Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour M. Bernard , demeurant ..., par Me Runfola ;
Vu la requête, enregistrée le 10 juillet 2003 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, par laquelle M. demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0202040 - 0202589 en date du 19 juin 2003 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté ses demandes tendant à la décharge de l'obligation de payer les sommes de 13 021,28 euros et de 209 867,12 euros résultant de commandements décernés par le trésorier de l'Isle-Adam respectivement les 4 octobre 2001 et 23 janvier 2002, en vue du recouvrement de cotisations d'impôt sur le revenu réclamées, d'une part, au titre de l'année 1986 et, d'autre part, au titre des années 1987 et 1988 ;
2°) de prononcer la décharge de l'obligation de payer ;
3°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 3000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Il soutient que si, dans son cas, l'action en recouvrement a été suspendue par le dépôt de sa réclamation, le 15 mai 1991, assortie d'une demande de sursis de paiement, elle a recommencé à courir à compter de l'expiration du délai de deux mois suivant la notification, le 6 décembre 1991, de la décision du directeur des services fiscaux du Val d'Oise en date du 2 décembre 1991 rejetant sa réclamation, dès lors qu'il n'a pas contesté dans ce délai les impositions litigieuses auprès du tribunal administratif ; qu'à la date à laquelle il a saisi le tribunal d'une demande en décharge, la décision du 2 décembre 1991 portant rejet de sa réclamation était devenue définitive ; que les impositions mises à sa charge étaient donc redevenues exigibles ; qu'ayant saisi le tribunal administratif tardivement, il ne pouvait plus bénéficier du sursis de paiement prévu par article L 277 du livre des procédures fiscales ; que, faute pour le comptable d'avoir délivré un commandement de payer dans le délai de quatre ans prévu par l'article L 274, la prescription était acquise lors de la notification des commandements litigieux en date des 4 octobre 2001 et 23 janvier 2002 ; que son analyse est conforme à la doctrine de l'administration telle qu'elle résulte de la réponse à M Y, député, en date du 29 avril 1985 et de la note référencée 13-O-4-85, publiée au bulletin officiel des impôts ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 septembre 2005 :
- le rapport de Mme Barnaba, premier conseiller ;
- et les conclusions de Mme Colrat, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales : « Les comptables du Trésor qui n'ont fait aucune poursuite contre un contribuable retardataire pendant quatre années consécutives, à partir du jour de la mise en recouvrement du rôle, perdent leur recours et sont déchus de tous droits et de toute action contre ce redevable. Le délai de quatre ans mentionné au premier alinéa, par lequel se prescrit l'action en vue du recouvrement, est interrompu par tous actes comportant reconnaissance de la part des contribuables et par tous autres actes interruptifs de la prescription. » ; qu'aux termes de l'article L. 277 du même livre applicable à la présente espèce : « Le contribuable qui conteste le bien-fondé ou le montant des impositions mises à sa charge peut, s'il en a expressément formulé la demande dans sa réclamation et précisé le montant ou les bases du dégrèvement auquel il estime avoir droit, être autorisé à différer le paiement de la partie contestée de ces impositions et des pénalités y afférentes. Le sursis de paiement ne peut être refusé au contribuable que s'il n'a pas constitué auprès du comptable les garanties propres à assurer le recouvrement de la créance du Trésor (...) » ;
Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que la demande de sursis de paiement dont est assortie une réclamation a pour effet, dès sa réception par l'administration, de suspendre l'exigibilité de l'impôt ainsi que le délai de prescription de l'action en recouvrement ; qu'à la date à laquelle expire le délai de recours contentieux dont dispose le contribuable pour contester devant le tribunal administratif la décision de l'administration rejetant sa réclamation, les impositions litigieuses redeviennent exigibles et le délai de la prescription reprend son cours ;
Considérant que M. a été assujetti à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 1986, 1987 et 1988, qui ont été mises en recouvrement le 28 février 1991 ; que l'intéressé a sollicité le sursis de paiement à l'appui de la réclamation en date du 15 mai 1991 qu'il a présentée au directeur des services fiscaux du Val d'Oise ; que les impositions litigieuses ont cessé d'être exigibles à compter de cette date ; que le directeur des services fiscaux a rejeté sa réclamation par une décision du 2 décembre 1991 notifiée le 6 décembre suivant au contribuable, lequel devait, par conséquent, saisir le tribunal administratif d'une demande en décharge des impositions dont s'agit au plus tard le 7 février 1992 ; que cette demande, enregistrée le 11 février suivant au greffe du Tribunal administratif de Versailles, a été rejetée, en raison de sa tardiveté, par une ordonnance du président de la deuxième chambre de ce tribunal en date du 9 novembre 1998 ;
Considérant qu'eu égard à l'expiration du délai légal pour saisir le tribunal, les impositions litigieuses sont à nouveau devenues exigibles à compter du 8 février 1992 et le délai de la prescription a repris son cours ; que l'action en recouvrement était prescrite à la date des commandements de payer décernés les 4 octobre 2001 et 23 janvier 2002 ; que dès lors, c'est à bon droit que M. a demandé à être déchargé de l'obligation de payer les sommes qui lui étaient réclamées par ces commandements ; que le requérant est par suite fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté ses demandes ; que, par voie de conséquence, il y a lieu, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat, dans les circonstances de l'espèce, le paiement à M. de la somme de 1500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise n° 0202040 et n° 0202589 en date du 19 juin 2003 est annulé.
Article 2 : Il est accordé à M. la décharge de l'obligation de payer résultant des commandements des 4 octobre 2001 et 23 janvier 2002 émis par le trésorier de l'Isle-Adam pour avoir paiement des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1986 , 1987 et 1988.
Article 3 : L'Etat est condamné à payer à M. une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
03VE02730 2