Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société civile immobilière Le Quatuor a demandé au tribunal administratif de Nîmes l'annulation de l'arrêté du 19 juin 2020 par lequel le maire de Laudun-l'Ardoise s'est opposé à sa déclaration préalable de travaux portant sur la surélévation d'un muret existant au n° 70 de la rue Georges Brassens, ainsi que de la décision par laquelle la même autorité a implicitement rejeté son recours gracieux présenté le 15 juillet 2020 contre cet arrêté.
Par un jugement n° 2003573 du 22 novembre 2022, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté cette demande, ainsi que les conclusions présentées par la commune de Laudun-l'Ardoise sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 20 janvier 2023, la société civile immobilière Le Quatuor, représentée par Me Franc, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 22 novembre 2022 ;
2°) d'annuler l'arrêté du maire de Laudun-l'Ardoise du 19 juin 2020, ainsi que la décision implicite portant rejet de son recours gracieux ;
3°) d'enjoindre au maire de Laudun-l'Ardoise de prendre un arrêté de non-opposition sur la déclaration préalable de travaux présentée le 26 mai 2020 ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Laudun-l'Ardoise le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté en litige est insuffisamment motivé dès lors qu'il ne précise pas le plan de prévention des risques d'inondation applicable et qu'il comporte une erreur sur la zone du plan local d'urbanisme dans laquelle se situe le terrain en cause ;
- le plan de prévention des risques d'inondation " Confluence Rhône Cèze Tave " n'était pas opposable à la déclaration préalable de travaux dès lors qu'il n'avait pas été annexé au plan local d'urbanisme de la commune de Laudun-l'Ardoise ;
- les travaux litigieux respectent le plan local d'urbanisme de la commune et notamment l'article 2 du règlement de ce plan applicable à la zone Unj ;
- le maire ne pouvait pas légalement lui opposer l'absence de signature de la déclaration préalable après lui avoir donné récépissé de cette déclaration ;
- la commune ne s'est pas opposée à la construction récente de plusieurs murs de clôture sur des propriétés situées à proximité de la parcelle en litige.
Par un mémoire en défense, enregistré le 20 juillet 2023, la commune de Laudun-l'Ardoise, représentée par la SCP CGCB Avocats et associés, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la société requérante une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi qu'une somme de 13 euros sur le fondement des articles R. 723-26-1 et R. 723-26-2 du code de la sécurité sociale.
Elle fait valoir que :
- la requête d'appel est irrecevable dès lors qu'elle se borne à reproduire intégralement les écritures de première instance ;
- les moyens invoqués ne sont pas fondés.
La clôture immédiate de l'instruction est intervenue le 21 février 2024 en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jazeron, premier conseiller,
- les conclusions de M. Diard, rapporteur public,
- et les observations de Me Langlois, représentant la commune intimée.
Considérant ce qui suit :
1. La société civile immobilière Le Quatuor est propriétaire de la parcelle cadastrée section AV n° 49, située au n° 70 de la rue Georges Brassens, sur le territoire de la commune de Laudun-l'Ardoise (Gard). Les services de la police municipale ont constaté le 29 avril 2020 que ladite société avait entrepris des travaux portant sur la clôture de cette parcelle. Par une lettre du 13 mai 2020, le maire de Laudun-l'Ardoise a relevé que les travaux en cause n'avaient fait l'objet d'aucune demande d'autorisation d'urbanisme et a mis en demeure la société de cesser lesdits travaux ainsi que de régulariser sa situation. Le 26 mai suivant, la société Le Quatuor a présenté auprès des services de la commune une déclaration préalable de travaux portant sur la " surélévation d'un muret existant jusqu'à une hauteur de 2 mètres d'une longueur totale de 16 mètres, muni d'ouvertures à ras du sol permettant le libre écoulement des eaux pluviales, ceci afin de permettre la manœuvre d'un portail coulissant de 4 mètres de long ". Par un arrêté pris le 19 juin 2020, le maire s'est opposé à cette déclaration préalable. La société Le Quatuor a introduit un recours gracieux contre cet arrêté le 15 juillet suivant, lequel a été implicitement rejeté par le maire. Par la présente requête, ladite société interjette appel du jugement du 22 novembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 juin 2020 et de la décision rejetant son recours gracieux.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 424-3 du code de l'urbanisme : " Lorsque la décision rejette la demande ou s'oppose à la déclaration préalable, elle doit être motivée. / (...) ". Aux termes de l'article A. 424-3 du même code : " L'arrêté indique, selon les cas : / (...) / b) Si le permis est refusé ou si la déclaration préalable fait l'objet d'une opposition ; / (...) ". Selon l'article A. 424-4 de ce code : " Dans les cas prévus aux b) à f) de l'article A. 424-3, l'arrêté précise les circonstances de droit et de fait qui motivent la décision (...) ".
