Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... D... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil :
- d'annuler la décision du 9 juin 2015 par laquelle le directeur du conservatoire municipal de la commune de Saint-Ouen a fixé la répartition hebdomadaire de son service d'enseignement pour l'année scolaire 2015/2016, ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux tendant au retrait de cette décision ;
- de condamner la commune de Saint-Ouen à lui verser la somme de 28 320 euros en réparation de ses préjudices résultant du harcèlement moral dont elle est victime ;
- d'enjoindre à la commune de Saint-Ouen de retirer de son dossier administratif la mention du blâme ;
- de procéder à la jonction des affaires n° 1509689, n° 1507204 et n° 1600911 ;
- de procéder à la suppression de passages injurieux et diffamatoires figurant dans les écritures de la commune de Saint-Ouen ;
- de mettre à la charge de la commune de Saint-Ouen la somme de 7 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1509689 du 14 octobre 2016, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés respectivement le 12 décembre 2016, le
25 septembre 2017, le 30 octobre 2017, et le 23 février 2018, Mme D..., représentée par Me C..., avocate, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'annuler ces décisions ;
3° de condamner la commune de Saint-Ouen à lui verser la somme de 15 000 euros en réparation des troubles dans ses conditions d'existence résultant du harcèlement moral dont elle a été victime ;
4° de condamner la commune de Saint-Ouen à lui verser la somme de 10 320 euros en réparation de ses préjudices financiers ;
5° de condamner la commune de Saint-Ouen à lui verser la somme de 3 000 euros en réparation de son préjudice de carrière ;
6° de mettre à la charge de la commune Saint-Ouen la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier dès lors que le tribunal administratif aurait dû joindre, comme elle le demandait, ses demandes enregistrées sous les n° 1509689, 1507204 et 1600911 ;
- le jugement est irrégulier dès lors que le tribunal n'a pas tenu compte de la décision
n° 321225 du Conseil d'Etat du 11 juillet 2011 qui détermine la charge de la preuve en matière de harcèlement moral ; en effet, alors qu'elle a soumis aux premiers juges de nombreux éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un harcèlement moral, la commune de Saint-Ouen n'a produit en sens contraire aucune argumentation ou élément de fait de nature à démontrer que les agissements exposés étaient justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement ; par suite, c'est en méconnaissance de la jurisprudence susmentionnée et de son office que le tribunal n'a pas retenu l'existence d'un harcèlement moral ;
- le caractère répétitif des agissements en cause n'a pas été pris en compte par le tribunal ;
- le moyen tiré de la répétition des faits et le moyen tiré de son humiliation et de la dégradation de sa situation n'ont pas été examinés par les premiers juges ;
- le jugement est insuffisamment motivé et incohérent ;
- le tribunal a opéré une confusion entre sa demande n° 1509689, objet de la présente instance, et sa demande n° 1507204, jugée le même jour et qui tendait à l'annulation de la décision du 9 juin 2015 par laquelle le directeur du conservatoire municipal de la commune de Saint-Ouen a fixé la répartition hebdomadaire de son service d'enseignement pour l'année scolaire 2015/2016, ainsi que de la décision implicite de rejet de son recours gracieux tendant au retrait de cette décision ; ce faisant, il ne s'est pas prononcé sur la légalité de la décision implicite de rejet résultant du silence gardé sur sa demande du 13 juillet 2015 tendant à ce que la commune de Saint-Ouen reconnaisse le harcèlement moral dont elle a été victime ; ces conclusions tendant à l'annulation de cette décision implicite de rejet née le 13 septembre 2015 constituaient pourtant l'objet principal de sa demande n° 1509689 ; le tribunal a ainsi dénaturé sa demande ou ne l'a pas lue ;
- le jugement révèle une absence totale de rigueur et d'objectivité, en méconnaissance des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; les premiers juges ont adopté une stratégie visant au rejet de sa demande.
- elle a fait l'objet d'un harcèlement moral au sein du conservatoire municipal de musique depuis le mois d'avril 2010 ;
- l'enquête administrative organisée par la commune de Saint-Ouen est dépourvue d'objectivité ;
- cette enquête est également dépourvue de légitimité, dès lors que la procédure applicable, prévue par les articles L. 4132-2 et suivants du code du travail, comporte l'intervention du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ;
- elle est fondée à demander la condamnation de la commune de Saint-Ouen à lui verser, la somme de 10 320 euros en réparation de ses préjudices financiers, la somme de 3 000 euros au titre de son préjudice de carrière et la somme de 15 000 euros au titre de son préjudice moral, de ses troubles dans les conditions d'existence et de l'atteinte à sa réputation.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 2012-437 du 29 mars 2012 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- les conclusions de M. Cabon, rapporteur public,
- les observations de Me C..., pour Mme D..., et celles de
Mme D....
