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30/01/2025 | FRANCE | N°23TL00220

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 4ème chambre, 30 janvier 2025, 23TL00220


Vu les procédures suivantes :



I - Par une requête et des mémoires, enregistrés sous le n° 23TL00220 le 20 janvier 2023, le 26 décembre 2023 et le 14 mars 2024, l'association " Hers Ariège Environnement " (HAE), M. BO... BK..., Mme EB... GM..., Mme CW... AL..., M. FU... CZ..., M. BN... FG..., Mme ES... FG..., M. DS... AG..., Mme BU... CO..., M. FN... GA..., M. CD... DU..., Mme GG... ET..., M. FI... DB..., M. AO... ET..., Mme I... ET..., M. AR... ET..., Mme BL... ET..., M. EQ... CN..., Mme BB... CN..., M. DH... GH..., M. BF... GH..., Mme F... GH..., Mme EY... AM...,

M. EQ... FQ..., M. BE... FQ..., M. U... FQ..., Mme DJ... FQ..., Mm...

Vu les procédures suivantes :

I - Par une requête et des mémoires, enregistrés sous le n° 23TL00220 le 20 janvier 2023, le 26 décembre 2023 et le 14 mars 2024, l'association " Hers Ariège Environnement " (HAE), M. BO... BK..., Mme EB... GM..., Mme CW... AL..., M. FU... CZ..., M. BN... FG..., Mme ES... FG..., M. DS... AG..., Mme BU... CO..., M. FN... GA..., M. CD... DU..., Mme GG... ET..., M. FI... DB..., M. AO... ET..., Mme I... ET..., M. AR... ET..., Mme BL... ET..., M. EQ... CN..., Mme BB... CN..., M. DH... GH..., M. BF... GH..., Mme F... GH..., Mme EY... AM..., M. EQ... FQ..., M. BE... FQ..., M. U... FQ..., Mme DJ... FQ..., Mme EW... FQ..., Mme FP... FQ..., Mme ES... AP..., M. Z... AP..., M. DM... DT..., M. FU... BZ..., M. AU... AJ..., M. P... AJ..., M. FU... AJ..., M. DA... AS..., M. AC... BQ..., Mme DN... BQ..., Mme DX... BA..., M. FV... BA..., M. GE... O..., M. BE... AK..., Mme DV... AK..., Mme DO... CG..., M. AI... M..., M. G... AY..., M. EJ... DI..., Mme EH... GJ..., M. Q... AN..., Mme CI... CH..., Mme DK... FK..., M. DR... FK..., Mme AH... FK..., M. C... EK..., Mme DD... EK..., M. CB... BD..., Mme BP... CS..., M. BR... DZ..., Mme AX... DZ..., M. DR... DL..., Mme FE... DL..., M. L... FM..., Mme FF... EA..., M. AA... A..., Mme CC... A..., M. FR... A..., Mme CA... CK..., M. GE... CK..., M. J... AF..., Mme FT... AF..., Mme CF... BJ..., M. DC... S..., Mme GO... S..., M. BH... BX..., Mme FL... BX..., M. CU... EM..., Mme V... EM..., M. AA... EM..., M. BM... DW..., M. BI... AB..., M. AE... FB..., M. CV... FY..., Mme CC... FZ..., M. DP... EE..., Mme EO... FH..., M. EL... EE..., Mme GB... EE..., M. R... FA..., M. FC... EE..., Mme DQ... EX..., Mme GL... Duc, M. EI... AQ..., M. BY... CQ..., M. CV... B..., M. BY... AD..., Mme FJ... GI..., Mme BV... CP..., M. AV... CE..., M. GF... B..., Mme DF... ER..., Mme BC... GD..., Mme ED... DY..., M. BI... DY..., Mme FX... X..., Mme EV... AZ..., Mme CW... E..., M. J... EU..., Mme BT... BS..., M. FO... AW..., M. P... EF..., Mme DG... K..., M. W... Y..., M. EG... AF..., Mme EO... GN..., M. FU... CL..., M. GK... CY..., M. FR... AT..., Mme T... BG..., Mme FD... GC..., Mme D... FS..., Mme BW... CJ..., Mme DE... EN..., M. FI... EN..., M. GE... CR..., Mme EC... CR..., M. GE... CT..., M. EP... FK..., Mme EZ... FK..., Mme EY... H..., M. BE... H..., Mme DN... N..., M. FR... CM..., M. FV... FW... et M. CB... CX..., représentés par la SCP Bouyssou et associés, demandent à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté du 22 septembre 2022 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a accordé une autorisation environnementale à la société par actions simplifiée Aganaguès pour la construction et l'exploitation d'une installation terrestre de production d'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent comprenant un aérogénérateur au lieu-dit " Les Parrounes " sur le territoire de la commune de Cintegabelle ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

Sur la régularité de l'arrêté :

- les avis recueillis préalablement à l'autorisation en litige sont irréguliers dès lors qu'ils ne portent pas sur le seul projet objet de la demande d'autorisation, mais sur un projet plus important prévoyant la réalisation de quatre aérogénérateurs ;

- l'étude d'impact produite à l'appui de la demande d'autorisation est irrégulière dès lors qu'elle porte sur un projet de quatre éoliennes et qu'elle n'a donc pas permis d'apprécier les impacts propres au seul projet visé par l'arrêté en litige ;

- l'étude d'impact est insuffisante s'agissant de l'analyse des impacts cumulés du projet litigieux avec les autres installations ou projets existants ;

- l'étude géotechnique est insuffisante ; il en est de même des informations relatives aux travaux relatifs aux terrains, aux pistes et aux fondations ;

- l'étude d'impact est insuffisante s'agissant des modalités prévues pour raccorder le projet éolien au réseau de distribution de l'électricité ;

- la même étude est insuffisante s'agissant des impacts acoustiques de l'installation et repose, en outre, sur un protocole de mesure irrégulier ;

- la société pétitionnaire n'a pas procédé dans son étude d'impact à une évaluation suffisante des solutions alternatives à son projet ;

- l'arrêté en litige n'est pas suffisamment motivé en tant qu'il vaut dérogation à la législation relative aux espèces protégées ;

Sur le bien-fondé de l'arrêté :

- l'arrêté en litige est illégal en raison de l'illégalité de la mise en compatibilité du plan local d'urbanisme de la commune de Cintegabelle approuvée le 23 mai 2022 : la création des secteurs " Ae " ne présente pas un caractère d'intérêt général et n'est pas compatible avec le schéma de cohérence territoriale du Pays Sud Toulousain ;

- la société Aganaguès ne dispose pas de capacités techniques et financières suffisantes ; le dossier de demande était, en outre, incomplet sur ce point ;

- le projet porte atteinte au principe d'utilisation économe des sols naturels, agricoles et forestiers mentionné à l'article L. 511-1 du code de l'environnement ;

- il porte atteinte à la qualité des paysages de la basse vallée de l'Ariège et aux éléments remarquables du patrimoine culturel et archéologique ;

- il porte atteinte à la ressource en eau et présente en outre un risque au regard de sa localisation en zone d'aléa de mouvements de terrain ;

- il porte atteinte à la santé publique en entraînant des nuisances acoustiques et des phénomènes d'ombre portée et d'effet stroboscopique ;

- il porte atteinte à la faune et l'autorisation ne pouvait être légalement accordée au regard des impacts attendus sur les oiseaux et les chiroptères ;

- le préfet a commis une erreur de droit et une erreur manifeste d'appréciation en accordant la dérogation au titre de la législation " espèces protégées " : le projet ne répond pas à une raison impérative d'intérêt public majeur ; il n'a pas été recherché une solution alternative ; le projet menace le maintien des espèces dans un état de conservation favorable.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 31 juillet 2023, 9 février 2024 et 12 avril 2024, les sociétés par actions simplifiée Aganaguès et Engie Green Cintegabelle, représentées par Me Elfassi, concluent, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à ce qu'il soit sursis à statuer au titre de l'article L. 181-18 du code de l'environnement et, en tout état de cause, à ce qu'il soit mis à la charge de chacun des requérants une somme de 1 000 euros à verser à chacune d'elles sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles font valoir que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 août 2023, le préfet de la Haute-Garonne conclut, à titre principal, au rejet de la requête et, à titre subsidiaire, à ce qu'il soit sursis à statuer au titre de l'article L. 181-18 du code de l'environnement.

Il fait valoir que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

La clôture immédiate de l'instruction a été prononcée le 3 mai 2024 en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative.

Des observations présentées pour la commune de Cintegabelle, représentée par Me Courrech, ont été enregistrées le 17 décembre 2024.

Les parties ont été informées le 9 janvier 2025 que la cour était susceptible de surseoir à statuer, sur le fondement de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, pour permettre la régularisation des vices tenant à l'insuffisance de l'étude d'impact s'agissant des aspects liés au sous-sol et aux eaux souterraines ainsi qu'à la méconnaissance de l'article L. 511-1 du code de l'environnement s'agissant de ces mêmes aspects.

Des observations en réponse à cette information, produites par les deux sociétés pétitionnaires, représentées par Me Elfassi, ont été enregistrées le 13 janvier 2025.

Des observations en réponse à cette même information, produites par les requérants, représentés par la SCP Bouyssou et associés, ont été enregistrées le 15 janvier 2025.

