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30/01/2025 | FRANCE | N°23PA00727

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 7ème chambre, 30 janvier 2025, 23PA00727


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2010 et 2011.



Par un jugement no 1806285 du 23 décembre 2022, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête et un mémoir

e en réplique, enregistrés les 20 février 2023 et 25 janvier 2024, M. A..., représenté par Me Tourrou, demande à la cour :

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2010 et 2011.

Par un jugement no 1806285 du 23 décembre 2022, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 20 février 2023 et 25 janvier 2024, M. A..., représenté par Me Tourrou, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Melun ;

2°) de prononcer la décharge des impositions supplémentaires mises à sa charge pour un montant de 293 536 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les revenus en litige doivent être soumis au régime d'imposition proportionnelle des plus-values à long terme prévu au 1 de l'article 39 terdecies du code général des impôts dès lors qu'ils proviennent de la concession de licences d'exploitation d'un brevet ;

- il demande l'application de la doctrine administrative 4 B 2221 du 7 juin 1999 n°42 en vigueur sur la période litigieuse, publiée sous la référence BOI-BIC-PVMV-20-20-20.

Par un mémoire en défense enregistré le 3 juillet 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 30 janvier 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 20 février 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Laforêt, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Jurin, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., qui est l'inventeur du " mur végétal ", concept breveté en 1988 et 1996 sous les intitulés " dispositif pour la culture sans sol des plantes sur surface verticale " et " dispositif pour la culture sans sol de plantes sur une surface sensiblement verticale ", a soumis au régime d'imposition proportionnelle des plus-values à long terme prévu au 1 de l'article 39 terdecies du code général des impôts les revenus qu'il a perçus pendant les années 2010 et 2011 de son activité de créateur de murs végétaux, considérant qu'ils constituaient la rémunération d'opérations de concessions de brevets. A l'issue de la vérification de comptabilité de cette activité, le service a réintégré ces produits dans ses revenus imposables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux et les a imposés au taux progressif de droit commun de l'impôt sur le revenu, au motif que M. A... ne procédait pas à la cession ou à la concession de licence d'exploitation d'inventions brevetées, mais exploitait personnellement les brevets qu'il avait déposés. M. A... a, en conséquence de cette rectification, été assujetti à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 2010 et 2011. Il fait appel du jugement en date du 23 décembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions et pénalités.

Sur les conclusions aux fins de décharge :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

2. Aux termes du 1 de l'article 39 terdecies du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : " Le régime des plus-values à long terme est applicable aux plus-values de cession de brevets, ou d'inventions brevetables, ainsi qu'au résultat net de la concession de licences d'exploitation des mêmes éléments (...) / Ces dispositions ne sont pas applicables lorsque les éléments mentionnés ci-dessus ne présentent pas le caractère d'éléments de l'actif immobilisé ou ont été acquis à titre onéreux depuis moins de deux ans. ".

3. Il résulte de ces dispositions que le bénéfice du régime de faveur qu'elles prévoient est subordonné à la condition que les droits, procédés et techniques dont il est fait mention constituent des éléments de l'actif immobilisé que le concédant accepte de mettre à disposition du concessionnaire et que, par suite, la concession mette ce dernier à même d'exploiter utilement, pour son propre compte, le brevet, les procédés ou les techniques concédés.

