Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 3 mars 2015 par lequel le préfet de l'Essonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays dans lequel il pourra être renvoyé.
Par un jugement n° 1504084 du 5 octobre 2015, le Tribunal administratif de
Versailles a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 24 juin et 20 juillet 2016, M.B..., représenté par Me Mamoudy, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 3 mars 2015 ;
3° d'enjoindre au préfet de l'Essonne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
4° à défaut, d'enjoindre au préfet de l'Essonne de lui délivrer sur le fondement des mêmes dispositions un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ;
5° à défaut, d'enjoindre au préfet de l'Essonne de procéder au réexamen de sa situation ;
6° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. B...soutient que :
- le jugement est entaché d'irrégularité, dès lors que les premiers juges ne précisent pas en quoi l'arrêté attaqué est suffisamment motivé ;
- les décisions de refus de séjour et d'obligation de quitter le territoire, sont entachées d'une motivation insuffisante, et d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;
- la décision de refus de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît les stipulations des articles 3 et 9-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Mali sur la circulation et le séjour des personnes (ensemble deux échanges de lettres), signée à Bamako le 26 septembre 1994 et publiée le 9 décembre 1996 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Vergne a été entendu, au cours de l'audience publique.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Vergne ;
- et les observations de Me Mamoudy, avocat de M.B....
1. Considérant que M.B..., ressortissant malien né le 2 mai 1984, entré en France le 13 novembre 2012, selon ses déclarations, a sollicité son admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié ; que cette demande a été rejetée par un arrêté du préfet de l'Essonne en date du 3 mars 2015, lequel a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel l'intéressé pourra être renvoyé ; que M. B...relève appel du jugement en date du 5 octobre 2015 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant qu'en indiquant que " les décisions attaquées énoncent les considérations de droit et de fait sur lesquelles elles se fondent ", les premiers juges ont suffisamment motivé le rejet du moyen tiré de l'insuffisance de motivation de ces décisions ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la décision portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français :
3. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, aujourd'hui codifié à l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " (...) Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de la même loi, aujourd'hui codifié à l'article L. 211-5 du code précité : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ; qu'aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, (...) et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance (...) d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger (...) ; (...) / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III " ;
4. Considérant que la décision attaquée vise les articles L. 511-1 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dont elle fait application ; qu'elle retrace le parcours de M. B...depuis la date alléguée de son entrée en France le 13 novembre 2012, à l'âge de 28 ans ; qu'elle fait ainsi état d'une précédente mesure d'éloignement non suivie d'effet et de la demande de titre formée en dernier lieu par M. B... sur le fondement de l'article L. 313-14 du code applicable ; qu'elle souligne l'insuffisance des justificatifs professionnels fournis par l'intéressé pour appuyer cette demande de régularisation en qualité de salarié, la faible durée du séjour en France du requérant, la situation de concubinage récente déclarée par celui-ci, et l'absence de preuve apportée d'une vie commune effective ; qu'elle mentionne également que l'intéressé n'établit pas être totalement dépourvu d'attaches familiales au Mali, où réside sa soeur ; que l'arrêté litigieux comporte ainsi l'ensemble des éléments de droit et de fait sur lesquels le préfet, sur la base des éléments dont il disposait, a estimé que la demande de M. B...ne remplissait pas les conditions lui permettant de bénéficier d'une admission exceptionnelle au séjour au titre de la vie privée et familiale ou en qualité de salarié ; que le moyen tiré du défaut de motivation de la décision de refus de titre de séjour ne peut qu'être écarté ; qu'il en va de même de la décision portant obligation de quitter le territoire français, le préfet ayant visé le I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et exposé qu'il refusait l'admission au séjour de l'intéressé, ainsi que les motifs de ce refus ;
5. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et en particulier des termes mêmes de l'arrêté attaqué que le préfet de l'Essonne n'aurait pas procédé, préalablement à l'édiction de la décision litigieuse, à l'examen particulier de la situation personnelle de M.B... ; que, par suite, celui-ci n'est pas fondé à soutenir que la décision litigieuse serait entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;
