Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... et Mme C... B... ont demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision implicite par laquelle le maire d'Argelès-sur-Mer a refusé le raccordement provisoire au réseau de distribution de l'électricité de leur terrain constitué des parcelles cadastrées section BV nos 239 et 240, situées lieu-dit " Saint-Julien ouest ".
Par un jugement n° 2005253 rendu le 25 octobre 2022, le tribunal administratif de Montpellier a annulé cette décision et rejeté le surplus des conclusions des parties.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 16 décembre 2022 et le 9 juillet 2024, la commune d'Argelès-sur-Mer, représentée par Me Pons-Serradeil, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler le jugement du 25 octobre 2022 ;
2°) de mettre à la charge de M. et Mme B... une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la demande de M. et Mme B... était irrecevable en ce que la décision contestée par les intéressés n'existe pas : le maire n'était pas compétent pour se prononcer sur la demande de raccordement provisoire au réseau électrique et ne s'est pas opposé à ce raccordement ;
- à supposer même que le maire ait émis un avis défavorable sur la demande de raccordement provisoire, un tel avis, non obligatoire, ne constituait pas un acte faisant grief et la demande de première instance ne pouvait dès lors qu'être rejetée comme irrecevable.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 juin 2023, M. et Mme B..., représentés par Me Lucas, concluent :
1°) au rejet de la requête ;
2°) à l'annulation de la décision implicite par laquelle le maire d'Argelès-sur-Mer a refusé le raccordement provisoire de leurs parcelles au réseau électrique ;
3°) à ce que soit mise à la charge de la commune d'Argelès-sur-Mer une somme de 2 000 euros à verser à leur avocate au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du second alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Ils soutiennent que :
- la décision en litige existe bien dès lors que le maire a interdit à la société Enedis de procéder au raccordement provisoire de leurs parcelles au réseau électrique et qu'il n'a pas répondu à leur courrier du 21 juillet 2020 sollicitant l'autorisation de raccordement ;
- bien qu'il ne fût pas compétent pour ce faire, le maire s'est opposé au raccordement provisoire de leurs parcelles au réseau électrique en interdisant à la société Enedis d'y procéder ; le refus ainsi opposé leur fait grief ainsi que le tribunal administratif l'a considéré ;
- le maire n'était pas compétent pour se prononcer sur la demande de raccordement provisoire des parcelles au réseau électrique ainsi que les premiers juges l'ont retenu et ainsi que la commune d'Argelès-sur-Mer le reconnaît d'ailleurs expressément dans sa requête.
Par une ordonnance du 9 juillet 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 12 septembre 2024.
Par une décision du 20 septembre 2023, M. B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'énergie ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'urbanisme ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jazeron, premier conseiller,
- les conclusions de M. Diard, rapporteur public,
- et les observations de Me Pons-Serradeil, représentant la commune appelante.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme B... ont acquis, par acte du 19 juillet 2019, un terrain constitué des parcelles cadastrées section BV nos 239 et 240, situées au lieu-dit " Saint-Julien ouest ", sur le territoire de la commune d'Argelès-sur-Mer (Pyrénées-Orientales). Les intéressés ont sollicité le raccordement provisoire de leur terrain au réseau public de distribution de l'électricité, pour la période du 21 juillet 2020 au 31 octobre 2020, auprès de la société Enedis. Par un courrier du 21 juillet 2020, M. B... a demandé au maire d'Argelès-sur-Mer d'autoriser ladite société à procéder au raccordement provisoire ainsi sollicité. M. et Mme B... ont saisi le tribunal administratif de Montpellier d'une demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le maire a refusé le raccordement provisoire de leur terrain au réseau électrique. Par un jugement rendu le 25 octobre 2022, ledit tribunal a prononcé l'annulation de cette décision. Par la présente requête, la commune d'Argelès-sur-Mer relève appel de ce jugement.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. D'une part, il ressort des pièces du dossier que, postérieurement au courrier adressé au maire d'Argelès-sur-Mer le 21 juillet 2020 mentionné au point précédent, M. B... a, par un nouveau courrier du 7 août 2020, indiqué avoir été informé oralement, tant par les services de la police municipale que par la société Enedis, de ce que le maire s'était opposé au raccordement provisoire de ses parcelles au réseau électrique. Par ce courrier, l'intéressé a réitéré sa demande tendant à ce que le maire autorise la société Enedis à procéder au raccordement provisoire et a sollicité la communication des motifs justifiant un éventuel refus. Il n'est pas contesté que le maire n'a pas répondu expressément aux demandes de raccordement présentées par M. B... les 21 juillet 2020 et 7 août 2020 et la réalité de l'opposition du maire à ce raccordement est corroborée tant par les informations contenues dans le dossier complété par la société Enedis, lequel indique que la demande de raccordement n'a pas pu être satisfaite en raison d'une " interdiction de la mairie ", que par le message électronique de ladite société du 28 juin 2021, lequel mentionne " la décision initiale de refus d'alimentation provisoire de la commune ". Par suite, la première fin de non-recevoir soulevée par la commune d'Argelès-sur-Mer, tirée de l'inexistence de l'opposition du maire à ce raccordement provisoire, doit être écartée.
