Vu la procédure suivante :
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 25 janvier et le
16 septembre 2016, la SOCIÉTÉ NOUVELLE DE GESTION CYRANO et la société ROXANE, représentées par Me Diot, avocat, demandent à la Cour :
1° d'annuler la décision du 24 novembre 2015 par laquelle la Commission nationale d'aménagement commercial (CNAC), statuant en matière cinématographique, a accordé aux SCI Hoche et Le Chesnay Pierre 2 l'autorisation préalable requise en vue de la création d'un établissement de douze salles et 2 200 places à l'enseigne " UGC Ciné Cité " au Chesnay (Yvelines) ;
2° de mettre solidairement à la charge des sociétés Hoche et Chesnay Pierre 2 la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que :
- la délimitation de la zone d'influence cinématographique retenue par le pétitionnaire est erronée en ce qu'elle ne prend pas en compte la situation du projet inclus dans un centre commercial, mais également en ce qu'elle retient un périmètre correspondant à vingt minutes de trajet en voiture ; dès lors, l'instruction réalisée par la CNAC statuant en matière cinématographique est faussée et, par suite, entachée d'irrégularité ;
- la CNAC statuant en matière cinématographique a fait une inexacte appréciation du projet au regard des critères des articles L. 212-6 et L. 212-9 du code du cinéma et de l'image animée quant à son effet, d'une part sur la diversité cinématographique de la zone d'influence cinématographique, et d'autre part sur la protection de l'environnement et la qualité de l'urbanisme eu égard aux différents modes de transports publics et à la mauvaise qualité de la desserte routière, le site n'étant qu'insuffisamment desservi par les transports en commun, et doté d'un parking d'une capacité insuffisante ;
- la décision de la CNAC statuant en matière cinématographique doit être annulée en tant qu'elle favorise un abus de position dominante au profit d'UGC Ciné Cité.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de commerce ;
- le code du cinéma et de l'image animée ;
- l'arrêté du 5 décembre 2008 pris pour l'application du III de l'article R. 752-7 du code de commerce et relatif à la demande portant sur les projets d'aménagement cinématographique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Errera,
- les conclusions de M. Delage, rapporteur public,
- et les observations de MeA..., pour les sociétés Hoche et Chesnay Pierre 2.
1. Considérant que, par une décision du 24 novembre 2014, la commission départementale d'équipement cinématographique des Yvelines a refusé d'accorder aux sociétés Hoche et Chesnay Pierre 2 l'autorisation préalable en vue de la création d'un établissement situé au Chesnay, appelé à être exploité sous l'enseigne " UGC Ciné Cité ", et comprenant douze salles et 2 200 places ; que, saisie d'un recours des sociétés Hoche et Chesnay Pierre 2, la CNAC, statuant en matière cinématographique, a accordé à ces dernières, le 24 novembre 2015, l'autorisation qu'elles sollicitaient ; que la SOCIETE NOUVELLE DE GESTION CYRANO et la société ROXANE demandent l'annulation de cette décision ;
Sur la légalité de la décision attaquée et sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête :
2. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que les sociétés Hoche et Chesnay Pierre 2 ont délimité une zone d'influence cinématographique découpée en trois sous-zones correspondant à un temps d'accès de vingt minutes respectivement à pied, en transports en commun et en voiture ; que les sociétés requérantes n'apportent aucun élément, au regard des critères posés par la loi et la réglementation applicables, de nature à établir qu'une telle délimitation de la zone par les pétitionnaires aurait été erronée et, notamment, que cette zone aurait dû être délimitée par rapport à un temps d'accès en voiture de trente minutes ou être identique à la zone de chalandise du centre commercial Parly 2 ; que le moyen tiré de ce que la délimitation opérée par le pétitionnaire dans son dossier de demande aurait été erronée doit, par suite, être écarté ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 212-6 du code du cinéma et de l'image animée : " Les créations, extensions et réouvertures au public d'établissements de spectacles cinématographiques doivent répondre aux exigences de diversité de l'offre cinématographique, d'aménagement culturel du territoire, de protection de l'environnement et de qualité de l'urbanisme, en tenant compte de la nature spécifique des oeuvres cinématographiques. Elles doivent contribuer à la modernisation des établissements de spectacles cinématographiques et à la satisfaction des intérêts du spectateur tant en ce qui concerne la programmation d'une offre diversifiée que la qualité des services offerts. " ; qu'aux termes de l'article L. 212-9 du même code : " Dans le cadre des principes définis à l'article 30-1, la commission d'aménagement commercial statuant en matière cinématographique se prononce sur les deux critères suivants : / 1° L'effet potentiel sur la diversité cinématographique offerte aux spectateurs dans la zone d'influence cinématographique concernée, évalué au moyen des indicateurs suivants : / a) Le projet de programmation envisagé pour l'établissement de spectacles cinématographiques objet de la demande d'autorisation et, le cas