Vu la requête, enregistrée le 20 septembre 2011, présentée pour M. B...A...demeurant ... par Me Bineteau, avocat ; M. A...demande à la Cour :
1° de réformer le jugement n° 0902148 en date du 21 juillet 2011 du Tribunal administratif de Montreuil en tant qu'il a limité le montant de l'indemnisation accordée à M. A... à la somme de 1 500 euros ;
2° de dire et juger que la responsabilité de France Télécom est engagée en raison des fautes commises dans la gestion de son dossier et au titre de la responsabilité sans faute ;
3° de condamner France Télécom à lui verser une somme de 62 000 euros au titre des préjudices subis, majorée des intérêts au taux légal à compter de sa demande préalable ;
4° de mettre à la charge de France Télécom une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- l'administration n'a géré que tardivement les accidents du travail dont il a été victime ; qu'en ce qui concerne son accident du 8 août 2002, son imputabilité au service n'a été reconnue par la commission de réforme que le 14 juin 2007 ; qu'en ce qui concerne l'accident du travail du 22 mai 2003, l'imputabilité au service n'a été reconnue qu'en 2004 ; qu'en ce qui concerne l'accident de service du 11 novembre 2003, l'allocation temporaire d'invalidité ne lui a été octroyée qu'en octobre 2007 ; que ces retards lui ont occasionné un préjudice financier ; que postérieurement, France Télécom a commis une nouvelle erreur en lui allouant une prime de 500 euros alors, qu'après vérification, seule la somme de 161,42 euros lui a été versée ; que la société a fait preuve de mauvais vouloir dans la régularisation de sa situation alors même qu'il l'a alertée à de nombreuses reprises de cette gestion anormale ;
- le Docteur Maloux a commis une faute de service engageant la responsabilité de France Télécom en faisant état, dans son rapport d'expertise, de renseignements erronés et sans rapport avec son état de santé alors que ce document est strictement confidentiel et ne pouvait qu'être communiqué sous pli ;
- la société France Télécom a commis une faute en ne le faisant pas bénéficier d'un poste adapté à son grade du mois de septembre 1998 à ce jour et en le déchargeant de toute responsabilité ;
- ce changement d'affectation a entraîné un changement de situation ; qu'il appartenait donc à France Télécom de saisir la commission administrative paritaire compétente, voir la commission de réforme dans le cadre d'un reclassement ;
- la décision litigieuse ne lui a pas été notifiée régulièrement ;
- il a été victime de harcèlement moral ; qu'il a dû faire face aux conditions particulièrement anormales de travail et notamment aux agissements de son supérieur hiérarchique qui a fait preuve d'acharnement à son encontre ;
- la responsabilité de la société France Télécom est également engagée sans faute ; que le fonctionnaire qui a enduré du fait d'un accident de service des souffrances physiques ou morales et des préjudices esthétiques ou d'agrément peut en obtenir réparation en l'absence même de faute de l'administration ; que le fait d'être en position d'activité ne s'opposait pas à ce qu'il obtienne réparation des dommages ne revêtant pas un caractère patrimonial subis du fait des accidents de service dont il a été victime ;
- il a subi un préjudice financier dont le montant d'élève à la somme de 15 000 euros, un préjudice dans les troubles dans les conditions d'existence évalué à la somme de 25 000 euros, un préjudice moral de 15 0000 euros ; un préjudice d'agrément et de souffrances physiques estimé à 7 000 euros ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;
Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique d'Etat ;
Vu la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et à France Télécom ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 septembre 2013 :
- le rapport de Mme Lepetit-Collin, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Soyez, rapporteur public ;
1. Considérant que M. A...a été embauché en 1974 aux " Postes et Télécommunications " en qualité d'aide technicien ; qu'il a ensuite poursuivi sa carrière au sein de la société France Télécom où il a été nommé responsable de groupe en 1996 ; qu'à partir de l'année 1998, il s'est plaint d'une diminution des responsabilités qui lui étaient confiées ; qu'en 2002 et 2003, il a ensuite été victime de trois accidents sur son lieu de travail ; qu'en 2009, M. A... a saisi le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'une action indemnitaire à raison des préjudices subis du fait de la dégradation de ses conditions de travail et de la mauvaise gestion administrative de ses accidents de service ; que cette requête a été transférée au Tribunal administratif de Montreuil qui, par un jugement en date du 21 juillet 2011, a rejeté cette requête ; que M. A...relève régulièrement appel de ce jugement ;
Sur la responsabilité pour faute de France Télécom :
2. Considérant, en premier lieu, que M. A...se prévaut des fautes commises par France Télécom dans la gestion administrative de ses dossiers d'accidents de travail et notamment du traitement anormalement long de ces derniers ; qu'il résulte de l'instruction que l'imputabilité au service de l'accident du 8 août 2002 n'a été reconnue par la commission de réforme que le 14 juin 2007 alors que la date de consolidation de ce dernier était fixée au 26 novembre 2002 ; que France Télécom n'apporte aucun élément de nature à expliquer le retard ainsi pris par ses services dans la gestion de ce dossier ; que, de même, en ce qui concerne l'accident du 12 novembre 2003, il résulte de l'instruction que l'allocation temporaire d'invalidité n'a été octroyée au requérant qu'en octobre 2007, sans que France Télécom ne soit en mesure de justifier du délai de quatre ans pris pour le traitement de ce dossier ; qu'en revanche, l'imputabilité au service de l'accident du travail du 22 mai 2003 a été reconnue dès 2004 alors que la commission de réforme s'était réunie le 18 novembre 2003 ; que cette chronologie des faits ne saurait en elle-même traduire une négligence de France Télécom dans le traitement de ce dossier ; que le Tribunal administratif de Montreuil a fait une juste appréciation du préjudice moral subi par M. A...du fait de ces carences en fixant à la somme de 1 500 euros l'indemnité due par France Télécom au titre de ce chef de préjudice ;
