Vu la requête, enregistrée le 19 décembre 2011, présentée pour Mme C...B..., demeurant ...Bokanowski à Dugny (93440), par Me Arm, avocat ; Mme B... demande à la Cour :
1° d'annuler le jugement n° 0704933 en date du 30 mai 2011 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté n° 2007/453 du 7 mars 2007 par lequel le maire de la commune de Dugny a modifié son régime indemnitaire, à ce qu'il soit enjoint au maire de la commune de Dugny de procéder au rappel de traitement correspondant, soit environ 350 euros bruts par mois, majorés des intérêts au taux légal à compter de la date où ses salaires auraient dû être versés et à la capitalisation jusqu'à parfait paiement et à la condamnation de la commune de Dugny à lui payer les sommes de 4 630 euros en réparation de son préjudice matériel et de 6 000 euros au titre de l'ensemble de ses préjudices moraux ;
2° de faire droit à sa demande de première instance et d'annuler l'arrêté n° 2007/453 du 7 mars 2007 du maire de la commune de Dugny ;
3° de condamner la commune de Dugny à lui verser la somme totale de 45 000 euros à titre d'indemnisation des préjudices subis ;
4° de mettre à la charge de la commune de Dugny le paiement d'une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier en ce qu'il ne porte pas les signatures du rapporteur et du président, en méconnaissance de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;
- le jugement attaqué est irrégulier en ce qu'il n'a pas répondu aux conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté n° 2007/740 du 14 juin 2007 ;
- le jugement attaqué est entaché d'une erreur de droit en ce que, s'il a reconnu la responsabilité de la commune de Dugny et le fait que l'arrêté n°2007/740 du 14 juin 2007 constituait une sanction déguisée, il n'en a pas tiré les conséquences en annulant cet acte illégal ;
- contrairement à ce qu'a relevé le jugement attaqué, la nouvelle organisation des services communaux ne répondait aucunement à l'intérêt du service mais était destinée à la sanctionner de manière illégale et à la priver de toute fonction ;
- c'est à tort que les premiers juges ont estimé qu'il sera fait une juste appréciation du préjudice subi par elle par l'allocation d'une somme de 7 000 euros, tous postes de préjudice confondus ; en effet, elle a subi des actes répétés d'humiliation et de vexation de la part de ses supérieurs hiérarchiques qui ont dégradé ses conditions de travail et altéré son état de santé ; elle souffre depuis le 19 février 2007 d'un état dépressif qui doit être imputé au service ; elle est ainsi fondée à demander la somme de 5 000 euros en réparation de son préjudice moral ; par ailleurs, il a été porté atteinte à sa réputation et à sa dignité, ce qui a constitué un préjudice moral qui doit être réparé par l'allocation d'une somme de 5 000 euros ; elle a subi en outre des troubles dans ses conditions d'existence qui doivent être réparés par l'allocation d'une somme de 5 000 euros ; de plus, dès lors qu'elle n'a pas pu reprendre son emploi à la suite de sa dépression, elle n'a pas pu bénéficier d'un déroulement de carrière normal, et verra ultérieurement sa retraite réduite, ce qui doit être réparé par l'allocation d'une somme de 10 000 euros ; enfin, elle a subi un préjudice financier important du fait de l'édiction de l'arrêté illégal n° 2007/740 du 14 juin 2007 qui doit être évalué à la somme de 20 000 euros ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 juin 2013 :
- le rapport de M. Luben, président ;
- les conclusions de M. Soyez, rapporteur public ;
- les observations de Me A...pour la commune de Dugny ;
Et connaissance prise de la note en délibéré enregistrée le 27 juin 2013, présentée pour MmeB..., par Me Arm ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
1. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience. " ;
2. Considérant qu'il ressort de l'examen de la minute du jugement attaqué que celle-ci porte les signatures du rapporteur et du président de la formation de jugement ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 741-7 du code de justice administrative manque en fait ;
3. Considérant, en second lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B...a présenté au tribunal administratif une demande tendant à la fois à l'annulation de l'arrêté n° 2007/740 en date du 14 juin 2007 du maire de la commune de Dugny et une demande indemnitaire ; que si les premières conclusions relevaient, en principe, du recours pour excès de pouvoir, MmeB..., en présentant, en outre, des conclusions indemnitaires, a donné à l'ensemble de sa demande le caractère d'une demande de plein contentieux ; que, par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait irrégulier en ce qu'il n'aurait pas répondu aux conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 14 juin 2007 du maire de la commune de Dugny ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le jugement attaqué n'est pas entaché d'irrégularité ;
Sur la responsabilité de la commune de Dugny :
5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que MmeB..., agent de maîtrise principal territorial à la mairie de Dugny, responsable du service entretien-restauration, a fait l'objet d'un changement d'affectation en qualité de coordinatrice du personnel de service le 21 mars 2007 en application de la réorganisation des services de la commune approuvée par le comité technique paritaire du 15 février 2007 ; que, par l'arrêté n° 2007/453 en date du 7 mars 2007 du maire de la commune de Dugny, son régime indemnitaire a été modifié, le coefficient de l'indemnité d'exercice de missions passant de 3 à 1 et le coefficient de l'indemnité d'administration et de technicité passant de 8 à 3 ; que, par un courrier en date du 26 mars 2007, Mme B...a demandé au maire de Dugny de retirer cet arrêté et de lui " rendre l'essentiel de ses anciennes fonctions " ; que le maire de Dugny a implicitement rejeté cette demande ;