Une note en délibéré, enregistrée le 19 septembre 2019, a été présentée pour
Mme D....
Considérant ce qui suit :
1. Par un courrier en date du 9 juin 2015, le directeur du conservatoire municipal de musique de danse et de théâtre de la commune de Saint-Ouen a informé
Mme D..., assistante d'enseignement artistique titulaire, chargée de l'enseignement du violoncelle, que ses heures de cours seraient, à compter de la rentrée de l'année scolaire 2015-2016, réparties sur quatre jours de la semaine, les lundi, mardi, mercredi et samedi et non plus sur trois jours. Par un courrier du 13 juillet 2015, Mme D... a présenté au maire de la commune de Saint-Ouen une demande tendant à la reconnaissance du harcèlement moral au travail, dont elle s'estimait victime depuis le mois d'avril 2010, qui a été implicitement rejetée, et lui a adressé une demande indemnitaire qui a également été rejetée. Mme D... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil l'annulation de la décision portant modification de son service d'enseignement à compter de la rentrée de l'année scolaire 2015-2016, ainsi que la condamnation de la commune de Saint-Ouen à lui verser la somme de 28 320 euros en réparation des préjudices qu'elle estimait avoir subis du fait du harcèlement moral dont elle aurait été l'objet. Elle relève appel du jugement du 14 octobre 2016 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En premier lieu, si le juge administratif, saisi de plusieurs affaires présentant à juger la même question ou des questions connexes, a la faculté de joindre ces affaires pour y statuer par une seule décision, il n'en a pas l'obligation. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué serait irrégulier faute pour le tribunal administratif d'avoir joint, comme le demandait la requérante, ses demandes enregistrées sous les n° 1509689, 1507204 et 1600911 doit être écarté.
3. En deuxième lieu, la requérante soutient que le tribunal administratif ne s'est pas prononcé sur la légalité de la décision implicite de rejet résultant du silence gardé sur sa demande du 13 juillet 2015 tendant à ce que la commune de Saint-Ouen reconnaisse le harcèlement moral dont elle était victime, alors que ces conclusions constituaient l'objet principal de sa demande. Toutefois, en admettant même que la demande de première instance puisse être regardée comme ayant comporté de telles conclusions, le tribunal, en se prononçant comme il l'a fait aux points 3 à 15 de son jugement sur la question de l'existence d'un harcèlement moral, doit être regardé comme ayant nécessairement apprécié la légalité de la décision implicite de rejet susmentionnée. Au surplus, en demandant au tribunal la condamnation de la commune à lui verser une indemnité en réparation d'un harcèlement moral,
Mme D... a donné à l'ensemble de sa demande le caractère d'un recours de plein contentieux. Dans ces conditions, il n'y avait pas lieu, pour les premiers juges, de se prononcer sur la légalité de la décision dont il s'agit. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué serait irrégulier au motif que le tribunal administratif aurait omis de statuer sur ces conclusions ou se serait mépris sur l'objet de la demande qui lui était soumise ne peut qu'être écarté.
4. En troisième lieu, contrairement à ce que soutient la requérante, les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à l'ensemble des arguments exposés à l'appui des moyens de la demande qui leur était soumise, n'ont omis de répondre à aucun des moyens invoqués par elle et se sont, notamment, prononcés de manière complète et précise sur le moyen tiré de l'existence d'un harcèlement moral. Par suite, le moyen tiré d'un défaut de motivation du jugement attaqué doit être écarté.
5. Enfin, si la requérante soutient que le jugement attaqué est incohérent, que le tribunal a commis une erreur de droit s'agissant de la charge de la preuve en matière de harcèlement moral et qu'il n'a pas pris en compte le caractère répétitif des agissements qu'elle dénonçait, ces moyens, qui se rattachent au bien-fondé du raisonnement suivi par les premiers juges, ne sont, en tout état de cause, pas de nature à entacher d'irrégularité le jugement attaqué. Par suite, les moyens tirés de ce que le tribunal administratif aurait, en conséquence de l'ensemble des erreurs de droit et d'appréciation dont l'intéressée allègue, méconnu le principe d'impartialité et les stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doivent également être écartés.
