Vu la requête, enregistrée le 24 avril 2006 au greffe de la Cour, présentée pour M. Guy X, demeurant ..., et pour Mme Josiane X épouse Y, demeurant ..., par la SCP Carbonnier-Lamaze-Rasle et associés ; les requérants demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0201319 en date du 23 février 2006 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 septembre 2001 du préfet de la Seine-Saint-Denis déclarant immédiatement cessibles pour cause d'utilité publique au profit de la Société anonyme d'économie mixte d'aménagement du territoire du département de la Seine Saint-Denis (Sodedat 93) les parcelles cadastrées AJ 232 et 233 situées 44 bis rue Merlan à Noisy-le-Sec ;
2°) d'annuler l'arrêté susvisé du 13 septembre 2001 du préfet de la Seine-Saint-Denis ;
3°) de condamner l'Etat à leur verser une somme de 1 500 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Ils soutiennent que le tribunal a écarté à tort leur moyen tiré de ce que l'arrêté litigieux est intervenu au terme d'une procédure irrégulière en raison du défaut d'indépendance et d'impartialité du commissaire-enquêteur désigné dans le cadre de l'enquête publique qui s'est déroulée du 21 mai 2001 au 13 juin 2001 ; que l'arrêté en cause méconnaît l'autorité absolue de la chose jugée par le Conseil d'Etat dans sa décision n° 090748 du 16 octobre 1996 dès lors que la seconde procédure d'expropriation vise à achever l'opération « RHI Merlan » pour laquelle il a été définitivement jugé que cette opération de résorption de l'habitat insalubre ne pouvait inclure les parcelles en cause ; que le lancement d'une nouvelle procédure pour achever la zone illégalement définie de l'opération RHI Merlan est entaché de détournement de pouvoir ; que, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, l'arrêté litigieux est entaché d'un vice propre dès lors que l'administration a entendu achever une zone illégale ; que le tribunal ne pouvait accorder à la Sodedat 93 le bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative dès lors qu'elle n'avait pas la qualité de partie à l'instance ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 novembre 2007 :
- le rapport de M. Dacre-Wright, président ;
- les observations de Me Derridj, substituant Me Peru pour la Sodedat 93 ;
- et les conclusions de M.Davesne, commissaire du gouvernement ;
Considérant que le terrain constitué des deux parcelles cadastrées AJ 232 et AJ 233, situé au 44 bis rue Merlan sur le territoire de la commune de Noisy le Sec et appartenant indivisément à M. Guy X et à Mme Josiane X épouse Y, a été inclus, par un arrêté du préfet de la Seine Saint-Denis en date du 16 octobre 1983, dans le périmètre d'un îlot d'insalubrité, dénommé îlot Merlan, dont l'aménagement a été confié à la Société anonyme d'économie mixte d'aménagement du territoire du département de la Seine-Saint-Denis (Sodedat 93) ; que l'arrêté préfectoral en date du 15 décembre 1986 déclarant l'opération d'utilité publique et la cessibilité du terrain au profit de la Sodedat 93 a été annulé par une décision du 16 octobre 1996 du Conseil d'Etat au motif que l'arrêté du 16 octobre 1983 était illégal en tant qu'il incluait dans un périmètre d'insalubrité les locaux et installations à usage purement commercial existant sur ce terrain ; que l'ordonnance d'expropriation a, par voie de conséquence, été annulée par le juge judiciaire en 1997 ; qu'une nouvelle procédure d'expropriation du même terrain a été engagée par la commune de Noisy le Sec ; que le commissaire enquêteur ayant émis un avis défavorable à l'issue de l'enquête publique qui s'est déroulée du 29 mars 1999 au 16 avril 1999 et le conseil municipal ayant confirmé sa demande de déclaration d'utilité publique, un décret du Premier ministre en date du 16 octobre 2000, pris en Conseil d'Etat, a déclaré d'utilité publique l'acquisition par la Sodedat 93 des parcelles AJ 232 et AJ 233 nécessaires à l'aménagement de l'îlot Merlan ; que, par une décision du 30 avril 2004, le Conseil d'Etat a rejeté la requête des consorts X dirigée contre ce décret ; qu'à la suite de l'enquête parcellaire qui s'est déroulée du 21 mai 2001 au 13 juin 2001 et à l'issue de laquelle le commissaire enquêteur a émis un avis favorable, un arrêté préfectoral en date du 13 septembre 2001 a déclaré les parcelles AJ 232 et AJ 233 immédiatement cessibles au profit de la Sodedat 93 ; que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté la demande des consorts X tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article R. 11-5 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, dans sa rédaction applicable en l'espèce : « Les