échéant, le respect des engagements de programmation éventuellement contractés en application de l'article 90 de la loi n° 82-52 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle ; / b) La nature et la diversité culturelle de l'offre cinématographique proposée dans la zone concernée, compte tenu de la fréquentation cinématographique ; / c) La situation de l'accès des oeuvres cinématographiques aux salles et des salles aux oeuvres cinématographiques pour les établissements de spectacles cinématographiques existants ; / 2° L'effet du projet sur l'aménagement culturel du territoire, la protection de l'environnement et la qualité de l'urbanisme, évalué au moyen des indicateurs suivants : / a) L'implantation géographique des établissements de spectacles cinématographiques dans la zone d'influence cinématographique et la qualité de leurs équipements ; / b) La préservation d'une animation culturelle et le respect de l'équilibre des agglomérations ; / c) La qualité environnementale appréciée en tenant compte des différents modes de transports publics, de la qualité de la desserte routière, des parcs de stationnement ; / d) L'insertion du projet dans son environnement ; / e) La localisation du projet. " ;
4. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que l'autorisation d'aménagement commercial ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet d'équipement cinématographique contesté compromet la réalisation des objectifs et principes énoncés par la loi ; qu'il appartient aux commissions d'aménagement commercial statuant en matière cinématographique, lorsqu'elles se prononcent sur les dossiers de demande d'autorisation, d'apprécier la conformité du projet à ces objectifs et principes, au vu des critères d'évaluation et indicateurs mentionnés à l'article L. 212-9 du code du cinéma et de l'image animée, parmi lesquels ne figure plus la densité d'équipement en salles de spectacles cinématographiques dans la zone d'attraction du projet ; que, par suite, le moyen tiré du risque que la création de nouvelles salles ferait peser sur la survie des établissements exploités par les sociétés requérantes doit être écarté comme inopérant ;
5. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que la zone d'influence cinématographique n'accueille aucun autre établissement de type multiplexe, dès lors qu'il est constant que le cinéma Le Cyrano n'entre pas dans cette catégorie en raison de la date à laquelle il a été conçu ; qu'il ressort des pièces du dossier que la cessation d'activité de l'ancien établissement Le Studio a engendré un déficit d'offre dans la zone d'influence cinématographique concernée, et plus particulièrement au Chesnay ; qu'en élargissant et en diversifiant l'offre de films ainsi que le nombre de séances dans la zone d'influence cinématographique, le nouvel établissement a vocation à permettre de résorber ce déficit d'offre constaté dans la zone ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet soit disproportionné par rapport à ces besoins ; que, par suite, le moyen tiré du non-respect du critère relatif aux effets du projet sur la diversité cinématographique doit être écarté ;
6. Considérant, d'autre part, qu'il ressort des pièces du dossier que le projet porté par les sociétés Hoche et Chesnay Pierre 2 bénéficie d'une desserte routière adaptée aux flux de fréquentation qu'il engendrera ; que des liaisons douces assurent l'accès au site ; que le parking, qui comporte actuellement 4 628 places, verra sa capacité augmentée de 114 places ; que, par conséquent, le moyen développé par les sociétés requérantes tiré du non-respect du critère relatif à la protection de l'environnement et à la qualité de l'urbanisme eu égard aux conditions d'accès au site du projet n'est pas fondé ;
7. Considérant que si les sociétés requérantes soutiennent que le projet aurait pour conséquence de placer l'enseigne " UGC Ciné Cité " en situation d'abus de position dominante, elles n'assortissent ce moyen d'aucune précision concernant la délimitation du marché pertinent envisagé et les parts de marché respectives des différents opérateurs ; qu'il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 420-2 du code de commerce ne peut qu'être écarté ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE NOUVELLE DE GESTION CYRANO et la société ROXANE ne sont pas fondées à demander l'annulation de la décision de la commission nationale d'aménagement commercial statuant en matière cinématographique en date du 24 novembre 2015 ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;
10. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la somme que demandent la SOCIETE NOUVELLE DE GESTION CYRANO et la société ROXANE soit mise à la charge des sociétés Hoche et Chesnay Pierre 2 qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de chacune des sociétés requérantes le versement aux sociétés Hoche et Chesnay Pierre 2 d'une somme de 1 000 euros chacune ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SOCIETE NOUVELLE DE GESTION CYRANO et de la société ROXANE est rejetée.
Article 2 : La SOCIETE NOUVELLE DE GESTION CYRANO et la société ROXANE verseront chacune à la SCI Hoche et à la SCI Chesnay Pierre 2 une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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N° 16VE00241