4. M. A..., qui se prévaut d'une concession de licence d'exploitation, ne produit pourtant aucun contrat ayant cette nature. Il fait valoir que la relation contractuelle est matérialisée par une facture émise pour chaque projet, dont il ne fournit aucun exemplaire, avec des mentions pouvant varier selon le lieu d'exécution en France ou à l'étranger mais sans contenir de précision sur les modalités éventuelles de la cession de ses brevets ni distinguer entre la nature juridique des diverses prestations objets du prix. Il résulte de l'instruction que M. A... fournit une prestation globale de conception du végétal pour chaque projet, de création de séquences végétales uniques et plans de plantation, quand bien même pour les années en litige il ne fournissait pas les plantes ni ne procédait à l'achat ou à l'installation de ces plantes. Ainsi, alors même qu'un savoir-faire est transféré, relatif à la conception du plan d'installation des plantes et au choix de celles-ci, que ce savoir-faire pourrait dans certains cas être utilisé par le bénéficiaire pour reproduire ou renouveler cette installation, et que les clients de M. A... tirent profit du mur végétal installé en raison de l'agrément procuré à leurs clients ou aux visiteurs des lieux, ces clients ne sauraient être regardés comme étant mis à même d'exploiter utilement les brevets, procédés ou technique dont M. A... est le propriétaire. Les factures émises à l'attention de ces clients ne constituent pas, par suite, des concessions de licences d'exploitation de procédés et de techniques dont les produits seraient soumis au régime d'imposition proportionnelle des plus-values à long terme prévu au 1 de l'article 39 terdecies du code général des impôts.

5. Si le requérant soutient que certaines des factures qu'il a émises précisent également que le mur végétal facturé est protégé au titre du droit d'auteur et que toute reproduction ou exploitation en dehors d'un cadre strictement privé et non commercial devra faire l'objet de l'accord préalable et écrit de son concepteur, les utilisateurs du brevet n'étant ainsi pas autorisés à fabriquer, à reproduire ou à exploiter son invention, cette mention, qui au demeurant concerne le droit d'auteur, est à elle seule sans incidence sur la qualification des revenus tirés des prestations en litige dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction que M. A... s'est dessaisi, même partiellement, du droit d'exploiter ses brevets à l'occasion desdites prestations.

6. Dès lors, c'est sans méconnaître la loi fiscale que le service a imposé les gains réalisés par M. A... dans le cadre de son activité de créateur de murs végétaux dans la catégorie des bénéfices non commerciaux au taux progressif de l'impôt sur le revenu.

En ce qui concerne l'interprétation administrative de la loi fiscale :

7. Aux termes de l'article L. 80 A du livre de procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut néanmoins poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente ".

8. Aux termes de la doctrine BOI-BIC-PVMV-20-20-20 invoquée par le requérant, qui reprend la doctrine administrative 4 B 2221 du 7 juin 1999 n°42 en vigueur sur la période litigieuse : " 660 Le régime prévu à l'article 39 terdecies-1 du CGI s'applique aux opérations de cession ou de concession./ La cession s'entend de toute opération entraînant la sortie de l'actif de l'entreprise des éléments en cause (...) /670 La concession d'une licence d'exploitation est le contrat par lequel le titulaire d'un brevet concède à une personne, en tout ou partie, la jouissance de son droit d'exploitation moyennant le paiement d'une redevance. / 680 La concession peut : / - être exclusive ou non ; / - être conclue pour l'ensemble du ou des territoires pour lesquels l'invention bénéficie d'une protection juridique, ou pour une partie de ceux-ci seulement ;/ - porter sur la totalité des droits ou sur certains éléments seulement (par exemple, la concession pourrait ne concerner que certaines applications d'un brevet seulement) ".

9. Outre que M. A... ne produit aucun contrat de concession d'une licence d'exploitation d'un brevet, les dispositions précitées ne font pas de la loi fiscale une interprétation différente de celle dont il est fait application dans le présent arrêt. Par suite, M. A... n'est pas fondé à les invoquer sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Sur les conclusions présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le paiement de la somme que M. A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à l'administrateur général des finances publiques à la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris.

Délibéré après l'audience du 14 janvier 2025, à laquelle siégeaient :

- Mme Hamon, présidente,

- M. Desvigne-Repusseau, premier conseiller,

- M. Laforêt, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 janvier 2025.

Le rapporteur,

E. LAFORETLa présidente,

P. HAMON

La greffière,

C. BUOT

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23PA00727


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA00727
Date de la décision : 30/01/2025
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme HAMON
Rapporteur ?: M. Emmanuel LAFORÊT
Rapporteur public ?: Mme JURIN
Avocat(s) : TOURROU

Origine de la décision
Date de l'import : 01/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-01-30;23pa00727 ?
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