Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société civile Rodige a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du 19 décembre 2019 de rejet de sa réclamation préalable et de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge pour la période du 1er juillet 2014 au 30 juin 2015, d'un montant de 60 833 euros, et des intérêts de retard d'un montant de 8 638 euros.
Par une ordonnance n° 462171 du 4 avril 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué au tribunal administratif de Nîmes le jugement de la requête de la société civile Rodige et, par une ordonnance n° 2020433 du 17 juin 2022, le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Nîmes a donné acte du désistement de la requête de la société civile Rodige.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 26 juillet 2022, la société civile Rodige, représentée par Me Lauron, demande à la cour :
1°) d'annuler cette ordonnance ;
2°) de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Nîmes ou de Toulouse.
Elle soutient que :
- le déroulement de la procédure juridictionnelle, avant l'utilisation par le tribunal administratif de Nîmes des dispositions de l'article R. 612-5-1 du code de justice administrative, démontre qu'elle n'avait pas l'intention de se désister de l'instance et que le tribunal n'a pas fait une juste application de ces dispositions ;
- compte-tenu de la gravité des conséquences qu'emporte le prononcé d'un désistement, la procédure prévue à l'article R. 612-5-1 du code de justice administrative doit être précédée d'une mise en demeure ;
- l'ordonnance prononcée, qui la prive de la possibilité de voir sa cause entendue par un tribunal, méconnaît les stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 septembre 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la société civile Rodige ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 13 septembre 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 3 octobre 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- les conclusions de Mme Cherrier, rapporteure publique,
- et les observations de Me Lauron, représentant la société civile Rodige.
Considérant ce qui suit :
1. Par l'ordonnance du 17 juin 2022 attaquée, le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Nîmes, notant que la société civile Rodige n'avait pas expressément confirmé le maintien de ses conclusions dans le délai d'un mois ainsi qu'il lui était demandé par un courrier dont son conseil avait eu connaissance sur l'application électronique Télérecours le 13 mai 2022, a jugé qu'elle était ainsi réputée s'être désistée de l'ensemble des conclusions de sa requête et a, en conséquence, donné acte du désistement. La société civile Rodige fait appel de cette ordonnance.
2. Aux termes de l'article R. 612-5-1 du code de justice administrative : " Lorsque l'état du dossier permet de s'interroger sur l'intérêt que la requête conserve pour son auteur, le président de la formation de jugement ou le président de la chambre chargée de l'instruction, peut inviter le requérant à confirmer expressément le maintien de ses conclusions. La demande qui lui est adressée mentionne que, à défaut de réception de cette confirmation à l'expiration du délai fixé, qui ne peut être inférieur à un mois, il sera réputé s'être désisté de l'ensemble de ses conclusions ". A l'occasion de la contestation en appel de l'ordonnance prenant acte du désistement d'un requérant en l'absence de réponse à l'expiration du délai qui lui a été fixé, il incombe au juge d'appel, saisi de moyens en ce sens, de vérifier que l'intéressé a reçu la demande mentionnée par les dispositions de l'article R. 612-5-1 du code de justice administrative, que cette demande fixait un délai d'au moins un mois au requérant pour répondre et l'informait des conséquences d'un défaut de réponse dans ce délai, que le requérant s'est abstenu de répondre en temps utile et d'apprécier si le premier juge, dans les circonstances de l'affaire, a fait une juste application des dispositions de l'article R. 612-5-1.
3. Il résulte de l'instruction, notamment des pièces du dossier de première instance, que la société civile Rodige a saisi le tribunal administratif de Toulouse le 24 janvier 2020 d'une requête tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée précédemment mentionnés, a répliqué par un mémoire enregistré le 10 novembre 2020 au premier mémoire en défense de l'administration et, si elle n'a pas répondu avant la clôture de l'instruction fixée au 10 août 2021 au second mémoire en défense de l'administration, cette dernière renvoyait sur de nombreux points à ses précédentes écritures. Ainsi, eu égard à ce comportement de la société, en l'absence de tout dégrèvement prononcé en cours d'instance et compte-tenu des sommes contestées, rien ne permettait de s'interroger sur l'intérêt que conservait la demande pour la société civile Rodige. Dans ces circonstances, le tribunal administratif de Nîmes, désormais compétent pour connaître du litige, n'a pas fait une juste application des dispositions de l'article R. 612-5-1 du code de justice administrative en demandant, le 13 mai 2022, à la société civile Rodige de confirmer expressément le maintien de ses conclusions. L'ordonnance attaquée a, ainsi, à tort donné acte d'un désistement et est donc irrégulière.
4. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que l'ordonnance attaquée doit être annulée. En l'absence de conclusions sur le fond présentées en appel par la société civile Rodige, il y a lieu de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Nîmes pour qu'il soit à nouveau statué sur sa demande.
D E C I D E :
Article 1er : L'ordonnance n° 2020433 du tribunal administratif de Nîmes du 17 juin 2022 est annulée.
Article 2 : La société civile Rodige est renvoyée devant le tribunal administratif de Nîmes pour qu'il soit statué sur sa demande.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société civile Rodige et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Pyrénées.
Délibéré après l'audience du 17 novembre 2022, où siégeaient :
- M. Barthez, président,
- M. Lafon, président assesseur,
- Mme Arquié, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er décembre 2022.
Le président-rapporteur,
A. A...L'assesseur le plus ancien,
N. Lafon
Le greffier,
F. Kinach
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N°22TL21673 2