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17/09/2024 | FRANCE | N°23TL01719

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 3ème chambre, 17 septembre 2024, 23TL01719


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 27 décembre 2021 par lequel le préfet de l'Hérault lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2202352 du 18 juillet 2022, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :>


Par une requête et des pièces, enregistrées le 13 juillet 2023 et le 24 juin 2024, M. A..., représe...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 27 décembre 2021 par lequel le préfet de l'Hérault lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2202352 du 18 juillet 2022, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des pièces, enregistrées le 13 juillet 2023 et le 24 juin 2024, M. A..., représenté par Me Ruffel, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 18 juillet 2022 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) d'annuler l'arrêté du 27 décembre 2021 par lequel le préfet de l'Hérault lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ou, à titre très subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros, à verser à son conseil, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier en ce qu'il est fondé sur une lecture erronée de l'avis rendu par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;

- la décision portant refus de titre de séjour est insuffisamment motivée ;

- elle n'a pas été précédée d'un examen particulier de sa situation personnelle ;

- elle a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière en ce que, d'une part, il n'est pas établi que le médecin instructeur chargé d'établir le rapport soumis au collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration n'a pas siégé lors de la réunion du collège et n'a pas participé à l'élaboration de l'avis, et, d'autre part, cet avis doit mentionner la durée prévisible du traitement et les éléments de procédure ;

- elle méconnaît l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences qu'elle emporte sur sa situation personnelle ;

- elle méconnaît l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;

- elle n'a pas été précédée d'un examen particulier de sa situation personnelle ;

- elle méconnaît le 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences qu'elle emporte sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 décembre 2023, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.

Il soutient, en se référant à ses écritures de première instance, que les moyens soulevés par l'appelant ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 13 juin 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 5 juillet 2024, à 12 heures.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Toulouse du 23 juin 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme El Gani-Laclautre a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant guinéen né le 25 août 1975, déclare être entré en France le 3 novembre 2012. L'intéressé a obtenu une autorisation de séjour pour soins, valable du 6 avril au 5 octobre 2021. Le 23 septembre 2021, M. A... a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en se prévalant de son état de santé. Par un arrêté du 27 décembre 2021, le préfet de l'Hérault lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. A... relève appel du jugement du 18 juillet 2022 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. M. A... soutient que le jugement attaqué repose sur une lecture erronée de l'avis rendu par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le 6 décembre 2021, lequel a estimé que le défaut de prise en charge de sa situation médicale pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Toutefois, alors même que le tribunal s'est effectivement mépris sur la portée de l'avis du collège de médecins, un tel moyen ne tend pas à remettre en cause la régularité de jugement, mais le raisonnement adopté par les premiers juges. Il se rattache, dès lors, au bien-fondé du jugement attaqué. Par suite, ce moyen est sans incidence sur la régularité du jugement.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

3. En premier lieu, la décision portant refus de titre de séjour vise les dispositions applicables à la situation de M. A..., en particulier les articles L. 425-9 et L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sur le fondement desquels a été examinée sa demande de titre de séjour. Elle mentionne l'ensemble des éléments relatifs à la situation administrative, familiale et personnelle de l'intéressé en rappelant les conditions de son entrée sur le territoire français ainsi que les raisons de fait pour lesquelles sa demande de titre de séjour pour raisons de santé est rejetée. Elle précise ensuite, en s'appropriant les motifs de l'avis rendu le 6 décembre 2021 par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, qu'il peut bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine. La décision en litige, qui contient l'ensemble des considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement, est, par suite, suffisamment motivée.

4. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, en particulier de la motivation exhaustive de l'arrêté en litige, que le préfet de l'Hérault se serait abstenu de procéder à un examen particulier de la situation personnelle de l'appelant.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'État (...) ".

6. L'article R. 425-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que : " Pour l'application de l'article L. 425-9, le préfet délivre la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'office et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) ". L'article R. 425-12 du même code dispose que : " Le rapport médical mentionné à l'article R. 425-11 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement le demandeur ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa du même article. (...) ".