II - Par une requête et des mémoires, enregistrés sous le n° 23TL00235 le 23 janvier 2023, le 4 janvier 2024 et le 14 mars 2024, l'association " Hers Ariège Environnement " (HAE), M. BO... BK..., Mme EB... GM..., Mme CW... AL..., M. FU... CZ..., M. BN... FG..., Mme ES... FG..., M. DS... AG..., Mme BU... CO..., M. FN... GA..., M. CD... DU..., Mme GG... ET..., M. FI... DB..., M. AO... ET..., Mme I... ET..., M. AR... ET..., Mme BL... ET..., M. EQ... CN..., Mme BB... CN..., M. DH... GH..., M. BF... GH..., Mme F... GH..., Mme EY... AM..., M. EQ... FQ..., M. BE... FQ..., M. U... FQ..., Mme DJ... FQ..., Mme EW... FQ..., Mme FP... FQ..., Mme ES... AP..., M. Z... AP..., M. DM... DT..., M. FU... BZ..., M. AU... AJ..., M. P... AJ..., M. FU... AJ..., M. DA... AS..., M. AC... BQ..., Mme DN... BQ..., Mme DX... BA..., M. FV... BA..., M. GE... O..., M. BE... AK..., Mme DV... AK..., Mme DO... CG..., M. AI... M..., M. G... AY..., M. EJ... DI..., Mme EH... GJ..., M. Q... AN..., Mme CI... CH..., Mme DK... FK..., M. DR... FK..., Mme AH... FK..., M. C... EK..., Mme DD... EK..., M. CB... BD..., Mme BP... CS..., M. BR... DZ..., Mme AX... DZ..., M. DR... DL..., Mme FE... DL..., M. L... FM..., Mme FF... EA..., M. AA... A..., Mme CC... A..., M. FR... A..., Mme CA... CK..., M. GE... CK..., M. J... AF..., Mme FT... AF..., Mme CF... BJ..., M. DC... S..., Mme GO... S..., M. BH... BX..., Mme FL... BX..., M. CU... EM..., Mme V... EM..., M. AA... EM..., M. BM... DW..., M. BI... AB..., M. AE... FB..., M. CV... FY..., Mme CC... FZ..., M. DP... EE..., Mme EO... FH..., M. EL... EE..., Mme GB... EE..., M. R... FA..., M. FC... EE..., Mme DQ... EX..., Mme GL... Duc, M. EI... AQ..., M. BY... CQ..., M. CV... B..., M. BY... AD..., Mme FJ... GI..., Mme BV... CP..., M. AV... CE..., M. GF... B..., Mme DF... ER..., Mme BC... GD..., Mme ED... DY..., M. BI... DY..., Mme FX... X..., Mme EV... AZ..., Mme CW... E..., M. J... EU..., Mme BT... BS..., M. FO... AW..., M. P... EF..., Mme DG... K..., M. W... Y..., M. EG... AF..., Mme EO... GN..., M. FU... CL..., M. GK... CY..., M. FR... AT..., Mme T... BG..., Mme FD... GC..., Mme D... FS..., Mme BW... CJ..., Mme DE... EN..., M. FI... EN..., M. GE... CR..., Mme EC... CR..., M. GE... CT..., M. EP... FK..., Mme EZ... FK..., Mme EY... H..., M. BE... H..., Mme DN... N..., M. FR... CM..., M. FV... FW... et M. CB... CX..., représentés par la SCP Bouyssou et associés, demandent à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté du 22 septembre 2022 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a accordé une autorisation environnementale à la société par actions simplifiée Engie Green Cintegabelle pour construire et exploiter une installation de production d'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent comprenant trois aérogénérateurs au lieu-dit " Les Parrounes " sur le territoire de la commune de Cintegabelle ;

2°) à titre subsidiaire, d'annuler le même arrêté en tant qu'il autorise la construction et l'exploitation de l'aérogénérateur numéroté " E 1 " ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

Sur la régularité de l'arrêté :

- les avis recueillis préalablement à l'autorisation en litige sont irréguliers dès lors qu'ils ne portent pas sur le seul projet objet de la demande d'autorisation, mais sur un projet plus important prévoyant la réalisation de quatre aérogénérateurs ;

- l'étude d'impact produite à l'appui de la demande d'autorisation est irrégulière dès lors qu'elle porte sur un projet de quatre éoliennes et qu'elle n'a donc pas permis d'apprécier les impacts propres au seul projet visé par l'arrêté en litige ;

- l'étude d'impact est insuffisante s'agissant de l'analyse des impacts cumulés du projet litigieux avec les autres installations ou projets existants ;

- l'étude géotechnique est insuffisante ; il en est de même des informations relatives aux travaux relatifs aux terrains, aux pistes et aux fondations ;

- l'étude d'impact est insuffisante s'agissant des modalités prévues pour raccorder le projet éolien au réseau de distribution de l'électricité ;

- la même étude est insuffisante s'agissant des impacts acoustiques de l'installation et repose, en outre, sur un protocole de mesure irrégulier ;

- la société pétitionnaire n'a pas procédé dans son étude d'impact à une évaluation suffisante des solutions alternatives à son projet ;

- l'arrêté en litige n'est pas suffisamment motivé en tant qu'il vaut dérogation à la législation relative aux espèces protégées ;

Sur le bien-fondé de l'arrêté :

- l'arrêté en litige est illégal en raison de l'illégalité de la mise en compatibilité du plan local d'urbanisme de la commune de Cintegabelle approuvée le 23 mai 2022 : la création des secteurs " Ae " ne présente pas un caractère d'intérêt général et n'est pas compatible avec le schéma de cohérence territoriale du Pays Sud Toulousain ;

- le projet porte atteinte au principe d'utilisation économe des sols naturels, agricoles et forestiers mentionné à l'article L. 511-1 du code de l'environnement ;

- il porte atteinte à la qualité des paysages de la basse vallée de l'Ariège et aux éléments remarquables du patrimoine culturel et archéologique ;

- il porte atteinte à la ressource en eau et présente en outre un risque au regard de sa localisation en zone d'aléa de mouvements de terrain ;

- il porte atteinte à la santé publique en entraînant des nuisances acoustiques et des phénomènes d'ombre portée et d'effet stroboscopique ;

- il porte atteinte à la faune et l'autorisation ne pouvait être légalement accordée au regard des impacts attendus sur les oiseaux et les chiroptères ;

- l'arrêté en litige est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation en ce qu'il autorise la réalisation de l'éolienne " E 1 " isolée par rapport aux autres ;

- le préfet a commis une erreur de droit et une erreur manifeste d'appréciation en accordant la dérogation au titre de la législation " espèces protégées " : le projet ne répond pas à une raison impérative d'intérêt public majeur ; il n'a pas été recherché une solution alternative ; le projet menace le maintien des espèces dans un état de conservation favorable.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 31 juillet 2023, 9 février 2024 et 12 avril 2024, les sociétés par actions simplifiée Aganaguès et Engie Green Cintegabelle, représentées par Me Elfassi, concluent, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à ce qu'il soit sursis à statuer au titre de l'article L. 181-18 du code de l'environnement et, en tout état de cause, à ce qu'il soit mis à la charge de chacun des requérants une somme de 1 000 euros à verser à chacune d'elles sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles font valoir que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 août 2023, le préfet de la Haute-Garonne conclut, à titre principal, au rejet de la requête et, à titre subsidiaire, à ce qu'il soit sursis à statuer au titre de l'article L. 181-18 du code de l'environnement.

Il fait valoir que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

La clôture immédiate de l'instruction a été prononcée le 3 mai 2024 en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative.

Des observations présentées pour la commune de Cintegabelle, représentée par Me Courrech, ont été enregistrées le 17 décembre 2024.

Les parties ont été informées le 9 janvier 2025 que la cour était susceptible de surseoir à statuer, sur le fondement de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, pour permettre la régularisation des vices tenant à l'insuffisance de l'étude d'impact s'agissant des aspects liés au sous-sol et aux eaux souterraines ainsi qu'à la méconnaissance de l'article L. 511-1 du code de l'environnement s'agissant de ces mêmes aspects.

Des observations en réponse à cette information, produites par les deux sociétés pétitionnaires, représentées par Me Elfassi, ont été enregistrées le 13 janvier 2025.

Des observations en réponse à cette même information, produites par les requérants, représentés par la SCP Bouyssou et associés, ont été enregistrées le 15 janvier 2025.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code de l'énergie ;

- le code de l'environnement ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de l'urbanisme ;

- la loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 ;

- la loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023 ;

- le décret n° 2020-456 du 21 avril 2020 ;

- le décret n° 2023-1366 du 28 décembre 2023 ;

- l'arrêté du ministre de l'agriculture et de la pêche et du ministre de l'environnement du 9 juillet 1999 fixant la liste des espèces de vertébrés protégées menacées d'extinction et dont l'aire de répartition excède le territoire d'un département ;

- l'arrêté du ministre de l'agriculture et de la ministre de l'écologie du 19 février 2007 fixant les conditions de demande et d'instruction des dérogations définies au 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement ;

- l'arrêté des mêmes ministres du 23 avril 2007 fixant la liste des mammifères protégés sur l'ensemble du territoire et les modalités de leur protection ;

- l'arrêté des mêmes ministres du 29 octobre 2009 fixant la liste des oiseaux protégés sur l'ensemble du territoire et les modalités de leur protection ;

- l'arrêté de la ministre de l'écologie du 26 août 2011 relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent soumises à autorisation au titre de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement ;

- l'arrêté de la ministre de la transition écologique et du ministre de l'agriculture du 8 janvier 2021 fixant la liste des amphibiens et des reptiles protégés ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jazeron, premier conseiller,

- les conclusions de M. Diard, rapporteur public,

- les observations de Me Martinez, représentant les requérants,

- les observations de Me Bergès, représentant les sociétés pétitionnaires,

- et les observations de Me Marti, représentant la commune de Cintegabelle, ainsi que celles de M. Rémy, conseiller municipal.

Des notes en délibéré, produites dans chacune des deux instances par les requérants, représentés par la SCP Bouyssou et associés, ont été enregistrées le 22 janvier 2025.

