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19/07/2016 | FRANCE | N°14VE02590

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 19 juillet 2016, 14VE02590


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société IFB EUROPEAN HOLDING a demandé au Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise de la décharger des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos le 30 juin 2007 et des intérêts de retard.

Par un jugement n° 1105953 en date du 26 juin 2014, le Tribunal administratif a rejeté sa requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 28 août 2014, la société IFB EUROPEAN HOLDING, re

présentée par Me A..., demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement attaqué ;

2° de la décharger des impo...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société IFB EUROPEAN HOLDING a demandé au Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise de la décharger des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos le 30 juin 2007 et des intérêts de retard.

Par un jugement n° 1105953 en date du 26 juin 2014, le Tribunal administratif a rejeté sa requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 28 août 2014, la société IFB EUROPEAN HOLDING, représentée par Me A..., demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement attaqué ;

2° de la décharger des impositions contestées ;

3° de condamner l'État aux dépens ;

4° de mettre la charge de l'État le versement d'une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société IFB EUROPEAN HOLDING soutient :

- qu'elle n'a pas pu être entendue par l'interlocuteur départemental, ce qui constitue la méconnaissance d'une formalité substantielle ; ce souhait avait été manifesté au stade de la réponse à la proposition de rectification ;

- que les titres qu'elle détenait dans sa filiale Herport ont été rachetés par cette dernière le 28 juillet 2006 ; qu'à cette date, elle détenait 50,14 % du capital de cette société ; bien que ce rachat ait porté sur la totalité des titres, elle pouvait bénéficier du régime mère-fille ;

- que la position de l'administration aboutit à traiter différemment les contribuables qui se font racheter une fraction de leur participation en conservant 5 % de titres, et ceux qui se font racheter la totalité des titres en une opération ;

- que la notion de " mise en paiement des produits de participations " renvoie aux versements de dividendes, dont les modalités sont prévues à l'article L. 232-13 du code de commerce ; or, une opération de rachat de titres n'entraîne pas de " mise en paiement des produits de participation " à proprement parler ; il s'agit simplement du paiement d'un prix de vente ;

- que les conditions d'application du régime des sociétés mères s'apprécient au moment du rachat des titres, soit le 28 juillet 2006, et qu'elle pouvait donc en bénéficier ;

- qu'à titre subsidiaire, il convient d'appliquer le régime d'imposition des plus-values conformément à la décision du Conseil constitutionnel du 20 juin 2014 ; que même si cette décision a été prise concernant les associés qui sont des personnes physiques, elle est transposable aux associés qui sont des personnes morales, afin de respecter le principe d'égalité devant la loi.

........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Errera,

- et les conclusions de M. Delage, rapporteur public.

1. Considérant que la société IFB EUROPEAN HOLDING, société de détention de titres, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité pour la période allant du 1er juillet 2005 au 30 juin 2008, à l'issue de laquelle le service a remis en cause le bénéfice du régime fiscal des sociétés mères prévu par les dispositions des articles 145 et 216 du code général des impôts, pour le gain résultant du rachat par la société Herport de ses propres actions détenues par la société IFB EUROPEAN HOLDING, au titre de l'exercice clos le 30 juin 2007 ; que la société IFB EUROPEAN HOLDING a demandé, par une réclamation en date du 3 décembre 2010, la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie à ce titre ; que cette réclamation a fait l'objet d'une décision de rejet en date du 12 mai 2011 ; que la société IFB EUROPEAN HOLDING relève appel du jugement n° 1105953 du

26 juin 2014 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa requête tendant à la décharge de ces cotisations supplémentaires ;

