Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 29 avril 2021 par lequel le préfet de l'Aude a procédé au retrait de sa carte de séjour pluriannuelle.
Par un jugement n° 2102832 du 9 mars 2023, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 4 mai 2023, M. A..., représenté par Me Leguay, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 9 mars 2023 du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler l'arrêté du 29 avril 2021 par lequel le préfet de l'Aude a procédé au retrait de sa carte de séjour pluriannuelle ;
3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement rendu par le tribunal administratif de Montpellier est insuffisamment motivé ; les premiers juges n'ont pas expliqué en quoi l'autorité préfectorale était légitime à se fonder sur les diverses condamnations pénales dont il a fait l'objet pour conclure que sa présence sur le territoire national présente une menace pour l'ordre public ; ils n'ont pas, de plus, suffisamment motivé leur réponse au moyen tiré de l'atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale ;
- l'arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que sa présence en France ne constitue pas une menace à l'ordre public ;
- il porte une atteinte disproportionnée à son droit de mener une vie privée et familiale normale ;
La requête a été communiquée au préfet de l'Aude, qui n'a pas produit d'observations en défense.
Par ordonnance du 8 janvier 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 15 février 2024 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Rey-Bèthbéder a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant serbe, né le 3 mai 1997, est entré en France au cours de l'année 2004, avec ses parents. Il a bénéficié d'un premier document de circulation pour étranger mineur le 29 août 2007. À sa majorité, il a été titulaire d'un titre de séjour puis d'une carte de séjour pluriannuelle valable jusqu'au 28 octobre 2021. Par un arrêté du 29 avril 2021, le préfet de l'Aude a procédé au retrait de son titre de séjour. M. A... fait appel du jugement du 9 mars 2023 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 29 avril 2021.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".
3. D'une part, le tribunal administratif de Montpellier a indiqué, au point 4 de son jugement, de manière suffisamment détaillée, les raisons pour lesquelles le préfet pouvait légalement estimer que la présence de M. A... en France constitue une menace à l'ordre public. Le tribunal administratif de Montpellier n'a donc pas entaché son jugement d'une insuffisance de motivation dans sa réponse à ce moyen.
4. D'autre part, les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments invoqués à l'appui du moyen tiré du caractère disproportionné de la mesure au regard du droit de l'intéressé à mener une vie privée et familiale normale, ont écarté ce moyen, également au point 4 du jugement attaqué, en décrivant sa situation personnelle et familiale.
5. Il résulte de ce qui a été exposé aux points précédents que le jugement attaqué n'est pas insuffisamment motivé.
Sur la légalité de l'arrêté :
6. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : " La carte de séjour temporaire ou la carte de séjour pluriannuelle peut, par une décision motivée, être refusée ou retirée à tout étranger dont la présence en France constitue une menace pour l'ordre public ". Aux termes de l'article R. 311-15 du même code, alors en vigueur : " I. Le titre de séjour peut être retiré : (...) / 10° Si l'étranger titulaire d'une carte de séjour temporaire ou d'une carte de séjour pluriannuelle constitue une menace pour l'ordre public (...) ".
7. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a été condamné, le 6 septembre 2016, à quatre mois d'emprisonnement avec sursis pour des faits de circulation avec un véhicule terrestre à moteur sans assurance, de conduite d'un véhicule sans permis et de vol par ruse, effraction ou escalade dans un local d'habitation ou un lieu d'entrepôt aggravé par une autre circonstance, le 13 août 2018, à quatre mois d'emprisonnement pour des faits de vol aggravé par deux circonstances et de conduite d'un véhicule sans permis, le 10 septembre 2018, à deux mois d'emprisonnement pour des faits de conduite de véhicule sans permis et, le 26 octobre 2018, pour des faits de conduite d'un véhicule sans permis. En outre, l'appelant a été placé en détention provisoire à la maison d'arrêt de Carcassonne, le 6 mars 2020, pour des faits d'arrestation, enlèvement, séquestration ou détention arbitraire avec torture ou acte de barbarie commis en bande organisée. Compte tenu de la multiplicité des condamnations dont il a fait l'objet et de la gravité des faits pour lesquels il a été placé en détention provisoire, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de l'Aude aurait commis une erreur d'appréciation en estimant que sa présence en France constituait une menace pour l'ordre public.
8. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
9. Il ressort des pièces du dossier que M. A... est scolarisé en France depuis 2004, qu'il a conclu une convention de stage professionnel en mécanique le 6 juin 2012 pour une durée de deux semaines et demi. Par ailleurs, il allègue entretenir une relation avec une ressortissante française depuis trois ans à la date de la décision en litige. Toutefois, les certificats médicaux versés au débat, qui attestent que la mère de l'appelant présente un syndrome d'Alzheimer et que son père présente des troubles mnésiques, sont insuffisants pour démontrer à eux-seuls que la présence de M. A... à leurs côtés est indispensable, alors d'ailleurs que leur fils est placé en détention à la maison d'arrêt de Carcassonne depuis le 6 mars 2020. En outre, les quelques photographies ainsi que les témoignages produits, au demeurant peu circonstanciés, ne permettent pas de justifier de l'ancienneté, de l'intensité et de la stabilité des liens que l'intéressé affirme entretenir avec sa compagne. Enfin, l'appelant ne justifie d'aucune intégration professionnelle sur le territoire français et est sans charge de famille. Dans ces conditions, et nonobstant la durée de son séjour en France, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision par laquelle le préfet de l'Aude a procédé au retrait de son titre de séjour aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette décision a été prise. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit, par suite, être écarté.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Aude du 29 avril 2021. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Aude.
Délibéré après l'audience du 6 février 2025, à laquelle siégeaient :
M. Rey-Bèthbéder, président,
M. Lafon, président-assesseur,
Mme Fougères, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 février 2025.
Le président-rapporteur,
É. Rey-BèthbéderLe président-assesseur,
N. Lafon
Le greffier,
F. Kinach
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23TL01037