Vu les procédures suivantes :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 2 décembre 2021 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de six mois.
Par un jugement n° 2107419 rendu le 15 décembre 2022, le tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté du 2 décembre 2021, a enjoint au préfet de la Haute-Garonne de délivrer un titre de séjour à M. A... dans le délai d'un mois et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Procédures devant la cour :
I - Par une requête enregistrée le 9 janvier 2023 sous le n° 23TL00056, le préfet de la Haute-Garonne demande à la cour de surseoir à l'exécution du jugement du 15 décembre 2022 sur le fondement de l'article R. 811-15 du code de justice administrative.
Il soutient que c'est à tort que le tribunal administratif de Toulouse a considéré que le refus de séjour méconnaissait les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que ce moyen, sérieux, est de nature à justifier, outre l'annulation du jugement, le rejet des conclusions en annulation de M. A....
Par un mémoire en défense enregistré le 12 juillet 2023, M. B... A..., représenté par Me Soulas, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- à titre principal, la requête est irrecevable dès lors qu'il n'est pas justifié de ce que son signataire disposait d'une délégation pour la déposer ;
- à titre subsidiaire, le moyen invoqué n'est pas fondé.
La clôture de l'instruction est intervenue trois jours francs avant la date de l'audience en application de l'article R. 613-2 du code de justice administrative.
Par une décision du 5 juillet 2023, M. A... a obtenu le bénéfice du maintien de plein droit de l'aide juridictionnelle totale.
II - Par une requête enregistrée le 9 janvier 2023 sous le n° 23TL00079, le préfet de la Haute-Garonne demande à la cour d'annuler le jugement du 15 décembre 2022.
Il soutient que c'est à tort que le tribunal administratif de Toulouse a considéré que le refus de séjour méconnaissait les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que M. A... peut bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé en cas de retour dans son pays d'origine.
Par un mémoire en défense enregistré le 12 juillet 2023, M. B... A..., représenté par Me Soulas, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- à titre principal, la requête est irrecevable dès lors qu'il n'est pas justifié de ce que son signataire disposait d'une délégation pour la déposer ;
- à titre subsidiaire, le moyen invoqué n'est pas fondé.
La clôture de l'instruction est intervenue trois jours francs avant la date de l'audience en application de l'article R. 613-2 du code de justice administrative.
Par une décision du 5 juillet 2023, M. A... a obtenu le bénéfice du maintien de plein droit de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique, le rapport de M. Jazeron, premier conseiller.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant albanais, né le 2 juin 1995 à Fier (Albanie), déclare être entré sur le territoire français le 14 janvier 2020. Il a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile le 10 février 2020, mais cette demande a été successivement rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 31 mars 2020 et par la Cour nationale du droit d'asile le 16 novembre suivant. Par un arrêté du 16 juillet 2020, le préfet de la Haute-Garonne a obligé M. A... à quitter le territoire français dans un délai de trente jours. L'intéressé a sollicité le 8 avril 2021 un titre de séjour pour motif médical. Par un arrêté du 2 décembre 2021, le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un tel titre, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de six mois. Par un jugement du 15 décembre 2022, le tribunal administratif de Toulouse a annulé cet arrêté, a enjoint au préfet de délivrer un titre de séjour à M. A... dans le délai d'un mois et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Par la requête n° 23TL00079, le préfet de la Haute-Garonne relève appel de ce jugement et, par sa requête n° 23TL00056, il demande qu'il soit sursis à son exécution. Ces requêtes étant dirigées contre le même jugement, il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
Sur les conclusions à fin d'annulation présentées par le préfet de la Haute-Garonne dans la requête n° 23TL00079 :
En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée par l'intimé :
2. Par un arrêté du 20 septembre 2021, publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de la Haute-Garonne le lendemain, le préfet de ce département a donné délégation à Mme F... D..., adjointe à la cheffe du bureau de l'éloignement et du contentieux au sein de cette préfecture, pour signer notamment les requêtes concernant les décisions prises en matière de droit des étrangers devant les juridictions administratives. En conséquence, la fin de non-recevoir opposée par l'intimé tirée de l'incompétence de la signataire de la requête d'appel présentée au nom du préfet de la Haute-Garonne ne peut qu'être écartée.
