Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 3 novembre 2022 par lequel le préfet de la Haute-Garonne l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans.
Par un jugement n° 2206495 du 14 novembre 2022, le tribunal administratif de Toulouse a annulé cet arrêté.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête enregistrée le 16 décembre 2022 sous le n° 22TL22575, le préfet de la Haute-Garonne demande à la cour d'annuler ce jugement et de rejeter la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Toulouse.
Il soutient que :
- la requête est recevable ;
- la méconnaissance du droit d'être entendu ne saurait entacher sa décision d'illégalité car M. A... constitue une menace grave à l'ordre public dès lors que celui-ci ne fait état d'aucun élément suffisamment pertinent pour être susceptible d'influer sur le contenu de la décision prise le 3 novembre 2022.
Par une ordonnance du 14 avril 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 4 mai 2023.
II. Par une requête enregistrée le 16 décembre 2022 sous le n° 22TL22576, le préfet de la Haute-Garonne demande à la cour de prononcer le sursis à exécution du jugement n°2206495 rendu le 14 novembre 2022 par le tribunal administratif de Toulouse.
Il soutient que le moyen d'annulation sur lequel est fondée sa requête au fond présente un caractère sérieux.
Par une ordonnance du 14 avril 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 4 mai 2023.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Barthez a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant roumain né le 9 juillet 1982, déclare être entré en France en 2011. Il a été condamné plusieurs fois, notamment en 2021, pour des faits de vol. A la levée d'écrou de M. A..., le 3 novembre 2022, le préfet de la Haute-Garonne a pris à son encontre un arrêté l'obligeant à quitter le territoire français sans délai et l'interdisant de retour sur le territoire pour une durée de trois ans. Par la requête n° 22TL22575, le préfet de la Haute-Garonne fait appel du jugement du 14 novembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a annulé cet arrêté au motif qu'il avait méconnu le droit d'être entendu de M. A.... Par la requête n° 22TL22576, il demande à la cour d'en prononcer le sursis à exécution.
2. Les requêtes n° 22TL22575 et n° 22TL22576 présentées par le préfet de la Haute-Garonne étant dirigées contre le même jugement, il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
Sur la requête n° 22TL22575 :
3. Pour prononcer l'annulation de l'arrêté du 3 novembre 2022 du préfet de la Haute-Garonne, pris à l'encontre de M. A..., portant obligation de quitter le territoire français sans un délai et l'interdisant de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse a estimé qu'en adoptant la décision attaquée, le préfet avait méconnu son droit d'être entendu.
4. Il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice que le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union. Il se définit comme celui de toute personne de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours d'une procédure administrative avant l'adoption de toute décision susceptible d'affecter de manière défavorable ses intérêts. Il ne saurait être interprété en ce sens que l'autorité compétente est tenue, dans tous les cas, d'entendre l'intéressé lorsque celui-ci a déjà eu la possibilité de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur la décision en cause. Une atteinte au droit d'être entendu n'est susceptible d'affecter la régularité de la procédure à l'issue de laquelle une décision est prise que si l'intéressé a été privé de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision, ce qu'il lui revient, le cas échéant, d'établir devant la juridiction.
5. Il ressort des pièces du dossier que M. A... n'a été entendu pour la dernière fois que le 2 avril 2019 et n'a pu présenter des informations au plus tard à l'autorité préfectorale que le 6 octobre 2021 par une fiche de renseignements. Depuis cette date, M. A... n'a été ni entendu, ni invité à faire des observations. Il n'a pu ainsi informer le préfet que sa dernière peine de prison a été effectuée sous le régime de la semi-liberté à partir du 30 mars 2022, qu'il a conclu un contrat à durée indéterminée le 28 janvier 2022 pour un emploi à temps plein et, surtout, que sa compagne a accouché de leur second enfant vingt jours avant la décision du préfet de la Haute-Garonne. Ces éléments pertinents relatifs à sa situation personnelle, dont l'exactitude matérielle est admise par le préfet, auraient pu influer, ainsi que l'a considéré le premier juge, sur la décision d'éloignement en litige, quand bien même il présentait une menace à l'ordre public. Le préfet de la Haute-Garonne n'est donc pas fondé à soutenir que le droit d'être entendu de M. A... n'aurait pas été méconnu.
6. Il résulte de ce qui précède que le préfet de la Haute-Garonne n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a annulé son arrêté du 3 novembre 2022 et a mis à la charge de l'Etat le versement au conseil de M. A... de la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Sur la requête n° 22TL22576 :
7. Le présent arrêt statuant sur la demande d'annulation du jugement n° 2206495 du 14 novembre 2022 du tribunal administratif de Toulouse, les conclusions de la requête n° 22TL22576 tendant au sursis à exécution de ce jugement sont devenues sans objet.
D E C I D E :
Article 1er : La requête n° 22TL22575 du préfet de la Haute-Garonne est rejetée.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 22TL22576 tendant au sursis à exécution du jugement.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. B... A....
Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.
Délibéré après l'audience du 8 juin 2023, à laquelle siégeaient :
M. Barthez, président,
M. Lafon, président assesseur,
Mme Restino, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023.
Le président-rapporteur,
A. Barthez
L'assesseur le plus ancien
dans l'ordre du tableau,
N. Lafon Le greffier,
F. Kinach
Le République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 22TL22575, 22TL22576 2