Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 19 juillet 2010, présentée pour M. Makensie A, demeurant ..., par Me Rezki ; M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0807223 du 15 mai 2009 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 13 septembre 2007 par lequel le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales l'a révoqué de ses fonctions ;
2°) de le réintégrer avec toutes conséquences de droit, reconstitution de carrière et d'échelon dans un délai de deux mois, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
Il soutient que la procédure a été viciée, dès lors que son dossier ne comportait pas les éléments qui lui étaient favorables, que les procédures disciplinaires dont il aurait fait l'objet ne lui ont jamais été notifiées et que ces faits non établis ont faussé l'avis de la commission de discipline ; que l'arrêté attaqué est entaché d'erreur de fait ; que la sanction de la révocation est manifestement disproportionnée à la faute commise ; que la décision contestée est entachée d'erreur de droit ; que les premiers juges ont commis une erreur manifeste d'appréciation en considérant qu'il avait été absent de manière irrégulière ; que le médecin chef ne l'a pas informé de ce qu'il avait la possibilité de saisir le comité médical compétent ; que ce médecin chef a fait preuve de partialité ; qu'il est victime de harcèlement moral ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;
Vu l'arrêté du 6 juin 2006 portant règlement général d'emploi de la police nationale ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 septembre 2012 :
- le rapport de Mlle Rudeaux, premier conseiller,
- les conclusions de M. Soyez, rapporteur public,
- et les observations de Me Rezki, pour M. A ;
Considérant que M. A, gardien de la paix affecté à la circonscription de sécurité publique de Nanterre, relève appel du jugement du 15 mai 2009 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 13 septembre 2007 par lequel le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales lui a infligé la sanction de la révocation ;
Sur les conclusions de M. A :
Considérant qu'aux termes de l'article 29 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale " et qu'aux termes de l'article 66 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : / (...) Quatrième groupe : (...) la révocation " ;
Considérant que l'arrêté du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales en date du 13 septembre 2007 infligeant à M. A la sanction de la révocation a été pris, après l'avis unanime de la commission administrative paritaire interdépartementale siégeant en formation disciplinaire le 21 août 2007, au motif que l'intéressé s'était placé en position d'absence irrégulière du 18 avril 2005 au 3 février 2007, malgré plusieurs relances et mises en demeure par sa hiérarchie de reprendre ses fonctions, auxquelles il n'a pas donné suite ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 19 de la loi susvisée du 13 juillet 1983 : " Le fonctionnaire à l'encontre duquel une procédure disciplinaire est engagée a droit à la communication de l'intégralité de son dossier individuel et de tous les documents annexes " et qu'aux termes de l'article 18 de la même loi : " Le dossier du fonctionnaire doit comporter toutes les pièces intéressant la situation administrative de l'intéressé, enregistrées, numérotées et classées sans discontinuité " ; qu'il résulte de ces dispositions combinées que le dossier communiqué à l'intéressé préalablement à une sanction disciplinaire doit comporter l'ensemble des pièces intéressant sa situation administrative, y compris celles qui lui seraient favorables et qu'il pourrait faire valoir au cours de la procédure engagée à son encontre ;
Considérant, d'une part, que, contrairement à ce que soutient M. A, les deux lettres de félicitations établies par des autorités de la police nationale, en date des 13 septembre 2004 et 13 avril 2007, ont été portées à la connaissance des membres du conseil de discipline, ainsi qu'il ressort notamment du mémoire en défense produit par le requérant devant l'instance disciplinaire le 27 juin 2007 ; que, s'agissant de la médaille de la défense nationale, obtenue par l'intéressé en 1997, il ressort des pièces du dossier et notamment de la notice individuelle de M. A, qu'elle y est mentionnée dans une rubrique " décorations " ;
Considérant que si l'administration, dans son rapport adressé au conseil de discipline, s'est prévalue de l'existence d'un blâme, le conseil de discipline, dans son avis, n'y fait pas référence ; que ce dernier indique seulement, pour justifier l'avis unanimement favorable à la sanction de révocation, que M. A s'est placé en situation d'absence irrégulière pendant de longs mois et a eu un comportement indigne ; qu'il suit de là que M. A n'est pas fondé à soutenir que le conseil de discipline aurait retenu des éléments qui ne lui auraient pas été communiqués ; que, le moyen tiré de ce que ledit blâme n'aurait jamais été notifié au requérant est inopérant et ne peut qu'être écarté ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à soutenir que la procédure disciplinaire ayant abouti à sa révocation aurait été irrégulière ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 24 du décret du 14 mars 1986 susvisé : " Sous réserve des dispositions de l'article 27 (...), en cas de maladie dûment constatée et mettant le fonctionnaire dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, celui-ci est de droit mis en congé de maladie " ; qu'aux termes de l'article 25 du même décret : " Pour obtenir un congé de maladie, ainsi que le renouvellement du congé initialement accordé, le fonctionnaire doit adresser à l'administration dont il relève, par l'intermédiaire de son chef de service, une demande appuyée d'un certificat d'un médecin, d'un chirurgien-dentiste ou d'une sage-femme. / L'administration peut faire procéder à tout moment à la contre-visite du demandeur par un médecin agréé ; le fonctionnaire doit se soumettre, sous peine d'interruption du versement de sa rémunération, à cette contre-visite / Le comité médical compétent peut être saisi, soit par l'administration, soit par l'intéressé, des conclusions du médecin agréé " ;