En ce qui concerne le motif d'annulation retenu par le tribunal :
3. L'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile mentionne que : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ".
4. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour à l'étranger. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'intéressé et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi.
5. Il ressort des pièces du dossier que, par un avis du 28 septembre 2021, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a considéré que, si l'état de santé de M. A... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'intéressé pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié en Albanie eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé de ce pays. Il ressort par ailleurs des certificats médicaux versés au dossier de première instance par M. A..., rédigés par un médecin psychiatre les 27 avril et le 8 juillet 2021, que l'intéressé présente une souffrance psychique de nature anxio-dépressive au titre de laquelle il bénéficie depuis le 20 janvier 2021 d'un suivi psychiatrique mensuel et d'un traitement antipsychotique composé du médicament nommé " Tercian ". Il ressort également des pièces médicales produites par l'intimé qu'il a été hospitalisé pendant une année et demie en 2018 dans son pays d'origine en raison de cette pathologie apparue après une rupture conjugale.
6. Il est constant que ni le médicament Tercian, ni sa substance active, la cyamémazine, n'étaient accessibles en Albanie à la date de l'arrêté en litige. Il ressort toutefois des fiches " MedCoi " établies par les autorités néerlandaises, produites par l'administration en première instance, que quatorze autres médicaments antipsychotiques sont disponibles en Albanie, ce qui n'est pas contesté par l'intimé. D'une part, il n'est pas allégué et il ne ressort pas des certificats médicaux versés aux débats que l'un au moins de ces médicaments ne pourrait pas constituer un traitement adapté à la pathologie de M. A... en remplacement du Tercian. D'autre part, si l'intéressé fait valoir qu'il ne pourrait pas accéder effectivement à ces molécules parce qu'elles ne seraient proposées que dans les pharmacies privées et non dans les hôpitaux ou pharmacies publiques, si bien qu'elles ne seraient pas prises en charge par les assurances sociales albanaises, il ressort pourtant des fiches " MedCoi " que quatre d'entre elles sont disponibles dans les hôpitaux de Tirana, ce que ne contredit pas la note du Département de l'intérieur britannique relative à la santé mentale en Albanie datée de mai 2020 produite à l'appui de la demande de première instance. En outre, si M. A... soutient qu'il n'a pas pu bénéficier du suivi médical nécessaire à la suite de son hospitalisation en 2018 et qu'il se retrouverait isolé sans soutien ni ressources en cas de retour dans son pays d'origine, il n'est cependant pas allégué et il ne ressort pas des certificats médicaux produits que son état de santé le mettrait dans l'incapacité de se procurer des revenus. Enfin, si l'intimé invoque la nécessité de la proximité des membres de sa famille pour la réussite de sa prise en charge médicale, il ressort des pièces du dossier qu'il a vécu séparé de ses parents et de ses frères et sœurs depuis son enfance, qu'il ne les a rejoints en France qu'à l'âge de vingt-quatre ans et qu'il n'y est d'ailleurs pas hébergé avec eux.
7. Il résulte de tout ce qui vient d'être exposé que le préfet de la Haute-Garonne a pu légalement considérer que M. A... pourrait bénéficier effectivement d'un traitement adapté à son état de santé en Albanie. Il s'ensuit que c'est à tort que, pour annuler l'arrêté en litige, les premiers juges ont accueilli le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
8. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... devant le tribunal administratif au soutien de sa demande d'annulation de l'arrêté préfectoral du 2 décembre 2021.
