Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... A... épouse B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 17 novembre 2023 par lequel le préfet de police a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée.
Par un jugement n° 2402631 du 3 avril 2024, le président tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 23 juin 2024, Mme B..., représentée par Me Chouki, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 3 avril 2024 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 17 novembre 2023 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;
3°) d'enjoindre au préfet compétent de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans un délai d'une semaine à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai d'un mois sous la même condition d'astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- les décisions portant refus de renouvellement de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français sont insuffisamment motivées ;
- elles sont entachées d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;
- elles méconnaissent les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elles sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation, notamment au regard de l'article 5 et du 4 de l'article 6 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ;
- la décision fixant le pays de destination est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 octobre 2024, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés.
Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 31 mai 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Lorin a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., ressortissante comorienne née le 11 juin 1984, est entrée en France le 26 novembre 2019 sous couvert d'un visa long séjour en qualité de conjointe de français puis a été mise en possession d'un titre de séjour pluriannuel valable du 7 décembre 2020 au 6 décembre 2022. Par un arrêté du 17 novembre 2023, le préfet de police a rejeté sa demande de renouvellement de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée. Par la présente requête, Mme B... relève régulièrement appel du jugement du 3 avril 2024 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, aux termes des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, les mesures de police doivent être motivées et " comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".
3. D'une part, l'arrêté qui vise notamment l'article L. 423-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont il est fait application, mentionne avec suffisamment de précision les circonstances de fait sur lesquelles le préfet de police s'est fondé pour refuser à Mme B... le renouvellement de son titre de séjour, en indiquant qu'elle n'est plus en mesure de justifier d'une vie commune avec son mari de nationalité française dont elle s'est déclarée séparée en dernier lieu depuis le mois de juin 2022 et n'allègue ni ne démontre que la vie commune aurait été rompue en raison de violences conjugales. L'arrêté relève également que l'intéressée est sans charge de famille en France et n'atteste pas être dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine. D'autre part, l'arrêté attaqué qui vise également les dispositions du 3° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile permettant d'assortir un refus de titre de séjour d'une obligation de quitter le territoire français, n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour, elle-même suffisamment motivée. Enfin, la décision fixant le pays de destination, qui vise l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et relève que Mme B... n'établit pas être exposée à des peines et traitements contraires à ces stipulations en cas de retour dans son pays d'origine, comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, l'arrêté contesté répond aux exigences de motivation posées par l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, contrairement à ce que soutient l'intéressée et le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté.
4. En deuxième lieu, il ne ressort ni des pièces du dossier ni des termes de l'arrêté attaqué rappelés ci-dessus, que le préfet de police n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de l'intéressée avant de prendre cet arrêté. En particulier, le préfet de police a pris en considération les circonstances de la séparation de Mme B... en précisant qu'elle n'alléguait pas et ne justifiait pas davantage que des violences conjugales auraient été à l'origine de la rupture de la vie commune avec son mari. Ce moyen doit par suite être écarté.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / (...) ".
6. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... qui est entrée en France le 26 novembre 2019, ne peut se prévaloir d'une durée de séjour qui n'excède pas quatre ans à la date de l'arrêté attaqué. Il est par ailleurs constant que la vie commune avec son mari de nationalité française a cessé depuis le mois de juin 2022. Si elle soutient que cette rupture est consécutive à des faits de violences conjugales dont ce dernier s'est rendu responsable depuis 2020, elle ne le démontre pas par le dépôt d'une main courante le 13 avril 2021 qui tend uniquement à constater un abandon de domicile conjugal, par la plainte déposée le 24 janvier 2024 postérieurement à l'arrêté attaquée et par l'attestation établie le 20 décembre 2013 par le chef de service de l'Espace solidarité insertion de l'association HAFB, compte tenu du caractère particulièrement imprécis des termes dans lesquels elle est rédigée. Mme B... n'établit pas davantage avoir établi le centre de ses intérêts privés et familiaux en France par l'activité professionnelle qu'elle a exercée au cours des années 2023 et 2024 et par la circonstance que trois de ses frères et sœurs résident en France, alors qu'elle ne justifie pas être dépourvue de toute attache familiale aux Comores où elle a vécu jusqu'à l'âge de 35 ans. Si elle fait état de la naissance de son premier enfant le 22 février 2024 et de la reconnaissance par anticipation de cet enfant par son père, elle ne conteste pas que son compagnon, de nationalité comorienne, se maintient en situation irrégulière sur le territoire français et ne démontre pas l'impossibilité de poursuivre sa vie familiale à l'étranger. Par suite, il ne ressort pas des pièces du dossier, que le préfet de police aurait porté atteinte à son droit au respect de sa vie privée et familiale en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
7. En quatrième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'encontre des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire, qui n'ont ni pour objet ni pour effet de fixer le pays à destination duquel Mme B... peut être reconduite. En tout état de cause et à supposer même que l'intéressée ait entendu se prévaloir de ce moyen à l'encontre de cette décision, la circonstance qu'elle serait le cas échéant séparée des membres de sa famille présents en France, ne saurait constituer un traitement inhumain et dégradant au sens des stipulations précitées. Par suite, ce moyen ne peut qu'être écarté.
8. En dernier lieu, d'une part, Mme B... ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article 5 et du 4 de l'article 6 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 à l'encontre de l'arrêté litigieux, dès lors qu'à la date de cet arrêté, cette directive avait été transposée en droit interne. Par suite, ce moyen doit être écarté comme inopérant. D'autre part, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dont seraient entachées les décisions en litige, doit être écarté pour les même motifs que ceux énoncés au point 6 du présent arrêt.
9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement contesté, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 17 novembre 2023. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles relatives aux frais liés à l'instance doivent également être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... épouse B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 20 décembre 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Carrère, président,
- M. Lemaire, président assesseur,
- Mme Lorin, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 17 janvier 2025.
La rapporteure,
C. LORIN
Le président,
S. CARRERE
La greffière,
E. LUCE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 24PA02689