Vu le recours, enregistré le 1er juin 2012, présenté par le GARDE DES SCEAUX MINISTRE DE LA JUSTICE, demeurant au ... ;
Le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE demande à la Cour :
1° d'annuler le jugement n°1100366 du 12 avril 2012 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a annulé la décision du 18 novembre 2010 du directeur interrégional des services pénitentiaires rejetant le recours administratif formé par M.B... ;
2° de rejeter la demande présentée par M. B...devant le Tribunal administratif de Versailles ;
Le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE soutient que :
- l'avertissement dont M. B...a fait l'objet est une mesure d'ordre intérieur qui ne fait pas grief ; par nature, en effet, l'avertissement est une sanction disciplinaire qui ne présente aucun caractère répressif ; il n'a aucune conséquence sur la vie quotidienne ni sur les activités exercées par le détenu et n'entraîne aucune restriction au droit de visite ou au droit de promenade ; le régime de détention ne s'en est pas trouvé modifié ;
- à la différence des autres sanctions, il n'est pas notifié à la commission de l'application des peines ; le juge d'application des peines est indépendant de l'autorité administrative et se prononce au vu de l'ensemble du comportement du détenu et peut seul déterminer le retrait des réductions de peine ; les avertissements sont sans effet sur l'appréciation portée par le juge sur les efforts sérieux de réadaptation sociale du détenu dont la loi fixe une liste non exhaustive, dont les activités en détention et les efforts d'indemnisation des victimes ;
- contrairement à ce qu'a jugé la Cour administrative d'appel de Bordeaux, le juge ne tiendra pas compte de l'existence d'un seul avertissement pour refuser l'octroi d'une permission de sortie ou d'un aménagement de peine mais de l'ensemble du comportement du détenu ; suivant une jurisprudence constante, l'avertissement présente le caractère d'une mesure d'ordre intérieur non susceptible de recours devant le Tribunal administratif ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de procédure pénale ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 septembre 2014 :
- le rapport de Mme Belle, premier conseiller,
- et les conclusions de Mlle Rudeaux, rapporteur public ;
1. Considérant que le GARDE DES SCEAUX MINISTRE DE LA JUSTICE demande l'annulation du jugement du 12 avril 2012 par lequel le Tribunal administratif de Versailles, après avoir jugé recevable la demande de M. B...formée contre la sanction dont il a fait l'objet, a annulé la décision du 18 novembre 2010 du directeur interrégional des services pénitentiaires qui a rejeté le recours administratif préalable formé par M. B...contre la décision du 7 octobre 2010 du président de la commission de discipline de la maison centrale de Poissy prononçant à son encontre la sanction d'avertissement ;
2. Considérant, d'une part, qu'aux termes des dispositions de l'article D. 251 du code de procédure pénale alors applicables, aujourd'hui reprises à l'article R. 57-7-33 du même code :
" Lorsque le détenu est majeur, peuvent être prononcées, quelle que soit la faute disciplinaire, les sanctions disciplinaires suivantes : / 1° L'avertissement ; (... ) " ; qu'aux termes des dispositions de l'article D. 250-1 du code de procédure pénale : " En cas de manquement à la discipline de nature à justifier une sanction disciplinaire (...) un compte rendu est établi dans les plus brefs délais par l'agent présent lors de l'incident. Le chef d'établissement apprécie (...) l'opportunité de poursuivre la procédure " ; qu'aux termes de l'article D.251 du même code : " Lorsque le détenu est majeur, peuvent être prononcées, quelle que soit la faute disciplinaire, les sanctions disciplinaires suivantes : / 1° l'avertissement ; (...) " ; qu'aux termes de l'article D.250-5 de ce code, aujourd'hui reprises à l'article R. 57-7-32 du même code : " Le détenu qui entend contester la sanction disciplinaire dont il est l'objet doit, dans le délai de quinze jours à compter du jour de la notification de la décision, la déférer au directeur interrégional des services pénitentiaires préalablement à tout autre recours. Le directeur interrégional dispose d'un délai d'un mois à compter de la réception du recours pour répondre par décision motivée. (...)" ;
