Vu la requête, enregistrée le29 juin 2012, présentée pour la SCI DUKAL, société immobilière dont le siège social est domaine de Grandchamp 4 allée du Golf au Pecq (78230), parMe Ramond, avocat ;
La SCI DUKAL demande à la Cour :
1° d'annuler le jugement n°0800388 du 30 avril 2012 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande en décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée et des intérêts de retard y afférents qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier au 31 mars 2003 ;
2° de prononcer la décharge de ces impositions ;
3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient, en premier lieu, que c'est par erreur que, dans un premier temps, les services fiscaux, dans les propositions de rectification, ont considéré que la taxe sur la valeur ajoutée payée par le vendeur marchand de biens n'était pas déductible alors qu'elle l'était en application du 6° de l'article 257 du code général des impôts et que les acquéreurs, non marchands de biens, peuvent déduire cette taxe sur la valeur ajoutée collectée au titre de leurs propres opérations ; que ce dispositif n'est pas incompatible avec le dispositif de la taxe sur la valeur ajoutée immobilière prévu au 7° de l'article 257 du même code, ni avec celui des droits d'enregistrement et des régularisations prévues aux articles 210 et 211 de l'annexe II au code général des impôts ; que la taxe sur la valeur ajoutée collectée et payée par le vendeur marchand de bien est déductible pour la SCI DUKAL qui utilise l'immeuble aux fins de location taxable à la taxe sur la valeur ajoutée et ne se trouve pas dans la situation d'un consommateur final de biens et de services ; qu'en deuxième lieu, s'agissant des conditions de forme nécessaires à la déduction si la législation applicable au cas d'espèce prévoit des factures comme document de référence, elle n'exclut pas d'utiliser d'autres documents qui peuvent en tenir lieu ; que si la doctrine admet que ce sont les factures qui sont le plus couramment utilisées, certains textes prévoient explicitement des documents qui ne sont pas des factures qui permettent l'exercice du droit à déduction notamment en ce qui concerne la vente de biens immobiliers ; que, sur le terrain de la loi fiscale en troisième lieu les articles 201 de l'annexe II au code général des impôts prévoient des attestations et de même l'article 216 quater de la même annexe ; qu'en quatrième lieu la doctrine se prononce également dans le même sens ; qu'en cinquième lieu ni les dispositions du code général des impôts, ni aucune disposition législative ou réglementaire n'imposent de règles particulière s'agissant de la rédaction d'actes notariés et que si le notaire est redevable de l'impôt dû sur la mutation il ne se préoccupe pas des obligations des parties à l'acte notarié ; que le Tribunal commet une erreur de droit en rejetant la demande au motif que l'acte notarié qui pourrait valoir facture au sens des dispositions combinées des articles 271 et 289 du code général des impôts ne contient pas la taxe sur la valeur ajoutée en cause et qu'aucune taxe sur la valeur ajoutée ne lui a été facturée ; qu'en sixième lieu, l'arrêt de la Cour de justice des communautés européennes du 5 décembre 1996 aff.85/95 John Reisdorf précise que les Etats membres peuvent admettre comme factures d'autres preuves établissant que la transaction qui fait l'objet de la demande a effectivement eu lieu pour justifier du droit à déduction ; que la preuve du droit à déduire peut être apportée par tout moyen ; qu'enfin, la jurisprudence du Conseil d'Etat dans une décision du 2 juillet 1986 n°49492 admet que la déduction peut être autorisée si le contribuable a fourni des preuves suffisantes par tout moyen, comptable ou autre, du montant de la taxe sur la valeur ajoutée ;
...............................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la sixième directive 77/388/CE du Conseil des Communautés européennes du 17 mai 1977 en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 janvier 2014 :
- le rapport de Mme Belle, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme Dioux-Moebs, rapporteur public ;
1. Considérant que la SCI DUKAL a acquis, par acte notarié du 5 mars 2001 enregistré le 11 avril 2001, des locaux à usage commercial sis 174 et 176 rue Jean Jaurès à Puteaux qui lui ont été vendus par la société anonyme Meubles Mounie ; que la SCI DUKAL a présenté devant l'administration fiscale, le 13 juillet 2001, une demande de remboursement de crédit de la taxe sur la valeur ajoutée au titre du deuxième trimestre 2001 résultant de la prise en compte du montant de la taxe sur la valeur ajoutée afférente à cette opération ; que cette demande ayant été rejetée par les services fiscaux, la SCI DUKAL a imputé et reporté ce crédit de la taxe sur la valeur ajoutée sur ses déclarations de taxe sur la valeur ajoutée au titre du premier trimestre 2003 ; qu'à la suite de la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet pour les années 2003 à 2005, l'administration fiscale a remis en cause ce report pour un montant de 72 780 euros et notifié, en conséquence, les rappels de la taxe sur la valeur ajoutée qui en ont résulté ; que la SCI DUKAL relève régulièrement appel du jugement du Tribunal administratif de Versailles rejetant sa demande de décharge de cette imposition ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 271 du code général des impôts : " 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération ; 2: le droit à déduction prend naissance lorsque la taxe déductible devient exigible. (...) II 1. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est selon les cas : a. Celle qui figure sur les factures d'achat qui leur sont délivrées par leurs vendeurs, dans la mesure où ces derniers étaient légalement autorisés à la faire figurer sur lesdites factures " ; qu'aux termes de l'article 289 du même code : " I. Tout assujetti doit délivrer une facture ou un document en tenant lieu pour les biens livrés ou les services rendus à un autre assujetti ou à une personne morale non assujettie, ainsi que pour les acomptes perçus au titre de ces opérations lorsqu'ils donnent lieu à exigibilité de la taxe. ( ...)II. La facture ou le document en tenant lieu doit faire apparaître : 1° Par taux d'imposition, le total hors taxe et la taxe correspondante mentionnés distinctement ; (...) " ; qu'aux termes de l'article 242 nonies de l'annexe II au code général des impôts dans sa rédaction alors applicable : " Les factures ou les documents en tenant lieu établis par les assujettis doivent être datés et numérotés et faire apparaître : Le nom du vendeur ou du prestataire et celui du client ainsi que leurs adresses respectives ; La date de l'opération ; (...) ".
