Vu la requête, enregistrée le 4 août 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour Mme Sona A demeurant chez M. Djibril B, ..., par Me d'Hauteville, avocat à la Cour ; Mme A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1002719 en date du 8 juillet 2010 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Essonne du 26 mars 2010 refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant de pays de destination ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Essonne de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que l'arrêté attaqué méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'en effet, arrivée en France en septembre 2007 pour y solliciter l'asile, elle vit en concubinage avec un compatriote titulaire d'un titre de séjour depuis 2005, avec lequel elle a eu un enfant né en juin 2008 ; que sa présence en France auprès de son compagnon est indispensable, celui-ci souffrant d'une grave hépatite qui ne peut être soignée dans son pays d'origine ; qu'en outre, leur insertion en France est exemplaire ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 juillet 2011 :
- le rapport de M. Huon, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Dhers, rapporteur public ;
Considérant que Mme A, de nationalité guinéenne, fait appel du jugement du 8 juillet 2010 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Essonne du 26 mars 2010 refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant de pays de destination ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et n'est d'ailleurs pas contesté, que Mme A est entrée en France en septembre 2007, date à laquelle elle a noué une relation avec un compatriote en situation régulière, père de son enfant né le 10 juin 2008 ; qu'il n'est pas davantage contesté que depuis l'année 2005, M. B est atteint, ainsi que cela résulte de certificats médicaux en date des 16 mars 2007 et 20 juillet 2008, d'une hépatite B + D, qui ne peut être soignée dans son pays d'origine et qui est à l'origine d'un état de fatigue perturbant sa vie quotidienne et rendant indispensable la présence de sa compagne à ses côtés ; que l'intéressé bénéficie d'ailleurs depuis 2005 d'un titre de séjour régulièrement renouvelé ; que, dans ces circonstances, compte tenu des liens familiaux de la requérante en France, la décision de refus de titre de séjour a porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et a, ainsi, méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par voie de conséquence, les décisions du même jour par lesquelles le préfet de l'Essonne a respectivement obligé Mme A à quitter le territoire français et fixé le pays de destination sont elles-mêmes illégales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant qu'eu égard au motif énoncé ci-dessus, le présent arrêt implique nécessairement que soit délivrée à Mme A une carte de séjour temporaire sur le fondement de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'à la date de la présente décision, des éléments de fait ou de droit nouveaux justifieraient qu'une nouvelle décision de refus soit opposée à la demande de l'intéressée ; qu'il y a lieu, par suite, d'enjoindre au préfet de l'Essonne de procéder à cette délivrance dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le versement à Mme A d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1002719 du 8 juillet 2010 du Tribunal administratif de Versailles et l'arrêté du préfet de l'Essonne du 26 mars 2010 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Essonne de délivrer à Mme A une carte de séjour temporaire vie privée et familiale dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à Mme A une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A est rejeté.
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N° 10VE02567 2