Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme C... et B... A... ont demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la délibération du 23 juillet 2019 par laquelle le conseil municipal de Cabrières d'Avignon a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune ou, à titre subsidiaire, d'annuler cette délibération du 23 juillet 2019 en tant seulement qu'elle classe leur parcelle au sein d'une orientation d'aménagement et de programmation et qu'elle institue sur leur parcelle un emplacement réservé.
Par un jugement n° 2000191 du 8 décembre 2020, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 12 février 2021 au greffe de la cour administrative de Marseille sous le numéro 21MA00615, puis au greffe de la cour administrative de Toulouse sous le numéro 21TL00615, et un mémoire en réplique enregistré le 21 octobre 2022, M. et Mme A..., représentés par la SELARL CDMF avocats affaires publiques, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler la délibération du 23 juillet 2019 par laquelle le conseil municipal de Cabrières d'Avignon a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune ainsi que la décision tacite rejetant leur recours gracieux ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Cabrières d'Avignon une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la délibération attaquée a été approuvée en méconnaissance de l'article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales en raison de l'information insuffisante des membres du conseil municipal ;
- la nécessité et l'utilité de l'emplacement réservé n° 13 grevant les parcelles dont ils sont propriétaires ne sont justifiées par aucun élément et les auteurs du plan local d'urbanisme ont commis une erreur manifeste d'appréciation en instituant cet emplacement réservé ;
- l'objet complémentaire de cet emplacement réservé ajouté après l'enquête publique tenant à la création d'espaces verts et de jeux procède n'est pas complémentaire et en cohérence avec l'orientation d'aménagement et de programmation du Coustellet, ni avec le projet d'aménagement et de développement durables et le parti d'aménagement retenu par les auteurs du plan local d'urbanisme de la commune ;
- en outre, ces éléments induisent des sujétions disproportionnées à leurs droits de propriété qui commandent la censure du document d'urbanisme.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 2 août 2021 et le 2 novembre 2022, la commune de Cabrières d'Avignon, représentée par Me Imbert-Gargiulo, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. A... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens invoqués par les requérants ne sont pas fondés.
Par un courrier du 5 octobre 2022, les parties ont été informées de la période à laquelle il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et il leur a été précisé la date à partir de laquelle l'instruction pourrait être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2 du code de justice administrative.
La clôture d'instruction a été fixée au 3 novembre 2022 par une ordonnance du même jour.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Haïli, président-assesseur ;
- les conclusions de Mme Meunier-Garner, rapporteure publique,
- et les observations de Me Malbert substituant la Selarl CDMF, représentant les appelants.
Considérant ce qui suit :
1. Par délibération du 23 juillet 2019, le conseil municipal de Cabrières d'Avignon (Vaucluse) a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune lequel prévoit en particulier une orientation d'aménagement et de programmation du hameau du Coustellet où se situent les parcelles cadastrées section C nos 790 et 792 appartenant à M. et Mme A.... Le même plan institue sur ces parcelles un emplacement réservé n° 13 destiné à la création d'une aire de stationnement ainsi que des espaces verts et de jeux. M. et Mme A... relèvent appel du jugement n° 2000191 du 8 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande d'annulation de cette délibération.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Aux termes des dispositions de l'article L. 2121-13 du même code : " Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération ".
3. Il ressort des pièces du dossier que la convocation adressée le 5 juillet 2019 aux conseillers municipaux pour la séance prévue le 10 juillet suivant comportait dans son ordre du jour le point n° 6 relatif à l'approbation du plan local d'urbanisme avec en pièces jointes notamment le projet de délibération. Le quorum n'ayant pas été atteint à cette séance, une nouvelle convocation a été adressée le 12 juillet 2019 pour une séance prévue le 19 juillet suivant, laquelle indiquait que l'ordre du jour de cette séance serait identique à celle du 10 juillet 2019 et reproduisait l'intégralité de cet ordre du jour. Par ailleurs, il ressort également des pièces du dossier que les services de la commune ont adressé le 5 juillet 2019 à l'ensemble des membres du conseil municipal le lien de téléchargement relatif à l'approbation du plan local d'urbanisme et ont pu mettre à disposition des élus qui en ont fait la demande des exemplaires papiers. Si les appelants soutiennent que la commune n'établit pas avoir respecté le droit à l'information des élus notamment en ce qui concerne les modifications apportées au projet de plan après enquête publique, ils n'assortissent leurs allégations d'aucun élément circonstancié. Ainsi, les membres du conseil municipal ont été mis en mesure d'appréhender l'objet et la portée du plan local d'urbanisme de la commune qui leur était soumis et, par suite, d'exercer utilement leur mandat à l'occasion de la séance du 12 juillet 2019 au cours de laquelle la délibération relative au plan local d'urbanisme a été adoptée. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales doit être écarté.