Des notes en délibéré, produites dans chacune des deux instances par les sociétés pétitionnaires, représentées par Me Elfassi, ont été enregistrées le 24 janvier 2025.

Des notes en délibéré, produites dans chacune des deux instances par la commune de Cintegabelle, représentée par Me Courrech, ont été enregistrées le 28 janvier 2025.

Considérant ce qui suit :

1. Les sociétés Aganaguès et Engie Green Cintegabelle ont initié conjointement, dans les années 2010, un projet visant à la construction et à l'exploitation d'une installation de production d'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent au lieu-dit " Les Parrounes " sur le territoire de la commune de Cintegabelle (Haute-Garonne). Les deux sociétés ont déposé, en avril 2019, deux premières demandes d'autorisation environnementale portant respectivement sur un aérogénérateur pour la première société et quatre aérogénérateurs pour la seconde. La mission régionale d'autorité environnementale d'Occitanie a émis un avis sur ces dossiers le 12 février 2020 et les sociétés pétitionnaires ont décidé de retirer leurs demandes en avril 2020 pour retravailler leur projet. Les deux mêmes sociétés ont déposé, le 28 décembre 2020, deux nouvelles demandes d'autorisation environnementale portant respectivement sur une éolienne pour la société Aganaguès et trois éoliennes pour la société Engie Green Cintegabelle. La mission régionale d'autorité environnementale d'Occitanie a émis son avis sur ces demandes le 20 juillet 2021, puis le Conseil national de protection de la nature a rendu un avis au titre de la législation sur les espèces protégées le 17 septembre 2021. L'enquête publique a été organisée du 12 février au 16 mars 2022 et le commissaire enquêteur a émis son avis le 12 avril 2022.

2. Par un premier arrêté du 22 septembre 2022, le préfet de la Haute-Garonne a accordé l'autorisation environnementale sollicitée par la société Aganaguès pour une éolienne d'une puissance de 3 mégawatts ainsi qu'un poste de livraison électrique. Par un second arrêté pris le même jour, le même préfet a accordé l'autorisation environnementale sollicitée par la société Engie Green Cintegabelle pour trois aérogénérateurs présentant une puissance unitaire de 3 mégawatts ainsi que deux postes de livraison électrique. Par leur requête n° 23TL00220, l'association " Hers Ariège Environnement " et cent trente-quatre personnes physiques résidant sur le territoire de la commune de Cintegabelle ou des communes limitrophes demandent l'annulation de l'autorisation préfectorale concernant la société Aganaguès et, par leur requête n° 23TL00235, les mêmes requérants demandent l'annulation de l'arrêté concernant la société Engie Green Cintegabelle. Les deux requêtes présentant à juger des questions semblables, il y a lieu pour la cour de prononcer leur jonction pour y statuer par un seul et même arrêt.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. D'une part, il appartient au juge de plein contentieux d'apprécier le respect des règles relatives à la forme et à la procédure régissant la demande d'autorisation environnementale au regard des circonstances de droit et de fait en vigueur à la date de délivrance de l'autorisation et celui des règles de fond régissant le projet au regard des circonstances de droit et de fait en vigueur à la date à laquelle il se prononce, sous réserve du respect des règles d'urbanisme qui s'apprécie au regard des circonstances de droit et de fait applicables à la date de l'autorisation. D'autre part, les obligations relatives à la composition du dossier de demande d'autorisation relèvent des règles de procédure. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances affectant le dossier de demande ne sont susceptibles de vicier la procédure et ainsi d'entacher d'irrégularité l'autorisation que si elles ont eu pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision prise par l'administration.

En ce qui concerne la régularité de la procédure suivie :

S'agissant de la procédure d'instruction :

4. L'article L. 122-1 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable aux autorisations environnementales en litige, mentionne que : " (...) / III. - L'évaluation environnementale est un processus constitué de l'élaboration, par le maître d'ouvrage, d'un rapport d'évaluation des incidences sur l'environnement, dénommé ci-après "étude d'impact", de la réalisation des consultations prévues à la présente section, ainsi que de l'examen, par l'autorité compétente pour autoriser le projet, de l'ensemble des informations présentées dans l'étude d'impact et reçues dans le cadre des consultations effectuées et du maître d'ouvrage. / L'évaluation environnementale permet de décrire et d'apprécier de manière appropriée, en fonction de chaque cas particulier, les incidences notables directes et indirectes d'un projet sur les facteurs suivants : / 1° La population et la santé humaine ; / 2° La biodiversité, en accordant une attention particulière aux espèces et aux habitats protégés (...) ; / 3° Les terres, le sol, l'eau, l'air et le climat ; / 4° Les biens matériels, le patrimoine culturel et le paysage ; / 5° L'interaction entre les facteurs mentionnés aux 1° à 4°. / (...) / Lorsqu'un projet est constitué de plusieurs travaux, installations, ouvrages ou autres interventions dans le milieu naturel ou le paysage, il doit être appréhendé dans son ensemble, y compris en cas de fractionnement dans le temps et dans l'espace et en cas de multiplicité de maîtres d'ouvrage, afin que ses incidences sur l'environnement soient évaluées dans leur globalité. / (...) / V. - Lorsqu'un projet est soumis à évaluation environnementale, le dossier présentant le projet comprenant l'étude d'impact et la demande d'autorisation déposée est transmis pour avis à l'autorité environnementale ainsi qu'aux collectivités territoriales et à leurs groupements intéressés par le projet. / (...) ".

5. Il résulte de l'instruction que les deux demandes d'autorisation environnementale présentées par les sociétés Aganaguès et Engie Green Cintegabelle le 28 décembre 2020 portent sur des installations classées de la même nature, dont la réalisation est prévue de manière simultanée sur des sites géographiques proches l'un de l'autre et qui ont en outre vocation à partager des équipements communs, notamment les aménagements de voirie. En conséquence, les deux demandes d'autorisation en litige doivent être regardées comme concernant un seul et même projet au sens et pour l'application des dispositions précitées du dernier alinéa du III de l'article L. 122-1 du code de l'environnement. Il s'ensuit que les deux demandes devaient faire l'objet d'un processus d'évaluation environnementale global portant sur les deux parties du projet éolien. Les deux sociétés pétitionnaires étaient dès lors tenues de réaliser, comme elles l'ont fait, une étude d'impact unique permettant d'apprécier les incidences des quatre machines prises dans leur ensemble et les avis des autorités et services consultés sur le projet ont pu être régulièrement rendus, pour les mêmes raisons, sur les deux demandes prises conjointement. Par suite et alors au surplus que, contrairement à ce qui est soutenu, l'étude d'impact unique présentée à l'appui des demandes d'autorisation permet également d'appréhender les incidences propres à chacune des éoliennes projetées, notamment en fonction de leur lieu d'implantation, les requérants ne sont fondés à soutenir ni que les deux composantes du projet auraient dû donner lieu à la réalisation de deux études d'impact distinctes, ni que les deux demandes auraient dû nécessairement faire l'objet de deux avis séparés de la part de chaque autorité consultée.

S'agissant du contenu de l'étude d'impact :

6. L'article R. 122-5 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable au présent litige, dispose que : " I. - Le contenu de l'étude d'impact est proportionné à la sensibilité environnementale de la zone susceptible d'être affectée par le projet, à l'importance et la nature des travaux, installations, ouvrages, ou autres interventions dans le milieu naturel ou le paysage projetés et à leurs incidences prévisibles sur l'environnement ou la santé humaine. / (...) / II. - En application du 2° du II de l'article L. 122-3, l'étude d'impact comporte les éléments suivants, en fonction des caractéristiques spécifiques du projet et du type d'incidences sur l'environnement qu'il est susceptible de produire : / (...) / 3° Une description des aspects pertinents de l'état initial de l'environnement et de leur évolution en cas de mise en œuvre du projet (...) ; / 4° Une description des facteurs mentionnés au III de l'article L. 122-1 susceptibles d'être affectés de manière notable par le projet (...) ; / 5° Une description des incidences notables que le projet est susceptible d'avoir sur l'environnement résultant, entre autres : / (...) / c) De l'émission de polluants, du bruit, de la vibration, de la lumière, la chaleur et la radiation, de la création de nuisances (...) ; / d) Des risques pour la santé humaine, pour le patrimoine culturel ou pour l'environnement ; / e) Du cumul des incidences avec d'autres projets existants ou approuvés (...). Ces projets sont ceux qui, lors du dépôt de l'étude d'impact : / - ont fait l'objet d'une étude d'incidence environnementale au titre de l'article R. 181-14 et d'une enquête publique ; / - ont fait l'objet d'une évaluation environnementale au titre du présent code et pour lesquels un avis de l'autorité environnementale a été rendu public. / (...) / 7° Une description des solutions de substitution raisonnables qui ont été examinées par le maître d'ouvrage, en fonction du projet proposé et de ses caractéristiques spécifiques, et une indication des principales raisons du choix effectué, notamment une comparaison des incidences sur l'environnement et la santé humaine ; / 8° Les mesures prévues par le maître de l'ouvrage pour : / - éviter les effets négatifs notables du projet sur l'environnement ou la santé humaine et réduire les effets n'ayant pu être évités ; / - compenser, lorsque cela est possible, les effets négatifs notables du projet sur l'environnement ou la santé humaine qui n'ont pu être ni évités ni suffisamment réduits. S'il n'est pas possible de compenser ces effets, le maître d'ouvrage justifie cette impossibilité. / La description de ces mesures doit être accompagnée de l'estimation des dépenses et de l'exposé des effets attendus de ces mesures à l'égard des impacts du projet sur les éléments mentionnés au 5° ; / (...) ".