6. Considérant, en premier lieu, que la commune de Dugny soutient, par la voie de l'appel incident, que les demandes indemnitaires de Mme B...étaient irrecevables car n'ayant pas été précédées d'une demande préalable adressée au maire de la commune et que la commune avait opposé, dans son premier mémoire en défense devant le tribunal administratif, leur irrecevabilité ; qu'ainsi qu'il a été dit, Mme B...ayant présenté au tribunal administratif une demande tendant à la fois à l'annulation de l'arrêté n° 2007/740 en date du 14 juin 2007 du maire de la commune de Dugny et une demande indemnitaire, elle a ainsi donné à l'ensemble de sa demande le caractère d'une demande de plein contentieux ; qu'il résulte de l'instruction que la commune de Dugny, dans son mémoire en défense enregistré le 12 mai 2011 au greffe du tribunal administratif, avait opposé l'irrecevabilité des demandes indemnitaires de Mme B...au motif de l'absence de demande préalable ; qu'ainsi, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges pour estimer que les conclusions indemnitaires de Mme B...étaient recevables, la commune de Dugny avait invoqué à titre principal l'irrecevabilité des conclusions à fin d'indemnité ; que, toutefois, Mme B...a adressé une demande d'indemnisation, datée du 8 mars 2010, au maire de Dugny, par une lettre recommandée avec accusé de réception remise à son destinataire le 10 mars 2010, dont l'accusé de réception a été produit en appel le 7 juin 2013 ; qu'ainsi, le contentieux a été lié en cours d'instance, antérieurement à l'enregistrement, le 12 mai 2011, au greffe du tribunal administratif, du mémoire en défense susmentionné de la commune de Dugny ; que, par suite, la commune de Dugny n'est pas fondée à se plaindre de ce que le tribunal administratif a écarté sa fin de non-recevoir ;
7. Considérant, en deuxième lieu, que la personne qui a demandé en première instance la réparation des conséquences dommageables d'un fait qu'elle impute à une administration est recevable à détailler ces conséquences devant le juge d'appel, en invoquant le cas échéant des chefs de préjudice dont elle n'avait pas fait état devant les premiers juges, dès lors que ces chefs de préjudice se rattachent au même fait générateur et que ses prétentions demeurent... ;
8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme B... avait saisi le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, dans le dernier état de ses écritures de première instance, d'une demande tendant au versement d'une indemnité de 5 400 euros au titre de la réparation de son préjudice matériel et de 10 000 euros au titre de la réparation de l'ensemble de ses préjudices moraux ; qu'elle ne se prévaut pas en appel d'éléments nouveaux apparus postérieurement au jugement ; que, par suite, la commune de Dugny est fondée à soutenir, par la voie de l'appel incident, que les demandes indemnitaires de Mme B...présentées en appel sont irrecevables en ce qu'elles excèdent le montant total de l'indemnité demandée en première instance ;
9. Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de l'instruction que Mme B...encadrait, avant sa nouvelle affectation, soixante-quinze agents d'entretien et de restauration depuis plus de douze années et avait fait l'objet d'appréciations et de notations favorables ; qu'à la suite de la prise de fonctions du nouveau directeur général des services de la commune, une nouvelle organisation des services de la commune de Dugny a été mise en place le 1er mars 2007, emportant la création, au sein de la direction des services à la population, d'un service de logistique scolaire et administrative, organisé en deux pôles, dont le pôle " personnels de service ", placé sous la responsabilité de Mme B...en tant que coordinatrice, chargée d'organiser " les tâches d'entretien des agents de service sur les différents équipements municipaux ", l'autre pôle étant constitué du service " restauration collective " qui lui a été retiré et qui a été placé sous la responsabilité d'un autre agent ; que ce changement d'affectation s'est accompagné d'un changement de lieu de travail ;
10. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la nouvelle organisation des services communaux répondait à l'intérêt du service ; que, toutefois, le changement d'affectation de Mme B... et ses corolaires, des responsabilités moindres et la diminution de ses indemnités décidée par l'arrêté n° 2007/453 en date du 7 mars 2007, n'étaient pas justifiés par l'intérêt du service et constituaient une sanction disciplinaire déguisée ; qu'en effet, la gestion par Mme B... du service entretien-restauration avait été mise en cause à la suite d'un incident survenu le 18 janvier 2007, lorsque le nouveau directeur général des services avait constaté que deux lingères de la lingerie municipale dont elle avait la responsabilité effectuaient des travaux personnels de lavage et de repassage ; qu'un rapport référencé HE/ML/2007/102 avait ensuite été adressé par la première adjointe au maire à Mme B...le 26 février 2007 qui précisait que celle-ci avait, d'une part, " reconnu l'existence de ce travail non réglementaire installé de longue date ", d'autre part, " admis le non respect des ordres reçus de [son] responsable de