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06/06/2017 | FRANCE | N°17VE00058

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 06 juin 2017, 17VE00058


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision en date du 17 octobre 2016 par laquelle le préfet de l'Essonne ordonné son transfert aux autorités italiennes, et la décision du même jour l'assignant à résidence.

Par une ordonnance n° 1606808 du 20 décembre 2016, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande comme manifestement irrecevable en raison de sa tardiveté.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 5 janvier 2017, M.A..., représenté par Me Taverdin, avocat, deman...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision en date du 17 octobre 2016 par laquelle le préfet de l'Essonne ordonné son transfert aux autorités italiennes, et la décision du même jour l'assignant à résidence.

Par une ordonnance n° 1606808 du 20 décembre 2016, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande comme manifestement irrecevable en raison de sa tardiveté.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 5 janvier 2017, M.A..., représenté par Me Taverdin, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler cette ordonnance en tant qu'elle a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 17 octobre 2016 par laquelle le préfet de l'Essonne ordonné son transfert aux autorités italiennes ;

2° d'annuler la décision attaquée ordonnant son transfert aux autorités italiennes ;

3° d'enjoindre au préfet d'enregistrer sa demande d'asile et de lui en délivrer récépissé sous astreinte ;

4° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. A...soutient que sa requête de première instance n'était pas tardive dès lors qu'elle a été enregistrée dans le délai de deux mois mentionné dans la décision attaquée.

M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par une décision du 25 février 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le décret n° 2000-652 du 4 juillet 2000 portant publication de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République italienne relatif à la réadmission des personnes en situation irrégulière, signé à Chambéry le 3 octobre 1997 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Bruno-Salel a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.A..., ressortissant malien né le 25 novembre 1994, demande l'annulation de l'ordonnance du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles du 20 décembre 2016 en tant qu'elle a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 17 octobre 2016 par laquelle le préfet de l'Essonne a ordonné sa remise aux autorités italiennes ;

Sur la légalité de l'ordonnance attaquée :

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article R. 776-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Les jugements sont rendus, sans conclusions du rapporteur public, par le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il désigne à cet effet. / Les attributions dévolues par les dispositions réglementaires du présent code à la formation de jugement ou à son président sont exercées par ce magistrat. / Il peut, par ordonnance : (...) 3° Rejeter les recours entachés d'une irrecevabilité manifeste non susceptible d'être couverte en cours d'instance. " ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 742-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. -L'étranger qui a fait l'objet d'une décision de transfert mentionnée à l'article L. 742-3 peut, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de cette décision, en demander l'annulation au président du tribunal administratif. (...) II. -Lorsqu'une décision (...) d'assignation à résidence prise en application de l'article L. 561-2 est notifiée avec la décision de transfert, l'étranger peut, dans les quarante-huit heures suivant leur notification, demander au président du tribunal administratif l'annulation de la décision de transfert et de la décision de placement en rétention ou d'assignation à résidence. / Il est statué sur ce recours selon la procédure et dans le délai prévus au III de l'article L. 512-1. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 777-3-1 du code de justice administrative : " I. - Conformément aux dispositions du I de l'article L. 742-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la notification d'une décision de transfert fait courir un délai de quinze jours pour contester cette décision. II. - Conformément aux dispositions du II de l'article L. 742-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la notification simultanée d'une décision de placement en rétention ou d'assignation à résidence et d'une décision de transfert fait courir un délai de quarante-huit heures pour contester ces décisions." ;

