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07/06/2022 | FRANCE | N°21TL02470

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 2ème chambre, 07 juin 2022, 21TL02470


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision du 13 août 2019 par laquelle la ministre du travail a autorisé son licenciement ainsi que la décision du 1er avril 2019 par laquelle l'inspectrice du travail de la section 34.2.09 de l'unité départementale de l'Hérault a autorisé son licenciement.

Par un jugement n° 1905571 du 29 avril 2021, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregis

trée le 25 juin 2021, sous le n°21MA02470, et un mémoire enregistré le 29 juillet 2021 au gre...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision du 13 août 2019 par laquelle la ministre du travail a autorisé son licenciement ainsi que la décision du 1er avril 2019 par laquelle l'inspectrice du travail de la section 34.2.09 de l'unité départementale de l'Hérault a autorisé son licenciement.

Par un jugement n° 1905571 du 29 avril 2021, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 25 juin 2021, sous le n°21MA02470, et un mémoire enregistré le 29 juillet 2021 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis le 16 janvier 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n°21TL02470, M. B... A..., représenté par Me Rousseau, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 29 avril 2021 ;

2°) d'annuler la décision du 13 août 2019 par laquelle la ministre du travail a autorisé son licenciement ;

3°) de mettre à la charge de son employeur une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'enquête a été menée par une autorité territorialement incompétente, il appartenait à la ministre de mener de nouveau une enquête contradictoire, ce qu'elle n'a pas fait ;

- l'enquête a été menée à charge et selon des modalités ne garantissant pas ses droits ;

- la faute n'était pas suffisamment grave pour que son licenciement soit autorisé ;

- le licenciement est en lien avec son mandat.

Par un mémoire en défense enregistré le 19 juillet 2021, l'office public d'habitat ACM Habitat, représenté par Me Kalczynski, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. A... en application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens.

Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par une ordonnance du 30 juillet 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 6 septembre 2021 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Céline Arquié, première conseillère,

-et les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., qui exerçait des fonctions de au sein d'une agence de l'office public de l'habitat Montpellier Méditerranée métropole, s'est porté candidat sur la liste de la confédération française démocratique du travail au second collège du comité social économique des élections professionnelles organisées le 6 novembre 2018. A la suite d'une plainte déposée par l'une de ses subordonnées, l'office public de l'habitat a engagé à l'encontre de M. A... une procédure de licenciement pour faute grave. Par décision du 1er avril 2019, l'inspectrice du travail de la section 209 de l'unité départementale de l'Hérault a autorisé le licenciement de M. A.... A la suite du recours hiérarchique formé le 15 mai 2019 par M. A..., la ministre du travail a annulé l'autorisation du 1er avril 2019, au motif qu'elle avait été prise par une inspectrice du travail territorialement incompétente et, statuant à nouveau, a autorisé, par décision du 13 août 2019, ce licenciement. M. A... relève appel du jugement du 29 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 13 août 2019 de la ministre du travail.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article R. 2421-4 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable : " L'inspecteur du travail procède à une enquête contradictoire au cours de laquelle le salarié peut, sur sa demande, se faire assister d'un représentant de son syndicat (...) ". Aux termes de l'article R. 2422-1 du même code : " Le ministre chargé du travail peut annuler ou réformer la décision de l'inspecteur du travail sur le recours de l'employeur, du salarié ou du syndicat que ce salarié représente ou auquel il a donné mandat à cet effet. Ce recours est introduit dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision de l'inspecteur. Le silence gardé pendant plus de quatre mois sur ce recours vaut décision de rejet. ".

3. Il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire, ni d'aucun principe, que le ministre chargé du travail soit tenu de procéder à une enquête contradictoire au sens de l'article R. 2421-4 du code du travail visé au point 2. Il en va toutefois autrement lorsque l'inspecteur du travail n'a pas lui-même respecté les obligations de l'enquête contradictoire ou qu'il n'était pas territorialement compétent pour la mener.

4. Il ressort des pièces du dossier que l'inspectrice du travail qui a procédé à l'enquête contradictoire préalable au licenciement de M. A... n'était pas territorialement compétente. Aucun élément du dossier n'établit par ailleurs que la ministre ait elle-même respecté les obligations de l'enquête contradictoire. Cette irrégularité, qui a substantiellement vicié la procédure, entache d'illégalité la décision du 13 août 2019.

5. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M. A..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme demandée par l'office public d'habitat ACM Habitat au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'office public d'habitat ACM Habitat la somme demandée par M. A... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Par ailleurs, l'office public d'habitat ACM Habitat n'ayant exposé aucun des frais mentionnés à l'article R. 761-1 du même code, ses conclusions tendant à mettre à la charge du requérant les entiers dépens de l'instance doivent être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 29 avril 2021 et la décision du 13 août 2019 de la ministre du travail sont annulés.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 3 : Les conclusions présentées par l'office public d'habitat ACM Habitat sur le fondement des dispositions des articles L.761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion et à l'office public d'habitat ACM Habitat.

Délibéré après l'audience du 24 mai 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,

Mme Blin, présidente assesseure,

Mme Arquié, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 juin 2022.

La rapporteure,

C. Arquié

La présidente,

A. Geslan-Demaret

La greffière,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21T02470


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21TL02470
Date de la décision : 07/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-03-02-01 TRAVAIL ET EMPLOI. - LICENCIEMENTS. - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIÉS PROTÉGÉS. - MODALITÉS DE DÉLIVRANCE OU DE REFUS DE L'AUTORISATION. - MODALITÉS D'INSTRUCTION DE LA DEMANDE. - ENQUÊTE CONTRADICTOIRE. - L'ARTICLE R 2421-1 DU CODE DU TRAVAIL IMPOSE À L'INSPECTEUR DU TRAVAIL DE PROCÉDER À UNE ENQUÊTE CONTRADICTOIRE PRÉALABLE AU LICENCIEMENT D'UN SALARIÉ PROTÉGÉ. DÈS LORS QUE L'INSPECTEUR DU TRAVAIL QUI A RÉALISÉ L'ENQUÊTE CONTRADICTOIRE N'ÉTAIT PAS TERRITORIALEMENT COMPÉTENT POUR LA MENER, CETTE IRRÉGULARITÉ ENTACHE LA PROCÉDURE D'UN VICE SUBSTANTIEL DE NATURE À ENTRAÎNER L'ILLÉGALITÉ DE LA DÉCISION D'AUTORISATION DE LICENCIEMENT D'UN SALARIÉ PROTÉGÉ Y COMPRIS LORSQUE LA DÉCISION ADMINISTRATIVE EST PRISE PAR LE MINISTRE QUI A ANNULÉ L'AUTORISATION DÉLIVRÉE PAR L'INSPECTEUR DU TRAVAIL POUR L'ACCORDER À NOUVEAU.

66-07-01-03-02-01


Références :

Comp. CE 15 février 1991 n° 69035 min des affaires sociales c/ Teulier, B...Cf. CE, Assemblée, 23 décembre 2011, M. Danthony et autres, n° 335033, p. 649.


Composition du Tribunal
Président : Mme GESLAN-DEMARET
Rapporteur ?: Mme Céline ARQUIÉ
Rapporteur public ?: Mme TORELLI
Avocat(s) : SCP DABIENS - CELESTE - KALCZYNSKI CASTELNAU LE LEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 15/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2022-06-07;21tl02470 ?
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