3. L'arrêté en litige rappelle l'objet de la déclaration préalable de travaux présentée par la société requérante et cite dans leur intégralité, d'une part, les dispositions de l'article Un2 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Laudun-l'Ardoise applicables à la réalisation des murs de clôture dans la zone Un de ce plan et, d'autre part, les dispositions de l'article II du règlement du plan de prévention des risques d'inondation couvrant le territoire de la commune relatives à l'édification de clôtures dans la zone R2/u de ce dernier plan. L'arrêté mentionne par ailleurs que la déclaration préalable n'a pas été signée par la pétitionnaire. La société appelante a ainsi été mise à même de comprendre les raisons pour lesquelles le maire s'est opposé à sa déclaration après l'avoir d'ailleurs alertée sur l'illégalité des travaux par sa lettre du 13 mai 2020 mentionnée au point 1 du présent arrêt. Les circonstances que l'arrêté ne précise pas le nom et la date d'approbation du plan de prévention des risques d'inondation en vigueur et qu'il comporte une indication erronée s'agissant du secteur de la zone Un du plan local d'urbanisme dans lequel se situe le terrain en cause ne sont pas de nature à caractériser une insuffisance de motivation. Par suite, le moyen invoqué en ce sens doit être écarté.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 151-43 du code de l'urbanisme : " Les plans locaux d'urbanisme comportent en annexe les servitudes d'utilité publique affectant l'utilisation du sol et figurant sur une liste dressée par décret en Conseil d'Etat. ". L'article R. 151-51 du même code précise que : " Les annexes au plan local d'urbanisme comprennent (...) les servitudes d'utilité publique affectant l'utilisation du sol appartenant aux catégories figurant sur la liste annexée au présent livre (...) ". Figurent notamment au nombre de ces servitudes, selon l'annexe au livre Ier dudit code, les " Plans de prévention des risques naturels prévisibles établis en application de l'article L. 562-1 du code de l'environnement (...) ".
5. Il ressort des pièces du dossier, notamment des copies de délibérations produites par la commune à l'appui de ses écritures, que le conseil municipal de Laudun-l'Ardoise a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune le 18 juillet 2003 à l'issue de la procédure de révision générale du plan d'occupation de sols antérieur et que ce plan local d'urbanisme n'a fait l'objet par la suite que de modifications ou révisions simplifiées ou partielles. La commune a également versé au dossier une copie de la page de garde de l'annexe 7 au plan local d'urbanisme approuvé le 18 juillet 2003, laquelle porte l'intitulé " plan de prévention des risques " et est revêtue du même tampon, apposé par les services de la préfecture du Gard, que la délibération adoptée le même jour par le conseil municipal. La commune a produit au surplus un écrit du préfet, mentionnant que le plan de prévention des risques d'inondation " Confluence Rhône Cèze Tave ", approuvé par arrêté préfectoral le 10 mars 2000, est annexé au plan local d'urbanisme de la commune de Laudun-l'Ardoise. L'ensemble de ces éléments permettent établir que le plan local d'urbanisme approuvé le 18 juillet 2003 comporte en annexe le plan de prévention des risques d'inondation applicable au territoire de la commune. Dès lors et contrairement à ce que soutient la société appelante, ce dernier plan, valant servitude d'utilité publique, était opposable à sa déclaration préalable de travaux du 26 mai 2020. Par suite, le maire de Laudun-l'Ardoise n'a pas commis d'erreur de droit en fondant sa décision sur les dispositions de ce plan.
