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09/11/2023 | FRANCE | N°22TL20297

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 1ère chambre, 09 novembre 2023, 22TL20297


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 20 mai 2020 par lequel la préfète de l'Ariège a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2002675 du 26 octobre 2021, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 25 janvier 2022, sous le n° 22BX00297

au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux et ensuite sous le n° 22TL20297 au greffe d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 20 mai 2020 par lequel la préfète de l'Ariège a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2002675 du 26 octobre 2021, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 25 janvier 2022, sous le n° 22BX00297 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux et ensuite sous le n° 22TL20297 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, et deux mémoires complémentaires enregistrés le 30 septembre 2022 et le 17 octobre 2023, M. B..., représenté par Me Kosseva-Venzal, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 20 mai 2020 ;

3°) à titre subsidiaire, de prononcer un non-lieu à statuer sur ses conclusions en annulation ;

4°) en tout état de cause, d'enjoindre, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à la préfète de l'Ariège de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", " travailleur temporaire " ou " salarié " ou de réexaminer sa situation en lui délivrant une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans un délai de quinze jours suivant la notification du présent arrêt ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le tribunal n'a pas examiné le moyen tiré de ce que la préfète de l'Ariège n'avait pas interrogé les autorités guinéennes sur l'authenticité des actes d'état civil produits ;

- les actes d'état civil produits, qui mentionnent qu'il est né le 8 mai 2001, sont valides et authentiques et permettent de justifier qu'il était mineur lors de son arrivée en France et de son placement éducatif ;

- la décision de refus de titre de séjour méconnaît les dispositions du 2 bis de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision fixant le pays de renvoi est privée de base légale ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 juillet 2022, le préfet de l'Ariège conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Par une lettre du 19 octobre 2023, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que la cour est, du fait de la délivrance d'un titre de séjour à M. B... le 7 juillet 2023, susceptible d'opposer d'office un non-lieu à statuer sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté attaqué en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixation du pays de renvoi.

Par une lettre du 20 octobre 2023, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que la cour est, du fait de la délivrance d'un titre de séjour à M. B... le 7 juillet 2023, susceptible d'opposer d'office un non-lieu à statuer sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte.

Par un mémoire, enregistré le 23 octobre 2023, le préfet de l'Ariège a présenté des observations en réponse à la mesure d'information du 20 octobre 2023.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 16 décembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 ;

- le décret n° 2015-1740 du 24 décembre 2015 ;

- le décret n° 2020-1370 du 10 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Lafon,

- et les observations de Me Kosseva-Venzal pour M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., de nationalité guinéenne, fait appel du jugement du 26 octobre 2021 du tribunal administratif de Toulouse qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 mai 2020 par lequel la préfète de l'Ariège a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Sur les conclusions dirigées contre la décision portant refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : " A titre exceptionnel et sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 portant la mention " salarié " ou la mention " travailleur temporaire " peut être délivrée, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française (...) ". Lorsqu'il examine une demande d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de " salarié " ou " travailleur temporaire ", présentée sur le fondement de ces dispositions, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, qu'il a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et dix-huit ans, qu'il justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle et que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public. Il lui revient ensuite, dans le cadre du large pouvoir dont il dispose, de porter une appréciation globale sur la situation de l'intéressé, au regard notamment du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Il appartient au juge administratif, saisi d'un moyen en ce sens, de vérifier que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation ainsi portée.

3. En deuxième lieu, aux termes du premier alinéa de l'article R. 311-2-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable : " L'étranger qui demande la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour présente les documents justifiant de son état civil et de sa nationalité (...) ". Aux termes de l'article L. 111-6 du même code, alors en vigueur : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil (...) ". L'article 47 du code civil, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté attaqué, dispose que : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ". Aux termes enfin de l'article 1er du décret n° 2015-1740 du 24 décembre 2015 relatif aux modalités de vérification d'un acte de l'état civil étranger : " Lorsque, en cas de doute sur l'authenticité ou l'exactitude d'un acte de l'état civil étranger, l'autorité administrative saisie d'une demande d'établissement ou de délivrance d'un acte ou de titre procède ou fait procéder, en application de l'article 47 du code civil, aux vérifications utiles auprès de l'autorité étrangère compétente, le silence gardé pendant huit mois vaut décision de rejet (...) ".