Quant à l'analyse des impacts cumulés :

7. Il résulte de l'instruction que l'étude d'impact produite par les sociétés Aganaguès et Engie Green Cintegabelle comporte un chapitre consacré à l'analyse des impacts cumulés des installations litigieuses avec les autres projets et aménagements identifiés dans les environs, à savoir le parc éolien de Calmont en exploitation à 9 kilomètres, le parc éolien de Gibel autorisé situé à plus de 14 kilomètres et trois parcs photovoltaïques projetés ou réalisés sur le territoire de la commune de Cintegabelle. L'étude d'impact, illustrée par des photomontages, conclut à des incidences cumulées très faibles à négligeables sur le plan paysager entre le projet et les parcs photovoltaïques locaux. Elle conclut également à des impacts cumulés très faibles sur la faune en relevant que les habitats et espèces recensés sont très différents entre le site d'implantation du projet, marqué par un contexte agricole, et les sites des parcs photovoltaïques, issus d'anciennes gravières. Elle prend en compte les suivis de mortalité de l'avifaune et des chiroptères réalisés sur le parc éolien de Calmont, lesquels ont été annexés à l'étude et intégrés dans l'analyse, alors même que les incidences cumulées sur ces espèces restent limitées compte tenu de la distance séparant les deux parcs. Les auteurs de l'étude d'impact n'étaient enfin pas tenus d'inclure dans leur analyse l'unité de méthanisation autorisée à proximité en 2021 dès lors que celle-ci n'avait fait l'objet ni d'une enquête publique ni d'un avis de l'autorité environnementale. Par suite, l'étude d'impact produite par les sociétés pétitionnaires présente une analyse suffisante des impacts cumulés des éoliennes projetées avec les autres projets existants ou approuvés.

Quant au sous-sol et à la ressource en eau :

8. Il résulte de l'instruction, notamment de l'étude d'impact, que les sites retenus pour l'implantation du parc éolien en litige se trouvent dans un milieu géologique et hydrogéologique particulièrement sensible constitué par les alluvions de la basse plaine de l'Ariège, lequel est marqué par une composition peu stable des premières couches du sous-sol, une exposition au risque de retrait et gonflement des argiles et une faible profondeur de la nappe phréatique. Il ressort notamment des cartes insérées dans l'étude d'impact que, s'agissant du risque de retrait et gonflement des argiles, trois des éoliennes projetées se situent en zone d'aléa moyen tandis que la quatrième, portée par la société Aganaguès et référencée " E 4 ", est implantée en zone d'aléa fort au titre de ce risque. Il ressort de ces mêmes cartes que, s'agissant du risque de remontée de nappe phréatique, si deux éoliennes se trouvent en zone de sensibilité faible, l'éolienne " E 3 " se situe en revanche en zone de sensibilité moyenne et l'éolienne " E 4 " est, au moins en partie, prévue en zone de " nappe sub-affleurante ". Lors de l'instruction des demandes d'autorisation présentées en avril 2019, la mission régionale d'autorité environnementale d'Occitanie, relevant la sensibilité élevée du site sur ces points, avait recommandé de compléter l'étude d'impact en réalisant dès à présent des études géotechniques et hydrogéologiques pour assurer la stabilité des machines et maîtriser les incidences de ces dernières sur les masses d'eaux souterraines.

9. Les sociétés pétitionnaires ont fait réaliser une " étude géotechnique préalable " de stade " mission G 1 - étude de site " par un bureau d'études en septembre 2020, laquelle a été jointe en annexe de l'étude d'impact présentée avec les nouvelles demandes d'autorisation le 28 décembre 2020 et dont les conclusions ont été reprises dans ladite étude. Néanmoins, d'une part, si l'étude d'impact mentionne que les fondations des aérogénérateurs ne devraient pas présenter une profondeur excédant trois mètres, ni cette étude, ni l'étude géotechnique préalable, ne justifient de la faisabilité et du volume de ces fondations dans le contexte susmentionné d'un sous-sol peu stable, alors qu'il ressort de ces deux mêmes études que le poids important des machines est susceptible de provoquer un tassement des premières couches, que la pression de la nappe phréatique peut conduire à envisager des fondations plus volumineuses et qu'il reste nécessaire de réaliser des sondages profonds au droit de chaque éolienne pour s'assurer de la résistance des matériaux du sous-sol. D'autre part, si les mesures piézométriques ponctuelles réalisées dans le cadre de l'étude géotechnique ont permis de préciser les niveaux de la nappe phréatique en période de basses eaux, il en ressort non seulement que la nappe est située à des profondeurs comprises entre 3,2 mètres et 5,5 mètres pendant cette période, soit des niveaux proches de ceux prévus pour les fondations des éoliennes, mais également que l'amplitude de la nappe pourrait varier de l'ordre de 2,2 mètres entre les périodes de basses eaux et hautes eaux, si bien que la présence des fondations aura nécessairement des incidences sur l'écoulement de la nappe en période de hautes eaux, sans que l'étude d'impact n'expose une analyse précise de ces incidences. En outre, alors que l'étude géotechnique et l'étude d'impact indiquaient que les piézomètres seraient maintenus sur site pendant un an à partir de septembre 2020 pour vérifier les variations du niveau de la nappe sur cette durée, il ne résulte pas de l'instruction que les résultats de ces analyses aient été portés à la connaissance de l'administration ou du public et les résultats en cause n'ont au demeurant pas non plus été versés aux débats devant la cour.

10. Eu égard à l'ensemble des imprécisions constatées ci-dessus et compte tenu de la sensibilité particulière de la zone, alors au surplus que l'étude d'impact comporte à plusieurs reprises des indications contradictoires sur les niveaux de risques et d'impacts prévisibles du projet du point de vue géologique et hydrogéologique et comme l'a d'ailleurs estimé à nouveau la mission régionale d'autorité environnementale d'Occitanie dans son avis du 20 juillet 2021, l'étude d'impact, même complétée avec les éléments issus de l'étude géotechnique préalable, ne peut être regardée comme présentant, en l'état, un caractère suffisant s'agissant de l'analyse des interactions entre les aérogénérateurs, le sous-sol et les eaux souterraines. L'insuffisance ainsi relevée ayant eu pour effet de nuire à l'information du public et ayant été de nature à exercer une influence sur les décisions en litige, le moyen soulevé sur ce point doit être accueilli.

Quant au raccordement au réseau électrique :

11. Le raccordement d'une installation de production d'électricité au réseau électrique à partir de son poste de livraison se rattache à une opération distincte de la construction et de l'exploitation de l'installation en cause et est sans rapport avec la procédure de délivrance de l'autorisation environnementale relative à cette dernière. Par conséquent et alors que les sociétés pétitionnaires ont tout de même décrit un tracé de raccordement possible dans l'étude d'impact, les requérants ne peuvent utilement invoquer l'insuffisance de ladite étude sur ce point.

Quant à l'analyse des impacts acoustiques :

12. L'étude d'impact produite à l'appui des demandes d'autorisation expose clairement la méthodologie retenue pour l'analyse des incidences sonores du projet et pour l'élaboration du plan de bridage des éoliennes. Elle présente les modes de régulation prévus sur chaque machine pour respecter les émergences réglementaires selon les périodes et les conditions de vent et mentionne le niveau des émergences résiduelles pour chacun des douze lieux habités les plus proches dans toutes les conditions étudiées. Les requérants ne peuvent par ailleurs utilement se prévaloir de l'annulation du " protocole de mesure acoustique des parcs éoliens ", prononcée par le Conseil d'Etat dans sa décision n° 465036 du 8 mars 2024, dès lors que l'étude acoustique présentée dans l'étude d'impact n'a pas été réalisée selon ce protocole, mais selon le projet de norme NFS 31-114. Par suite, l'analyse des incidences acoustiques n'est pas insuffisante.

Quant à l'analyse des solutions alternatives :

13. L'étude d'impact produite par les sociétés pétitionnaires contient un chapitre dédié à la justification du choix du site et à la présentation des variantes d'implantation, lequel expose précisément la démarche suivie par les porteurs du projet pour parvenir à la solution proposée, laquelle est apparue comme ayant le moindre impact sur l'environnement après avoir recherché les zones d'implantation potentielles à l'échelle départementale et intercommunale, puis analysé six variantes, comprenant entre quatre et neuf éoliennes, réparties sur quatre secteurs distincts de la commune de Cintegabelle. Les requérants ne critiquent pas sérieusement les conclusions de l'étude d'impact sur ce point en se bornant à regretter qu'il n'ait pas été envisagé une variante prévoyant seulement trois éoliennes, alors au demeurant que l'autorité environnementale a salué la qualité des justifications ainsi apportées. Dès lors, l'étude d'impact comporte une description suffisante des solutions de substitution raisonnables examinées par les maîtres d'ouvrage.