7. Aux termes de l'article R. 425-13 du même code : " Le collège à compétence nationale mentionné à l'article R. 425-12 est composé de trois médecins, il émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du même article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. / Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. / L'avis est rendu par le collège dans un délai de trois mois à compter de la transmission du certificat médical. (...). / L'avis est transmis au préfet territorialement compétent, sous couvert du directeur général de l'office ". Enfin, l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 susvisé ajoute que : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : / a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; / d) la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Cet avis mentionne les éléments de procédure. (...) / L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".

8. D'une part, il ressort de l'avis rendu par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le 6 décembre 2021, lequel mentionne l'ensemble des éléments de procédure prévus par les dispositions citées aux points 5 à 7, et notamment la composition de cette instance, et du bordereau de transmission de cet avis aux services préfectoraux, que le médecin chargé d'établir le rapport médical du demandeur n'a pas siégé lors de la réunion du collège. D'autre part, l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ne doit indiquer la durée prévisible du traitement que dans le cas où l'intéressé ne peut suivre un traitement approprié dans son pays d'origine. Dès lors que le collège des médecins a estimé que M. A... pouvait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, il n'était pas tenu de se prononcer sur la durée prévisible des soins nécessités par son état de santé. Par suite, les vices de procédure allégués doivent être écartés.

9. En quatrième lieu, s'il est saisi, à l'appui de conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus, d'un moyen relatif à l'état de santé du demandeur, aux conséquences de l'interruption de sa prise en charge médicale ou à la possibilité pour lui d'en bénéficier effectivement dans le pays dont il est originaire, il appartient au juge administratif de prendre en considération l'avis médical rendu par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Si le demandeur entend contester le sens de cet avis, il appartient à lui seul de lever le secret relatif aux informations médicales qui le concernent, afin de permettre au juge de se prononcer en prenant en considération l'ensemble des éléments pertinents, notamment l'entier dossier du rapport médical au vu duquel s'est prononcé le collège des médecins de l'Office français de l'immigration, en sollicitant sa communication, ainsi que les éléments versés par le demandeur au débat contradictoire.

10. Pour déterminer si un étranger peut bénéficier effectivement dans le pays dont il est originaire d'un traitement médical approprié au sens de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il convient de s'assurer, eu égard à la pathologie de l'intéressé, de l'existence d'un traitement approprié et de sa disponibilité dans des conditions permettant d'y avoir accès, et non de rechercher si les soins dans le pays d'origine sont équivalents à ceux offerts en France ou en Europe.

11. Par son avis du 6 décembre 2021, dont l'autorité préfectorale pouvait s'approprier les termes pour forger sa propre appréciation sans s'estimer pour autant en situation de compétence liée, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a considéré que l'état de santé de M. A... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'il peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine et y voyager sans risque, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges au prix d'une erreur matérielle sans incidence sur le bien-fondé de leur raisonnement, lequel a bien porté sur la disponibilité ou non du traitement médical de l'intéressé ainsi que cela ressort du point 6 du jugement attaqué. Pour remettre en cause cet avis, l'appelant a versé au dossier les éléments relatifs à son état de santé, en particulier des certificats médicaux qui permettent à la cour d'apprécier sa situation, sans qu'il soit besoin de demander l'entier dossier du rapport médical au vu duquel s'est prononcé ce collège.

12. Sur ce point, il ressort des pièces du dossier, sur lesquelles l'intéressé a accepté de lever le secret médical, que M. A... souffre d'une polyarthrite rhumatoïde. En se bornant à faire état de certificats médicaux relatifs à son tableau clinique et à la prise en charge médicale dont il bénéficie en France, laquelle repose sur une corticothérapie, des immunosuppresseurs et un suivi spécialisé en rhumatologie, M. A... ne produit, ainsi que cela lui incombe eu égard au sens de l'avis du collège des médecins, aucun élément précis et circonstancié quant à la disponibilité de son traitement médical en Guinée et la possibilité pour lui d'y bénéficier d'une prise en charge appropriée, le certificat médical du 25 janvier 2021 par lequel son médecin traitant indique qu'il est atteint d'une pathologie médicale nécessitant une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner de graves conséquences ne pouvant suffire à en tenir lieu. En outre, il ressort des pièces du dossier, en particulier de la fiche Medical Country of Origin Information (MedCoi) datée du mois d'août 2019, et de la liste nationale des médicaments essentiels disponibles en Guinée, que l'appelant peut bénéficier d'un traitement médical approprié dans son pays d'origine sans qu'il soit exigé qu'il soit en tous points équivalent à celui dont il dispose en France. Par suite, le préfet de l'Hérault n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant de délivrer un titre de séjour à M. A....

