Vu la requête et le mémoire ampliatif, enregistrés respectivement les 10 et 26 juin 2008, présentés pour la SOCIETE WATELET T.P, dont le siège est 7, route principale du Port à Gennevilliers (92230), par Me Farge, avocat au barreau de Paris ;
La SOCIETE WATELET T.P, venant aux droits de la société Viafrance, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0606245 du 18 avril 2008 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la condamnation du syndicat intercommunal de la région de Rambouillet à lui verser la somme de 33 300,63 euros, en règlement des travaux qu'elle a réalisés dans le cadre de l'opération de construction d'une usine de traitement biologique des boues de station d'épuration ;
2°) de condamner le syndicat intercommunal de la région de Rambouillet à lui verser la somme de 33 300,63 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 5 décembre 2002, avec capitalisation ;
3°) de mettre à la charge du syndicat intercommunal de la région de Rambouillet une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient qu'à l'occasion du marché de construction d'une usine de traitement biologique des boues provenant de diverses stations d'épuration, conclu entre le syndicat intercommunal de la région de Rambouillet et la société Horstmann France, cette dernière a sous-traité les travaux de génie civil à la société SEE Simeoni, qui a elle-même sous-traité les travaux de démolition, terrassement et voirie - réseaux divers à la société Viafrance, aux droits de laquelle elle se trouve ; que la société Viafrance a été régulièrement acceptée et a obtenu l'agrément de ses conditions de paiement par un acte du 11 décembre 1998 ; que la somme restant due au titre des travaux susmentionnés s'élève à 33 300,63 euros ; qu'elle a adressé le 22 mai 2002 sa demande de paiement direct à la société SEE Simeoni et au maître de l'ouvrage ; qu'en l'absence de refus motivé de la part de la société SEE Simeoni, le décompte qu'elle transmis le 22 mai 2002 a donc été tacitement accepté ; qu'elle a respecté les obligations lui incombant, prévues par l'article 186 ter du code des marchés publics alors applicables ; que, pour sa part, le syndicat intercommunal de la région de Rambouillet ne s'est pas conformé aux dispositions de ce texte ; qu'elle était donc en droit d'obtenir le mandatement de la somme en cause dans le délai fixé à l'article 178 du code des marchés publics, soit, en l'espèce, dans les trente-cinq jours à compter du 29 octobre 2002 ; que le refus de paiement constitue un enrichissement sans cause ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le code civil ;
Vu la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975, relative à la sous-traitance ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 janvier 2010 :
- le rapport de Mme Barnaba, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme Jarreau, rapporteur public ;
Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la loi susvisée du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance : L'entrepreneur qui entend exécuter un contrat ou un marché en recourant à un ou plusieurs sous-traitants doit, au moment de la conclusion et pendant toute la durée du contrat ou du marché, faire accepter chaque sous-traitant et agréer les conditions de paiement de chaque contrat de sous-traitance par le maître de l'ouvrage ; (...) qu'aux termes de l'article 6 de la loi susmentionnée dans sa rédaction alors applicable : Le sous-traitant qui a été accepté et dont les conditions de paiement ont été agréées par le maître de l'ouvrage, est payé directement par lui pour la part du marché dont il assure l'exécution (...) ; que l'article 2 de cette loi dispose : Le sous-traitant est considéré comme entrepreneur principal à l'égard de ses propres sous-traitants ; qu'aux termes de l'article 8 de ladite loi : L'entrepreneur principal dispose d'un délai de quinze jours, comptés à partir de la réception des pièces justificatives servant de base au paiement direct, pour les revêtir de son acceptation ou pour signifier au sous-traitant son refus motivé d'acceptation. / Passé ce délai, l'entrepreneur principal est réputé avoir accepté celles des pièces justificatives ou des parties de pièces justificatives qu'il n'a pas expressément acceptées ou refusées. / Les notifications prévues à l'alinéa 1er sont adressées par lettre recommandées avec accusé de réception ; qu'enfin, aux termes de l'article 186 ter du code des marchés publics dans sa rédaction alors en vigueur, rendu applicable aux marchés conclus par les collectivités locales et leurs établissements publics par l'article 356 du même code : Au vu des pièces justificatives fournies par le sous-traitant et revêtues de l'acceptation du titulaire du marché, l'ordonnateur mandate les sommes dues au sous-traitant et, le cas échéant, envoie à ce dernier l'autorisation définie au I de l'article 178 bis. / Dès réception de ces pièces, l'administration avise le sous-traitant de la date de réception de la demande de paiement envoyée par le titulaire et lui indique les sommes dont le paiement à son profit a été accepté par ce dernier. / Dans le cas où le titulaire d'un marché n'a ni opposé un refus motivé à la demande de paiement du sous-traitant dans le délai de quinze jours suivant sa réception, ni transmis celle-ci à l'administration, le sous-traitant envoie directement sa demande de paiement à l'administration par lettre recommandée avec avis de réception postal ou la lui remet contre récépissé dûment daté et inscrit sur un registre tenu à cet effet. / L'administration met aussitôt en demeure le titulaire, par lettre recommandée avec avis de réception postal, de lui faire la preuve, dans un délai de quinze jours à compter de la réception de cette lettre, qu'il a opposé un refus motivé à son sous-traitant. Dès réception de l'avis, elle informe le sous-traitant de la date de cette mise en demeure. / A l'expiration de ce délai, au cas où le titulaire ne serait pas en mesure d'apporter cette preuve, l'administration contractante dispose du délai prévu au I de l'article 178 pour mandater les sommes dues aux sous-traitants à due concurrence des sommes restant dues au titulaire ou du délai prévu au I de l'article 178 bis pour envoyer au sous-traitant l'autorisation d'émettre une lettre de change-relevé à due concurrence des sommes restant dues au titulaire ;