En ce qui concerne le bien-fondé des autorisations d'exploiter :

S'agissant des capacités de la société Aganaguès :

14. L'article L. 181-27 du code de l'environnement dispose que : " L'autorisation prend en compte les capacités techniques et financières que le pétitionnaire entend mettre en œuvre, à même de lui permettre de conduire son projet dans le respect des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 et d'être en mesure de satisfaire aux obligations de l'article L. 512-6-1 lors de la cessation d'activité. ". En outre, l'article D. 181-15-2 du même code prévoit que : " Lorsque l'autorisation environnementale concerne un projet relevant du 2° de l'article L. 181-1, le dossier de demande est complété dans les conditions suivantes. / I. - Le dossier est complété des pièces et éléments suivants : / (...) / 3° Une description des capacités techniques et financières mentionnées à l'article L. 181-27 dont le pétitionnaire dispose, ou, lorsque ces capacités ne sont pas constituées au dépôt de la demande d'autorisation, les modalités prévues pour les établir au plus tard à la mise en service de l'installation ; / (...) ". Lorsque le juge se prononce sur la légalité de l'autorisation avant la mise en service de l'installation, il lui appartient de vérifier la pertinence des modalités selon lesquelles le pétitionnaire prévoit de disposer de capacités financières et techniques suffisantes pour assumer l'ensemble des exigences susceptibles de découler du fonctionnement, de la cessation éventuelle de l'exploitation et de la remise en état du site au regard des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement, ainsi que les garanties de toute nature qu'il peut être appelé à constituer à cette fin en application de l'articles L. 516-1 du même code. Le dossier d'une demande d'autorisation déposée depuis le 1er mars 2017 ne doit plus comporter des indications précises et étayées sur les capacités techniques et financières exigées par l'article L. 181-27, mais seulement une présentation des modalités prévues pour établir ces capacités, si elles ne sont pas encore constituées.

15. Il résulte de l'instruction, notamment du dossier de demande d'autorisation déposée par la société Aganaguès, que l'actionnariat de cette société est constitué par l'association " Les Energies d'Aganaguès ", par dix habitants du territoire et par deux sociétés impliquées dans le secteur de " l'énergie citoyenne ", à savoir la société coopérative Enercoop Midi-Pyrénées et la société Energie Partagée Investissement. Si la société Aganaguès ne possède aucune capacité propre pour construire puis exploiter un parc éolien, le dossier de demande mentionne qu'elle prévoit de s'appuyer sur les compétences techniques de la société Engie Green, soit l'un des principaux acteurs de l'industrie éolienne en France, tant pour l'exécution des travaux que pour l'exploitation, la maintenance et la surveillance de l'aérogénérateur projeté. Le même dossier précise que les contrats liant les deux sociétés pour l'organisation de la maîtrise d'œuvre et des prestations liées à l'exploitation de l'éolienne sont en cours d'élaboration et la circonstance que lesdits contrats ne soient pas encore signés à la date du présent arrêt est sans incidence sur la pertinence des modalités ainsi prévues par la société Aganaguès pour disposer, le moment venu, des capacités techniques nécessaires à la conduite de sa partie du projet du parc éolien.

16. De même, il ressort du dossier de demande que, si la société Aganaguès ne dispose pas actuellement des capacités financières suffisantes pour prendre en charge l'investissement nécessaire à la construction de l'aérogénérateur autorisé, les sociétés Enercoop Midi-Pyrénées et Energie Partagée Investissement participant à son actionnariat possèdent, pour leur part, des ressources suffisantes comme en témoignent leurs bilans versés au dossier. La première de ces sociétés a par ailleurs attesté, par une lettre jointe à la demande d'autorisation, pouvoir apporter les trois-quarts des fonds propres requis pour cet investissement. Le dossier de demande a ainsi permis à l'administration et au public d'être suffisamment informés sur les modalités prévues par la société Aganaguès pour se procurer les capacités financières nécessaires au projet. La société pétitionnaire a également produit, à l'appui de ses écritures devant la cour, outre les derniers rapports de gestion des deux sociétés actionnaires attestant de la croissance de leur capital, une lettre de la société Energie Partagée Investissement confirmant son intention de participer à l'investissement. Eu égard à l'ensemble de ces éléments, alors au surplus que le plan d'affaires prévisionnel sur vingt ans fait ressortir des résultats nets positifs en phase exploitation et que l'arrêté en litige impose à la société Aganaguès de constituer des garanties financières pour la remise en état des lieux, ladite société doit être regardée comme justifiant de la pertinence des modalités prévues pour disposer en temps utile des capacités financières adaptées au projet.

S'agissant des intérêts visés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement :

17. L'article L. 181-3 du code de l'environnement prévoit que : " I. - L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent la prévention des dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1 du code de l'environnement ainsi qu'à l'article L. 161-1 du code minier selon les cas. / (...) ". L'article L. 511-1 du même code mentionne que : " Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation économe des sols naturels, agricoles ou forestiers, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique. / (...) ".

Quant à l'utilisation des sols agricoles :

18. Il résulte de l'instruction, notamment de l'étude d'impact, que les aérogénérateurs projetés ont vocation à être implantés sur des parcelles actuellement cultivées, consacrées à la production de céréales et présentant un bon potentiel agronomique. L'impact de l'opération sur les terres agricoles restera toutefois réduit dès lors qu'elle n'immobilisera que 3,5 hectares en phase de travaux, soit 0,1 % de la surface agricole utile totale de la commune, et 2,7 hectares en phase d'exploitation, soit 0,08 % de cette même surface. Les sociétés pétitionnaires ont en outre recherché le moindre impact sur l'activité agricole en implantant les ouvrages en bordure des parcelles et en utilisant au maximum les chemins préexistants. Elles ont par ailleurs missionné la chambre d'agriculture de la Haute-Garonne pour réaliser l'étude de compensation agricole requise par l'article L. 112-1-3 du code rural et de la pêche maritime et ont prévu à ce titre de mobiliser une somme de 32 104 euros, supérieure à l'exigence règlementaire, pour contribuer à l'amélioration du réseau d'irrigation collective, au développement d'une unité de méthanisation locale et à la valorisation des " circuits courts " sur le territoire. Dans ces conditions et alors que l'Institut national de l'origine et de la qualité a également émis un avis favorable sur le projet, l'opération en cause ne méconnaît pas l'objectif d'utilisation économe des sols agricoles.

Quant aux paysages et au patrimoine :

19. L'autorité administrative peut refuser de délivrer l'autorisation environnementale sollicitée ou l'assortir de prescriptions spéciales si les installations projetées portent atteinte aux paysages avoisinants. Pour rechercher l'existence d'une atteinte à un paysage de nature à fonder le refus de l'autorisation ou les prescriptions spéciales accompagnant son octroi, il appartient à l'autorité administrative d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site sur lequel les installations sont projetées et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que ces installations pourraient avoir sur le site, compte tenu de la nature des installations et de leurs effets.

20. D'une part, le parc éolien en litige a vocation à s'insérer dans un paysage de vallée principalement agricole et largement anthropisé, marqué par la présence de lieux habités et de bâtiments agricoles dont un imposant silo à proximité immédiate du site projeté. Les nombreux photomontages produits dans l'étude d'impact ne mettent pas en exergue l'atteinte alléguée au grand paysage, malgré la hauteur des éoliennes culminant à 150 mètres en bout de pale, tant à l'échelle de la vallée que par rapport au panorama sur la chaîne des Pyrénées située à environ 30 kilomètres. Ni la situation isolée de l'éolienne " E 1 " prévue à 1,2 kilomètre des trois autres, ni la circonstance que la ligne des éoliennes " E 2 " à " E 4 " ne soit pas parallèle aux structures paysagères locales, n'apparaissent notamment suffisantes pour caractériser une telle atteinte. Les sociétés pétitionnaires ont par ailleurs proposé de prendre en charge la mise en place de haies pour atténuer les vues depuis les habitations les plus proches et les articles 5 des autorisations en litige reprennent cette mesure en exigeant de reconstituer un maillage bocager cohérent.

21. D'autre part, la zone d'implantation présente un nombre de monuments et sites protégés ou sensibles relativement faible et les seules incidences significatives ressortant des photomontages concernent l'église de Cintegabelle et la butte du Calvaire, sans qu'il n'en résulte pour autant une atteinte excessive compte tenu du caractère anthropisé du paysage avoisinant. Les autres monuments ou sites patrimoniaux répertoriés dans le secteur ne seront pas impactés visuellement par les aérogénérateurs autorisés par les arrêtés préfectoraux en litige, notamment l'abbaye de Boulbonne et le château de Terraqueuse situés dans la commune de Calmont.

22. Enfin, s'il est vrai que le site prévu pour accueillir l'éolienne " E 1 " est proche de la zone de vestiges archéologiques de Bonrepos, il ressort cependant des plans de l'opération que l'aérogénérateur en cause sera implanté à 270 mètres de la limite de cette zone. Le préfet de la région Occitanie a en outre prescrit un diagnostic d'archéologie préventive par un arrêté édicté le 2 mai 2019, tandis que les trois autres machines sont éloignées de toute zone de vestiges.

23. Il résulte de tout ce qui a été exposé aux trois points précédents que les arrêtés en litige ne sont pas entachés d'une erreur d'appréciation au regard de l'article L. 511-1 du code de l'environnement concernant la protection des paysages et la conservation du patrimoine.

Quant au sous-sol et à la ressource en eau :

24. En raison de l'insuffisance de l'étude d'impact s'agissant des aspects relatifs au sous-sol et aux eaux souterraines, telle que relevée aux points 8 à 10 du présent arrêt, la cour n'est pas en mesure de porter une appréciation sur la conformité du projet aux dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'environnement s'agissant de ces mêmes aspects. Par suite, il y a lieu de réserver la réponse au moyen soulevé sur le fondement de cet article sur ce point, dans l'attente de la régularisation éventuelle du vice tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact.