Sur la régularité de la procédure :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales : " Avant l'engagement d'une des vérification prévues aux articles L. 23 et L. 13, l'administration des impôts remet au contribuable la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ; les dispositions contenues dans la charte sont opposables à l'administration " ; que ladite charte prévoit que : " Si le vérificateur a maintenu totalement ou partiellement les redressements envisagés, des éclaircissement supplémentaires peuvent vous être fournis si nécessaire par l'inspecteur principal. Si, après ces contacts des divergences importantes subsistent, vous pouvez faire appel à l'interlocuteur départemental ou régional (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que le requérant qui demande la saisine de l'interlocuteur départemental ne peut le faire qu'après qu'il ait rencontré le supérieur hiérarchique du vérificateur ; qu'au cas d'espèce, la saisine du supérieur hiérarchique comme de l'interlocuteur départemental a été demandée dans un courrier du 16 juin 2010 ; que la rencontre avec le chef de brigade a eu lieu le 2 septembre 2010 ; qu'il est constant que la société IFB EUROPEAN HOLDING n'a pas renouvelé, postérieurement à cette rencontre, sa demande de saisine de l'interlocuteur départemental ; qu'elle ne peut par conséquent soutenir que la procédure serait irrégulière à défaut de rencontre avec celui-ci ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne le moyen tiré de l'erreur de droit :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 216 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'année d'imposition en litige : " I. Les produits nets des participations, ouvrant droit à l'application du régime des sociétés mères et visées à l'article 145, touchés au cours d'un exercice par une société mère, peuvent être retranchés du bénéfice net total (...) " ; qu'aux termes de l'article 145 du même code, dans sa rédaction applicable à l'année d'imposition en litige : " 1. Le régime fiscal des sociétés mères, tel qu'il est défini à l'article 216, est applicable aux sociétés et autres organismes soumis à l'impôt sur les sociétés au taux normal qui détiennent des participations satisfaisant aux conditions ci-après : / a. Les titres de participations doivent revêtir la forme nominative ou être déposés dans un établissement désigné par l'administration / b. les titres de participation doivent représenter au moins 5 % du capital de la société émettrice ; ce pourcentage s'apprécie à la date de mise en paiement des produits de la participation / (...) " ; et qu'aux termes de l'article 54 de l'annexe II au code précité, dans sa rédaction applicable à l'année d'imposition en litige : " Les personnes morales doivent se conformer aux obligations suivantes en ce qui concerne les titres de participations pour lesquels elles entendent se prévaloir du régime des sociétés mères prévu aux articles 145, 146 et 216 du code général des impôts : / 1° Elles doivent prendre l'engagement de conserver pendant deux ans au moins la pleine propriété des titres (...) " ;

4. Considérant qu'il résulte des dispositions citées au point 3 que, pour bénéficier du régime dit des sociétés mères, qui prévoit une exemption d'imposition des produits de participation reçus de sa filiale, une société mère doit détenir des titres de participation de cette filiale à hauteur d'au moins 5 % du capital de celle-ci, ce pourcentage s'appréciant à la date de distribution des produits de cette participation ; qu'il suit de là que le bénéfice du régime de faveur dont s'agit peut être remis en cause en cas de non respect de la condition de détention d'au moins 5 % du capital ; que, dans le cas où la société ne remplit pas les conditions cumulatives ainsi rappelées, elle doit acquitter le complément d'imposition résultant, pour chaque exercice, de la réintégration du montant des produits de participation indûment retranchés de son bénéfice net total ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société IFB EUROPEAN HOLDING détenait 4 647 des 9 268 titres composant le capital social de la société Herport, soit 50,14 % de ce capital ; que, par une décision de son conseil d'administration en date du 28 juillet 2006, la société Herport a racheté à la société IFB EUROPEAN HOLDING la totalité des 4 647 titres détenus par cette dernière, pour un prix de 1 025 000 euros ; que l'administration fiscale a, par une proposition de rectification en date du 16 juin 2010, remis en cause les retraitements effectués par la société IFB EUROPEAN HOLDING par application du régime fiscal des sociétés mères, au motif que celle-ci ne détenait plus aucune participation dans la société Herport à l'issue du rachat des titres ;

6. Considérant que la société requérante soutient que lors du rachat, soit à la date du 28 juillet 2006, elle détenait 50,14 % des titres de la société Herport, soit plus de 5 % du capital de cette société et que c'est à tort que pour apprécier le respect de cette condition, les premiers juges se sont placés à la date du 2 janvier 2007 ; qu'il ressort toutefois du point 5 du jugement attaqué que le tribunal administratif a expressément jugé que, la première mise en paiement de l'opération de rachat de titres ayant été effectuée le 31 juillet 2006, la condition de détention d'une participation représentant au moins 5 % du capital de la société Herport n'était plus satisfaite par la société requérante depuis le 28 juillet 2006 ; qu'il n'a mentionné les dates des deux derniers paiements, effectués respectivement les 29 septembre 2006 et 2 janvier 2007, que dans un souci de livrer un exposé complet des faits ;

7. Considérant que si la société requérante soutient également que la notion de " mise en paiement de produits de participation " n'a pas vocation à s'appliquer une opération de rachat de titres, une telle argumentation, qui aurait pour conséquence de priver la société du bénéfice du régime fiscal des sociétés mères, contredit ses propres conclusions ; qu'en tout état de cause, le gain net dégagé par un associé ou actionnaire passible de l'impôt sur les sociétés détenant des titres de participation à l'occasion du rachat par la société émettrice de ses propres actions, constitue un produit net de participation à concurrence, conformément aux dispositions du 2 de l'article 38 combiné avec l'article 209 du même code, de la différence entre le prix de rachat et la valeur d'acquisition des titres inscrite à son bilan d'ouverture ; qu'il suit de là que, contrairement à ce que soutient la société IFB EUROPEAN HOLDING, le gain net dégagé par elle entrait bien dans le champ de l'article 216 précité du code général des impôts ;