Considérant que, par un acte d'engagement accepté le 6 juillet 1998, le syndicat intercommunal de la région de Rambouillet a confié à la société Hortsmann France les travaux de construction, sur le territoire de la commune de Gazeran, d'une usine de traitement des boues provenant de diverses stations d'épuration ; que, par un acte spécial du 11 décembre 1998, la société SEE Simeoni a été acceptée en qualité de sous-traitant de la société Hortsmann France et la société Viafrance a été à son tour acceptée en qualité de sous-traitant de la société SEE Simeoni, pour les travaux de démolition, terrassement et voirie - réseaux divers ; que cet acte comportait également l'agrément exprès des conditions de paiement de ces travaux, pour un montant de 1 787 292 F TTC ( 272 470,91 euros) ; que, par jugement du 11 avril 2002, le Tribunal de commerce de Versailles a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société SEE Simeoni ; que la SOCIETE WATELET T.P, venant aux droits de la société Viafrance, qui n'a pas obtenu, de la part de la société SEE Simeoni, le paiement de la somme lui restant due au titre des travaux qu'elle avait réalisés en sa qualité d'entreprise sous-traitante, a présenté en vain une demande de règlement au syndicat intercommunal de la région de Rambouillet ; qu'elle interjette appel du jugement du 18 avril 2008 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la condamnation de cette collectivité à lui verser la somme de 33 300,63 euros ;
Considérant que, pour rejeter la demande de la SOCIETE WATELET T.P, le tribunal administratif s'est fondé sur la circonstance que cette dernière s'était bornée à adresser à l'administrateur judiciaire de la société SEE Simeoni, le 22 mai 2002, une déclaration de créance qui ne pouvait être regardée comme présentant le caractère d'une demande de paiement direct adressée à l'entrepreneur principal, au sens des dispositions précitées de la loi du 31 décembre 1975 ;
Considérant, toutefois, qu'il résulte de l'instruction que si la SOCIETE WATELET T.P a effectivement procédé, par lettre du 22 mai 2002, à une déclaration de créance effectuée entre les mains du représentant des créanciers de la société SEE Simeoni, elle a également, à la même date, informé cette dernière ainsi que le syndicat intercommunal de la région de Rambouillet du montant des factures restées impayées, soit la somme de 33 300,63 euros TTC, dont elle réclamait le règlement ; qu'elle a renouvelé sa demande de paiement auprès du syndicat susmentionné, par lettres des 29 octobre 2002, 29 avril 2005, 7 septembre 2005 et 3 mars 2006 ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que la société SEE Simeoni aurait opposé un refus motivé à la demande de paiement direct présentée par la SOCIETE WATELET T.P, comme le prévoient les dispositions des articles 8 de la loi du 31 décembre 1975 et 186 ter du code des marchés publics alors applicables ; que, par suite, il appartenait au syndicat intercommunal de la région de Rambouillet de faire droit à cette demande ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE WATELET T.P est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la condamnation du syndicat intercommunal de la région de Rambouillet au versement de la somme de 33 300,63 euros TTC ;
Sur les intérêts et les intérêts des intérêts :
Considérant qu'eu égard à la date à laquelle la SOCIETE WATELET T.P a adressé sa première demande de paiement direct au syndicat intercommunal de la région de Rambouillet, elle a droit, comme elle le demande, aux intérêts au taux légal de la somme de 33 300,63 euros à compter du 5 décembre 2002 ;
Considérant que pour l'application de l'article 1154 du code civil, la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond ; que cette demande prend effet au plus tôt à la date à laquelle elle est enregistrée et pourvu qu'à cette date il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière ; que, le cas échéant, la capitalisation s'accomplit à nouveau à l'expiration de chaque échéance annuelle ultérieure sans qu'il soit besoin de formuler une nouvelle demande ; que la SOCIETE WATELET T.P a demandé la capitalisation des intérêts dans sa demande enregistrée au greffe du tribunal administratif le 30 juin 2006 ; qu'à cette date, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, par suite, la SOCIETE WATELET T.P a droit à la capitalisation des intérêts de la somme de 33 300,63 euros au 30 juin 2006 et à chaque échéance annuelle à partir de cette date ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du syndicat intercommunal de la région de Rambouillet, au profit de la SOCIETE WATELET T.P, le versement d'une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DECIDE
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Versailles n° 0606245 du 18 avril 2008 est annulé.
Article 2 : Le syndicat intercommunal de la région de Rambouillet est condamné à verser à la SOCIETE WATELET T.P la somme de 33 300,63 euros. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 5 décembre 2002. Les intérêts échus à la date du 30 juin 2006 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date, seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 3 : Le syndicat intercommunal de la région de Rambouillet versera à la SOCIETE WATELET T.P une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la SOCIETE WATELET T.P est rejeté.
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N° 08VE01714 2