Quant aux aspects liés à la santé publique :

25. D'une part, il a été dit au point 12 du présent arrêt que les sociétés Aganaguès et Engie Green Cintegabelle ont prévu la mise en œuvre d'un plan de bridage des éoliennes pour maîtriser leurs impacts acoustiques et permettre le respect des émergences réglementaires selon les périodes et les conditions de vent. Le plan ainsi présenté comporte un bridage spécifique pendant la période nocturne en cohérence avec la préconisation émise par l'agence régionale de la santé d'Occitanie dans son avis du 9 février 2021. Les articles 7 des autorisations en litige reprennent cette mesure sous forme de prescription en imposant en outre aux porteurs de projet la réalisation d'une campagne de mesure des émissions sonores des éoliennes pendant les douze premiers mois de fonctionnement conformément aux articles 26 à 28 de l'arrêté ministériel du 26 août 2011 susvisé, ainsi que la révision du plan de bridage en cas de dépassement des valeurs règlementaires, sous le contrôle de l'inspection des installations classées pour la protection de l'environnement. Les requérants ne peuvent sérieusement soutenir que lesdits articles 7 seraient illégaux en raison de l'annulation prononcée par le Conseil d'Etat dans sa décision n° 465036 du 8 mars 2024, dès lors que cette annulation n'a porté que sur le II de l'article 28 de l'arrêté du 26 août 2011 et non sur le I de ce même article, sur lequel se fonde l'exigence de vérification de la conformité acoustique des installations dans les douze premiers mois d'exploitation.

26. D'autre part, bien que la règlementation relative à la perception des effets stroboscopiques des éoliennes ne s'applique en principe que vis-à-vis des bâtiments à usage de bureaux, les sociétés pétitionnaires ont procédé à une analyse des phénomènes d'ombres portées vis-à-vis des dix-huit habitations les plus proches au regard des seuils d'exposition fixés par cette règlementation. L'analyse ainsi réalisée ayant révélé que cinq des habitations concernées étaient susceptibles d'être impactées par ces phénomènes au-delà de ces seuils, les porteurs de projet ont proposé de procéder à une expertise spécifique en cas de gêne exprimée par les riverains et de prendre les mesures nécessaires en cas de dépassement des seuils, soit en adaptant le mode de fonctionnement des éoliennes, soit en mettant en place des masques visuels. En cohérence avec la recommandation émise par l'agence régionale de la santé d'Occitanie, le préfet a renforcé la mesure ainsi proposée en prescrivant aux pétitionnaires, par les articles 6 des arrêtés attaqués, de réaliser l'expertise des effets stroboscopiques dès la mise en service des aérogénérateurs.

27. Il résulte de tout ce qui a été développé aux deux points précédents que les arrêtés préfectoraux en litige ne portent pas atteinte aux intérêts visés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement s'agissant des enjeux de santé publique et de commodité du voisinage.

Quant à l'avifaune et aux chiroptères :

28. D'une part, il résulte de l'instruction que les sites retenus pour l'implantation du parc éolien ne sont inclus dans aucun zonage de protection ou d'inventaire écologique, mais seulement dans le domaine vital du milan royal, tel qu'identifié dans le plan national d'actions relatif à cette espèce, et à proximité du ruisseau La Jade, répertorié en tant que réservoir de biodiversité par le schéma régional de cohérence écologique de l'ancienne région Midi-Pyrénées. Les inventaires naturalistes réalisés par un bureau d'études spécialisé ont mis en évidence une représentation modérée de l'avifaune sur le secteur, lequel demeure cependant fréquenté par plusieurs espèces patrimoniales, notamment le milan royal et le milan noir, pour lesquels les impacts bruts du projet ont été estimés modérés au regard du risque de collision. S'agissant du milan royal, si les éoliennes seront implantées dans le domaine vital de l'espèce comme il a été rappelé ci-dessus, la zone retenue ne se situe toutefois que sur la frange nord de ce domaine et l'espèce a été très peu observée lors des inventaires. Le milan royal n'est pas nicheur dans le secteur, les effectifs repérés en période migratoire sont faibles et aucun dortoir hivernal n'a été identifié à proximité. S'agissant du milan noir, si l'espèce fréquente la zone de manière un peu plus importante et si elle niche probablement dans la ripisylve de la rivière Ariège, les effectifs recensés restent mesurés et aucun individu n'a été observé en période hivernale. Les requérants soulignent que la mission régionale d'autorité environnementale d'Occitanie a critiqué comme sous-estimés les impacts bruts évalués par l'étude d'impact pour ces deux espèces ainsi que pour le busard-Saint-Martin et le circaète Jean-le-Blanc. Il ressort néanmoins de l'étude d'impact que les sociétés pétitionnaires ont intégré à leur projet un nombre important de mesures pour éviter, réduire ou compenser les incidences potentielles des éoliennes sur l'avifaune en général et les rapaces en particulier, notamment en prévoyant une implantation des aérogénérateurs limitant l'effet " barrière ", une interruption du fonctionnement pendant les travaux agricoles et un système " anti collision " permettant la détection et l'effarouchement des oiseaux et, si besoin, l'arrêt automatisé des machines, dont l'efficacité n'est pas sérieusement remise en cause par les requérants. Dans ces conditions et comme l'ont d'ailleurs retenu l'autorité environnementale et le Conseil national de la protection de la nature dans leurs avis respectifs, à supposer même que les impacts bruts du projet aient été sous-estimés pour certaines espèces, il n'apparaît pas que les pétitionnaires auraient procédé à une évaluation erronée en retenant des impacts résiduels faibles pour l'ensemble de l'avifaune après prise en considération des mesures proposées, lesquelles ont par ailleurs été reprises et précisées aux articles 4.2 et aux titres III des arrêtés attaqués.

29. D'autre part, il est constant que les inventaires naturalistes ont mis en évidence une présence marquée des chiroptères au sein de la zone d'implantation, liée à la proximité de la ripisylve du ruisseau La Jade, avec quatorze espèces patrimoniales répertoriées et une activité importante au sol, mais également significative en hauteur pendant l'automne. Dans ce contexte, l'étude d'impact a évalué les impacts bruts du projet comme modérés à forts pour la grande majorité des espèces de chauves-souris et a prévu la mise en œuvre de mesures pour éviter, réduire ou compenser ces impacts, notamment la limitation de l'attractivité des plateformes, l'isolation des nacelles et la mise en place d'un plan de bridage spécifique permettant de réguler le fonctionnement des éoliennes suivant les conditions de vitesse de vent et de température. La mission régionale d'autorité environnementale d'Occitanie a évalué favorablement les mesures proposées par les sociétés pétitionnaires et, bien que regrettant que les éoliennes ne soient pas plus éloignées de la ripisylve, n'a pas remis en cause les impacts résiduels faibles retenus par l'étude d'impact après prise en compte de ces mesures, lesquelles ont été reprises sous forme de prescriptions aux articles 4.1 et aux titres III des arrêtés. Il est vrai que le Conseil national de la protection de la nature avait assorti son avis d'une réserve tendant à renforcer le plan de bridage pour les chiroptères en relevant d'1 kilomètre par heure le paramètre de vitesse de vent retenu pour la période automnale. Les porteurs de projet ont toutefois démontré, dans leur mémoire en réponse à cet avis, que le plan de bridage proposé permettait déjà de protéger entre 95 % et 99,6 % des chiroptères pendant l'automne et que le relèvement de la vitesse de vent préconisé par le Conseil national de protection de la nature ne représenterait qu'un gain très marginal pour la protection de ces espèces. Par suite et alors que les requérants ne contestent pas sérieusement les simulations présentées par les sociétés pétitionnaires sur ce point, l'autorité préfectorale a pu légalement accorder les autorisations avec le plan de bridage proposé par ces dernières.

30. Il résulte de tout ce qui a été énoncé aux deux points précédents que les arrêtés en litige ne sont pas entachés d'une erreur d'appréciation au regard de l'article L. 511-1 du code de l'environnement s'agissant de la protection des espèces d'avifaune et de chiroptères.

S'agissant de l'aérogénérateur référencé " E 1 " :

31. Il a été indiqué au point 20 du présent arrêt que l'éolienne " E 1 " incluse dans l'autorisation accordée à la société Engie Green Cintegabelle a vocation à être implantée à 1,2 kilomètre à l'ouest de l'alignement constitué par les trois autres aérogénérateurs projetés et notamment les deux autres machines portées par cette société. Si les requérants soutiennent que la configuration ainsi adoptée augmente les impacts négatifs du parc éolien sur les paysages, l'avifaune et les chiroptères, il résulte de ce qui a été exposé précédemment que l'isolement de l'éolienne " E 1 " ne porte pas par lui-même une atteinte supplémentaire aux paysages et qu'il a permis de privilégier une implantation réduisant l'effet " barrière " pour la faune volante. Il en résulte que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en autorisant la réalisation de cette éolienne plus éloignée.

S'agissant de la légalité des règles d'urbanisme :

32. L'article L. 152-1 du code de l'urbanisme dispose que : " L'exécution par toute personne publique ou privée de tous travaux, constructions, aménagements, plantations, affouillements ou exhaussements des sols, et ouverture d'installations classées appartenant aux catégories déterminées dans le plan sont conformes au règlement et à ses documents graphiques. (...) ". Il peut être utilement soutenu devant le juge administratif que l'autorisation d'exploiter une installation classée a été délivrée sous l'empire d'un document d'urbanisme illégal - sous réserve, en ce qui concerne les vices de forme ou de procédure, des dispositions de l'article L. 600-1 du même code - à la condition que le requérant fasse en outre valoir que l'autorisation méconnaît les dispositions remises en vigueur du fait de la constatation de cette illégalité.

