Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société coopérative agricole de vinification Les caves du pays de Quarante et du pays d'Héric a demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires de cotisation foncière des entreprises, de taxes spéciales d'équipement, de taxe pour la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2012 et 2013 dans les rôles de la commune de Quarante (Hérault) ainsi que des frais de gestion correspondants.
Par un jugement n° 1903910 du 28 décembre 2020, le tribunal administratif de Montpellier a prononcé un non-lieu à statuer à concurrence des dégrèvements accordés en cours d'instance et la décharge du surplus des cotisations supplémentaires de cotisation foncière des entreprises, de taxes spéciales d'équipement, de taxe pour la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations, ainsi que des frais de gestion correspondants.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 10 mars 2021 et le 4 octobre 2021 sous le n° 21MA00937 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille et ensuite sous le n° 21TL00937 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, et deux mémoires enregistrés le 25 mars 2022 et le 3 août 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance demande à la cour :
1°) d'annuler l'article 2 de ce jugement ;
2°) de remettre à la charge de la société Les caves du pays de Quarante et du pays d'Héric les cotisations supplémentaires de cotisation foncière des entreprises, de taxes spéciales d'équipement, de taxe pour la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations et des frais de gestion correspondants, dont la décharge a été prononcée par les premiers juges.
Il soutient que :
- le délai d'appel du ministre prévu par l'article R. 200-18 du livre des procédures fiscales n'est pas contraire à la Constitution ;
- la requête est recevable dès lors, d'une part, que le signataire a reçu délégation aux fins de signer de tels actes et, d'autre part, qu'elle permet d'identifier son auteur ;
- les impositions en litige n'ont pas été établies suivant une procédure irrégulière en méconnaissance de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales, dont les dispositions ne s'appliquent pas en matière d'impositions directes locales ;
- les impositions en litige sont établies sur les bases d'imposition des années de référence applicables ;
- la société ne peut bénéficier de l'exonération prévue par l'article 1451 du code général des impôts en faveur des sociétés coopératives agricoles qui se consacrent à la vinification dès lors que, en méconnaissance des règles fixées par ses statuts et par le code rural et de la pêche maritime qui régissent le fonctionnement de ces sociétés, elle a réalisé plus de 20 % de son chiffre d'affaires avec des tiers non coopérateurs ;
- c'est à bon droit que le service a évalué la valeur des biens de la société selon la méthode comptable prévue à l'article 1499 du code général des impôts.
Par trois mémoires, enregistrés le 8 juin 2021, le 18 mars 2022 et le 14 avril 2022, la société Les caves du pays de Quarante et du pays d'Héric, représentée par Me Chateauneuf, conclut au rejet de la requête et à ce que l'Etat lui verse une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête d'appel est irrecevable dès lors, d'une part, que le signataire ne justifie pas de l'existence d'une délégation du directeur général des finances publiques l'autorisant à agir pour le compte du ministre et, d'autre part, que la requête ne mentionne pas le ministre au nom duquel elle est déposée ;
- les dispositions de l'article R. 200-18 du livre des procédures fiscales, qui prévoient un délai d'appel allongé au bénéfice du ministre, méconnaissent la garantie des droits protégée par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ;
- les impositions en litige ont été établies suivant une procédure irrégulière dès lors qu'elle n'a pas été informée des rehaussements avant la mise en recouvrement des impositions, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales ;
- le bénéfice de l'exonération prévue par l'article 1451 du code général des impôts n'est pas subordonné au respect des règles qui régissent les sociétés coopératives agricoles ;
- la circonstance qu'elle aurait réalisé plus de 20 % de son chiffre d'affaires avec des tiers non coopérateurs ne fait pas obstacle au bénéfice de l'exonération ;
- en tout état de cause, le chiffre d'affaires réalisé avec des tiers non coopérateurs n'excédait pas 20 % ;
- le service s'est fondé, pour établir les rappels, sur les résultats des exercices clos en 2012, 2013 et 2014 ;
- selon la doctrine administrative publiée le 1er juillet 2015 au Bulletin officiel des finances publiques - Impôts sous la référence BOI-IF-CFE-10-30-10-30 n° 350, la situation des coopératives doit être appréciée au 1er janvier de chaque année ;
- c'est à tort que le service a utilisé la méthode comptable pour évaluer la valeur de ses biens, dès lors qu'elle n'était pas soumise à l'obligation de déposer une déclaration de résultats telle que définie à l'article 53 A du code général des impôts ;
- selon la doctrine administrative publiée le 10 décembre 2012 au Bulletin officiel des finances publiques - Impôts sous la référence BOI-IF-TFB-20-10-50-20 n° 80, la condition relative au régime fiscal de l'entreprise propriétaire des bâtiments s'apprécie à la date de réalisation des constructions.