6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313 11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) " ; qu'en présence d'une demande de régularisation présentée sur ce fondement, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " ; que dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là-même, des " motifs exceptionnels " exigés par la loi ; qu'il appartient, en effet, à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, de même que tout élément de sa situation personnelle dont il ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour ;
7. Considérant, d'une part, que M. B...se prévaut de son intégration professionnelle, du soutien d'élus et de fonctionnaires de sa commune de résidence et de membres d'associations, de la durée de son séjour, et de sa vie familiale ; que, toutefois, à la date de la décision en litige à laquelle doit s'apprécier sa légalité, la durée du séjour de M. B...en France n'était que de deux ans et trois mois et sa vie familiale, à la supposer établie, était très récente ; que sa participation bénévole à la vie municipale et aux activités de l'association locale du Secours Populaire ne permet d'établir ni la stabilité de ses conditions d'existence, ni une insertion particulièrement remarquable dans la société française, malgré les soutiens et l'estime qu'il a pu susciter dans sa commune de résidence, au sein d'un entourage diversifié ; que les promesses d'embauche et certificats d'employeurs qu'il produit dans l'instance sont postérieurs à la décision litigieuse ; que, par suite, il ne peut être considéré que le préfet de l'Essonne aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant que son admission au séjour ne répondait pas à des considérations humanitaires et ne se justifiait pas au regard de motifs exceptionnels, au sens de l'article L. 313-14 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dans ces conditions, c'est sans méconnaître ces dispositions ni commettre d'erreur manifeste d'appréciation de la situation de l'intéressé au regard de celles-ci que le préfet de l'Essonne a pu refuser de lui délivrer un titre de séjour ;
8. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; que pour l'application des stipulations précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France, au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine ;
9. Considérant que M. B...fait valoir qu'il justifie, par de nombreuses attestations d'élus, de responsables d'associations et d'habitants de sa commune, d'une parfaite intégration dans la société française, qu'il vit en concubinage, depuis janvier 2014, avec une ressortissante camerounaise titulaire d'un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français, et qu'il est le père d'un enfant né sur le territoire français le 2 février 2015 ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier, qu'à la date de l'arrêté contesté, il ne séjournait en France que depuis deux ans et trois mois ; que la réalité et la stabilité de sa communauté de vie, depuis janvier 2014 ainsi qu'il l'allègue, avec une personne titulaire d'un titre de séjour de longue durée, ne sont pas suffisamment démontrées, malgré la naissance, le 2 février 2015, d'un enfant qu'il a reconnu par anticipation en novembre 2014 et dont est produit l'acte de naissance ; qu'ainsi qu'il a été dit au points 7, M. B...ne justifie pas d'une réelle insertion professionnelle ; que, par ailleurs, il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine qu'il a quitté à l'âge de vingt huit ans, et où réside sa soeur ; que, par suite, compte tenu de la durée et des conditions de son séjour en France, et en dépit de ses efforts d'intégration, M. B...n'est pas fondé à soutenir que le préfet de l'Essonne aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs de l'arrêté litigieux, ou aurait commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle ;
10. Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la Convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces dispositions que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; qu'elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation ;
11. Considérant que M. B...se prévaut de la naissance de son enfant, née le 2 février 2015, un mois avant l'arrêté litigieux : que, toutefois, les éléments qu'il produit ne permettent pas d'établir l'existence, à la date du 3 mars 2015 à laquelle doit s'apprécier la légalité de cette décision, d'une vie commune effective dans un domicile partagé avec la mère de l'enfant, ni que M.B... participait, de manière effective et régulière, à l'entretien et à l'éducation de cet enfant depuis sa naissance ; que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées ne peut être accueilli ;
12. Considérant que les stipulations de l'article 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant créent seulement des obligations entre Etats sans ouvrir de droits aux intéressés ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de cet article est, en tout état de cause, inopérant ;
13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
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N° 16VE01932