3. Considérant, en deuxième lieu, que si le requérant se prévaut de la faute commise par France Télécom qui, à l'occasion de l'allocation d'une prime, lui aurait, dans un premier temps, versé une somme de 500 euros alors que seule la somme de 161,42 euros lui était due, contraignant M. A..., dans un second temps, à restituer une partie des sommes indûment perçues, il ne résulte pas de l'instruction que cette circonstance ait été à l'origine d'un quelconque préjudice pour M.A... ;
4. Considérant, en troisième lieu, que le requérant se prévaut des fautes de service commises par le Docteur Maloux qui, dans son rapport d'expertise en date du 1er juin 2007, aurait fait état d'informations erronées et dépourvues de caractère médical le concernant ; qu'il ne résulte cependant pas de l'instruction, ni n'est allégué, que la mission confiée par France-Telecom au médecin expert ait excédé le champ des investigations auxquelles le médecin devait se livrer dans le cadre d'une expertise relative aux répercussions médicales et psychologiques d'un accident du travail ; que si M. A...soutient également que la pratique ayant consisté pour le médecin expert à transmettre son rapport par télécopie au secrétariat du comité médical, permettant ainsi à des personnes non soumises au secret médical d'avoir accès aux informations qu'il contenait, la circonstance qu'un agent administratif, au demeurant tenu au secret professionnel par les dispositions de l'article 26 de la loi du 13 juillet 1983, ait procédé à la réception d'un document médical envoyé par télécopie n'est pas, à elle seule, de nature à établir que le secret médical n'aurait pas été respecté ;
5. Considérant, en quatrième lieu, que la perte de responsabilités alléguée par M. A... n'est pas établie par les pièces du dossier ; que, notamment, il ne résulte pas de l'instruction que le requérant ait jamais été laissé sans affectation ; que s'il se prévaut d'une perte de ses fonctions d'encadrement, il ne résulte pas de l'instruction que ces dernières aient constitué une part déterminante des missions auparavant confiées au requérant ; que, par ailleurs, si le requérant se plaint des conditions matérielles de travail qui lui auraient été assignées, il n'établit pas, par les pièces qu'il produit, que celles-ci auraient revêtu un caractère anormal ou impropre à l'exercice des fonctions qui lui étaient assignées ; que cette situation n'a donc pas revêtu les caractéristiques d'une situation de harcèlement moral dont M. A... serait fondé à demander réparation ;
6. Considérant, en cinquième lieu, que si le requérant soutient que le changement d'affectation qui lui aurait été imposé n'aurait pas fait l'objet d'une décision notifiée de manière régulière, M. A...n'établit pas que cette circonstance, au demeurant sans incidence sur la légalité de la décision litigieuse, ait été la source d'un quelconque préjudice dont il serait fondé à demander réparation ;
7. Considérant, en sixième lieu, que le changement susvisé d'affectation qui n'a entrainé aucune diminution sensible des responsabilités que l'intéressé était susceptible d'exercer ne saurait donc être regardé comme une mutation ; que le requérant n'est par suite pas fondé à soutenir que cette décision aurait dû être précédée de la saisine de la commission administrative paritaire compétente, voire de la commission de réforme dans le cadre d'un reclassement ;
Sur la responsabilité sans faute de France Télécom :
8. Considérant que les dispositions qui déterminent forfaitairement la réparation à laquelle un fonctionnaire victime d'un accident de service ou atteint d'une maladie professionnelle peut prétendre, au titre de l'atteinte qu'il a subie dans son intégrité physique, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions, ne font pas obstacle à ce que le fonctionnaire qui a enduré, du fait de l'accident ou de la maladie, des souffrances physiques ou morales et des préjudices esthétiques ou d'agrément, obtienne de la collectivité qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, distincts de l'atteinte à l'intégrité physique, et à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la collectivité, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette collectivité ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien incombait à celle-ci ;
9. Considérant que si c'est à tort que le Tribunal administratif de Montreuil a écarté la responsabilité sans faute de France Télécom au seul motif que M. A...n'ait pas été radié des cadres par anticipation, soit sur sa demande, soit d'office en raison d'infirmités résultant de blessures contractées en service et en l'absence de reclassement dans un autre corps, il ne résulte pas, en tout état de cause, de l'instruction que le pretium doloris ou les troubles dans les conditions d'existence dont se plaint le requérant, et dont la réalité n'est d'ailleurs pas établie par les pièces du dossier, soient imputables aux accidents de service dont il a été victime ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Montreuil a limité le montant de l'indemnisation mise à la charge de France Télécom en conséquence des préjudices subis à la somme de 1 500 euros ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de M. A...le versement à la société France Télécom de tout ou partie des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que ces mêmes dispositions font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de ladite société, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement à M. A...d'une somme au titre des frais exposés par ce dernier et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la société France Télécom tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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N° 11VE03351 2