4. Considérant que le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles a rejeté comme irrecevable la demande présentée par M. A...tendant à l'annulation de la décision du 17 octobre 2016 par laquelle le préfet de l'Essonne a ordonné sa remise aux autorités italiennes au motif qu'elle avait été présentée après l'expiration du délai de recours de 48 heures prévu par les dispositions du II de l'article L. 742-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet de l'Essonne a notifié à M. B...A...le 17 octobre 2016 à 15h52 une décision de transfert aux autorités italiennes et à 15h56 une décision d'assignation à résidence ; que si, en vertu des dispositions précitées, cette notification simultanée faisait courir un délai de quarante-huit heures pour contester ces décisions, il ressort des pièces du dossier que la décision ordonnant la remise de M. A...aux autorités italiennes mentionne, dans sa partie relative aux voies et délais de recours, un délai de recours erroné d'une durée de deux mois à compter de sa notification qui, dès lors, est le seul délai qui peut être opposé à l'intéressé ; que, dans ces conditions, la requête présentée par M.A..., en ce qu'elle tendait à l'annulation de cette décision, enregistrée au greffe le 19 décembre 2016, n'était pas tardive ; que, par suite, c'est à tort que le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles a rejeté comme irrecevables les conclusions de la demande dont il était saisi tendant à l'annulation de la décision du 17 octobre 2016 ordonnant la remise de M. A...aux autorités italiennes ; que son ordonnance doit, dans cette mesure, être annulée ;

5. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A...devant le Tribunal administratif de Versailles en tant qu'elle tendait à l'annulation de la décision du 17 octobre 2016 ordonnant sa remise aux autorités italiennes ;

Sur la légalité de la décision ordonnant sa remise aux autorités italiennes :

6. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation aux articles L. 213-2 et L. 213-3, L. 511-1 à L. 511-3, L. 512-2 à L. 512-4 (1), L. 513-1 et L. 531-3, l'étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne qui a pénétré ou séjourné en France sans se conformer aux dispositions des articles L. 211-1, L. 211-2, L. 311-1 et L. 311-2 peut être remis aux autorités compétentes de l'Etat membre qui l'a admis à entrer ou à séjourner sur son territoire, ou dont il provient directement, en application des dispositions des conventions internationales conclues à cet effet avec les Etats membres de l'Union européenne " ; qu'aux termes de l'article L. 531-2 du même code : " (...) Les mêmes dispositions sont également applicables à l'étranger qui, en provenance du territoire d'un Etat partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990, est entré ou a séjourné sur le territoire métropolitain sans se conformer aux dispositions des articles 19, paragraphe 1 ou 2, 20, paragraphe 1, ou 21, paragraphe 1 ou 2, de cette convention ou sans souscrire, au moment de l'entrée sur ce territoire, la déclaration obligatoire prévue par l'article 22 de la même convention, alors qu'il était astreint à cette formalité. / Il en est de même de l'étranger détenteur d'un titre de résident de longue durée-CE en cours de validité accordé par un autre Etat membre qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement du territoire français. (...) " ;

7. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 5 de la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 : " 1. Pour un séjour n'excédant pas trois mois, l'entrée sur les territoires des Parties contractantes peut être accordée à l'étranger qui remplit les conditions ci-après : a) Posséder un document ou des documents valables permettant le franchissement de la frontière, déterminés par le Comité exécutif ; b) Etre en possession d'un visa valable si celui-ci est requis ; c) Présenter, le cas échéant, les documents justifiant de l'objet et des conditions du séjour envisagé et disposer des moyens de subsistance suffisants, tant pour la durée du séjour envisagé que pour le retour dans le pays de provenance ou le transit vers un Etat tiers dans lequel son admission est garantie, ou être en mesure d'acquérir légalement ces moyens ; d) Ne pas être signalé aux fins de non-admission ; e) Ne pas être considéré comme pouvant compromettre l'ordre public, la sécurité nationale ou les relations internationales de l'une des Parties contractantes. / 2. L'entrée sur les territoires des Parties contractantes doit être refusée à l'étranger qui ne remplit pas l'ensemble de ces conditions, sauf si une Partie contractante estime nécessaire de déroger à ce principe pour des motifs humanitaires ou d'intérêt national ou en raison d'obligations internationales. En ce cas, l'admission sera limitée au territoire de la Partie contractante concernée qui devra en avertir les autres Parties contractantes ( ...) " ; qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 21 de la même convention : " Les étrangers titulaires d'un titre de séjour délivré par une des parties contractantes peuvent, sous le couvert de ce titre ainsi que d'un document de voyage, ces documents étant en cours de validité, circuler librement pendant une période de trois mois au maximum sur le territoire des autres parties contractantes, pour autant qu'ils remplissent les conditions d'entrée visées à l'article 5, paragraphe 1, points a, c et e, et qu'ils ne figurent pas sur la liste de signalement nationale de la partie contractante concernée " ;

