Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler les décisions portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixation du pays de renvoi et interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de douze mois contenues dans l'arrêté du préfet de l'Hérault du 25 avril 2024 lui refusant également la délivrance d'un titre de séjour.
Par un jugement n° 2402973 du 9 juillet 2024, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a annulé cet arrêté dans son ensemble, en ce compris la décision relative au séjour, et enjoint au préfet de l'Hérault de réexaminer la situation de Mme B... dans un délai de deux mois à compter de la notification de sa décision.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête, enregistrée le 31 juillet 2024 sous le n° 24TL02065, le préfet de l'Hérault demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 9 juillet 2024 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) de rejeter la demande de Mme B... présentée devant le tribunal administratif de Montpellier tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixation du pays de renvoi et interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de douze mois contenues dans l'arrêté du 25 avril 2024.
Il soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a annulé l'arrêté en litige alors que le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a examiné la disponibilité d'un traitement en République démocratique du Congo, pays déclaré par Mme B... tant lors de la présentation de sa demande d'asile que lors de l'enregistrement de sa demande de titre de séjour ;
- c'est à bon droit qu'il a examiné le droit au séjour de Mme B... au regard de son état de santé, seul fondement figurant sur la demande de titre de séjour dont il était saisi ;
- Mme B... ne produit aucun élément probant de nature à remettre en cause le sens de l'avis rendu par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration lequel a examiné sa situation au regard de l'offre de soins disponible en République démocratique du Congo, pays dont l'intéressée a déclaré avoir la nationalité ;
- les autres moyens soulevés contre les décisions ne litige ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 septembre 2024, Mme B..., représentée par Me Bazin, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 800 euros, à verser à son conseil, soit mise à la charge de l'État sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- l'autorité préfectorale a méconnu l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que la disponibilité de son traitement n'a pas été examinée en République démocratique du Congo mais au Congo ; en outre, elle ne peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, la République démocratique du Congo ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;
- elle n'a pas été précédée d'un examen particulier de sa situation personnelle ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences qu'elle emporte sur sa situation personnelle ;
- la décision fixant le pays de renvoi méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français est insuffisamment motivée ;
- elle est illégale en raison de l'illégalité entachant la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences qu'elle emporte sur sa situation personnelle.
Mme B... a été maintenue de plein droit au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Toulouse du 11 octobre 2024.
Par une ordonnance du 16 octobre 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 7 novembre 2024, à 12 heures.
II. Par une requête, enregistrée le 31 juillet 2024, sous le n° 24TL02066, le préfet de l'Hérault demande à la cour de surseoir à l'exécution du jugement n° 2402973 rendu par le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier le 9 juillet 2024.
Il soutient, d'une part, que la requête en appel par laquelle il a saisi la cour comporte des moyens sérieux de nature à justifier, en l'état de l'instruction, outre l'annulation de ce jugement, le rejet des conclusions à fin d'annulation et d'injonction présentées à l'appui de la demande soumise au tribunal et, d'autre part, que l'exécution du jugement attaqué risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 septembre 2024, Mme B..., représentée par Me Bazin, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 800 euros, à verser à son conseil, soit mise à la charge de l'État sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que les moyens soulevés par l'appelant ne sont pas fondés.
Mme B... a été maintenue de plein droit au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Toulouse du 11 octobre 2024.
Par une ordonnance du 16 octobre 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 7 novembre 2024, à 12 heures.
Par une lettre du 13 novembre 2024, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour était susceptible de soulever d'office un moyen d'ordre public tiré de ce que le premier juge a fait droit à la demande de Mme B... et annulé l'arrêté en litige dans son ensemble en se fondant sur un moyen inopérant tiré de ce que le préfet a entaché sa décision d'erreur de droit en se prononçant sur la disponibilité d'un traitement dans un pays dont n'est pas originaire l'intéressée, alors qu'un tel moyen, qui tend à contester la légalité de la décision portant refus de titre de séjour contenue dans l'arrêté en litige, est inopérant à l'égard de la décision portant obligation de quitter le territoire français qui était exclusivement fondée sur le rejet de la demande d'asile, en application du 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et dont seule l'annulation était demandée devant le tribunal. (CE 3 août 2011 Mme A... n°326754 B et CE avis 19 juillet 2017 Mme C... n° 408902 A).