En ce qui concerne les autres moyens soulevés par M. A... :
S'agissant de l'ensemble des décisions litigieuses :
9. En premier lieu, l'arrêté litigieux a été signé, pour le préfet de la Haute-Garonne, par Mme E... C..., directrice des migrations et de l'intégration, laquelle avait régulièrement reçu délégation en vertu de l'arrêté du 20 septembre 2021 mentionné au point 2 ci-dessus. Le moyen tiré de l'incompétence de la signataire de l'acte doit donc être écarté.
10. En deuxième lieu, l'arrêté contesté énonce les circonstances de droit et de fait sur lesquelles l'autorité préfectorale s'est fondée pour prendre les décisions en litige et mentionne notamment les principaux éléments de la situation personnelle de M. A.... Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation des décisions attaquées doit dès lors être écarté.
S'agissant de la décision portant refus de titre de séjour :
11. En premier lieu, il ne ressort ni de la motivation de l'arrêté litigieux ni des autres pièces du dossier que le préfet de la Haute-Garonne ne se serait pas livré à un examen sérieux de la situation particulière de M. A... avant de rejeter sa demande de titre de séjour.
12. En deuxième lieu, l'autorité préfectorale a produit devant le tribunal administratif de Toulouse l'avis rendu par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le 28 septembre 2021 sur la demande de titre de séjour de M. A.... L'intéressé n'a néanmoins apporté aucune précision à l'appui de son moyen selon lequel ledit avis aurait été rendu dans des conditions irrégulières, lequel ne peut en conséquence qu'être écarté.
13. En troisième lieu, selon les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
14. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté en litige, M. A... n'était présent que depuis moins de deux ans en France où il n'avait été autorisé à séjourner que pour l'examen de sa demande d'asile et où il s'était maintenu irrégulièrement malgré la précédente mesure d'éloignement prise à son encontre. S'il est vrai que ses parents et ses frères et sœurs résident sur le territoire national, pour certains en situation régulière, il n'apporte aucun élément permettant de supposer qu'il entretient avec eux des liens stables et intenses, alors qu'il a vécu séparé d'eux depuis son enfance ainsi qu'il a été précisé au point 5 du présent arrêt. L'intimé n'établit ni n'allègue avoir d'autres attaches en France, alors qu'il n'en est pas dépourvu dans son pays d'origine où réside notamment son enfant mineur. Il ne justifie par ailleurs d'aucune intégration sociale ou professionnelle sur le territoire national. Dans ces conditions, la décision préfectorale contestée ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale et ne méconnaît donc pas les stipulations citées au point précédent. Pour les mêmes raisons, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait commis une erreur manifeste au regard des conséquences de cette décision sur sa situation personnelle.
S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
15. En premier lieu, il ne ressort ni de la motivation de l'arrêté litigieux ni des autres pièces du dossier que le préfet de la Haute-Garonne ne se serait pas livré à un examen sérieux de la situation particulière de M. A... avant de l'obliger à quitter le territoire français.
16. En deuxième lieu, le moyen tiré de l'irrégularité de l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ne peut qu'être écarté pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 11 du présent arrêt s'agissant du refus de séjour.
17. En troisième lieu, il résulte de tout ce qui précède que M. A... ne démontre pas l'illégalité de la décision portant refus de séjour. Par voie de conséquence, il n'est pas fondé à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français serait privée de sa base légale.
18. En quatrième lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. ". Le moyen tiré de la violation de ces dispositions ne peut qu'être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 4 à 6 ci-dessus.
19. En quatrième lieu, les moyens tirés de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés pour les raisons mentionnées au point 14.
S'agissant de la décision portant fixation du pays de renvoi :
20. En premier lieu, il résulte de tout ce qui précède que M. A... ne démontre pas l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français. Par voie de conséquence, il n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de renvoi serait privée de base légale.