6. En troisième lieu, aux termes de l'article II du règlement du plan de prévention des risques d'inondation " Confluence Rhône Cèze Tave " relatif aux dispositions particulières applicables aux zones " R1 " et " R2 " et notamment au secteur " R2/u " dans lequel est classée la parcelle appartenant à la société requérante : " ' Les occupations et utilisations des sols de toute nature autres que celles visées ci-dessous sont interdites. / ' Sont admis dans l'ensemble de la zone : / (...) / - Les clôtures " légères " c'est-à-dire non maçonnées et n'offrant pas de résistance au passage de l'eau. / (...) ". Lorsqu'une construction existante n'est pas conforme à une ou plusieurs dispositions d'un document d'urbanisme régulièrement approuvé, une autorisation d'urbanisme ne peut être légalement délivrée pour la modification de cette construction, sous réserve de dispositions de ce document spécialement applicables à la modification des immeubles existants, que si les travaux rendent l'immeuble plus conforme aux dispositions réglementaires méconnues ou s'ils sont étrangers à ces dispositions.
7. Il ressort des pièces du dossier, notamment des mentions portées dans la déclaration préalable et des photographies produites à l'appui des écritures de la société appelante, que le muret de clôture existant le long du terrain en litige est constitué de moellons en ciment et qu'il n'est ainsi pas conforme aux prescriptions de l'article II du règlement du plan de prévention des risques d'inondation citées au point précédent. Il en ressort également que les travaux objets de la déclaration préalable du 26 mai 2020 consistent à surélever ce muret maçonné pour porter sa hauteur de 60 centimètres à 2 mètres. De tels travaux ne sont pas étrangers aux prescriptions du plan de prévention des risques d'inondation méconnues par la clôture existante et ne sont pas de nature à rendre le muret en cause plus conforme à ces prescriptions. Par voie de conséquence, le maire de Laudun-l'Ardoise a pu légalement estimer que lesdits travaux ne pouvaient pas être légalement autorisés au regard du plan de prévention des risques d'inondation opposable.
8. En quatrième lieu, selon l'article Un1 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Laudun-l'Ardoise, applicable à la zone Un et notamment au secteur Unj dans lequel se situe le terrain en litige : " Sont interdites toutes les formes d'utilisation et d'occupation du sol non mentionnées à l'article Un2 ci-dessous (...). ". L'article Un2 de ce même règlement, auquel il est ainsi renvoyé, mentionne que : " (...) / Sont admis dans l'ensemble de la zone, sous réserve des règles particulières aux secteurs : / (...) / - les clôtures. Les murs de clôtures ne devront pas excéder deux mètres de hauteur. Leur aspect devra être harmonisé avec leur environnement. Ils doivent assurer la libre circulation des eaux de ruissellement ; / (...) ".