4. Aux termes de l'article L. 151-41 du code de l'urbanisme : " Le règlement peut délimiter des terrains sur lesquels sont institués : / 1° Des emplacements réservés aux voies et ouvrages publics dont il précise la localisation et les caractéristiques ; / 2° Des emplacements réservés aux installations d'intérêt général à créer ou à modifier ; / 3° Des emplacements réservés aux espaces verts à créer ou à modifier ou aux espaces nécessaires aux continuités écologiques ; / (...). Ces servitudes ne peuvent avoir pour effet d'interdire les travaux ayant pour objet l'adaptation, le changement de destination, la réfection ou l'extension limitée des constructions existantes. (...) ".
5. L'appréciation à laquelle se livrent les auteurs d'un plan local d'urbanisme lorsqu'ils décident de créer des emplacements réservés ne peut être discutée devant le juge de l'excès de pouvoir que si elle repose sur des faits matériellement inexacts, si elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ou si elle procède d'un détournement de pouvoir. En outre, l'intention d'une commune de réaliser un aménagement sur une parcelle suffit à justifier légalement son classement en tant qu'emplacement réservé sans qu'il soit besoin pour la commune de faire état d'un projet précisément défini. Enfin, il n'appartient pas au juge d'apprécier l'opportunité du choix de la localisation d'un emplacement réservé par rapport à d'autres localisations possibles.
6. Il ressort des pièces du dossier, en particulier du rapport de présentation, que les auteurs du plan local d'urbanisme se sont notamment fixés comme objectif de réaliser différents équipements et aménagements pour que l'évolution démographique soit accompagnée par une amélioration du cadre de vie. Le plan local d'urbanisme approuvé par la délibération en litige institue dans la zone à urbaniser 1AU, notamment, un emplacement réservé n° 13 sur une emprise de 7 100 m² correspondant à l'intégralité des parcelles cadastrées section C nos 790 et 792 appartenant aux appelants sur le hameau de Coustellet. Il ressort du rapport de présentation que cet emplacement réservé a été défini afin de permettre la réalisation d'un espace de convivialité intégrant une aire de stationnement, une aire de jeux et des espaces verts et que cet ensemble permettra notamment de répondre aux besoins de stationnement à l'échelle du hameau de Coustellet, en cas de forte affluence. Les appelants contestent la pénurie de stationnement dans ledit hameau et soulignent le caractère éloigné de cet équipement du lieu où se tient le marché paysan du Coustellet alors qu'existent à proximité le parking du musée de la lavande et des places de stationnement au niveau du collège public. Toutefois, l'existence de ces places de stationnement dédiées au collège et au musée ne remet pas, par elle-même, l'utilité de prévoir la création dans ce hameau d'un parc public de stationnement comprenant également des équipements collectifs ouverts à tous. Par ailleurs, s'ils font valoir que la zone d'urbanisation future 2AUe à vocation économique qui va longer la route départementale 900 était davantage adaptée pour l'accueil d'un tel équipement, il n'appartient pas à la cour d'apprécier l'opportunité du choix de cette localisation. Enfin, il ressort des pièces du dossier que les aires de jeux se situent au sein du village à une distance de 2,5 kilomètres du hameau de Coustellet et que cet équipement est destiné à attirer des jeunes ménages pour favoriser une croissance démographique positive. Si les appelants critiquent la versatilité de la destination de l'emplacement réservé en litige durant la procédure d'élaboration du plan local d'urbanisme, consistant en la création d'abord d'une aire de stationnement à laquelle ont été ajoutés ensuite une aire de jeux et des espaces verts, cette circonstance, qui tend à contester l'opportunité du choix de la destination cet emplacement, ne peut être utilement invoquée pour contester la légalité de l'emplacement réservé approuvé par la délibération en litige. Par suite, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation commise par les auteurs du plan local d'urbanisme à avoir institué l'emplacement réservé n° 13 grevant les parcelles de M. et Mme A... doit être écarté.
7. Aux termes de l'article L. 151-2 du code de l'urbanisme : " Le plan local d'urbanisme comprend : / (...) 3° Des orientations d'aménagement et de programmation ; (...) ". Aux termes de l'article L. 151-6 du même code : " Les orientations d'aménagement et de programmation comprennent, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, des dispositions portant sur l'aménagement, l'habitat, les transports et les déplacements. En l'absence de schéma de cohérence territoriale, les orientations d'aménagement et de programmation d'un plan local d'urbanisme élaboré par un établissement public de coopération intercommunale comprennent les dispositions relatives à l'équipement commercial et artisanal mentionnées aux articles L. 141-16 et L. 141-17 ". L'article R. 151-2 du même code dispose que : " Le rapport de présentation comporte les justifications de : / 1° La cohérence des orientations d'aménagement et de programmation avec les orientations et objectifs du projet d'aménagement et de développement durables ; / 2° La nécessité des dispositions édictées par le règlement pour la mise en œuvre du projet d'aménagement et de développement durables et des différences qu'elles comportent, notamment selon qu'elles s'appliquent à des constructions existantes ou nouvelles ou selon la dimension des constructions ou selon les destinations et les sous-destinations de constructions dans une même zone ; / 3° La complémentarité de ces dispositions avec les orientations d'aménagement et de programmation mentionnées à l'article L. 151-6 ; (...) ".
