Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la délibération du 21 février 2020 par laquelle le conseil municipal de la commune de Brissac a approuvé la révision du plan local d'urbanisme.
Par un jugement n° 2001855 du 8 juillet 2021, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille sous le n° 21MA03836 puis au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 21TL03836, le 8 septembre 2021 et le 12 janvier 2022, M. B..., représenté par Me Boillot, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler la délibération du 21 février 2020 par laquelle le conseil municipal de la commune de Brissac a approuvé la révision du plan local d'urbanisme ;
3°) d'annuler la délibération du 21 février 2020 en ce qu'elle classe les parcelles cadastrées ... en secteur de zone Ap ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Brissac une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la délibération approuvant le plan local d'urbanisme méconnaît les dispositions de l'article L. 153-21 du code de l'urbanisme ;
- la délibération approuvant le plan local d'urbanisme méconnaît les dispositions de l'article L. 153-34 du code de l'urbanisme ;
- le plan local d'urbanisme contrevient à l'objectif de l'orientation d'aménagement et de programmation du secteur de Coupiac en supprimant des terrains constructibles sur ce secteur ;
- le classement en zone A de ses parcelles est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la demande dérogatoire d'ouverture à l'urbanisation du secteur dit 5, concernant ses parcelles, qui était déjà urbanisé, était superfétatoire ;
- la délibération approuvant le plan local d'urbanisme méconnaît les dispositions de l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales ;
- la délibération approuvant le plan local d'urbanisme est entachée d'un détournement de pouvoir ;
- la délibération approuvant le plan local d'urbanisme méconnaît les dispositions des articles L. 153-14 et L. 153-19 du code de l'urbanisme dès lors que le projet de plan local d'urbanisme n'a pas été arrêté par le conseil municipal avant d'être soumis à enquête publique ;
- la délibération approuvant le plan local d'urbanisme est entachée d'un vice de procédure tenant à l'absence de consultation des autorités mentionnées à l'article L. 153-16 du code de l'urbanisme sur le plan local d'urbanisme ajusté à l'issue de la médiation administrative ;
- la délibération approuvant le plan local d'urbanisme est entachée d'un vice de procédure tenant à l'absence de consultation de l'autorité environnementale sur le plan local d'urbanisme ajusté à l'issue de la médiation administrative.
Par un mémoire en défense, enregistrés le 10 novembre 2021, la commune de Brissac, représentée par Me Pons, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. B... de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 10 mars 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 25 mars 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Lasserre, première conseillère,
- les conclusions de Mme Cherrier, rapporteure publique,
- et les observations de Me Boillot, représentant M. B..., et de Me Remy, représentant la commune de Brissac.
Considérant ce qui suit :
1. Par une délibération du 21 février 2020, le conseil municipal de Brissac a approuvé son plan local d'urbanisme communal. M. B..., propriétaire des parcelles cadastrées section AE n°193 et n°194 sur le territoire de cette commune, a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler cette délibération. Le tribunal a rejeté sa demande par un jugement du 8 juillet 2021, dont M. B... relève appel.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la procédure d'élaboration du plan local d'urbanisme :
2. Aux termes de l'article L. 153-14 du code de l'urbanisme : " L'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale ou le conseil municipal arrête le projet de plan local d'urbanisme ". Aux termes de l'article L. 153-16 du même code : " Le projet de plan arrêté est soumis pour avis : 1° Aux personnes publiques associées à son élaboration mentionnées aux articles L. 132-7 et L. 132-9 ; 2° A la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (...) ". Aux termes de l'article L. 153-19 du même code : " Le projet de plan local d'urbanisme arrêté est soumis à enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement par le président de l'établissement public de coopération intercommunale ou le maire ". Il résulte de la combinaison de ces dispositions qu'il appartient à une commune souhaitant modifier son projet de plan local d'urbanisme avant l'ouverture de l'enquête publique, notamment pour tenir compte de l'avis rendu par une personne publique associée à son élaboration, de consulter à nouveau l'ensemble des personnes publiques associées, afin que le dossier soumis à l'enquête publique comporte des avis correspondant au projet modifié. Toutefois, l'omission de cette nouvelle consultation n'est de nature à vicier la procédure et à entacher d'illégalité la décision prise à l'issue de l'enquête publique que si elle a pu avoir pour effet de nuire à l'information du public ou si elle a été de nature à exercer une influence sur cette décision.
3. Il ressort des pièces du dossier que le projet de plan local d'urbanisme de la commune a été arrêté le 2 septembre 2016. Le préfet de l'Hérault a d'abord refusé l'ouverture à l'urbanisation de plusieurs secteurs prévue par ce projet, puis, à la suite d'une médiation proposée par le tribunal administratif de Montpellier, a, par avis conforme en date du 13 août 2019, autorisé la commune à déroger à la règle de l'urbanisation limitée sur certains secteurs. Ainsi, conformément aux dispositions précitées des articles L. 153-14 et L. 153-19 du code de l'urbanisme, il appartenait au maire de Brissac de demander au conseil municipal d'arrêter ce projet modifié et de consulter à nouveau l'ensemble des personnes publiques associées, afin que le dossier soumis à l'enquête publique comporte des avis correspondants au projet modifié. Or, il ressort des pièces du dossier que le maire de Brissac s'est borné à joindre au dossier d'enquête publique un projet de plan local d'urbanisme " ajusté ". En outre, il ressort des pièces du dossier que les modifications apportées au projet de plan ont consisté à densifier les zones déjà urbanisées de la commune, à diminuer de 4,4 hectares les surfaces d'extension urbaine sur une surface totale prévue de 8,9 hectares et à classer en zone N des parcelles supportant des constructions. Eu égard à l'importance de ces changements, et alors même que le projet " ajusté " a été joint au dossier d'enquête publique, l'omission de la nouvelle consultation du conseil municipal et des personnes publiques associées a eu pour effet de nuire à l'information du public et a été de nature à exercer une influence sur la délibération attaquée. Ainsi, le vice de procédure tiré de la méconnaissance des dispositions des articles L. 153-14 et L. 153-19 du code de l'urbanisme a entaché d'illégalité cette délibération.