3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions combinées que, même lorsqu'elle a grevé des achats faits pour les besoins de l'exploitation du redevable, une taxe n'est déductible de celle à laquelle celui-ci est assujetti en raison de ses propres opérations que si une facture mentionnant ladite taxe, ou un document en tenant lieu a été établi à son nom par le fournisseur ;
4. Considérant, en premier lieu, que dès lors que le ministre de l'économie et des finances a produit un mémoire pour répondre à la requête de la SCI DUKAL, après la mise en demeure qui lui avait été adressée en application de l'article R. 612-6 du code de justice administrative, il ne peut être regardé comme ayant acquiescé aux faits exposés dans la requête, quand bien même ce mémoire ne serait parvenu au greffe de la Cour que postérieurement à l'expiration de ce délai ; que si la SCI DUKAL soutient en outre que la charge de la preuve incombait à l'administration fiscale, qui seule était en mesure d'exercer son droit de communication auprès du vendeur pour établir les faits, il lui revenait toutefois, dès lors qu'elle n'avait pas produit de facture ou de document en tenant lieu, d'établir les faits par des éléments suffisamment probants ;
5. Considérant, en deuxième lieu, que l'acte authentique, en date du 5 mars 2001, dont la SCI, société immobilière, DUKAL se prévaut, et qui serait de nature à remplacer une facture s'agissant d'une opération immobilière, se borne à faire état d'une somme globale versée en paiement de l'achat des locaux à la SA, société anonyme, Meubles Mounie sans comporter aucune mention concernant la prise en compte, l'assiette ou le montant de la taxe sur la valeur ajoutée ; que l'attestation du vendeur du 15 novembre 2000, antérieure de plusieurs mois à la date de la vente qu'elle a produite à l'appui de sa demande de remboursement et selon laquelle celui-ci " sera redevable " de la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge, mentionne un montant de 89 148 euros, différent de celui que la SCI DUKAL a reporté sur ses déclarations et ne comporte ni l'identité, ni l'adresse de l'acquéreur, ni la nature exacte de la vente, non plus que l'assiette de la taxe, ni son taux ; qu'enfin la déclaration de la taxe sur la valeur ajoutée du premier trimestre 2001 du vendeur qui mentionne un montant de 517 231 F de la taxe sur la valeur ajoutée en brut pour ses opérations réalisées pendant ce trimestre n'est assortie d'aucune pièce tendant à établir que ce montant comprendrait nécessairement la somme de 484 922 F dont la requérante soutient qu'elle a été versée au titre de la vente des locaux en litige ; que, dans ces conditions, la SCI DUKAL qui n'a pas produit de document tenant lieu de facture répondant aux conditions ci-dessus définies n'établit pas que le montant qu'elle a déduit a été acquitté par le vendeur ; qu'enfin, la circonstance que le notaire n'était tenu par aucune disposition légale ou réglementaire de mentionner la taxe sur la valeur ajoutée dans l'acte de vente est sans influence sur la solution du litige ;
6. Considérant, en troisième lieu, que la requérante ne peut d'une part utilement invoquer le bénéfice des dispositions de l'article 201 de l'annexe II au code général des impôts, qui n'était plus applicable à la date des faits en litige ; que, d'autre part, la situation de la SCI DUKAL et de la SA Meubles Mounie n'entre pas dans le champ d'application de l'article 216 quater II de la même annexe alors applicable la SA Meubles Mounie n'étant ni une personne publique, ni une société de construction, seules visées par les 1° et 2° de l'article 216 ter de la même annexe ;
7. Considérant, en quatrième lieu, que la SCI DUKAL ne soutient ni même n'allègue que les services fiscaux auraient méconnu le b de l'article 22-3 de la sixième directive de 1977 relative à la taxe sur la valeur ajoutée alors applicable et pas davantage qu'ils auraient exigé des mentions qui par leur nombre et leur technicité rendaient pratiquement impossible ou excessivement difficile l'exercice du droit à déduction ; qu'elle ne peut dès lors utilement se prévaloir des arrêts du 5 décembre 1996 aff. 85/95 John Reisdorf et du 14 juillet 1988 aff. 123 330/87 Mme A...de la Cour de justice des communautés européennes ;
8. Considérant, enfin, que la SCI DUKAL, qui ne précise d'ailleurs pas sur quel fondement du livre de procédures fiscales elle se place, ne peut se prévaloir des différentes doctrines adoptées par l'administration fiscale en matière de déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée qu'elle cite, dans les prévisions desquelles elle n'entre pas ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SCI DUKAL n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ; que ses conclusions tendant au versement des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ne peuvent, par voie de conséquence, qu'être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SCI DUKAL est rejetée.
''
''
''
''
12VE02320 2