4. Les dispositions de l'article 47 du code civil posent une présomption de validité des actes d'état civil établis par une autorité étrangère. Il résulte également de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties. Pour juger qu'un acte d'état civil produit devant lui est dépourvu de force probante, qu'il soit irrégulier, falsifié ou inexact, le juge doit en conséquence se fonder sur tous les éléments versés au dossier dans le cadre de l'instruction du litige qui lui est soumis. Ce faisant, il lui appartient d'apprécier les conséquences à tirer de la production par l'étranger d'une carte consulaire ou d'un passeport dont l'authenticité est établie ou n'est pas contestée, sans qu'une force probante particulière puisse être attribuée ou refusée par principe à de tels documents.

5. En troisième lieu, aux termes du II de l'article 16 de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté attaqué : " Sauf engagement international contraire, tout acte public établi par une autorité étrangère et destiné à être produit en France doit être légalisé pour y produire effet. / La légalisation est la formalité par laquelle est attestée la véracité de la signature, la qualité en laquelle le signataire de l'acte a agi et, le cas échéant, l'identité du sceau ou timbre dont cet acte est revêtu. / Un décret en Conseil d'État précise les actes publics concernés par le présent II et fixe les modalités de la légalisation ". À cet égard, le décret n° 2020-1370 du 10 novembre 2020 relatif à la légalisation des actes publics établis par une autorité étrangère, applicable aux légalisations intervenues à compter du 1er janvier 2021, prévoit à son article 3 : " I. l'ambassadeur ou le chef de poste consulaire français peut légaliser : 1° Les actes publics émis par les autorités de son État de résidence, légalisés le cas échéant par l'autorité compétente de cet État (...) ". Toutefois, en vertu de l'article 4 du même décret : " Par dérogation au 1° du I de l'article 3, peuvent être produits en France (...) : 1° Les actes publics émis par les autorités de l'État de résidence dans des conditions qui ne permettent manifestement pas à l'ambassadeur ou au chef de poste consulaire français d'en assurer la légalisation, sous réserve que ces actes aient été légalisés par l'ambassadeur ou le chef de poste consulaire de cet État en résidence en France. Le ministre des affaires étrangères rend publique la liste des États concernés (...) ". Il ressort de l'annexe 8 du tableau récapitulatif de l'état actuel du droit conventionnel en matière de légalisation que cette liste comprend notamment la République de Guinée.

6. Il ressort des termes de l'arrêté contesté que la demande de titre de séjour que M. B... a présentée sur le fondement de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a été rejetée au motif que l'intéressé, qui a déclaré être né le 8 mai 2001 et être entré en France le 26 avril 2017 et qui a été pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance du département de l'Ariège à compter du 17 mai 2017, ne satisfaisait pas aux conditions d'âge prévues par ces dispositions.

7. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a présenté, à l'appui de sa demande de titre de séjour, un extrait d'acte de naissance n° 2852 établi le 10 avril 2017, un jugement supplétif n° 3135 tenant lieu d'acte de naissance, rendu le 27 mars 2017 par le tribunal de première instance de Conakry III - Mafanco, un extrait n° 4441 du registre d'état civil du 20 juin 2018 de la commune de Matoto, portant transcription de ce jugement, une carte d'identité consulaire et un extrait d'acte de naissance délivrés respectivement les 4 et 30 juillet 2019. Dans le cadre de la procédure devant le tribunal administratif et la cour, M. B... a également produit une seconde carte d'identité consulaire et un passeport délivrés par les autorités guinéennes, respectivement, le 26 mars 2021 et le 27 juillet 2022. Ces différents documents mentionnent qu'il est né le 8 mai 2001.