Considérant qu'il ne résulte ni des textes précités, ni d'aucune autre disposition, que l'administration serait dans l'obligation de remettre, sans qu'aucune demande ne lui ait été adressée, à une personne en congés de maladie les avis médicaux émis par le médecin chef à l'issue d'une contre-visite médicale ou de l'informer de ce qu'elle aurait la possibilité de saisir le comité médical ; que, par suite, la circonstance que le requérant n'aurait pas contesté ces avis est sans incidence sur leur validité et sur le caractère justifié ou non de ses congés de maladie ;
Considérant, en troisième lieu, qu'il est constant que le 8 février 2005, M. A a fait parvenir à sa hiérarchie un arrêt de travail allant jusqu'au 12 février 2005 et a été placé en congé de maladie ordinaire ; qu'à la suite de la reconduction de cet arrêt de travail initial par son médecin, le requérant a fait l'objet, le 12 avril 2005, d'une contre-visite du médecin chef de la préfecture de police de Paris, qui l'a déclaré apte à reprendre le service à compter du 18 avril 2005, et a précisé qu'il ne devait pas porter d'arme ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que ce médecin chef aurait fait preuve de partialité ; que, malgré les mises en demeure de rejoindre son poste adressées par son supérieur hiérarchique les 16 avril 2005, 26 avril 2005 et 2 mai 2005, M. A, sauf pour solliciter un congé sans solde, lequel lui a été refusé, n'a pas pris contact avec sa hiérarchie, se contentant de lui faire régulièrement parvenir de nouveaux arrêts de travail ; que ces derniers étaient établis par le même médecin, comportaient le même motif d'absence que les arrêts antérieurs à l'avis du médecin chef et n'apportaient dès lors pas d'élément nouveau relatif à son état de santé ; que le requérant s'est placé, de ce fait, en position d'absence irrégulière à compter du 18 avril 2005 ; qu'il reconnaît d'ailleurs lui-même dans le procès-verbal de son audition administrative du 13 février 2007 qu'il avait connaissance de cette situation ; que, dans ces conditions, M. A n'est pas fondé à soutenir que son absence irrégulière du 18 avril 2005 au 3 février 2007 ne serait pas matériellement établie, ni que le ministre aurait commis une erreur d'appréciation ou une erreur de droit en décidant de le révoquer au motif qu'il s'était placé en position d'absence irrégulière pendant plus de vingt-deux mois ; que la circonstance qu'à partir du mois de février 2007, M. A aurait repris ses fonctions en étant affecté dans un service consacré au courrier, ne saurait l'exonérer de son comportement fautif antérieur, et est dès lors sans incidence sur la légalité de la sanction contestée ;
Considérant, en quatrième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit, que M. A a été irrégulièrement absent pendant vingt-deux mois, malgré l'avis du médecin chef et les mises en demeure et injonctions téléphoniques de sa hiérarchie de rejoindre son poste ; que M. A, qui n'établit pas avoir été atteint à l'époque des faits d'une maladie de nature à l'empêcher d'exercer ses fonctions, a, par son comportement, compromis le fonctionnement d'un service public essentiel ; que les faits susmentionnés sont constitutifs de fautes de nature à justifier le prononcé d'une sanction disciplinaire ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la nature et du caractère persistant des agissements fautifs dont s'agit, incompatibles avec les fonctions assurées par l'intéressé, la sanction de la révocation infligée par le ministre n'est pas manifestement disproportionnée au regard de la gravité des fautes commises ;
Considérant, enfin, qu'aux termes du premier alinéa de l'article 6 quinquies de la loi susvisée du 13 juillet 1983, dans sa rédaction issue de la loi du 17 janvier 2002 de modernisation sociale : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel " ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, pour justifier sa décision de révoquer M. A, le ministre de l'intérieur s'est fondé sur l'absence irrégulière de près de deux ans du requérant, sur sa désinvolture et sur le mépris de ses obligations de gardien de la paix ; que si M. A se plaint de ce que son supérieur aurait pris contact avec lui en vue de l'inviter à reprendre son activité, et de ce qu'il aurait reçu plusieurs mises en demeure, ces démarches répondaient à l'intérêt général et aux besoins du service ; que, dans ces conditions, les éléments produits par M. A ne sont pas susceptibles de faire présumer l'existence d'un harcèlement moral de la part de sa hiérarchie ; qu'il suit de là que le moyen ne peut qu'être écarté ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ; que, par suite, ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées ;
Sur les conclusions du ministre de l'intérieur tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761 -1 du code de justice administrative :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'accueillir les conclusions du ministre de l'intérieur tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
Article 2 : Les conclusions du ministre de l'intérieur tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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N° 10VE02325