33. D'une part, aux termes de l'article L. 300-6 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors en vigueur : " L'Etat et ses établissements publics, les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent, après enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement, se prononcer, par une déclaration de projet, sur l'intérêt général d'une action ou d'une opération d'aménagement au sens du présent livre ou de la réalisation d'un programme de construction. Les articles (...) L. 153-54 à L. 153-59 sont applicables (...) ". Selon l'article L. 153-54 du même code : " Une opération faisant l'objet (...) d'une déclaration de projet, et qui n'est pas compatible avec les dispositions d'un plan local d'urbanisme ne peut intervenir que si : / 1° L'enquête publique concernant cette opération a porté à la fois sur (...) l'intérêt général de l'opération et sur la mise en compatibilité du plan qui en est la conséquence ; / (...) ". Selon l'article L. 153-57 de ce code : " A l'issue de l'enquête publique, l'établissement public de coopération intercommunale compétent ou la commune : / (...) / 2° Décide la mise en compatibilité du plan (...) ". Pour l'application de ces dispositions, il appartient à l'autorité administrative compétente d'établir, de manière précise et circonstanciée, sous le contrôle du juge, l'intérêt général qui s'attache à la réalisation du projet constituant l'objet de la mise en compatibilité du plan local d'urbanisme, au regard notamment des objectifs économiques, sociaux et urbanistiques poursuivis par la collectivité publique intéressée.

34. Il résulte de l'instruction que, par une délibération du 10 avril 2019, le conseil municipal de Cintegabelle a prescrit la mise en compatibilité du plan local d'urbanisme de la commune pour permettre la réalisation du projet éolien porté par les sociétés Aganaguès et Engie Green Cintegabelle et que, par une délibération du 16 mai 2022, la même assemblée a approuvé la déclaration de projet emportant mise en compatibilité du plan, en instituant, dans la zone agricole " A " dont le règlement antérieur n'autorisait pas les installations éoliennes, deux sous-secteurs " Ae " permettant l'implantation de telles installations sur une superficie totale de 21 hectares. Eu égard aux objectifs de développement de la production d'énergie renouvelable poursuivis tant au plan national qu'au plan régional et local et à l'implication particulière de la commune de Cintegabelle dans ce domaine, avec notamment la mise en place de trois parcs photovoltaïques sur son territoire, alors que les incidences prévisibles du projet éolien sur les paysages et le milieu naturel ont été prises en compte dans l'évaluation environnementale spécifique à la procédure de déclaration de projet et ne sont pas excessives comme il a été dit aux points précédents du présent arrêt, le conseil municipal a pu légalement estimer que ce projet revêtait un caractère d'intérêt général et qu'il pouvait donc faire l'objet de la procédure prévue par les dispositions précitées pour mettre en compatibilité le plan local d'urbanisme.

35. D'autre part, aux termes de l'article L. 131-4 du code de l'urbanisme : " Les plans locaux d'urbanisme et les documents en tenant lieu ainsi que les cartes communales sont compatibles avec : / 1° Les schémas de cohérence territoriale prévus à l'article L. 141-1 ; / (...) ". Pour apprécier la compatibilité d'un plan local d'urbanisme avec un schéma de cohérence territoriale, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle de l'ensemble du territoire couvert en prenant en compte l'ensemble des prescriptions du document supérieur, si le plan ne contrarie pas les objectifs imposés par le schéma, compte tenu des orientations adoptées et de leur degré de précision, sans rechercher l'adéquation du plan à chaque disposition ou objectif particulier du schéma.

36. Le document d'orientation et d'objectifs du schéma de cohérence territoriale du Pays Sud Toulousain, approuvé le 28 octobre 2012 et dont le périmètre comprend notamment la commune de Cintegabelle, prévoit, au titre de l'orientation intitulée " Préserver et valoriser le territoire pour les générations futures ", un objectif visant à " mieux gérer et économiser les ressources ", lequel inclut une prescription portant le numéro 27, tendant à " diminuer les consommations énergétiques et favoriser les énergies renouvelables ". L'organe délibérant du pôle d'équilibre territorial et rural du Pays Sud Toulousain, en charge de ce schéma, a d'ailleurs rendu un avis favorable sur le projet de parc éolien de Cintegabelle le 15 mars 2022 au regard de l'objectif ainsi prévu. En se bornant à se prévaloir de deux autres objectifs particuliers fixés par le même document, tendant à " protéger les corridors écologiques " et à " identifier les espaces naturels ordinaires ", alors que les sociétés pétitionnaires ont au demeurant prévu des mesures permettant de limiter les impacts du projet sur la ripisylve du ruisseau La Jade, les requérants n'établissent pas que les modifications apportées au plan local d'urbanisme par la délibération du 16 mai 2022 seraient incompatibles avec le schéma de cohérence territoriale applicable.

37. Il résulte de ce qui été mentionné aux cinq points précédents que les requérants ne sont pas fondés à invoquer l'illégalité de la mise en compatibilité du plan local d'urbanisme de la commune de Cintegabelle ayant rendu possible l'autorisation du parc éolien en litige.

En ce qui concerne les dérogations " espèces protégées " :

38. L'article L. 411-1 du code de l'environnement dispose que : " I. - Lorsqu'un intérêt scientifique particulier, le rôle essentiel dans l'écosystème ou les nécessités de la préservation du patrimoine naturel justifient la conservation de sites d'intérêt géologique, d'habitats naturels, d'espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées et de leurs habitats, sont interdits : / 1° La destruction ou l'enlèvement des œufs ou des nids, la mutilation, la destruction, la capture ou l'enlèvement, la perturbation intentionnelle, la naturalisation d'animaux de ces espèces ou, qu'ils soient vivants ou morts, leur transport, leur colportage, leur utilisation, leur détention, leur mise en vente, leur vente ou leur achat ; / (...) / 3° La destruction, l'altération ou la dégradation de ces habitats naturels ou de ces habitats d'espèces ; / (...) ". En outre, selon l'article L. 411-2 du même code : " I. - Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions dans lesquelles sont fixées : / (...) / 4° La délivrance de dérogations aux interdictions mentionnées aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 411-1, à condition qu'il n'existe pas d'autre solution satisfaisante, pouvant être évaluée par une tierce expertise menée, à la demande de l'autorité compétente, par un organisme extérieur choisi en accord avec elle, aux frais du pétitionnaire, et que la dérogation ne nuise pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle : / (...) / c) Dans l'intérêt de la santé et de la sécurité publiques ou pour d'autres raisons impératives d'intérêt public majeur, y compris de nature sociale ou économique, et pour des motifs qui comporteraient des conséquences bénéfiques primordiales pour l'environnement ; / (...) ".

S'agissant de la motivation des dérogations :

39. Selon l'article L. 211-3 du code des relations entre le public et l'administration : " Doivent également être motivées les décisions administratives individuelles qui dérogent aux règles générales fixées par la loi ou le règlement. ". L'article 4 de l'arrêté interministériel du 19 février 2007 susvisé mentionne que : " La décision précise : / (...) / En cas d'octroi d'une dérogation, la motivation de celle-ci et, en tant que de besoin, en fonction de la nature de l'opération projetée, les conditions de celle-ci, notamment : / - nom scientifique et commun des espèces concernées ; / - nombre et sexe des spécimens sur lesquels porte la dérogation ; / - période ou dates d'intervention ; / - s'il y a lieu, mesures de réduction ou de compensation mises en œuvre, ayant des conséquences bénéfiques pour les espèces concernées, ainsi qu'un délai pour la transmission à l'autorité décisionnaire du bilan de leur mise en œuvre ; / (...) ".

40. Les arrêtés préfectoraux en litige visent les articles L. 411-1 et L. 411-2 du code de l'environnement ainsi que les arrêtés ministériels pris pour leur application et l'avis favorable sous conditions rendu par le Conseil national de la protection de la nature le 17 septembre 2021 sur les demandes de dérogation déposées par les sociétés pétitionnaires au titre de la législation sur les espèces protégées. Ils énoncent, avec une précision suffisante, les raisons pour lesquelles le préfet a regardé le projet éolien comme répondant à une raison impérative d'intérêt public majeur au regard des enjeux énergétiques nationaux et régionaux et des caractéristiques des installations prévues. Ils mentionnent également les motifs ayant conduit l'autorité préfectorale à retenir qu'il n'existait pas d'autre solution satisfaisante et que les dérogations sollicitées pour ce projet ne nuiraient pas au maintien de l'état de conservation favorable des populations des cent sept espèces animales dont la liste est précisée dans les annexes 3 des arrêtés. En conséquence, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation des dérogations litigieuses doit être écarté.

S'agissant du bien-fondé des dérogations :

41. Il résulte des dispositions précitées des articles L. 411-1 et L. 411-2 du code de l'environnement qu'un projet d'une personne publique ou privée susceptible d'affecter la conservation d'espèces animales ou végétales protégées et de leurs habitats naturels ne peut être autorisé, à titre dérogatoire, que s'il répond à une raison impérative d'intérêt public majeur. En présence d'un tel intérêt, le projet ne peut cependant être autorisé, eu égard aux atteintes portées aux espèces protégées, appréciées en tenant compte des mesures d'évitement, de réduction et de compensation prévues, que si, d'une part, il n'existe pas d'autre solution satisfaisante et, d'autre part, la dérogation ne nuit pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle.

