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17/04/2025 | FRANCE | N°23TL01892

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 4ème chambre, 17 avril 2025, 23TL01892


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Le préfet de l'Hérault a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision tacite, née le 21 juillet 2019, par laquelle le maire de Garrigues ne s'est pas opposé à la déclaration préalable présentée par le groupement foncier agricole Gravegeal le 21 juin 2019 pour procéder à une division foncière de la parcelle cadastrée section B n° 546.



Par un jugement n° 2202588 du 25 mai 2023, le tribunal administratif de Montpellier a an

nulé cette décision tacite et a rejeté les conclusions présentées par le groupement foncier agricole Gr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet de l'Hérault a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision tacite, née le 21 juillet 2019, par laquelle le maire de Garrigues ne s'est pas opposé à la déclaration préalable présentée par le groupement foncier agricole Gravegeal le 21 juin 2019 pour procéder à une division foncière de la parcelle cadastrée section B n° 546.

Par un jugement n° 2202588 du 25 mai 2023, le tribunal administratif de Montpellier a annulé cette décision tacite et a rejeté les conclusions présentées par le groupement foncier agricole Gravegeal au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 24 juillet 2023 et le 6 mars 2024, le groupement foncier agricole Gravegeal, représenté par Me Valette-Berthelsen, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 25 mai 2023 ;

2°) de rejeter le déféré du préfet de l'Hérault présenté devant le tribunal administratif de Montpellier ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les premiers juges ont commis une erreur de droit et une erreur d'appréciation au regard de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme en considérant que le terrain d'assiette du projet de division en litige ne se situait pas dans les parties urbanisées de la commune et que le projet aurait pour effet d'étendre lesdites parties urbanisées ;

- au titre de l'effet dévolutif de l'appel : la décision tacite de non-opposition en litige n'est pas entachée du vice d'incompétence soulevé par le préfet ; l'avis conforme défavorable du préfet du 4 juillet 2019 est entaché d'une erreur de fait et d'une erreur de droit en tant qu'il retient que le terrain en litige ne se situe pas dans les parties urbanisées de la commune ; le projet ne peut être regardé comme ayant pour effet d'étendre ces parties ; la circonstance que le terrain serait exposé à l'aléa feu de forêt est sans incidence à cet égard.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 novembre 2023, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens invoqués par le groupement appelant ne sont pas fondés et renvoie à ses écritures de première instance pour le surplus.

La clôture immédiate de l'instruction est intervenue le 1er août 2024 en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jazeron, premier conseiller,

- les conclusions de M. Diard, rapporteur public,

- les observations de Me Sapparart, représentant le groupement appelant.

Considérant ce qui suit :

1. Le groupement foncier agricole Gravegeal a déposé, le 21 juin 2019, une déclaration préalable pour procéder à une division foncière permettant de détacher deux lots à bâtir sur la parcelle cadastrée section B n° 546, située chemin du Cros, sur le territoire de la commune de Garrigues (Hérault). Le préfet de l'Hérault, saisi en application de l'article L. 422-5 du code de l'urbanisme, a émis un avis conforme défavorable sur cette déclaration le 4 juillet 2019. Si le maire de Garrigues a fait opposition à la déclaration préalable par un arrêté du 17 juillet 2019, l'arrêté en cause n'a cependant pas été notifié au groupement foncier agricole Gravegeal avant l'expiration du délai d'instruction d'un mois prévu à l'article R. 423-23 du code de l'urbanisme, si bien qu'une décision tacite de non-opposition était née le 21 juillet 2019, comme l'a constaté le tribunal administratif de Montpellier dans un jugement du 24 mars 2022 annulant ledit arrêté. Le préfet de l'Hérault a déféré la décision tacite de non-opposition devant ce même tribunal, lequel en a prononcé l'annulation par un jugement rendu le 25 mai 2023. Par la présente requête, le groupement foncier agricole Gravegeal interjette appel de ce dernier jugement.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. L'article L. 111-3 du code de l'urbanisme mentionne que : " En l'absence de plan local d'urbanisme, de tout document d'urbanisme en tenant lieu ou de carte communale, les constructions ne peuvent être autorisées que dans les parties urbanisées de la commune. ". L'article L. 111-4 du même code, dans sa version en vigueur à la date de la décision tacite en litige, dispose que : " Peuvent toutefois être autorisés en dehors des parties urbanisées de la commune : / 1° L'adaptation, le changement de destination, la réfection, l'extension des constructions existantes ou la construction de bâtiments nouveaux à usage d'habitation à l'intérieur du périmètre regroupant les bâtiments d'une ancienne exploitation agricole, (...) ; / 2° Les constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole, à des équipements collectifs (...), à la mise en valeur des ressources naturelles et à la réalisation d'opérations d'intérêt national ; / 2° bis Les constructions et installations nécessaires à la transformation, au conditionnement et à la commercialisation des produits agricoles (...) ; / 3° Les constructions et installations incompatibles avec le voisinage des zones habitées et l'extension mesurée des constructions et installations existantes ; / 4° Les constructions ou installations, sur délibération motivée du conseil municipal, si celui-ci considère que l'intérêt de la commune, en particulier pour éviter une diminution de la population communale, le justifie, (...). ".