21. En second lieu, selon les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ".
22. En se bornant à invoquer les risques liés à une absence de prise de charge médicale appropriée en cas de retour dans son pays d'origine, alors qu'il résulte de ce qui a été exposé précédemment qu'il pourrait y bénéficier de soins adaptés, M. A... n'établit pas qu'en fixant l'Albanie comme pays de destination de la mesure d'éloignement, l'autorité préfectorale aurait méconnu les stipulations précitées ou commis une erreur manifeste d'appréciation.
S'agissant de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :
23. En premier lieu, il résulte de tout ce qui précède que M. A... ne démontre pas l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français. Par voie de conséquence, il n'est pas fondé à soutenir que la mesure d'interdiction de retour serait privée de base légale
24. En second lieu, aux termes de l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'étranger n'est pas dans une situation mentionnée aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative peut assortir la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. (...). ". Aux termes de l'article L. 612-10 dudit code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. / Il en est de même pour l'édiction et la durée de l'interdiction de retour mentionnée à l'article L. 612-8. ".
25. Il a été rappelé précédemment que M. A... n'était présent en France que depuis moins de deux ans à la date de l'arrêté en litige et qu'il n'y justifiait pas de liens particulièrement stables ou intenses, y compris avec les membres de sa famille qui y résident. L'intéressé a fait par ailleurs l'objet d'une précédente mesure d'éloignement le 16 juillet 2020. Par suite et alors même qu'il ne représente pas une menace pour l'ordre public, le préfet de la Haute-Garonne a pu légalement édicter à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une période limitée à six mois. Pour les mêmes raisons, M. A... n'est pas fondé à soutenir qu'en prenant cette mesure, le préfet aurait porté une atteinte excessive à son droit au respect de la vie privée et familiale et méconnu ainsi les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales rappelées au point 13.
S'agissant du signalement dans le système d'information Schengen :
26. l'article L. 613-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile mentionne que : " L'étranger auquel est notifiée une interdiction de retour sur le territoire français est informé qu'il fait l'objet d'un signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen, conformément à l'article 24 du règlement (UE) n° 2018/1861 du Parlement européen et du Conseil du 28 novembre 2018 sur l'établissement, le fonctionnement et l'utilisation du système d'information Schengen (SIS) dans le domaine des vérifications aux frontières, modifiant la convention d'application de l'accord de Schengen (...). ".
27. Lorsqu'elle prend une décision d'interdiction de retour sur le territoire français à l'égard d'un étranger, l'administration se borne à informer l'intéressé de son signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen. Cette information ne constitue pas une décision distincte de la mesure d'interdiction de retour et n'est en conséquence pas susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir. Il s'ensuit que les conclusions présentées sur ce point sont irrecevables et qu'elles ne peuvent donc qu'être rejetées.
28. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Haute-Garonne est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a annulé son arrêté du 2 décembre 2021, lui a enjoint de délivrer un titre de séjour à M. A... dans le délai d'un mois et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Sur les conclusions à fin de sursis à exécution présentées par le préfet dans la requête n° 23TL00056 :
29. Le présent arrêt statuant sur les conclusions tendant à l'annulation du jugement du 15 décembre 2022, les conclusions du préfet tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement se trouvent dépourvues d'objet. Par suite, il n'y a plus lieu d'y statuer.
Sur les frais liés aux litiges :
30. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du second alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 s'opposent à ce que soient mises à la charge de l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, les sommes réclamées par l'intimé au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse en date du 15 décembre 2022 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Toulouse est rejetée.
Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de sursis à exécution présentée par le préfet de la Haute-Garonne dans la requête n° 23TL00056.
Article 4 : Les conclusions présentées par M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer, à M. B... A... et à Me Soulas.
Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.
Délibéré après l'audience du 21 septembre 2023, à laquelle siégeaient :
M. Chabert, président,
M. Haïli, président assesseur,
M. Jazeron, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 octobre 2023.
Le rapporteur,
F. JazeronLe président,
D. Chabert
La greffière,
N. Baali
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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Nos 23TL00056, 23TL00079