La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/12/2022 | FRANCE | N°19TL02277

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 4ème chambre, 08 décembre 2022, 19TL02277


Vu les procédures suivantes :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes l'annulation de l'arrêté du 25 mars 2017 par lequel le maire de Lourmarin a délivré un certificat d'urbanisme positif à M. A... C... pour l'extension d'une maison existante.

Par un jugement n° 1701600 du 26 mars 2019, le tribunal administratif de Nîmes a annulé le certificat d'urbanisme du 25 mars 2017, a mis à la charge de la commune de Lourmarin le paiement d'une somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de j

ustice administrative et a rejeté le surplus des conclusions des parties.

Proc...

Vu les procédures suivantes :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes l'annulation de l'arrêté du 25 mars 2017 par lequel le maire de Lourmarin a délivré un certificat d'urbanisme positif à M. A... C... pour l'extension d'une maison existante.

Par un jugement n° 1701600 du 26 mars 2019, le tribunal administratif de Nîmes a annulé le certificat d'urbanisme du 25 mars 2017, a mis à la charge de la commune de Lourmarin le paiement d'une somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédures devant la cour :

I - Par une requête, enregistrée le 19 mai 2019 sous le n° 19MA02277 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille et ensuite sous le n° 19TL02277 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, puis par des mémoires enregistrés le 21 avril 2020 et le 19 novembre 2020, la commune de Loumarin, représentée par Me Légier, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 26 mars 2019 ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de Nîmes ;

3°) de mettre à la charge de Mme B... la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que le tribunal a estimé que l'absence de consultation des gestionnaires de réseaux avait été susceptible d'influer sur le sens du certificat d'urbanisme ;

- les autres moyens invoqués par Mme B... ne sont pas fondés.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 14 avril 2020 et 19 octobre 2020, Mme D... B..., représentée par Me Ibanez, conclut, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à l'annulation du certificat d'urbanisme positif du 25 mars 2017 et, en tout état de cause, à ce que soit mise à la charge de la commune de Lourmarin la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- c'est à bon droit que le tribunal a retenu le moyen tiré de l'absence de consultation des gestionnaires de réseaux pour annuler le certificat d'urbanisme ;

- le maire n'a pas consulté l'architecte des bâtiments de France ;

- les informations contenues dans le certificat d'urbanisme sont insuffisantes ;

- le maire a méconnu les articles NC 1 et NC 2 du règlement du plan d'occupation des sols ;

- la construction ne pouvait être déclarée réalisable en l'absence de régularisation préalable des travaux antérieurs irrégulièrement réalisés ;

- le certificat d'urbanisme ne mentionne pas la possibilité d'opposer un sursis à statuer sur une demande de permis au regard du futur plan local d'urbanisme.

Par une ordonnance en date du 25 juillet 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 15 septembre 2022.

II - Par une requête, enregistrée le 27 mai 2019 sous le n° 19MA02397 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille et ensuite sous le n° 19TL02397 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, M. A... C..., représenté par Me Humbert-Simeone, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 26 mars 2019 en tant que les premiers juges ont annulé le certificat d'urbanisme ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de Nîmes ;

3°) de mettre à la charge de Mme B... la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que c'est à tort que le tribunal a estimé que l'absence de consultation des gestionnaires de réseaux avait été susceptible d'influer sur le certificat d'urbanisme.

La requête a été communiquée à Mme D... B..., laquelle n'a pas produit de mémoire en défense.

Par une ordonnance en date du 25 juillet 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 15 septembre 2022.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code du patrimoine ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jazeron, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Meunier-Garner, rapporteure publique,

- les observations de Me Humbert-Simeone, représentant M. C..., et de Me Marti, substituant Me Ibanez, représentant Mme B....

Une note en délibéré, présentée par M. C..., représenté par Me Humbert-Simeone, a été enregistrée le 1er décembre 2022 dans l'instance n° 19TL02397.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme C... ont sollicité, le 24 mars 2017, un certificat d'urbanisme portant sur une opération présentée comme l'extension d'une maison d'habitation existante, sur les parcelles cadastrées ... situées avenue Laurent Vibert à Lourmarin (Vaucluse). Le maire de cette commune leur a délivré, le 25 mars 2017, un certificat d'urbanisme positif, leur indiquant que le terrain concerné pouvait être utilisé pour la réalisation de l'opération envisagée. Sur la demande de Mme B..., voisine immédiate dudit terrain, le tribunal administratif de Nîmes a prononcé, par un jugement du 26 mars 2019, l'annulation de ce certificat d'urbanisme. Par leurs requêtes susvisées n° 19TL02277 et n° 19TL02397, la commune de Lourmarin et M. C... relèvent appel de ce jugement. Ces deux requêtes étant dirigées contre le même jugement, il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul et même arrêt.

Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal :

2. L'article L. 410-1 du code de l'urbanisme dispose que : " Le certificat d'urbanisme, en fonction de la demande présentée : / a) Indique les dispositions d'urbanisme, les limitations administratives au droit de propriété et la liste des taxes et participations d'urbanisme applicables à un terrain ; / b) Indique en outre, lorsque la demande a précisé la nature de l'opération envisagée ainsi que la localisation approximative et la destination des bâtiments projetés, si le terrain peut être utilisé pour la réalisation de cette opération ainsi que l'état des équipements publics existants ou prévus. (...) ". L'article R. 410-10 du même code précise que : " Dans le cas prévu au b de l'article L. 410-1, le délai d'instruction est de deux mois à compter de la réception en mairie de la demande. / L'autorité compétente recueille l'avis des collectivités, établissements publics et services gestionnaires des réseaux mentionnés à l'article L. 111-11 ainsi que les avis prévus par les articles R. 423-52 et R. 423-53. (...) ". Enfin, selon l'article L. 111-11 dudit code auquel il est ainsi renvoyé : " Lorsque, compte tenu de la destination de la construction ou de l'aménagement projeté, des travaux portant sur les réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou de distribution d'électricité sont nécessaires pour assurer la desserte du projet, le permis de construire ou d'aménager ne peut être accordé si l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés. ".

3. Il résulte de ces dispositions qu'un certificat d'urbanisme opérationnel doit être refusé lorsque, d'une part, des travaux d'extension ou de renforcement de la capacité des réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou d'électricité sont nécessaires à la desserte du projet et, d'autre part, lorsque l'administration n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire ces travaux doivent être exécutés, après avoir, le cas échéant, accompli les diligences appropriées pour recueillir les informations nécessaires à son appréciation. Il appartient à l'autorité compétente d'apprécier si les équipements publics existants ou prévus susceptibles de desservir le terrain permettent ou non la construction sur ce terrain. Si elle estime que tel n'est pas le cas, cette autorité peut, sous le contrôle du juge, déclarer que le terrain est inconstructible ou non utilisable pour ce projet, alors même qu'aucune règle d'urbanisme n'imposerait le refus de toute construction ou de toute autorisation.

4. Il ressort des pièces du dossier que le certificat d'urbanisme positif délivré par le maire de Lourmarin à M. et Mme C... mentionne que le terrain peut être utilisé pour la réalisation de l'opération d'extension envisagée et précise en son article 4, d'une part, que ledit terrain est desservi par les réseaux publics d'eau potable et d'électricité et, d'autre part, qu'il n'est pas raccordable au réseau public d'assainissement collectif, lequel ne fait l'objet d'aucun projet d'extension. Il n'est pas contesté que le maire de Lourmarin n'a pas consulté les services gestionnaires des réseaux avant de délivrer le certificat d'urbanisme positif en litige, en méconnaissance de l'article R. 410-10 précité du code de l'urbanisme.

5. Toutefois, d'une part, s'agissant du réseau public de distribution d'eau potable, il ressort d'un courrier adressé par la société des Eaux de Marseille à la commune le 14 mai 2019, produit pour la première fois en appel, que la propriété de M. et Mme C... est raccordée au réseau depuis le 7 juin 2013 et que la configuration de ce réseau permet d'alimenter en eau la partie nouvelle de la maison d'habitation envisagée par les intéressés. Bien qu'étant postérieur à la date de délivrance du certificat contesté, le courrier de la société des Eaux de Marseille décrit la situation préexistante, puisqu'il mentionne que l'alimentation en eau était déjà suffisante au mois de mars 2017. Les termes de ce courrier sont d'ailleurs corroborés par la lettre de la même société du 27 mai 2020, laquelle précise que la commune de Lourmarin possède sa propre ressource en eau avec la source du Couturas, dont les capacités sont " largement suffisantes " même en période de pointe. D'autre part, s'agissant du réseau public de distribution d'électricité, la société ERDF avait indiqué à la commune, par courriers des 11 août 2010 et 6 février 2013, produits également pour la première fois en appel, que le recueil de son avis n'était plus utile pour les dossiers portant sur une simple modification des surfaces d'une habitation, lorsque le branchement était existant et que l'extension ne nécessitait ni un nouveau compteur électrique ni un changement de tranche tarifaire. Dès lors que le projet de M. et Mme C... entre dans les critères ainsi déterminés, le maire a pu considérer à bon droit que le réseau d'électricité présentait, à l'instar du réseau d'eau potable, une capacité suffisante pour desservir la surface de plancher supplémentaire de 172 m2 prévue pour cette habitation déjà raccordée. Enfin, il n'est pas sérieusement contesté que, comme l'indique le certificat d'urbanisme, le terrain d'assiette du projet n'est pas desservi par le réseau d'assainissement collectif et qu'il a donc vocation à être pourvu d'un dispositif d'assainissement individuel dont la conformité sera contrôlée par le service public compétent. Eu égard à l'ensemble de ces éléments, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'absence de consultation des services gestionnaires des réseaux ait été de nature à exercer une influence sur le contenu du certificat d'urbanisme positif du 25 mars 2017. Dès lors, la commune de Lourmarin et M. C... sont fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nîmes a retenu ce motif pour prononcer l'annulation de ce certificat.

6. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme B..., tant en première instance qu'en appel, à l'appui de la demande d'annulation du certificat d'urbanisme du 25 mars 2017.

Sur les autres moyens invoqués par Mme B... :

7. Aux termes de l'article NC 1 du règlement du plan d'occupation des sols, applicable à la date du certificat d'urbanisme à la zone NC dans laquelle se situait le terrain d'assiette du projet : " Types d'occupation et utilisation des sols interdits : / Toutes les constructions qui ne sont pas directement liées aux activités agricoles, en particulier : / - Les locaux à usage d'habitation autres que ceux liés aux exploitations agricoles et ceux visés à l'article NC 2. (...) ". Aux termes de l'article NC 2 du même règlement : " Types d'occupation ou utilisation des sols soumis à conditions spéciales : / Sont admis dans la zone NC : / - Les constructions liées et nécessaires à l'exploitation agricole / - L'extension mesurée des constructions nécessaires aux activités existantes dont la réalisation ne peut se faire ailleurs / - La restauration et l'extension des constructions existantes en vue de l'habitat à condition que la SHOB existante soit supérieure ou égale à 70 m2 et que ces bâtiments soient clos et couverts (...) ". Au titre de l'exception prévue par les dispositions de ce dernier alinéa pour l'extension des constructions existantes en vue de l'habitat, ne peuvent être autorisés que des projets qui, eu égard à leur implantation par rapport aux constructions existantes et à leur ampleur limitée en proportion de ces mêmes constructions, peuvent être regardés comme ne procédant qu'à une simple extension de ces dernières.

8. Il ressort de la notice produite à l'appui de la demande de certificat d'urbanisme que le projet présenté par M. et Mme C... consiste à accoler à la maison d'habitation existante, laquelle présente une surface de plancher de 77 m2 répartie sur deux niveaux, une partie nouvelle implantée en continuité de cette dernière et représentant la création d'une surface de plancher supplémentaire de 172 m2, pareillement répartie sur deux niveaux. Il ressort par ailleurs des plans joints à cette même demande que l'emprise au sol du bâtiment existant est de l'ordre de 74 m2, intégrant l'escalier permettant l'accès à l'étage, tandis que l'emprise au sol de la partie nouvelle prévue représente 132,02 m2, soit près du double de celle de l'immeuble existant. Eu égard à l'ampleur de la surface supplémentaire à construire, alors même que l'alinéa de l'article NC 2 précité applicable aux projets à usage d'habitat ne subordonne pas les extensions à leur caractère mesuré et que l'opération satisfait aux autres conditions posées par ce même alinéa s'agissant de la surface préexistante et du caractère clos et couvert du bâtiment, le projet de M. et Mme C... ne peut être considéré comme procédant à une simple extension de la maison d'habitation existante et n'était, dès lors, pas susceptible d'être autorisé au regard des prescriptions des articles NC 1 et NC 2 du plan d'occupation des sols alors applicable. Par suite, Mme B... est fondée à soutenir que le certificat d'urbanisme positif déclarant l'opération réalisable a été délivré par le maire de Lourmarin en méconnaissance des dispositions précitées.

9. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, les autres moyens soulevés par Mme B... tant en première instance qu'en appel n'apparaissent pas de nature à justifier, en l'état de l'instruction, l'annulation du certificat d'urbanisme en litige.

10. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Lourmarin et M. C... ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a prononcé l'annulation du certificat d'urbanisme en date du 25 mars 2017.

Sur les frais liés aux litiges :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mises à la charge de Mme B..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, les sommes réclamées par la commune de Lourmarin et par M. C... au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la commune de Lourmarin le paiement d'une somme de 1 000 euros à verser à Mme B... à ce titre.

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes n° 19TL02277 de la commune de Lourmarin et n° 19TL02397 de M. C... sont rejetées.

Article 2 : La commune de Lourmarin versera à Mme B... une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Lourmarin, à M. A... C... et à Mme D... B....

Délibéré après l'audience du 24 novembre 2022, à laquelle siégeaient :

M. Chabert, président,

M. Haïli, président assesseur,

M. Jazeron, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 décembre 2022.

Le rapporteur,

F. JazeronLe président,

D. Chabert

Le greffier,

F. Kinach

La République mande et ordonne au préfet de Vaucluse, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

Nos 19TL02277, 19TL02397


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19TL02277
Date de la décision : 08/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-025 Urbanisme et aménagement du territoire. - Certificat d'urbanisme.


Composition du Tribunal
Président : M. CHABERT
Rapporteur ?: M. Florian JAZERON
Rapporteur public ?: Mme MEUNIER-GARNER
Avocat(s) : IBANEZ;IBANEZ;HUMBERT SIMEONE

Origine de la décision
Date de l'import : 11/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2022-12-08;19tl02277 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award