Une ordonnance du 13 septembre 2022 a prononcé la clôture de l'instruction à la même date en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code rural et de la pêche maritime ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Restino,
- et les conclusions de M. Clen, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La société coopérative agricole de vinification Les caves du pays de Quarante et du pays d'Héric a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos en 2012 et 2013, à l'issue de laquelle des cotisations supplémentaires de cotisation foncière des entreprises, de taxes spéciales d'équipement et de taxe pour la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations ont été mises à sa charge, ainsi que des frais de gestion. Par un jugement du 28 décembre 2020, le tribunal administratif de Montpellier a, en son article 1er, prononcé un non-lieu à statuer à concurrence des dégrèvements accordés en cours d'instance et, en son article 2, prononcé la décharge du surplus des cotisations supplémentaires de cotisation foncière des entreprises, de taxes spéciales d'équipement et de taxe pour la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations ainsi que des frais de gestion correspondants au titre des années 2012 et 2013. Le ministre de l'économie, des finances et de la relance relève appel de l'article 2 de ce jugement.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. Aux termes de l'article 1451 du code général des impôts : " Sous réserve des dispositions du II, sont exonérés de la cotisation foncière des entreprises : / 1° Les sociétés coopératives agricoles et leurs unions ainsi que les sociétés d'intérêt collectif agricole qui emploient au plus trois salariés ou qui se consacrent : / (...) à la vinification (...) ".
3. Il résulte de l'instruction, sans que cela soit d'ailleurs contesté, que la société Les caves du pays de Quarante et du pays d'Héric s'est consacrée à des opérations de vinification. Elle remplit donc la condition mentionnée par ces dispositions pour bénéficier de l'exonération de la cotisation foncière des entreprises. La circonstance, à la supposer même établie, que la fraction de son chiffre d'affaires réalisée avec des tiers non coopérateurs aurait excédé la limite de 20 % fixée par ses statuts comme par les dispositions législatives du code rural et de la pêche maritime applicables à ce type d'organisme, n'est pas de nature à priver la société du bénéfice de l'exonération de cotisation foncière des entreprises prévue par le 1° de l'article 1451 du code général des impôts.
4. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par la société Les caves du pays de Quarante et du pays d'Héric à la requête d'appel, le ministre de l'économie, des finances et de la relance n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 2 du jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a déchargé la société Les caves du pays de Quarante et du pays d'Héric du surplus des cotisations supplémentaires de cotisation foncière des entreprises, de taxes spéciales d'équipement, de taxe pour la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations et des frais de gestion correspondants, laissé sa charge au titre des années 2012 et 2013.
Sur les frais liés au litige :
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la société Les caves du pays de Quarante et du pays d'Héric et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera une somme de 1 500 euros à la société Les caves du pays de Quarante et du pays d'Héric au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et à la société coopérative agricole de vinification du pays de Quarante et du pays d'Héric.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Pyrénées.
Délibéré après l'audience du 14 septembre 2023, où siégeaient :
- M. Barthez, président,
- M. Lafon, président assesseur,
- Mme Restino, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 septembre 2023.
La rapporteure,
V. RestinoLe président,
A. Barthez
Le greffier,
F. Kinach
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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