8. Il ressort des pièces du dossier, en particulier du rapport de présentation que les auteurs du plan local d'urbanisme se sont fixés comme objectif d'attirer une population jeune sur son territoire et d'encourager une typologie d'habitat diversifiée pour permettre l'installation de jeunes ménages, que ce soit des primo-accédants ou des locataires. Les auteurs du plan ont ainsi défini une orientation d'aménagement et de programmation sur le hameau du Coustellet, classé en zone à urbaniser 1AU qui s'inscrit dans une logique d'aménagement de cet espace comme " véritable pôle de vie " et qui prévoit la réalisation de logements sous la forme groupée et/ou collective. Les principes d'aménagement définis dans cette orientation d'aménagement et de programme prévoient que : " - Le secteur devra se développer de la manière suivante : / Au Nord, le secteur d'implantation devra accueillir entre 50 et 60 logements dont 30% minimum d'habitat groupé et/ou collectif. La hauteur sur l'ensemble du secteur ne pourra être supérieure à R+1. / Au Sud, le secteur d'implantation devra accueillir entre 10 et 15 logements dont 40% minimum d'habitat groupé. La hauteur sur l'ensemble du secteur ne pourra être supérieure à R+1. / (...) A l'Ouest, un secteur d'équipement hôtelier a été prévu. Les constructions devront s'organiser autour d'espaces paysagers afin de favoriser l'intégration des bâtiments au site. Les constructions devront marquer un front bâti de qualité. (...) ". En outre, les auteurs du plan en litige ont décidé dans cette orientation d'aménagement et de programmation la création d'un secteur d'équipements communs tels que des aires de stationnement et de loisirs et des espaces verts sur la zone 1AU du hameau de Coustellet où un espace planté et paysager devra être aménagé à l'Ouest du secteur. En se bornant à soutenir que l'institution de l'emplacement réservé n°13 est incohérente avec l'orientation d'aménagement et de programmation qui indique que ce secteur est doté d'équipements publics, la partie appelante n'assortit pas le moyen soulevé des précisions suffisantes permettant à la cour d'en apprécier la portée et le bien-fondé. En tout état de cause, compte tenu de ce qui a été exposé au point 6 du présent arrêt et au vu de ce parti d'aménagement, alors qu'il n'appartient pas à la cour d'apprécier l'opportunité du choix de la localisation d'un emplacement réservé par rapport à d'autres localisations possibles, il ne ressort pas des pièces du dossier que la création de l'emplacement réservé n° 13 grevant les parcelles des appelants ne serait pas complémentaire avec lesdites orientations. Par suite, et dans ces conditions, le moyen tiré de l'incohérence de l'emplacement réservé n°13 avec le projet d'aménagement et de développement durables et celui tiré de l'absence de complémentarité avec l'orientation d'aménagement et de programmation doivent être écartés.
9. Enfin, les contraintes liées à l'existence d'un emplacement réservé sont prévues par la loi et répondent à un but d'intérêt général. Les propriétaires concernés ont toujours la possibilité d'exercer le droit de délaissement prévu par les dispositions de l'article L. 152-2 du code de l'urbanisme, en exigeant de la collectivité publique au bénéfice de laquelle le terrain a été réservé qu'elle procède à l'acquisition de ce bien. Par suite, le moyen tiré de l'atteinte disproportionnée à leur droit de propriété doit être écarté.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande.
Sur les frais liés au litige :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que soit mise à la charge de la commune intimée, qui n'a pas la qualité de partie perdante, la somme sollicitée par les appelants au titre des frais non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de M. et Mme A... le versement à la commune de Cabrières d'Avignon d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative
D E C I D E:
Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.
Article 2 : M. et Mme A... verseront à la commune de Cabrières d'Avignon une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et Mme B... A... et à la commune de Cabrières d'Avignon.
Copie en sera adressée à la préfète de Vaucluse.
Délibéré après l'audience du 20 avril 2023, à laquelle siégeaient :
M. Chabert, président,
M. Haïli, président assesseur,
M. Jazeron, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 mai 2023.
Le président-assesseur,
X. Haïli
Le président,
D. Chabert
La greffière,
C. Lanoux
La République mande et ordonne à la préfète de Vaucluse en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
No 21TL00615 2