En ce qui concerne le moyen tiré de la rupture d'égalité entre les contribuables :

8. Considérant que, selon la société requérante, la position de l'administration aboutit à traiter différemment les contribuables qui ne cèdent qu'une fraction de leur participation et conservent à l'issue de l'opération au moins 5 % des titres de la société émettrice et ceux qui cèdent l'ensemble de leurs titres en une seule opération ; que, toutefois, ces deux cas de figure renvoient à des situations différentes ; que le principe d'égalité garanti par l'article 1er de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 ne s'oppose pas à ce que législateur règle de façon différente de telles situations ; qu'il suit de là que le moyen susvisé doit être écarté ;

En ce qui concerne l'application des dispositions de l'article 219 a quinquies du code général des impôts :

9. Considérant que la société requérante entend se prévaloir de la décision n° 2014-404 du Conseil constitutionnel du 20 juin 2014 pour demander qu'il lui soit fait application du régime d'imposition des plus-values prévu aux dispositions de l'article 219 a quinquies du CGI ; que le Conseil constitutionnel a, dans la décision susvisée, d'une part déclaré contraires à la Constitution les dispositions du 6° de l'article 112 du code général des impôts et a, d'autre part, jugé que les sommes ou valeurs reçues avant le 1er janvier 2014 par les actionnaires ou associés personnes physiques au titre du rachat de leurs actions ou parts sociales par la société émettrice, lorsque ce rachat a été effectué selon une procédure autorisée par la loi, ne sont pas considérées comme des revenus distribués et sont imposées selon le régime des plus-values de cession prévu, selon les cas, aux articles 39 duodecies, 150-0 A ou 150 UB du code général des impôts ; que cette décision concerne les seuls actionnaires ou associés personnes physiques et déclare contraires à la Constitution des dispositions dont il n'a pas été fait application à la société requérante ; qu'il suit de là qu'elle ne peut être utilement invoquée en l'espèce ;

En ce qui concerne la demande de substitution de base légale :

10. Considérant que l'administration est en droit, à tout moment de la procédure contentieuse, de justifier une imposition par un nouveau fondement juridique, à la condition qu'une telle substitution de base légale ne prive le contribuable d'aucune des garanties de procédure prévues par la loi ;

11. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts dans sa rédaction applicable à l'exercice clos le 30 juin 2007 : " 1. (...), le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation./ 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés (...) " ; que, d'autre part, aux termes de l'article 209 du code général des impôts : " I. Sous réserve des dispositions de la présente section, les bénéfices passibles de l'impôt sur les sociétés sont déterminés d'après les règles fixées par les articles 34 à 45,53 A à 57,237 ter A et 302 septies A bis et en tenant compte uniquement des bénéfices réalisés dans les entreprises exploitées en France ainsi que de ceux dont l'imposition est attribuée à la France par une convention internationale relative aux doubles impositions.(...) " ;

12. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit au point 6, le gain net dégagé par un associé ou actionnaire passible de l'impôt sur les sociétés détenant des titres de participation à l'occasion du rachat par la société émettrice de ses propres actions, constitue un produit net de participation à concurrence, conformément aux dispositions du 2 de l'article 38 combiné avec l'article 209 du même code, de la différence entre le prix de rachat et la valeur d'acquisition des titres inscrite à son bilan d'ouverture ; que, dès lors que les sommes en litige pouvaient légalement faire l'objet d'une taxation sur le fondement des dispositions des articles précités et que la société requérante n'a été privée en l'espèce d'aucune garantie de procédure, il y a lieu de faire droit à la demande de substitution de base légale du ministre des finances et des comptes publics ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société IFB EUROPEAN HOLDING n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ; qu'enfin, en l'absence de dépens dans la présente instance, ses conclusions tendant à ce qu'ils soient mis à la charge de l'État ne peuvent également qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société IFB EUROPEAN HOLDING est rejetée.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 14VE02590
Date de la décision : 19/07/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-04 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales.


Composition du Tribunal
Président : M. SOYEZ
Rapporteur ?: M. Antoine ERRERA
Rapporteur public ?: M. DELAGE
Avocat(s) : CABINET JEAN LUCIEN et CIE

Origine de la décision
Date de l'import : 26/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2016-07-19;14ve02590 ?
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