Des observations en réponse à ce moyen d'ordre public, présentées pour Mme B..., ont été enregistrées, le 18 novembre 2024.
Vu les autres pièces de ces deux dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme El Gani-Laclautre a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., ressortissante de la République démocratique du Congo, née le 12 septembre 1997, déclare être entrée en France le 29 janvier 2023. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 17 avril 2023. Le recours formé contre cette décision a été rejeté par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 7 février 2024. Le 22 mai 2023, Mme B... a sollicité son admission au séjour en se prévalant de son état de santé. Par un arrêté du 25 avril 2024, le préfet de l'Hérault lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours sur le fondement des dispositions du 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de 12 mois. Sous le n° 24TL02065, le préfet de l'Hérault relève appel du jugement du 9 juillet 2024 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a annulé cet arrêté dans son ensemble et lui a enjoint de réexaminer la situation de Mme B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour. Sous le n° 24TL02066, le préfet de l'Hérault demande à la cour de surseoir à l'exécution de ce jugement.
2. Les requêtes précitées n° 24TL02065 et n° 24TL02066 sont dirigées contre un même jugement et présentent à juger des mêmes questions. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.
Sur la requête n° 24TL02065 :
En ce qui concerne le bien-fondé du jugement attaqué :
3. D'une part, lorsque le tribunal administratif a fait droit à une demande en se fondant sur un moyen inopérant, notamment en faisant application d'une règle de droit inapplicable, et que, pour contester le jugement de ce tribunal, l'appelant n'a pas invoqué le caractère inopérant du moyen retenu par les premiers juges, il appartient au juge d'appel de relever d'office cette inopérance pour censurer le motif retenu par le tribunal. Il ne peut toutefois le faire qu'après en avoir préalablement informé les parties en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative.
4. D'autre part, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : (...) / 3° L'étranger s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour, le renouvellement du titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de l'autorisation provisoire de séjour qui lui avait été délivré ou s'est vu retirer un de ces documents ; / 4° La reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou il ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 542-1 et L. 542-2, à moins qu'il ne soit titulaire de l'un des documents mentionnés au 3° ; (...) / Lorsque, dans le cas prévu à l'article L. 431-2, un refus de séjour a été opposé à l'étranger, la décision portant obligation de quitter le territoire français peut être prise sur le fondement du seul 4° ".
5. Aux termes de l'article L. 431-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'un étranger a présenté une demande d'asile qui relève de la compétence de la France, l'autorité administrative, après l'avoir informé des motifs pour lesquels une autorisation de séjour peut être délivrée et des conséquences de l'absence de demande sur d'autres fondements à ce stade, l'invite à indiquer s'il estime pouvoir prétendre à une admission au séjour à un autre titre et, dans l'affirmative, à déposer sa demande dans un délai fixé par décret. Il est informé que, sous réserve de circonstances nouvelles, notamment pour des raisons de santé, et sans préjudice de l'article L. 611-3, il ne pourra, à l'expiration de ce délai, solliciter son admission au séjour. / Les conditions d'application du présent article sont précisées par décret en Conseil d'État ".
6. Aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'État. / Sous réserve de l'accord de l'étranger et dans le respect des règles de déontologie médicale, les médecins de l'office peuvent demander aux professionnels de santé qui en disposent les informations médicales nécessaires à l'accomplissement de cette mission. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. / Si le collège de médecins estime dans son avis que les conditions précitées sont réunies, l'autorité administrative ne peut refuser la délivrance du titre de séjour que par une décision spécialement motivée (...) ".
7. Lorsqu'une décision relative au séjour est intervenue concomitamment à une obligation de quitter le territoire français prise sur le fondement du 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et fait l'objet d'une contestation à l'occasion d'un recours dirigé contre cette obligation de quitter le territoire français, cette contestation suit le régime contentieux applicable à l'obligation de quitter le territoire français.