3. D'autre part et compte tenu notamment des conséquences de cette opposition sur les conditions de vie de M. et Mme B... au sein de leur résidence mobile stationnée sur leurs parcelles pendant la période considérée, la décision ainsi prise par le maire d'Argelès-sur-Mer présente le caractère d'un acte faisant grief aux intéressés et était donc bien susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir, sans qu'y fassent obstacle les circonstances que le maire n'était pas compétent pour se prononcer sur une demande de raccordement provisoire ni n'avait à être consulté sur une telle demande. Dès lors, la seconde fin de non-recevoir invoquée par la commune appelante, tenant à l'absence d'une décision faisant grief susceptible de recours, ne peut qu'être également écartée. Par suite, c'est à bon droit que le tribunal administratif de Montpellier a admis la recevabilité des conclusions de la demande de première instance tendant à l'annulation de la décision par laquelle le maire d'Argelès-sur-Mer s'est opposé au raccordement provisoire des parcelles des intéressés au réseau public de distribution de l'électricité.
4. Il ressort par ailleurs de la motivation du jugement attaqué que, pour prononcer l'annulation de la décision contestée par M. et Mme B..., le tribunal administratif de Montpellier a estimé, d'une part, que le maire d'Argelès-sur-Mer avait méconnu les articles L. 121-1 du code de l'énergie et L. 111-12 du code de l'urbanisme et, d'autre part, que le maire n'était pas compétent pour s'opposer à la demande de raccordement provisoire présentée par M. B.... Dès lors que la commune d'Argelès-sur-Mer ne remet pas en cause dans la présente instance le bien-fondé des motifs ainsi retenus par les premiers juges pour prononcer cette annulation et qu'elle reconnaît en particulier explicitement l'incompétence de son maire pour prendre la décision litigieuse, ladite commune n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a annulé cette décision.
Sur les frais liés au litige :
5. D'une part, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. et Mme B..., lesquels n'ont pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, une somme quelconque à verser à la commune requérante au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
6. D'autre part, M. B... ayant obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle, Me Lucas, son avocate, peut se prévaloir de l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du second alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune d'Argelès-sur-Mer, partie perdante, une somme de 1 500 euros à verser à Me Lucas, sous réserve que cette dernière renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la commune d'Argelès-sur-Mer est rejetée.
Article 2 : La commune d'Argelès-sur-Mer versera une somme de 1 500 euros à Me Lucas sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du second alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Lucas renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Argelès-sur-Mer, à M. A... B... et Mme C... B... et à Me Lucas.
Délibéré après l'audience du 17 octobre 2024, à laquelle siégeaient :
M. Chabert, président,
M. Jazeron, premier conseiller,
Mme Lasserre, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 novembre 2024.
Le rapporteur,
F. JazeronLe président,
D. Chabert
La greffière,
N. Baali
La République mande et ordonne au préfet des Pyrénées-Orientales, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 22TL22567