Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 18 décembre 2019 par lequel le préfet de Tarn-et-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai expirant le 27 mars 2020, a fixé le pays de destination de la décision d'éloignement et l'a interdite de retour pour une durée d'un an et d'enjoindre au préfet de ce département de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte de 50 euros par jour de retard.
Par un jugement n° 2000345 du 21 février 2020, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 22 juin 2020, sous le n°20BX01960 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux, puis le 11 avril 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n°20TL21960, Mme B... A..., représentée par Me Schoenacker Rossi, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 21 février 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 18 décembre 2019 par lequel le préfet de Tarn-et-Garonne l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai expirant le 27 mars 2020, a fixé le pays de destination de la décision d'éloignement et l'a interdite de retour pour une durée d'un an et l'a obligée à se présenter aux services de la préfecture une fois par semaine afin d'y exposer les diligences mises en œuvre pour son départ ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
-l'arrêté est insuffisamment motivé ;
-la décision l'obligeant à quitter le territoire porte une atteinte disproportionnée au respect de sa vie privée et familiale et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
-elle méconnaît l'intérêt supérieur des enfants tels que protégé par l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.
Par un mémoire en défense enregistré le 7 avril 2022, la préfète de Tarn-et-Garonne conclut au rejet de la requête.
Elle fait valoir que les moyens invoqués ne sont pas fondés et entend se référer à ses écritures de première instance dont elle produit une copie en appel.
Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 16 juillet 2020.
Par une ordonnance du 7 juin 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 1er juillet 2022 à 12h.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme Céline Arquié, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., ressortissante albanaise née le 3 août 1989 à Dardha (Albanie), est entrée sur le territoire français le 1er mars 2019 selon ses dires. Sa demande d'asile a été rejetée le 26 juin 2019 par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides puis le 18 octobre 2019 par la Cour nationale du droit d'asile. Par un arrêté du 18 décembre 2019, le préfet de Tarn-et-Garonne l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai expirant le 27 mars 2020 en fixant le pays de renvoi de la mesure d'éloignement, l'a interdite de retour sur le territoire français pour une durée d'une année et l'a obligée à se présenter aux services de la préfecture une fois par semaine afin d'y exposer les diligences mises en œuvre pour son départ. Mme A... relève appel du jugement du 21 février 2020 par lequel la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. L'arrêté par lequel l'administration fait obligation à un étranger de quitter le territoire national constitue une mesure de police qui doit être motivée en fait et en droit en application des dispositions combinées des articles L 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des articles L 211-2 et L 211-5 du code des relations entre le public et l'administration.
3. L'arrêté contesté énonce les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et qui ont permis à l'intéressée de comprendre et de contester les décisions prises à son encontre. Le préfet de Tarn-et-Garonne, qui n'avait pas à faire mention de toutes les circonstances de fait caractérisant la situation familiale de Mme A..., a cité les éléments pertinents dont il avait connaissance et qui fondent ses décisions. Par suite, celles-ci sont suffisamment motivées au regard tant des exigences posées en la matière par le I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que de celles de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration.
4. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatives, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ".
5. Si Mme A... soutient qu'elle vit depuis plusieurs mois à Montauban avec son époux et leurs deux filles, nées respectivement en 2005 et 2007, scolarisées depuis le mois de septembre 2019 au collège Jean-Jaurès de la même ville, il ressort des pièces du dossier que la demande d'asile de son époux a été rejetée tant par l'Office de protection de réfugiés et apatrides que par la Cour nationale du droit d'asile et qu'il n'a été admis à séjourner sur le territoire que pour une durée de six mois, le temps nécessaire à la poursuite de ses soins jusqu'au 26 mars 2020. Aucun élément du dossier n'établit par ailleurs que M. A... ait vocation à demeurer sur le territoire. Ainsi, alors que le délai de départ accordé à Mme A... pour quitter le territoire a été porté au 27 mars 2020, correspondant au dernier jour de l'autorisation provisoire de séjour accordée à son époux, la décision n'a pas pour effet de séparer les enfants de leurs parents, ni ne fait obstacle à ce que les filles des époux A... poursuivent leur scolarité dans leur pays d'origine. Il ne ressort pas par ailleurs des pièces du dossier que la famille ait constitué en France des liens privés et sociaux d'une intensité particulière de nature à faire regarder ce pays comme le centre de ses intérêts privés. Par suite, contrairement à ce qu'indique Mme A..., la décision lui faisant obligation de quitter le territoire ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale tel que garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni n'est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation. Pour les mêmes motifs elle ne méconnait pas les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.
6. Il résulte de ce qui précède Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.
Sur les frais du litige :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et celles de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'intérieur et des Outre-mer.
Copie en sera adressée à la préfète de Tarn-et- Garonne.
Délibéré après l'audience du 30 août 2022 à laquelle siégeaient :
Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,
M. Teulière, premier conseiller,
Mme Arquié, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 septembre 2022.
La rapporteure,
C. Arquié
La présidente,
A. Geslan-Demaret
La greffière,
M-M. Maillat
La République mande et ordonne à la préfète de Tarn-et-Garonne, en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20TL21960