8. Dans la mesure où un refus de titre de séjour n'est pas le fondement d'une obligation de quitter le territoire français, l'éventuelle annulation du refus de titre de séjour ne conduit pas, par elle-même, à l'annulation par voie de conséquence de l'obligation de quitter le territoire français, qui aurait pu être légalement prise en l'absence du refus de titre de séjour et n'est pas intervenue en raison de ce refus. Il en va ainsi, en principe, pour les obligations de quitter le territoire français prises sur le fondement du 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Toutefois, dans le cas où serait contesté à l'occasion d'un recours dirigé contre une telle obligation un refus de titre de séjour pris concomitamment, si le juge administratif annule le refus de titre de séjour, il lui appartient, s'il est saisi d'un moyen en ce sens, d'apprécier, eu égard au motif qu'il retient, si l'illégalité du refus de titre de séjour justifie l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français. Tel est le cas notamment lorsque le motif de l'annulation implique le droit de l'intéressé à séjourner en France.
9. Par l'arrêté en litige, le préfet de l'Hérault a, d'une part, refusé la délivrance d'un titre de séjour à Mme B... sur le fondement des articles L. 425-9, L. 424-4 et L. 424-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, d'autre part, fait obligation à l'intéressée de quitter le territoire français sur le seul fondement des dispositions du 4° de l'article L. 611-1 du même code citées au point 4 et, enfin, fixé le pays de renvoi et interdit à l'intéressée de retourner sur le territoire français pendant un an.
10. Les conclusions formulées par Mme B... devant le tribunal administratif tendaient uniquement à l'annulation de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français contenue dans l'arrêté en litige, laquelle était exclusivement fondée sur les dispositions précitées du 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le premier juge a annulé cet arrêté dans son ensemble en se fondant sur un moyen tiré de ce que l'autorité préfectorale avait examiné l'offre de soins dans un pays dont Mme B... n'avait pas la nationalité. Or, un tel moyen est inopérant à l'encontre d'une décision faisant obligation à un étranger de quitter le territoire français seulement motivée par le rejet définitif de la demande d'asile de l'étranger. Par suite, c'est à tort que le premier juge s'est fondé sur ce moyen inopérant pour annuler l'arrêté du préfet de l'Hérault du 25 avril 2024.
11. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner les autres moyens soulevés par Mme B... devant le tribunal administratif de Montpellier.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
12. En premier lieu, la décision en litige vise les dispositions applicables à la situation de Mme B..., en particulier l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui fondent la mesure d'éloignement prise à son encontre. Elle mentionne l'ensemble des éléments relatifs à la situation administrative, familiale et personnelle de l'intéressée en rappelant les conditions de son entrée sur le territoire français et le rejet définitif de sa demande d'asile par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 17 avril 2023. Elle précise, en outre, que le recours formé contre cette décision a été rejeté par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 7 février 2024. La décision en litige, qui contient l'ensemble des considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement est, dès lors, suffisamment motivée.
13. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, en particulier de la motivation exhaustive de l'arrêté en litige, que l'autorité préfectorale se serait abstenue de procéder à un examen particulier de la situation de Mme B....
14. En troisième lieu, la circonstance selon laquelle Mme B... a sollicité en vain la communication de son dossier auprès de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et du préfet de l'Hérault est sans incidence sur la légalité de la mesure d'éloignement en litige, l'intéressée disposant au demeurant de la faculté, si elle s'y croit fondée, d'exercer un recours administratif préalable obligatoire devant la commission d'accès aux documents administratifs en vue d'obtenir la communication de ce document.
15. En quatrième lieu, et en tout état de cause, par son avis du 20 septembre 2023, produit pour la première fois en appel par le préfet de l'Hérault, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a examiné la disponibilité du traitement que nécessite l'état de santé de Mme B... au regard de son pays d'origine, la République démocratique du Congo, nationalité mentionnée en en-tête de l'avis, en considérant que l'état de santé de l'intéressée nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'elle peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine et y voyager sans risque. En outre, les motifs de l'arrêté en litige mentionnent que Mme B... est née à Kinshasa en République démocratique du Congo et qu'elle est de nationalité congolaise de la République démocratique du Congo. S'il est constant que l'arrêté en litige mentionne qu'elle peut bénéficier d'un traitement approprié " au Congo ", il s'agit, compte-tenu de la mention exacte de sa nationalité dans les motifs de l'arrêté et de la référence à l'avis régulièrement rendu par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration au regard de l'offre de soins existant en République démocratique du Congo, d'une simple erreur de plume, par elle-même sans incidence sur sa légalité. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet s'est mépris sur le pays d'origine de Mme B... est infondé et ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté.