service, relatif aux agissements du personnel impliqué, et le manque de contrôle réguliers des tâches des agents de la lingerie municipale ", et que " par conséquent, dans le cadre d'une réorganisation de service répondant à des objectifs de gestion fixés par la municipalité (...), le directeur général des services avait jugé opportun de tenir compte de [sa] note de service en date du 19 janvier 2007 qui précisait [ses] manquements en tant que responsable de service " et avait " jugé nécessaire de redéfinir le mode de gestion des agents d'entretien et de restauration scolaire, dans le cadre d'une réorganisation administrative qu'il [lui] a présentée le mardi 13 février dernier " ; que ledit rapport référencé HE/ML/2007/102 du 26 février 2007 a de plus été mentionné dans l'arrêté n° 2007/453 en date du 7 mars 2007 portant diminution des indemnités servies à MmeB..., établissant ainsi explicitement le lien entre les agissements reprochées à cette dernière et la diminution de son régime indemnitaire ; que, par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que le changement d'affectation de Mme B...ainsi que l'arrêté n° 2007/453 consécutif à cette nouvelle affectation constituaient une sanction disciplinaire déguisée, entachée d'illégalité fautive comme étant prise en violation de la procédure disciplinaire applicable aux agents de la fonction publique territoriale ; qu'il s'ensuit que l'appel incident présenté par la commune de Dugny doit être rejeté ;
11. Considérant, en quatrième lieu, que Mme B...a présenté au tribunal administratif une demande tendant à la fois à l'annulation de l'arrêté n° 2007/740 du 14 juin 2007 du maire de la commune de Dugny et une demande indemnitaire ; que si les premières conclusions relevaient, en principe, du recours pour excès de pouvoir, MmeB..., en présentant, en outre, des conclusions indemnitaires, a donné à l'ensemble de sa demande le caractère d'une demande de plein contentieux ; que, par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'une erreur de droit en ce qu'il n'aurait pas tiré les conséquences de la responsabilité de la commune de Dugny, qu'il a reconnue, en annulant l'arrêté n° 2007/740 du 14 juin 2007 du maire de la commune de Dugny ;
12. Considérant, en cinquième lieu, que les conclusions de Mme B...dirigées contre les motifs du jugement attaqué, qui a au demeurant partiellement fait droit à ses conclusions, par lesquels les premiers juges ont estimé que " la nouvelle organisation des services communaux semble répondre, dans son ensemble, à l'intérêt du service ", ne sont pas recevables ;
Sur les préjudices subis par MmeB... :
13. Considérant qu'il sera fait une juste appréciation des préjudice subis par Mme B...au titre de la perte de chance d'une progression de carrière, de son préjudice financier, de son préjudice moral et des troubles dans ses conditions d'existence en portant à la somme de 10 000 euros la somme de 7 000 euros qui avait été allouée par les premiers juges ; que le jugement attaqué doit, dès lors, être réformé dans cette mesure ;
Sur les conclusions tendant de l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des dispositions de la loi du 10 juillet 1991 :
14. Considérant, en premier lieu, qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par la commune de Dugny doivent dès lors être rejetées ;
15. Considérant, en second lieu, qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi susvisée du 10 juillet 1991 : " (...) En toute matière, l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle partielle ou totale peut demander au juge de condamner la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès, et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à lui payer une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. / Si le juge fait droit à sa demande, l'avocat dispose d'un délai de douze mois à compter du jour où la décision est passée en force de chose jugée pour recouvrer la somme qui lui a été allouée. S'il recouvre cette somme, il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat. S'il n'en recouvre qu'une partie, la fraction recouvrée vient en déduction de la part contributive de l'Etat. / Si, à l'issue du délai de douze mois mentionné au troisième alinéa, l'avocat n'a pas demandé le versement de tout ou partie de la part contributive de l'Etat, il est réputé avoir renoncé à celle-ci. (...) " ; qu'aux termes du 3ème alinéa de l'article 76 de la même loi : " (...) Les bureaux d'aide juridictionnelle se prononceront dans les conditions prévues par les textes en vigueur à la date à laquelle les demandes ont été présentées et les admissions produiront les effets attachés à ces textes. (...) " ; que Mme B...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Arm, avocat de MmeB..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de la commune de Dugny la somme de 1 500 euros au bénéfice de Me Arm ;
DECIDE :
Article 1er : La somme de 7 000 euros que la commune de Dugny a été condamnée à verser à Mme B...par le jugement du 30 mai 2011 est portée à 10 000 euros.
Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 30 mai 2011 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme B...est rejeté.
Article 4 : Les conclusions de la commune de Dugny présentées par la voie de l'appel incident et ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La commune de Dugny versera, en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, une somme de 1 500 euros à Me Arm, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.
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N°11VE04162