3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes des dispositions des premier et troisième alinéas de l'article 721 du code de procédure pénale, dans leur rédaction applicable au litige : " Chaque condamné bénéficie d'un crédit de réduction de peine calculé sur la durée de la condamnation prononcée à hauteur de trois mois pour la première année, de deux mois pour les années suivantes et, pour une peine de moins d'un an ou pour la partie de peine inférieure à une année pleine, de sept jours par mois ; pour les peines supérieures à un an, le total de la réduction correspondant aux sept jours par mois ne peut toutefois excéder deux mois. / (...) / En cas de mauvaise conduite du condamné en détention, le juge de l'application des peines peut être saisi par le chef d'établissement ou sur réquisitions du procureur de la République aux fins de retrait, à hauteur de trois mois maximum par an et de sept jours par mois, de cette réduction de peine. (...) " ; qu'aux termes de l'article D. 250-6 du même code, aujourd'hui repris aux articles R. 57-7-28 et R. 57-7-30: : " Dans le délai de cinq jours à compter de la décision prononçant une sanction disciplinaire, le chef d'établissement avise de la décision, d'une part, le directeur interrégional des services pénitentiaires et, d'autre part, le juge de l'application des peines (...). / Les sanctions disciplinaires prononcées sont inscrites sur un registre tenu sous l'autorité du chef d'établissement. Ce registre est présenté aux autorités administratives et judiciaires lors de leurs visites de contrôle ou d'inspection " ;
4. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que, d'une part, l'avertissement est au nombre des sanctions disciplinaires susceptibles d'être prononcées, en commission de discipline, par le chef d'établissement pénitentiaire, président de cette commission ; que les dispositions applicables à la procédure disciplinaire définissent des garanties dont la personne détenue bénéficie, quelles que soient la gravité des faits reprochés et la sanction encourue ; qu'en vertu de l'article D. 250-5 du code de procédure pénale cité ci-dessus, l'ensemble des sanctions est soumis, si la personne détenue entend les contester, à un recours administratif préalable obligatoire devant le directeur interrégional des services pénitentiaires ; que, d'autre part, en vertu de l'article D. 250-6 de ce code, le chef d'établissement avise le juge de l'application des peines de toute décision par laquelle une sanction disciplinaire est prononcée, y compris lorsqu'il s'agit d'un avertissement ; que si la sanction d'avertissement ne fait pas l'objet d'un rapport à la commission de l'application des peines, le juge de l'application des peines ainsi informé par le chef d'établissement peut néanmoins, le cas échéant, en tenir compte pour retirer, en application du troisième alinéa de l'article 721 cité ci-dessus, une réduction de peine ou, plus généralement, refuser une réduction de peine supplémentaire, une permission de sortir ou un aménagement de peine ; qu'en outre, la sanction d'avertissement, qui figure au dossier disciplinaire de la personne détenue, peut constituer, en cas de nouvelles poursuites disciplinaires pour d'autres faits, une circonstance aggravante prise en compte par la commission de discipline ;
5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède qu'eu égard à leur nature et à leurs effets sur la situation des personnes détenues, les décisions par lesquelles le président de la commission de discipline prononce une sanction d'avertissement sont au nombre des décisions susceptibles de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir ; que, par suite, M. B...était recevable à déférer, par la voie de l'excès de pouvoir, la décision du 18 novembre 2010 du directeur interrégional des services pénitentiaires prise après l'exercice du recours administratif préalable contre la sanction d'avertissement prononcée à son encontre ; qu'il résulte de ce qui précède que le GARDE DES SCEAUX MINISTRE DE LA JUSTICE, qui se borne en appel à contester la recevabilité de la demande de première instance, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a jugé recevable la demande présentée par
M. B...devant lui et a annulé la décision du 18 novembre 2010 ;
Sur les conclusions de M B...tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que
M.B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de condamner l'Etat à payer à Me Chehat la somme de 1 500 euros qu'elle demande ;
DECIDE :
Article 1er : Le recours du GARDE DES SCEAUX MINISTRE DE LA JUSTICE est rejeté.
Article 2 : L'Etat versera à Me Chehat, avocate de M.B..., une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve que Me Chehat renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
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N° 12VE02017 2