16. En cinquième lieu, dès lors que Mme B... n'a pas sollicité son admission exceptionnelle au séjour et que le préfet de l'Hérault n'a pas examiné d'office son droit au séjour sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions est inopérant et ne peut, dès lors, qu'être écarté.
17. En sixième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
18. D'une part, Mme B... indique être en concubinage avec un homme résidant en France sous couvert d'un titre de séjour. Toutefois, ces déclarations, qui ne sont étayées d'aucun justificatif circonstancié, ne permettent pas de caractériser la stabilité et l'ancienneté de sa relation de couple. En outre, si l'intéressée se prévaut de la présence en France de son père qui y réside régulièrement et de sa fratrie, elle ne produit aucun élément probant de nature à établir l'intensité de ses liens familiaux qu'elle entretient avec eux au regard des liens qu'elle a conservés dans son pays d'origine où elle a vécu la majeure partie de son existence et qu'elle a quitté à l'âge de 26 ans. Mme B..., qui est entrée en France de manière récente en 2023 en première intention en vue d'y solliciter l'asile ainsi que la délivrance d'un titre de séjour pour raisons de santé, sans solliciter la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", ne fait pas état de liens personnels et familiaux particulièrement intenses, anciens et stables de nature à caractériser des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels. D'autre part, si Mme B... se prévaut de son activité de bénévole auprès de la Croix-Rouge, cette circonstance n'est pas de nature à caractériser une insertion socio-professionnelle avérée depuis son entrée en France au cours de l'année 2023. Dans ces conditions, en obligeant Mme B... à quitter le territoire français, le préfet de l'Hérault n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts poursuivis et n'a, dès lors, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales
19. En septième et dernier lieu, eu égard aux conditions d'entrée et de séjour de Mme B... en France rappelées au point précédent et dès lors qu'elle peut bénéficier d'un traitement approprié dans ses pays d'origine et y voyager sans risques ainsi que cela ressort de l'avis rendu par le collège des médecins de l'Office français le 20 septembre 2023, le préfet de l'Hérault n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences qu'elle emporte sur sa situation personnelle.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
20. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
21. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient à l'autorité administrative chargée de prendre la décision fixant le pays de renvoi d'un étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français de s'assurer, sous le contrôle du juge, en application de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que les mesures qu'elle prend n'exposent pas l'étranger à des risques sérieux pour sa liberté ou son intégrité physique, non plus qu'à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Si elle est en droit de prendre en considération, à cet effet, les décisions qu'ont prises, le cas échéant, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile saisis par l'étranger de demandes de titre de réfugié politique, l'examen par ces dernières instances, au regard des conditions mises à la reconnaissance du statut de réfugié par la convention de Genève du 28 juillet 1951 et le protocole signé à New-York le 31 janvier 1967, des faits allégués par le demandeur d'un tel statut et des craintes qu'il énonce, et l'appréciation portée sur eux, en vue de l'application de ces conventions, ne lient pas l'autorité administrative et sont sans incidence sur l'obligation qui est la sienne de vérifier, au vu du dossier dont elle dispose, que les mesures qu'elle prend ne méconnaissent pas les dispositions précitées de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
22. Mme B... soutient encourir des risques en cas de renvoi en République démocratique du Congo en raison, d'une part, des violences que son ex-conjoint, auquel elle aurait été mariée de force, est susceptible de commettre à son endroit et, d'autre part, des menaces et des violences auxquelles elle pourrait être confrontée du fait des engagements politiques de ce dernier en lien avec le Rwanda. Toutefois, ces seules allégations, qui ne sont étayées par aucune pièce probante, ne sont de nature à établir de manière précise et circonstanciée ni la nature ni la gravité des risques encourus par l'intéressée en cas d'éloignement alors, au demeurant, qu'il ressort des pièces du dossier que sa demande d'asile a été définitivement rejetée par les autorités en charge de l'asile ainsi qu'il a été dit au point 1. Dès lors, en fixant la République démocratique du Congo comme pays à destination duquel Mme B... est susceptible d'être éloignée, le préfet de l'Hérault n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :
23. En premier lieu, la décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs. Si cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère.