En ce qui concerne le classement des parcelles section AE n° 193 et n° 194 en zone Ap :
4. D'une part, il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Ils ne sont pas liés, pour déterminer l'affectation future des divers secteurs, par les modalités existantes d'utilisation des sols, dont ils peuvent prévoir la modification dans l'intérêt de l'urbanisme. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.
5. D'autre part, aux termes de l'article R. 151-22 du code de l'urbanisme : " Les zones agricoles sont dites " zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles ".
6. Les parcelles de M. B..., qui étaient initialement prévues dans le secteur 2AUnc du projet arrêté par le conseil municipal puis dans le secteur N du projet ajusté par le maire de Brissac, ont été classées en zone agricole protégée à l'issue de l'enquête publique par la délibération en litige. Si ces parcelles sont concernées par les appellations d'origine contrôlée et protégée " Languedoc et Terrasses du Larzac ", il n'est pas contesté qu'elles ne sont pas cultivées depuis au moins leur ouverture à l'urbanisation par la délibération de la commune portant règlement du plan d'occupation des sols en date du 21 janvier 1993. En outre, il ressort des pièces du dossier que ces parcelles se situent à proximité immédiate de parcelles construites et bénéficiaient, à la date de l'édiction de la délibération approuvant le plan local d'urbanisme, de trois permis de construire valides autorisés à la suite d'une division foncière effectuée le 8 mars 2017. Enfin, il ressort également des pièces du dossier que ces parcelles sont desservies par les réseaux publics. Dans ces conditions, M. B... est fondé à soutenir que le classement des parcelles en litige en zone agricole protégée ne répond pas au parti d'aménagement de la commune et procède d'une erreur manifeste d'appréciation.
7. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'est susceptible de fonder l'annulation de l'acte attaqué.
8. Aux termes de l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme : " Si le juge administratif, saisi de conclusions dirigées contre (...) un plan local d'urbanisme (...), estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'une illégalité entachant l'élaboration ou la révision de cet acte est susceptible d'être régularisée, il peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation et pendant lequel le document d'urbanisme reste applicable, sous les réserves suivantes : / 1° En cas d'illégalité autre qu'un vice de forme ou de procédure, pour (...) les plans locaux d'urbanisme, le sursis à statuer ne peut être prononcé que si l'illégalité est susceptible d'être régularisée par une procédure de modification prévue à la section VI du chapitre III du titre IV du livre Ier et à la section VI du chapitre III du titre V du livre Ier ; / 2° En cas d'illégalité pour vice de forme ou de procédure, le sursis à statuer ne peut être prononcé que si l'illégalité a eu lieu, pour (...) les plans locaux d'urbanisme, après le débat sur les orientations du projet d'aménagement et de développement durables. / Si la régularisation intervient dans le délai fixé, elle est notifiée au juge, qui statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. (...) ".
9. Ces dispositions ont pour objet de permettre, sous le contrôle du juge, la régularisation d'un vice ayant entaché l'élaboration, notamment, d'un plan local d'urbanisme sous les réserves mentionnées au 2° s'agissant d'un vice de forme ou de procédure, dès lors qu'aucun autre moyen n'est susceptible d'entraîner l'annulation de l'acte attaqué. Lorsque le juge estime qu'une telle régularisation est possible, il peut, de sa propre initiative ou à la demande d'une partie, après avoir invité les parties à présenter leurs observations sur le principe de l'application de l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme, constater, par une décision avant-dire droit, que les autres moyens ne sont pas fondés et surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour permettre, selon les modalités qu'il détermine, la régularisation du vice qu'il a relevé. Le juge peut mettre en œuvre les pouvoirs qu'il tient de l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme pour la première fois en appel.
10. Si le débat sur les orientations du projet d'aménagement et de développement durables a fait l'objet d'une délibération du 8 juin 2017, il ressort des pièces du dossier que ces orientations ont été modifiées avant l'enquête publique sur le projet de plan local d'urbanisme sans nouveau débat par le conseil municipal. Ainsi, l'irrégularité retenue au point 3 du présent arrêt ne peut pas être regardée comme survenue postérieurement au débat sur les orientations du projet d'aménagement et de développement durables. Dans ces conditions, cette irrégularité n'apparaît pas susceptible d'être régularisée au regard des dispositions précitées. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a dès lors pas lieu de faire application des dispositions de l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme.
11. Il résulte de ce qui précède que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. B..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme à verser à la commune de Brissac au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Brissac une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 8 juillet 2021 est annulé.
Article 2 : La délibération en date du 21 février 2020 par laquelle la commune de Brissac a approuvé la révision de son plan local d'urbanisme est annulée.
Article 3 : La commune de Brissac versera à M. B... une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions de la commune de Brissac formées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la commune de Brissac.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 23 juin 2022, à laquelle siégeaient :
M. Barthez, président,
Mme Fabien, présidente assesseure,
Mme Lasserre, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 juillet 2022.
La rapporteure,
N. Lasserre
Le président,
A. Barthez Le greffier,
F. Kinach
La République mande et ordonne au préfet de l'Hérault en ce qui le concerne ou à tous
huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties
privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°21TL03836