personnes choisies par le préfet ne doivent pas appartenir à l'administration expropriante ni participer à son contrôle et ne doivent avoir aucun intérêt à l'opération. » ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le commissaire enquêteur désigné pour l'enquête publique du 21 mai 2001 au 13 juin 2001 avait exercé les fonctions de directeur de l'urbanisme de la commune de Pavillons-sous-Bois de 1991 à 1996, période au cours de laquelle la réalisation d'une zone d'aménagement concerté et la construction d'un lycée pour le compte de cette commune avaient été confiées à la Sodedat 93 ; que la même personne, admise à la retraite en 1996, a été désignée pour exercer les fonctions de commissaire enquêteur dans 35 enquêtes publiques qui se sont déroulées entre 1997 et 2001, dont deux seulement concernaient la Sodedat 93 ; que ces faits, qui établissent que l'intéressé n'a jamais appartenu aux services de la commune de Noisy le Sec, ne démontrent pas qu'il a manqué à son devoir d'indépendance et d'impartialité dans la conduite de l'enquête publique précitée et dans l'avis favorable qu'il a exprimé à l'issue de celle-ci, alors même qu'il avait émis des avis favorables dans les deux affaires concernant la Sodedat 93 et que le commissaire enquêteur intervenu dans l'enquête publique du 29 mars 1999 au 16 avril 1999 avait émis un avis défavorable quant à l'utilité publique de l'acquisition des parcelles des consorts X par la Sodedat 93 ;
Considérant, d'autre part, que, par sa décision du 30 avril 2004, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a jugé que la commune de Noisy le Sec pouvait légalement, sans qu'y fasse obstacle l'autorité absolue de la chose jugée par sa décision du 16 octobre 1996 qui avait annulé l'arrêté préfectoral du 15 décembre 1986 en raison du vice de procédure qui l'affectait, entreprendre, à titre de régularisation, une nouvelle procédure d'expropriation en vue de l'acquisition par la Sodedat 93 des parcelles en question, dès lors que celle-ci était conduite selon une procédure régulière ; que le Conseil d'Etat a également précisé que le maintien du garage exploité par les consorts X porterait gravement atteinte à la cohérence du projet de rénovation urbaine de l'îlot Merlan ;
Considérant qu'il se déduit de ce qui précède que l'arrêté de cessibilité des parcelles AJ 232 et AJ 233 au profit de la Sodedat 93, pris en application du décret du 16 octobre 2000 dont la légalité a été définitivement établie, ne saurait être regardé comme violant l'autorité absolue de la chose jugée par le Conseil d'Etat dans sa décision du 16 octobre 1996 ; qu'il s'en déduit également que la décision d'entreprendre une nouvelle procédure d'expropriation ne saurait être regardée comme entachée de détournement de pouvoir, non plus que de méconnaissance des dispositions des articles 6, 7 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 1er du protocole additionnel de cette convention ; qu'il s'en déduit aussi que si l'arrêté attaqué se rapporte effectivement à la fin de l'opération dite de l'îlot Merlan, cette circonstance n'est pas de nature à l'entacher d'un vice propre ;
Considérant, enfin, que la Sodedat 93 a été appelée par le tribunal à produire des observations en qualité de bénéficiaire de l'arrêté de cessibilité ; qu'elle aurait eu qualité pour former tierce-opposition au jugement si elle n'avait pas été mise en cause ; qu'elle devait, par suite, être regardée comme une partie pour l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que, dès lors, les consorts X ne sont pas fondés à soutenir qu'elle n'avait pas cette qualité et qu'elle ne pouvait prétendre au bénéfice de ces dispositions ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X et Mme X épouse Y ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté susvisé du 13 septembre 2001 du préfet de Seine-Saint-Denis et les a condamnés à verser une somme de 850 € à la Sodedat 93 ;
Considérant que, par voie de conséquence de ce qui précède, les conclusions de M. X et de Mme X épouse Y tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ; qu'en revanche, il y a lieu, sur le fondement des mêmes dispositions, de mettre à la charge de M. X et de Mme X épouse Y le paiement à la Sodedat 93 d'une somme de 1 500 € au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. Guy X et de Mme Josiane X épouse Y est rejetée.
Article 2 : M. Guy X et Mme Josiane X épouse Y verseront à la Société anonyme d'économie mixte d'aménagement du territoire du département de la Seine-Saint-Denis (Sodedat 93) une somme de 1 500 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
06VE00882 2