3. L'article L. 111-3 du code de l'urbanisme interdit en principe, en l'absence de plan local d'urbanisme ou de carte communale opposable aux tiers ou de tout document d'urbanisme en tenant lieu, les constructions implantées en dehors des parties urbanisées de la commune, c'est-à-dire des parties du territoire communal qui comportent déjà un nombre et une densité significatifs de constructions. Il s'ensuit qu'en dehors des cas où elles relèvent des exceptions limitativement prévues à l'article L. 111-4, les constructions ne peuvent être autorisées lorsque leur réalisation a pour effet d'étendre la partie urbanisée de la commune. Pour apprécier si un projet a pour effet d'étendre la partie actuellement urbanisée de la commune, il est notamment tenu compte de la géographie des lieux, de la desserte par des voies d'accès, de la proximité avec les constructions existantes situées dans les parties urbanisées de la commune, du nombre et de la densité des constructions projetées, du sens du développement de l'urbanisation, ainsi que de l'existence de coupures d'urbanisation, qu'elles soient naturelles ou artificielles.

4. Le groupement foncier agricole Gravegeal soutient que le tribunal administratif de Montpellier a commis une erreur de droit et une erreur d'appréciation en retenant que le terrain litigieux ne se situait pas dans les parties urbanisées de la commune de Garrigues et que le projet aurait pour effet d'étendre lesdites parties. De tels moyens se rattachent toutefois à l'office du juge de cassation et non à celui du juge d'appel, auquel il appartient de se prononcer directement sur la légalité de la décision tacite de non-opposition dans le cadre de l'effet dévolutif.

5. Il ressort des pièces du dossier, notamment des plans joints à la déclaration préalable ainsi que des photographies aériennes produites par les parties, que la division foncière projetée par le groupement requérant consiste à détacher deux lots de surfaces respectives de 725 m2 et 820 m2 à l'angle est d'une vaste parcelle de 11 500 m2 située au nord du village de Garrigues, laquelle est actuellement vierge de toute construction et intégralement cultivée. Si la parcelle litigieuse jouxte trois terrains bâtis sur sa limite sud-est, ceux-ci s'insèrent toutefois dans un secteur d'urbanisation diffuse, marqué par une faible densité de constructions et situé à l'écart de la principale partie agglomérée du bourg dont il est séparé par une parcelle agricole de taille significative. Le terrain d'assiette du projet s'ouvre par ailleurs sur de vastes étendues à caractère naturel ou agricole sur ses limites sud et ouest et il est séparé par la voie publique des quelques maisons éparses implantées vers le nord-est. Dans ces conditions et alors même que les deux lots prévus seraient desservis par les réseaux, le terrain en litige ne peut être regardé comme étant situé dans les parties actuellement urbanisées de la commune de Garrigues et la création de deux lots à bâtir sur ce terrain aurait ainsi pour effet d'étendre lesdites parties urbanisées.

6. Il résulte de tout ce qui vient d'être exposé que l'avis conforme défavorable rendu par le préfet de l'Hérault le 4 juillet 2019 procédait d'une exacte application des dispositions de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme. Le maire de Garrigues, lié par cet avis, se trouvait dès lors tenu de faire opposition à la déclaration préalable et c'est donc à bon droit que les premiers juges ont estimé illégale la décision tacite de non-opposition née le 21 juillet 2019.

7. Il résulte de ce qui précède que le groupement foncier agricole Gravegeal n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 25 mai 2023, le tribunal administratif de Montpellier a annulé la décision tacite de non-opposition à sa déclaration préalable.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que soit mis à la charge de l'Etat, lequel n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, le versement d'une somme quelconque au bénéfice du groupement foncier agricole requérant au titre des frais exposés par ce dernier et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête du groupement foncier agricole Gravegeal est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au groupement foncier agricole Gravegeal et au ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 3 avril 2025, à laquelle siégeaient :

M. Moutte, président,

M. Jazeron, premier conseiller,

Mme Lasserre, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 avril 2025.

Le rapporteur,

F. Jazeron Le président,

J.F. Moutte

La greffière,

N. Baali

La République mande et ordonne au ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 23TL01892


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23TL01892
Date de la décision : 17/04/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Moutte
Rapporteur ?: M. Florian Jazeron
Rapporteur public ?: M. Diard
Avocat(s) : SELARL VALETTE-BERTHELSEN

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-17;23tl01892 ?
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