13. En cinquième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

14. M. A... se prévaut de son entrée en France depuis l'année 2012 où il indique avoir fixé sa résidence habituelle, et du suivi médical dont il bénéficie. Il indique travailler lorsque ses problèmes de santé très invalidants le lui permettent, précise avoir été recruté à temps partiel en tant qu'employé polyvalent et produit, en dernier lieu, une carte d'adhérent à la Croix-Rouge datée du 3 avril 2024, soit postérieurement à l'arrêté en litige. Toutefois, ces éléments, qui ne sont pas assortis de justificatifs probants quant à son insertion socio-familiale, ne sont pas de nature à caractériser l'intensité et la stabilité des liens privés et familiaux allégués en France où il séjourne de manière précaire et isolée alors qu'il a vécu en Guinée la majeure partie de sa vie, jusqu'à l'âge de 37 ans et qu'il n'est pas dépourvu d'attaches et isolé dans son pays d'origine où résident son épouse et sa fille. Ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, en particulier des conditions d'entrée et de séjour de l'intéressé en France, le préfet de l'Hérault n'a pas, en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, porté au droit de M. A... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts poursuivis et n'a, dès lors, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

15. En sixième lieu, pour les mêmes motifs que ceux retenus aux points 12 et 14, l'autorité préfectorale n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences qu'elle emporte sur la situation personnelle de l'appelant.

16. En septième et dernier lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14 ".

17. Lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code. Il est toutefois loisible au préfet d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à un titre de séjour sur le fondement d'une autre disposition du code. Il lui est aussi possible, exerçant le pouvoir discrétionnaire qui lui appartient dès lors qu'aucune disposition expresse ne le lui interdit, de régulariser la situation d'un étranger en lui délivrant un titre de séjour, compte tenu de l'ensemble des éléments de sa situation personnelle.

18. Dès lors que M. A... n'a pas sollicité son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que cela ressort de l'attestation de demande de titre de séjour du 23 septembre 2021, et qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'autorité préfectorale aurait examiné son droit au séjour sur ce fondement, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté comme inopérant. En tout état de cause, en dehors de sa seule présence en France depuis l'année 2012 et de la production de bulletins de paie, M. A... ne fait pas état de liens personnels et familiaux anciens et stables en France de nature à caractériser des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

19. En premier lieu, aux termes de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La décision portant obligation de quitter le territoire français est motivée. / Dans le cas prévu au 3° de l'article L. 611-1 [étranger s'étant vu refuser la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour], la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour. (...) ". Dès lors que la décision faisant obligation à l'appelant de quitter le territoire français a été prise sur le fondement d'un refus de titre de séjour lui-même motivé ainsi qu'il a été dit au point 3, elle n'avait pas à faire l'objet d'une motivation distincte

20. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision en litige n'aurait pas été précédée d'un examen exhaustif de la situation personnelle de l'appelant.

21. En troisième lieu, aux termes du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) / 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ". Il résulte de ces dispositions qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage d'éloigner un étranger du territoire national, de vérifier que cette décision ne peut avoir de conséquences exceptionnelles sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait une éventuelle interruption des traitements suivis en France. Le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux retenus au point 12.

22. En quatrième et dernier lieu, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation qu'emporte la décision en litige sur la situation personnelle de M. A... doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux retenus aux points 14 et 15.

23. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

DÉCIDE:

Article 1 : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 3 septembre 2024, à laquelle siégeaient :

M. Faïck, président,

M. Bentolila, président-assesseur,

Mme El Gani-Laclautre, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 septembre 2024.

La rapporteure,

N. El Gani-Laclautre Le président,

F. Faïck

La greffière,

C. Lanoux

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23TL01719


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23TL01719
Date de la décision : 17/09/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Faïck
Rapporteur ?: Mme Nadia El Gani-Laclautre
Rapporteur public ?: Mme Perrin
Avocat(s) : RUFFEL

Origine de la décision
Date de l'import : 20/09/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-09-17;23tl01719 ?
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