8. Pour contester la valeur probante des extraits d'acte de naissance, du jugement supplétif, de l'extrait du registre de l'état civil et de la carte d'identité consulaire, la préfète de l'Ariège s'est fondée sur trois rapports d'examen technique, établis le 5 mai 2017, le 10 juillet 2018 et le 29 août 2019, à l'issue desquels la cellule fraude documentaire de la direction interdépartementale de la police aux frontières de Toulouse a émis des avis défavorables quant à l'authenticité de ces documents. Ils indiquent que ces documents, hormis ceux qui ont été délivrés par les autorités consulaires guinéennes, ne comportent pas les sécurités de base, comme l'utilisation de papier fiduciaire ou de l'offset, de sorte qu'une simple imprimante suffit à les éditer. Ils relèvent également que l'ensemble de ces documents n'ont pas été légalisés par les autorités françaises en poste en Guinée. La section consulaire de l'ambassade de France en Guinée a par ailleurs relevé, dans un courriel adressé aux services de la préfecture de l'Ariège le 1er août 2018, que le jugement supplétif avait été rendu le jour même de l'introduction de la requête, excluant toute enquête sur les déclarations du requérant, que ce dernier n'était pas habilité à engager une telle procédure, en vertu de l'article 183 du code civil guinéen, que le jugement supplétif et l'extrait du registre de l'état civil ne comportent pas les mentions relatives à l'âge, la profession et au domicile des parents de l'intéressé, en contrariété avec les exigences de l'article 175 du code civil guinéen, et sont en contradiction avec les dispositions de l'article 180 du même code, en ce qu'ils précisent que la naissance devra être transcrite en marge du registre d'état civil de l'année 2001.

9. Toutefois, il ressort également des pièces du dossier que le jugement supplétif tenant lieu d'acte de naissance ainsi que l'extrait du registre de l'état civil produits par M. B..., s'ils ont d'abord été légalisés par un juriste au ministère des affaires étrangères et des guinéens de l'étranger en 2018, ont ensuite fait l'objet d'une légalisation, le 13 décembre 2021, par les services du consulat de Guinée à Paris, lequel, conformément aux dispositions citées au point 5 du présent arrêt, était compétent pour le faire. Bien que postérieure à l'arrêté attaqué, cette dernière légalisation, dont l'authenticité n'est pas contestée par la préfète de l'Ariège, doit être prise en compte pour apprécier la légalité de l'arrêté en ce qu'elle révèle des faits qui lui sont antérieurs. Dans ce contexte, et bien qu'une légalisation se borne à attester de la régularité formelle d'un acte, cette nouvelle légalisation tend à redonner une valeur probante aux documents d'état civil dont M. B... se prévaut. Les autres éléments relevés par la préfète de l'Ariège apparaissent alors insuffisants pour écarter comme étant dépourvus de toute force probante quant à son identité et son âge les documents produits. Ainsi, tout d'abord, en l'absence de tout élément sur les sécurités que les documents produits doivent comporter selon la législation guinéenne, la circonstance que ces derniers sont démunis de telles sécurités ne permet pas de démontrer qu'ils ne sont pas authentiques. Il en est de même de la circonstance, à la supposée établie, que le jugement et la requête soient datés du même jour, alors, au demeurant, qu'il ressort de celui-ci qu'il a été rendu après versement de documents au dossier et après enquête réalisée à la barre, notamment l'audition de deux témoins. Ensuite, le fait que les documents produits ne comportent pas l'ensemble des mentions prévues par les articles 174, 175 et 176 du code civil guinéen ou que le jugement supplétif aurait été rendu en méconnaissance de l'article 183 de ce code, à supposer que ces articles leurs soient applicables, ne suffit pas à leur ôter tout caractère probant. En outre, la circonstance que ce dernier mentionne une retranscription dans le registre d'état civil de l'année de naissance, ce qui n'est pas conforme aux dispositions de l'article 180 du code civil guinéen qui prévoit que les registres sont clos et arrêtés à la fin de chaque année, ne suffit pas à établir le caractère frauduleux de ce jugement. Tel est également le cas de la présence d'une faute d'orthographe sur le cachet humide figurant au verso de ce document. Enfin, l'authenticité du passeport biométrique, délivré le 27 juillet 2022, n'est pas contestée par la préfète de l'Ariège à laquelle il a été transmis dans le cadre de la présente instance. Dans ces conditions, alors d'ailleurs que le titre de séjour délivré à M. B... le 7 juillet 2023 fait référence à la date de naissance qu'il revendique, la préfète de l'Ariège ne peut être regardée comme renversant la présomption de validité de l'article 47 du code civil et c'est donc en méconnaissance des dispositions de cet article, ainsi que de celles de l'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui renvoie à l'article 47 du code civil, qu'elle a écarté les documents d'état civil produits par M. B....