8. Considérant, enfin, qu'en vertu de l'article 5 de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République italienne relatif à la réadmission des personnes en situation irrégulière signé le 3 octobre 1997 : " (...) 2. Chaque Partie contractante réadmet sur son territoire, à la demande de l'autre Partie contractante et sans formalités, le ressortissant d'un Etat tiers qui ne remplit pas ou ne remplit plus les conditions d'entrée ou de séjour applicables sur le territoire de la Partie contractante requérante lorsque ce ressortissant dispose d'un visa ou d'une autorisation de séjour de quelque nature que ce soit, délivré par la Partie contractante requise et en cours de validité. / 3. La demande de réadmission doit être transmise dans un délai de trois mois à compter de la constatation par la Partie contractante requérante de la présence irrégulière sur son territoire du ressortissant d'un Etat tiers " ;

9. Considérant que, pour contester la décision du 17 octobre 2016 par laquelle le préfet de l'Essonne a ordonné sa remise aux autorités italiennes, M. A...soutient qu'il n'a effectué aucune demande d'asile en Italie et que l'administration ne justifie pas avoir saisi les autorités italiennes d'une demande de réadmission ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que le préfet de l'Essonne a, par saisine du 4 juillet 2016, procédé aux diligences nécessaires auprès des autorités italiennes pour procéder à la réadmission de l'intéressé dans ce pays dans le cadre du règlement de Dublin III et que par lettre du 29 juillet 2016, celles-ci l'ont informé qu'elles avaient accordé à M. A...le bénéfice de la protection subsidiaire le 10 mars 2016 et qu'il relevait dès lors des accords de Schengen ; que le requérant ne peut dès lors utilement se prévaloir des dispositions du règlement n° 604/2013 du parlement européen et du conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, qui ne lui sont pas applicables ; qu'à la date de la décision attaquée, M. A...entrait en revanche dans le champ d'application des dispositions de l'article L. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui permettaient au préfet de l'Essonne de le remettre aux autorités italiennes avec lesquelles la France avait signé un accord de réadmission des personnes en situation irrégulière ; que le requérant ne conteste par ailleurs pas la mention portée par le préfet dans la décision attaquée selon laquelle il ne remplissait pas les conditions fixées par les articles 5 et 21 de la convention du 19 juin 1990 qui lui auraient permis de circuler librement en France ; qu'ainsi, et alors même que M. A...a déposé en France une demande d'asile, le préfet de l'Essonne pouvait, sans commettre d'erreur de droit, prendre à son encontre la décision contestée de remise aux autorités italiennes ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision contestée ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, d'astreinte et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 1608608 du 20 décembre 2016 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles est annulée en tant qu'elle rejette la demande de M. A...tendant à l'annulation de la décision du 17 octobre 2016 par laquelle le préfet de l'Essonne a ordonné sa remise aux autorités italiennes.

Article 2 : La demande de M. A...et le surplus des conclusions de sa requête d'appel sont rejetés.

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N° 17VE00058

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17VE00058
Date de la décision : 06/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. VERGNE
Rapporteur ?: Mme Catherine BRUNO-SALEL
Rapporteur public ?: Mme RUDEAUX
Avocat(s) : SCP BERTHILIER et TAVERDIN

Origine de la décision
Date de l'import : 20/06/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2017-06-06;17ve00058 ?
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