24. La décision en litige, après avoir visé l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et rappelé le principe posé par les dispositions de l'article L. 612-10 du même code, précise que la demande de protection internationale de Mme B... a fait l'objet d'un rejet définitif de la part des autorités compétentes en matière d'asile. Cette décision, qui fait état de la nature et des caractéristiques des liens de Mme B... en France, mentionne en outre que la situation de cette dernière ne fait ressortir aucune circonstance humanitaire de nature à s'opposer au prononcé d'une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de douze mois en dépit de l'absence de précédente mesure d'éloignement et de menace à l'ordre public. Par suite, cette décision, qui comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement, est suffisamment motivée.
25. En deuxième lieu, l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas établie, ainsi qu'il a été dit aux points 10 à 19, le moyen tiré de ce que la décision en litige serait, par voie de conséquence, illégale, doit être écarté.
26. En troisième et dernier lieu, l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose, dans sa rédaction applicable au litige, que : " Lorsque l'étranger n'est pas dans une situation mentionnée aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative peut assortir la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. / Il en est de même pour l'édiction et la durée de l'interdiction de retour mentionnée à l'article L. 612-8 ainsi que pour la prolongation de l'interdiction de retour prévue à l'article L. 612-11 ".
27. Il ressort des termes mêmes de ces dispositions que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen en ce sens, de rechercher si les motifs qu'invoque l'autorité compétente sont de nature à justifier légalement dans son principe et sa durée la décision d'interdiction de retour et si la décision ne porte pas au droit de l'étranger au respect de sa vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. En revanche, lorsqu'il est saisi d'un moyen le conduisant à apprécier les conséquences de la mesure d'interdiction de retour sur la situation personnelle de l'étranger et que sont invoquées des circonstances étrangères aux quatre critères posés par les dispositions précitées de l'article L. 612-10, il incombe seulement au juge de l'excès de pouvoir de s'assurer que l'autorité compétente n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation.
28. Mme B... soutient que la décision lui faisant interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de douze mois entraîne des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur sa situation personnelle dès lors, d'une part, qu'elle l'expose à des traitements inhumains et dégradants en cas d'éloignement vers son pays d'origine, d'autre part, qu'elle n'a jamais fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement et que son comportement ne représente pas une menace pour l'ordre public et, enfin, que sa famille et son compagnon résident en situation régulière en France, pays dans lequel elle pourra bénéficier du suivi médical dont elle a besoin. Toutefois, pour les mêmes motifs que ceux retenus aux points 14, 17, 18 et 21, ces éléments ne permettent pas de faire regarder l'intéressée comme justifiant de circonstances humanitaires faisant obstacle au prononcé d'une interdiction de retour alors qu'elle vit en France de manière précaire et irrégulière en dépit du rejet définitif de sa demande d'asile tandis que la communauté de vie dont elle se prévaut, sans toutefois l'établir, présente un caractère récent et peu stable à la date de l'arrêté en litige et qu'elle ne produit aucun élément circonstancié quant à l'intensité de ses liens privés familiaux en France. Dès lors que la situation de Mme B... ne fait pas apparaître de motifs humanitaires particuliers, et alors même que le comportement de cette dernière ne représente pas une menace pour l'ordre public, le préfet de l'Hérault n'a pas entaché la décision en litige d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences qu'elle emporte sur la situation personnelle de l'intéressée.
29. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de l'Hérault est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a annulé l'arrêté du 25 avril 2024. Par suite, la demande présentée par Mme B... devant le tribunal doit être rejetée ainsi que, par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, tant en première instance qu'en appel.
Sur la requête n° 24TL02066 :
30. Dès lors qu'il est statué, par le présent arrêt, sur les conclusions tendant à l'annulation du jugement n° 2402973 du 9 juillet 2024 du tribunal administratif de Montpellier, les conclusions du préfet de l'Hérault tendant à ce qu'il soit sursis à son exécution sont devenues sans objet.
DÉCIDE:
Article 1 : Le jugement n° 2402973 du 9 juillet 2024 du tribunal administratif de Montpellier est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de Montpellier et ses conclusions d'appel sont rejetées.
Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de sursis à exécution présentée dans le cadre de la requête n° 24TL02066.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... B..., à Me Bazin, et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 19 novembre 2024, à laquelle siégeaient :
M. Faïck, président,
M. Bentolila, président-assesseur,
Mme El Gani-Laclautre, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 décembre 2024.
La rapporteure,
N. El Gani-LaclautreLe président,
F. Faïck
La greffière,
C. Lanoux
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°s 24TL02065 - 24TL02066