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03/05/2011 | FRANCE | N°10VE00695

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 03 mai 2011, 10VE00695


Vu la requête, enregistrée le 26 février 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Mehmet A, demeurant chez M. B, ..., par Me Saado, avocat à la Cour ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 0911335 en date du 30 novembre 2009 par laquelle le président du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 21 août 2009 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français

et a fixé le pays de renvoi ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet ...

Vu la requête, enregistrée le 26 février 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Mehmet A, demeurant chez M. B, ..., par Me Saado, avocat à la Cour ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 0911335 en date du 30 novembre 2009 par laquelle le président du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 21 août 2009 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

Il soutient que l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé et que sa situation n'a pas fait l'objet d'un examen particulier ; qu'une erreur de droit et une erreur manifeste d'appréciation ont été commises ; que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnues dès lors qu'il réside en France depuis plus de dix ans, qu'il n'a plus d'attaches dans son pays d'origine, que de nombreux membres de sa famille résident en France, que la demande présentée par son épouse pour obtenir le statut de réfugié est en cours d'instruction et que son fils est de nationalité française ; que les articles L. 313-10 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnus dès lors qu'il justifie d'un contrat à durée indéterminée en qualité de chef de chantier du BTP et est en mesure de subvenir aux besoins de sa famille ; que les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnues en ce qu'il est activement recherché en Turquie du fait de son appartenance ethnique ; que son fils a d'ailleurs obtenu le statut de réfugié et la naturalisation française ; que les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ont été également méconnues ; qu'il ne constitue pas une menace pour l'ordre public ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu l'arrêté du 18 janvier 2008 relatif à la délivrance, sans opposition de la situation de l'emploi, des autorisations de travail aux étrangers non ressortissants d'un état membre de l'Union européenne, d'un autre état partie à l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 avril 2011 :

- le rapport de Mme Riou, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Brunelli, rapporteur public ;

Considérant que M. A, ressortissant turc né le 10 octobre 1947, relève régulièrement appel de l'ordonnance par laquelle le président du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 21 août 2009 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ;

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : Les présidents de tribunal administratif (...) peuvent par ordonnance : / (...) 7°) Rejeter, après l'expiration du délai de recours (...), les requêtes ne comportant que (...) des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé (...) ;

Considérant que la demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Montreuil tendait à l'annulation de l'arrêté en date du 21 août 2009 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour en qualité de salarié, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays dans lequel il serait renvoyé ; que le requérant a notamment fait valoir, sur le fondement de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qu'il était titulaire d'un contrat à durée indéterminée pour un emploi de chef de chantier du BTP et qu'étant d'origine kurde, il était activement recherché par les autorités turques ; que les moyens ainsi invoqués, qui n'étaient pas inopérants, étaient, en outre, assortis de faits qui n'étaient pas manifestement insusceptibles de venir à leur soutien et des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ; que, dès lors, le président du Tribunal administratif de Montreuil ne pouvait rejeter la demande de M. A sur le fondement des dispositions précitées du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative ; que, par suite, l'ordonnance attaquée est entachée d'irrégularité et doit être annulée ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Montreuil ;

Sur la légalité de l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis en date du 21 août 2009 :

Considérant, en premier lieu, que l'arrêté attaqué a été signé par M. François Praver, secrétaire général de la sous-préfecture du Raincy, qui disposait à cet effet d'une délégation de signature du sous-préfet de cet arrondissement, M Philippe Piraux, par arrêté n° 09-0120 du 19 janvier 2009, publié le même jour au bulletin d'informations administratives du département ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte litigieux manque en fait ;

Considérant, en deuxième lieu, que, contrairement à ce que soutient M. A, l'arrêté attaqué, qui précise les circonstances de fait et les éléments de droit sur lesquels il repose, est suffisamment motivé ; qu'en outre, il ressort des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Saint-Denis a procédé à l'examen particulier de la situation personnelle du requérant avant de refuser de lui attribuer un titre de séjour ; que, par suite, les moyens tirés de l'erreur de droit et de l'erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle doivent être écartés ;

Considérant, en troisième lieu, que si M. A fait valoir qu'il vit et travaille en France depuis plus de dix ans, que son fils a obtenu le statut de réfugié politique et a été naturalisé français, que la plupart des membres de sa famille réside en France et qu'il n'a plus d'attaches en Turquie, il ressort cependant des pièces du dossier que son épouse réside habituellement en Turquie et que si elle est entrée régulièrement en France en 2009 pour y présenter une demande tendant à obtenir le statut de réfugié, en cours d'instruction à la date de l'arrêté attaqué, une telle demande ne lui donne pas droit au séjour ; que, dans ces conditions, compte tenu des circonstances de l'espèce, l'arrêté préfectoral attaqué n'a pas porté au droit de M. A au respect de sa vie privée et familiale, une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, les moyens tirés de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peuvent qu'être écartés ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail. Pour l'exercice d'une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national par l'autorité administrative, après consultation des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives, l'étranger se voit délivrer cette carte sans que lui soit opposable la situation de l'emploi sur le fondement du même article L. 341-2 ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. A n'a pas produit, à l'appui de sa demande de titre de séjour, un contrat de travail visé par l'autorité compétente pour la délivrance d'un titre de séjour en qualité de salarié, comme l'exigent les dispositions précitées de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni le visa de long séjour exigé par les dispositions de l'article L. 311-7 du même code ; que, dans ces conditions, le requérant ne peut utilement se prévaloir d'un contrat de travail en qualité de chef de chantier dans le bâtiment, emploi figurant sur la liste des métiers au titre desquels la situation de l'emploi n'est pas opposable aux étrangers ; que, par suite, M. A ne remplissait pas les conditions pour bénéficier de la carte de séjour temporaire prévue au 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant, en cinquième lieu, que lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé ; qu'il ne ressort d'aucune des pièces du dossier ni des mentions portées dans l'arrêté attaqué, que M. A aurait sollicité la délivrance d'un titre de séjour portant la mention salarié sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatif à l'admission au séjour à titre humanitaire et exceptionnel ; qu'ainsi, il ne peut utilement invoquer le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions à l'encontre du refus que le préfet de la Seine-Saint-Denis a opposé à sa demande de titre de séjour qui n'a pas été présentée sur le fondement de cet article ;

Considérant, en sixième lieu, que M. A n'établit pas qu'il encourrait des risques personnels en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peuvent qu'être écartés ;

Considérant, en septième lieu, que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant n'est assorti d'aucune précision permettant au juge d'en apprécier le bien-fondé ; que, par suite, ce moyen doit être écarté ;

Considérant, en dernier lieu, que la circonstance que le requérant ne constituerait pas une menace pour l'ordre public est sans incidence sur la légalité de l'arrêté attaqué ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté attaqué ;

DECIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 0911335 en date du 30 novembre 2009 du président du Tribunal administratif de Montreuil est annulée.

Article 2 : La demande de M. A présentée devant le Tribunal administratif de Montreuil et le surplus des conclusions de sa requête présentée devant la Cour sont rejetés.

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N° 10VE00695 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 10VE00695
Date de la décision : 03/05/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme COËNT-BOCHARD
Rapporteur ?: Mme Catherine RIOU
Rapporteur public ?: M. BRUNELLI
Avocat(s) : SAADO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2011-05-03;10ve00695 ?
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