9. La société requérante relève que le muret de clôture existant le long de la propriété litigieuse comporte, en sa partie basse, des ouvertures permettant le libre écoulement des eaux pluviales. Il ressort toutefois des pièces du dossier, plus particulièrement des photographies susmentionnées, que le muret en cause ne comporte que deux barbacanes de faible diamètre sur sa longueur totale de 16 mètres. Alors que le terrain se trouve exposé à un risque d'inondation " élevé " selon le plan de prévention des risques opposable et qu'une inondation " sur une hauteur d'homme " y est d'ailleurs survenue en 2003, les deux seuls orifices invoqués ne peuvent être sérieusement regardés comme suffisants pour assurer la libre circulation des eaux de ruissellement au sens de l'article Un2 précité du règlement du plan local d'urbanisme. Dès lors, le muret existant n'est pas conforme à cet article Un2. Les travaux en litige, portant sur la surélévation de ce mur jusqu'à 2 mètres de hauteur, ne sont pas étrangers aux dispositions du plan local d'urbanisme ainsi méconnues et n'auraient pas non plus pour effet de rendre le muret plus conforme à ces dispositions. Par suite et alors que la société appelante ne peut utilement se prévaloir de ce que des travaux comparables n'auraient pas été interdits sur des terrains voisins, le maire de Laudun-l'Ardoise a pu légalement s'opposer à la déclaration préalable au motif que les travaux n'étaient pas conformes aux dispositions du plan local d'urbanisme en vigueur.
10. En cinquième lieu, aux termes de l'article R. 431-35 du code de l'urbanisme : " (...) La déclaration préalable (...) comporte également l'attestation du ou des déclarants qu'ils remplissent les conditions définies à l'article R. 423-1 pour déposer une déclaration préalable. ". L'article R. 423-32 du même code dispose que : " Pour l'application de la présente section, le dossier est réputé complet si l'autorité compétente n'a pas, dans le délai d'un mois à compter du dépôt du dossier en mairie, notifié au demandeur ou au déclarant la liste des pièces manquantes dans les conditions prévues par les articles R. 423-38 et R. 423-41. ".
11. Il ressort des pièces du dossier que les services de la commune intimée ont délivré à la société requérante un récépissé de dépôt de déclaration préalable le 26 mai 2020 et il n'est pas même allégué que ladite société aurait été invitée à compléter son dossier dans le délai d'un mois prévu par l'article R. 423-32 du code de l'urbanisme. En conséquence et en application de ce même article, le dossier de la déclaration préalable était réputé complet dès le 26 juin 2020 et le maire de Laudun-l'Ardoise ne pouvait dès lors pas légalement s'opposer à cette déclaration en raison de l'absence de signature du formulaire par la société pétitionnaire. Il résulte toutefois de l'instruction que le maire aurait pris la même décision en se fondant uniquement sur les motifs tirés de ce que les travaux en cause méconnaissaient les prescriptions du plan de prévention des risques d'inondation et du plan local d'urbanisme, lesquels suffisaient à justifier légalement l'opposition à déclaration préalable comme il a été dit aux points précédents de cet arrêt.
12. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de Laudun-l'Ardoise à la requête d'appel, que la société civile immobilière Le Quatuor n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 juin 2020 ainsi que de la décision implicite portant rejet de son recours gracieux.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
13. Le présent arrêt rejette les conclusions en annulation de la société requérante et n'implique donc aucune mesure d'exécution au sens des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative. Par suite, les conclusions en injonction doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que soit mise à la charge de la commune de Laudun-l'Ardoise, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, une somme quelconque à verser à la société Le Quatuor au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la société Le Quatuor une somme de 1 500 euros à verser à la commune de Laudun-l'Ardoise sur le fondement de ces mêmes dispositions, en ce compris le droit de plaidoirie prévu par les articles R. 652-26 et R. 652-27 du code de la sécurité sociale, lequel entre dans les sommes susceptibles d'être prises en compte à ce titre.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la société civile immobilière Le Quatuor est rejetée.
Article 2 : La société civile immobilière Le Quatuor versera une somme de 1 500 euros à la commune de Laudun-l'Ardoise sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société civile immobilière Le Quatuor et à la commune de Laudun-l'Ardoise.
Délibéré après l'audience du 7 novembre 2024, à laquelle siégeaient :
M. Chabert, président,
M. Teulière, président assesseur,
M. Jazeron, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 novembre 2024.
Le rapporteur,
F. JazeronLe président,
D. Chabert
La greffière,
N. Baali
La République mande et ordonne au préfet du Gard, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 23TL00221