 5 juillet 2021, la Ville de Paris a rejeté la demande présentée par M. A..., agent d'accueil et de surveillance affecté à la direction de la police municipale et de la prévention tendant à la prise en charge des frais d'entretien de sa tenue de travail et à obtenir l'indemnisation des frais exposés à ce titre. Par la présente requête, M. A... relève régulièrement appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision et à la condamnation de la Ville de Paris à lui verser la somme de 10 920 euros ou de celle de 3 920 euros en cas d'application de la prescription quadriennale, en réparation du préjudice financier résultant des frais qu'il a dû engagés depuis 2008.

Sur la régularité du jugement :

2. Hormis dans le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative attaquée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Par suite, le moyen tiré de ce que les premiers juges ont entaché le jugement contesté d'une erreur de droit, qui n'est pas susceptible d'être utilement soulevé devant le juge d'appel mais seulement devant le juge de cassation, doit être écarté comme étant inopérant.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. En premier lieu, selon l'article L. 4122-2 du code du travail, les mesures prises en matière de sécurité, d'hygiène et de santé au travail ne doivent entraîner aucune charge financière pour les travailleurs. Aux termes de l'article 108-1 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions relatives à la fonction publique territoriale, et dont aucune disposition du décret du 24 mai 1994 visé ci-dessus ne prévoit qu'il n'est pas applicable aux agents de la Ville de Paris : " Dans les services des collectivités et établissements mentionnés à l'article 2, les règles applicables en matière d'hygiène et de sécurité sont celles définies par les livres Ier et V de la quatrième partie du code du travail et par les décrets pris pour son application (...) ".

4. Il résulte du principe général dont s'inspirent ces dispositions, applicable aux entreprises dont le personnel est doté d'un statut réglementaire et qui n'est pas incompatible avec les nécessités de la mission de service public qui leur est confiée, que les frais qu'un salarié expose pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de son employeur doivent, dès lors qu'ils résultent d'une sujétion particulière, être supportés par ce dernier. S'agissant de l'entretien et du nettoyage des vêtements de travail imposés par l'employeur, sont ainsi concernés les frais qui excèdent les charges qui résulteraient de l'entretien et du nettoyage des vêtements ordinairement portés par le salarié, soit que le port du vêtement de travail soit imposé en plus de ces derniers, soit que son entretien occasionne des frais particuliers.

5. Si M. A... soutient que la tenue d'agent d'accueil et de surveillance dont le port est rendu obligatoire, nécessite un entretien particulier, notamment en raison des vêtements comportant des bandes réfléchissantes, il n'établit pas que le nettoyage de sa tenue occasionnerait des frais excédant les charges pouvant résulter de l'entretien et du nettoyage des vêtements ordinairement portés. Par suite, M. A... ne justifie pas pouvoir bénéficier du principe ci-dessus énoncé. Les moyens tirés des erreurs de droit et d'appréciation commises par la Ville de Paris doivent par suite être écartés.

6. En second lieu, M. A... soutient que le refus de prise en charge des frais inhérents au nettoyage de sa tenue de travail méconnaît le principe d'égalité, dans la mesure où des agents affectés à la direction de la police municipale et de la prévention et antérieurement rattachés à la direction des espaces verts et de l'environnement, bénéficient de cette prise en charge alors même qu'ils exercent également une mission de surveillance et n'effectuent pas de travaux salissants. Toutefois, la Ville de Paris fait valoir que ses collègues sont en charge de missions dans un environnement extérieur plus exposé que le sien, dès lors qu'il est affecté à la surveillance des bâtiments des mairies d'arrondissement, la nature de leurs missions conditionnant en l'espèce la prise en charge des frais de nettoyage. Par suite, M. A... ne démontre pas qu'il se trouverait dans une situation identique à celle de ces agents et le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité doit ainsi être écarté.

7. En dernier lieu, en l'absence de décision fautive de nature à engager la responsabilité de la Ville de Paris, les conclusions indemnitaires présentées par M. A... doivent être rejetées, sans qu'il y ait lieu de se prononcer sur la prescription quadriennale opposée en défense.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à se plaindre que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes. Par voie de conséquence, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions, y compris celles tenant aux frais liés à l'instance. Par ailleurs, dans les circonstances de l'espèce, il n'y pas lieu de faire droit à la demande présentée par la Ville de Paris au titre des dispositions de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la Ville de Paris sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la Ville de Paris.

Délibéré après l'audience du 20 décembre 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Carrère, président,

- M. Lemaire, président assesseur,

- Mme Lorin, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le17 janvier 2025.

La rapporteure,

C. LORIN

Le président,

S. CARRERE

La greffière,

E. LUCE

La République mande et ordonne au préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23PA04059


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA04059
Date de la décision : 17/01/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CARRERE
Rapporteur ?: Mme Cécile LORIN
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : HENNI

Origine de la décision
Date de l'import : 19/01/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-01-17;23pa04059 ?
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