10. Il résulte de ce qui précède que M. B... doit être regardé comme ayant justifié de son état civil et de son âge, ainsi que de sa prise en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et dix-huit ans. Par conséquent, la préfète de l'Ariège ne pouvait pas rejeter sa demande de titre de séjour, présentée sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, au motif qu'il ne satisfaisait pas à la condition d'âge prévue par celles-ci. Elle ne pouvait pas davantage rejeter sa demande en se fondant sur les dispositions précitées de l'article R. 311-2-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, au motif que son identité n'était pas établie.

11. Par ailleurs, d'une part, il ressort des pièces du dossier que M. B... a préparé une formation en apprentissage, incluant un contrat de formation d'une durée de vingt-quatre mois, du 12 novembre 2018 au 31 août 2020, et aboutissant à l'obtention du certificat d'aptitude professionnelle de maçon au titre de la session du mois de juin 2020. Aucun élément ne permet également de considérer que sa présence en France constituerait une menace pour l'ordre public. D'autre part, le caractère réel et sérieux du suivi de la formation de M. B... n'apparaît pas sérieusement contestable, notamment au vu des appréciations de ses professeurs et de la promesse d'embauche dont il dispose dans sa spécialité. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que la structure d'accueil de l'intéressé aurait émis un avis négatif sur son insertion dans la société française. Dans ces conditions, alors même que M. B... admet que sa mère réside dans son pays d'origine, tout en indiquant ne plus entretenir de relation avec elle, l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation globale portée sur sa situation de l'intéressé, au regard des dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, la décision, contenue dans l'arrêté du 20 mai 2020, refusant à M. B... le titre de séjour qu'il avait sollicité doit être annulée.

12. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, y compris le moyen relatif à la régularité du jugement, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande dirigée contre la décision portant refus de titre de séjour.

Sur le surplus des conclusions en annulation et sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

13. Il ressort des pièces du dossier que, le 7 juillet 2023, postérieurement à l'introduction de la requête, la préfète de l'Ariège a délivré à M. B... une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", valable jusqu'au 6 juillet 2024. Dans ces conditions, les conclusions de la requête aux fins d'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi et aux fins d'injonction sous astreinte sont devenues sans objet.

Sur les frais liés au litige :

14. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 16 décembre 2021. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement au conseil du requérant, sous réserve qu'il renonce à la contribution de l'Etat à l'aide juridictionnelle, de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. B... tendant à l'annulation de l'arrêté attaqué en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixation du pays de renvoi et sur celles présentées à fin d'injonction et d'astreinte.

Article 2 : Le jugement n° 2002675 du 26 octobre 2021 du tribunal administratif de Toulouse est annulé en ce qu'il a rejeté les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 mai 2020 en tant qu'il porte refus de titre de séjour.

Article 3 : L'arrêté de la préfète de l'Ariège du 20 mai 2020 est annulé en tant qu'il porte refus de délivrance de titre de séjour.

Article 4 : L'Etat versera au conseil de M. B..., sous réserve qu'il renonce à percevoir la contribution de l'Etat à l'aide juridictionnelle, la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Me Ventzislava Kosseva-Venzal et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de l'Ariège.

Délibéré après l'audience du 26 octobre 2023, où siégeaient :

- M. Barthez, président,

- M. Lafon, président assesseur,

- Mme Restino, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 novembre 2023.

Le rapporteur,

N. Lafon

Le président,

A. Barthez

Le greffier,

F. Kinach

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N°22TL20297 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22TL20297
Date de la décision : 09/11/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BARTHEZ
Rapporteur ?: M. Nicolas LAFON
Rapporteur public ?: M. CLEN
Avocat(s) : KOSSEVA-VENZAL

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2023-11-09;22tl20297 ?
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