Quant à la raison impérative d'intérêt public majeur :

42. L'article L. 411-1-1 du code de l'environnement dispose que : " Sont réputés répondre à une raison impérative d'intérêt public majeur, au sens du c du 4° du I de l'article L. 411-2 du présent code, les projets d'installations de production d'énergies renouvelables ou de stockage d'énergie dans le système électrique satisfaisant aux conditions prévues à l'article L. 211-2-1 du code de l'énergie. ". Selon l'article L. 211-2-1 du code de l'énergie auquel il est ainsi renvoyé : " Les projets d'installations de production d'énergies renouvelables au sens de l'article L. 211-2 du présent code ou de stockage d'énergie dans le système électrique, y compris leurs ouvrages de raccordement aux réseaux de transport et de distribution d'énergie, sont réputés répondre à une raison impérative d'intérêt public majeur, au sens du c du 4° du I de l'article L. 411-2 du code de l'environnement, dès lors qu'ils satisfont à des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. / (...) ". L'article R. 411-6-1 du code de l'environnement mentionne que : " Sont réputés répondre à une raison impérative d'intérêt public majeur, au sens du c du 4° du I de l'article L. 411-2 : / (...) / 1° Les projets d'installations de production d'énergies renouvelables ou de stockage d'énergie dans le système électrique, y compris leurs ouvrages de raccordement aux réseaux de transport et de distribution d'énergie, au sens de l'article L. 211-2-1 du code de l'énergie, lorsqu'ils satisfont aux conditions prévues par les articles R. 211-1 à R. 211-6 du code de l'énergie ; / (...) ". L'article R. 211-2 du code de l'énergie précise que : " Un projet d'installation située à terre produisant de l'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent sur le territoire métropolitain continental satisfait aux conditions prévues à l'article L. 211-2-1 si : / 1° La puissance prévisionnelle totale de l'installation est supérieure ou égale à 9 mégawatts ; / 2° La puissance totale du parc éolien terrestre raccordé à ce territoire, à la date de la demande de dérogation aux interdictions mentionnées aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 411-1 du code de l'environnement est inférieure à l'objectif maximal de puissance du parc éolien terrestre sur ce territoire, défini par le décret relatif à la programmation pluriannuelle de l'énergie mentionné à l'article L. 141-1 du code de l'énergie. ". En vertu de l'article 3 du décret du 21 avril 2020 relatif à la programmation pluriannuelle de l'énergie, l'objectif de développement de l'énergie éolienne terrestre en France métropolitaine continentale est fixé à une puissance installée de 24,1 gigawatts au 31 décembre 2023 et à une puissance installée comprise entre 33,2 gigawatts et 34,7 gigawatts au 31 décembre 2028.

43. D'une part, il résulte de ce qui a été exposé aux points 5 et 15 du présent arrêt que le projet de parc éolien a été conçu de manière conjointe par les deux sociétés pétitionnaires, que les deux composantes du parc ont fait l'objet d'une étude d'impact unique et donné lieu à une instruction commune, que leur réalisation est prévue de manière concomitante, que les quatre machines partageront des équipements communs et que la société Aganaguès aura recours aux moyens techniques de la société Engie Green pour l'exécution des travaux et l'exploitation de l'éolienne " E 4 ". Eu égard à l'ensemble de ces éléments, les deux autorisations préfectorales en litige doivent être considérées comme portant sur un seul et même projet au sens et pour l'application des dispositions citées au point précédent et le respect de la condition de puissance prévisionnelle de l'installation prévue au 1° de l'article R. 211-2 du code de l'énergie doit donc s'apprécier à l'échelle de l'ensemble du parc composé de quatre aérogénérateurs. Par ailleurs, si les requérants relèvent que les demandes d'autorisation déposées par les sociétés pétitionnaires indiquaient que le choix des éoliennes serait arrêté ultérieurement entre quatre modèles de machines dont la puissance unitaire serait comprise entre 2,1 et 3 mégawatts, il ressort tant des motifs des arrêtés attaqués que de leurs articles 1er que les autorisations leur ont été délivrées respectivement pour une puissance de 3 mégawatts s'agissant de l'aérogénérateur de la société Aganaguès et une puissance totale de 9 mégawatts s'agissant des trois éoliennes de la société Engie Green Cintegabelle, si bien qu'il y a lieu de prendre en compte ces valeurs pour apprécier la puissance prévisionnelle de l'installation au sens des dispositions précitées. Par suite, le projet litigieux, présentant une puissance prévisionnelle totale de 12 mégawatts pris dans son ensemble, satisfait à la première condition mentionnée par l'article R. 211-2 du code de l'énergie.

44. D'autre part, il n'est pas contesté que la puissance totale du parc éolien terrestre raccordé sur le territoire métropolitain continental n'avait pas atteint l'objectif maximal de puissance fixé par l'article 3 du décret du 21 avril 2020 susvisé à la date à laquelle les sociétés pétitionnaires ont présenté leurs demandes d'autorisation, de sorte que le parc éolien en litige remplit également la seconde condition prévue à l'article R. 211-2 du code de l'énergie.

45. Il résulte de ce qui précède que le parc éolien contesté, pris dans son ensemble, est réputé répondre à une raison impérative d'intérêt public majeur au titre de la législation sur les espèces protégées. Les requérants ne peuvent à cet égard utilement invoquer les pertes de production électrique pouvant résulter de la mise en œuvre des plans de bridage, dès lors que la présomption irréfragable posée par les dispositions précitées s'apprécie au regard de la puissance prévisionnelle de l'installation et non au regard de la production énergétique attendue. Il en résulte que la première condition mentionnée par le 4° du I de l'article L. 411-2 du code de l'environnement doit être regardée comme satisfaite pour les deux dérogations en litige.

Quant au respect des deux autres conditions :

46. D'une part, il résulte de ce qui a été indiqué au point 13 du présent arrêt que les sociétés pétitionnaires ont procédé à une analyse suffisante des solutions alternatives avant de retenir la variante d'implantation du projet de parc éolien présentant le moindre impact pour l'environnement. Les requérants n'établissent pas qu'une solution plus satisfaisante existait pour réaliser l'opération, si bien que la deuxième condition énoncée à l'article L. 411-2 du code de l'environnement doit être regardée comme remplie, ainsi que l'a d'ailleurs considéré le Conseil national de protection de la nature dans son avis susmentionné du 17 septembre 2021.

47. D'autre part, il résulte de l'instruction que les dérogations accordées par les arrêtés litigieux portent sur cent sept espèces animales protégées, listées dans les annexes 3 des arrêtés, lesquelles comprennent soixante-dix-neuf espèces d'oiseaux, quatorze espèces de chiroptères, sept espèces d'amphibiens, cinq espèces de reptiles et deux espèces d'insectes. Pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 28 et 29 du présent arrêt, les incidences des installations projetées, après prise en compte des mesures d'évitement, de réduction et de compensation, ne sont pas de nature à faire regarder les arrêtés en litige comme susceptibles de porter atteinte à l'état de conservation des populations des espèces d'avifaune et de chiroptères. De même, il ne résulte pas de l'instruction et il n'est au demeurant pas même allégué qu'une telle atteinte pourrait exister pour les populations d'amphibiens, de reptiles et d'insectes sur lesquelles portent les dérogations contestées. Dès lors et comme l'a d'ailleurs aussi estimé le Conseil national de protection de la nature, la troisième condition prévue à l'article L. 411-2 est satisfaite.

48. Il résulte de l'ensemble de ce qui a été indiqué aux cinq points précédents que les trois conditions cumulatives permettant de délivrer une dérogation à la législation sur les espèces protégées sont réunies en l'espèce. En accordant les dérogations sollicitées à ce titre par les sociétés Aganaguès et Engie Green Cintegabelle, l'autorité préfectorale n'a donc pas fait une inexacte application des dispositions législatives rappelées au point 38 du présent arrêt.

Sur la possibilité d'une régularisation :

49. L'article L. 181-18 du code de l'environnement mentionne que : " I. - Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre une autorisation environnementale, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, même après l'achèvement des travaux : / 1° Qu'un vice n'affecte qu'une phase de l'instruction de la demande d'autorisation environnementale, ou une partie de cette autorisation, limite à cette phase ou à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et demande à l'autorité administrative compétente de reprendre l'instruction à la phase ou sur la partie qui a été entachée d'irrégularité ; / 2° Qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. / Le refus par le juge de faire droit à une demande d'annulation partielle ou de sursis à statuer est motivé. / (...) ".

50.

Il résulte de ce qui précède que seul est fondé, en l'état des dossiers, le moyen, retenu au point 10 du présent arrêt, tenant à l'insuffisance de l'étude d'impact s'agissant des aspects liés au sous-sol et aux eaux souterraines. Le vice entachant ainsi les deux autorisations litigieuses est susceptible d'être régularisé par la délivrance de deux autorisations modificatives par le préfet, après que les sociétés pétitionnaires auront complété leur étude d'impact, que l'autorité environnementale aura émis un nouvel avis et que l'administration aura mis en œuvre, selon la nature et l'importance des modifications apportées aux dossiers, soit une enquête publique complémentaire, soit une procédure de consultation du public. En conséquence, il y a lieu de surseoir à statuer sur les deux présentes requêtes, sur le fondement des dispositions de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, pendant une période de dix mois à compter de la notification du présent arrêt, pour permettre la régularisation du vice ainsi relevé.

D E C I D E :

Article 1er : Il est sursis à statuer sur les requêtes nos 23TL00220 et 23TL00235, pendant une période de dix mois suivant la notification du présent arrêt, pour permettre la régularisation du vice entachant les autorisations en litige tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact s'agissant des aspects liés au sous-sol et aux eaux souterraines.

Article 2 : Tous droits et moyens sur lesquels il n'est pas expressément statué dans le présent arrêt sont réservés jusqu'à la fin des instances.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association " Hers Ariège Environnement ", première nommée, pour l'ensemble des requérants des deux instances, à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche, à la commune de Cintegabelle, à la société Aganaguès et à la société Engie Green Cintegabelle.

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 16 janvier 2025, à laquelle siégeaient :

M. Chabert, président,

M. Teulière, président assesseur,

M. Jazeron, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 janvier 2025.

Le rapporteur,

F. JazeronLe président,

D. Chabert

La greffière,

N. Baali

La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche, en ce qui la concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

Nos 23TL00220, 23TL00235


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23TL00220
Date de la décision : 30/01/2025
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Chabert
Rapporteur ?: M. Florian Jazeron
Rapporteur public ?: M. Diard
Avocat(s) : PAUL ELFASSI

Origine de la décision
Date de l'import : 09/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-01-30;23tl00220 ?
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