Au fond :
En ce qui concerne les conclusions à fin d'annulation de la décision portant modification du service d'enseignement et de la décision implicite de rejet du recours gracieux :
6. En admettant, eu égard aux mentions du dispositif du mémoire susvisé enregistré le 25 septembre 2017, que la requérante ait entendu reprendre en appel ses conclusions dirigées contre la décision portant modification de son service d'enseignement à compter de la rentrée scolaire 2015/2016 et la décision implicite de rejet du recours gracieux formé contre cette décision, elle ne critique pas les motifs du jugement attaqué par lequel le tribunal administratif a rejeté lesdites conclusions. Par suite, il y a lieu de rejeter ces conclusions par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif.
En ce qui concerne les conclusions indemnitaires :
7. Aux termes de l'article 6 quinquiès de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa version alors applicable : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ; 3° Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés. Est passible d'une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé ou ayant enjoint de procéder aux agissements définis ci-dessus. (...) ".
8. Il appartient à l'agent public qui soutient avoir été victime de faits constitutifs de harcèlement moral de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles d'en faire présumer l'existence. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. Pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral. Pour être qualifiés de harcèlement moral, ces agissements doivent être répétés et excéder les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique.
9. A l'appui de sa demande du 13 juillet 2015 tendant à la reconnaissance d'une situation de harcèlement moral dans l'exercice de ses fonctions, la requérante a dénoncé des atteintes graves et répétées, depuis le mois d'avril 2010, à sa santé, sa dignité et sa carrière en faisant état d'une remise en cause permanente de sa manière de servir par le directeur du conservatoire de la commune de Saint-Ouen nommé en avril 2010. Elle a également soutenu que ces agissements de harcèlement moral s'étaient poursuivis pendant ses congés de maladie consécutifs à cette situation et qu'ils visaient à la décourager afin qu'elle démissionne.
10. En premier lieu, si la requérante soutient qu'elle n'a jamais connu de difficultés relationnelles avec les prédécesseurs du directeur nommé en avril 2010, cette affirmation, qui est au demeurant contredite par les termes mêmes du courrier qu'elle a adressé le 13 juillet 2015 au maire de la commune de Saint-Ouen, est en tout état de cause par elle-même sans incidence sur l'appréciation des agissements qu'elle dénonce. En outre, si la requérante fait valoir qu'elle a manifesté à maintes reprises ses désaccords avec les actions ou les orientations décidées par la direction du conservatoire et qu'elle a joué un rôle de " lanceur d'alerte ", il ne résulte pas de l'instruction que ces prises de position auraient entraîné, de la part du directeur du conservatoire, des mesures de rétorsion à son encontre. A cet égard, si celui-ci a pu prendre des décisions ayant eu une incidence sur l'organisation des enseignements dispensés par la requérante, il ne résulte pas de l'instruction qu'elles relèveraient d'un exercice anormal du pouvoir hiérarchique. Par ailleurs, si l'intéressée soutient qu'elle a dû cesser d'assurer la coordination du département des cordes ou ses fonctions au sein du conseil pédagogique, cette circonstance n'est pas, par elle-même, de nature à faire présumer l'existence d'un harcèlement. De même, la circonstance que seize enseignants du conservatoire ont, dans une pétition datée du 14 janvier 2015, apporté leur soutien au directeur du conservatoire après sa mise en cause publique par la requérante le jour précédent, ne saurait être regardée comme une stigmatisation ou révéler un acharnement à l'encontre de cette dernière, alors, au surplus, que cette pétition ne la mentionne pas nommément. Enfin, si la requérante fait valoir qu'elle a été contrainte à plusieurs reprises de participer avec ses élèves aux répétitions et au concert de fin d'année, que le bilan d'activité du premier semestre de l'année 2015 mentionnerait à tort, s'agissant du cours de violoncelle, un examen de cycle " non autorisé ", et que le directeur du conservatoire lui aurait demandé de justifier la dégradation d'un violoncelle, ces circonstances ne sont en tout état de cause pas de nature à faire présumer l'existence d'agissements constitutifs de harcèlement moral.
11. En deuxième lieu, la requérante soutient que la décision du 9 juin 2015 par laquelle le directeur du conservatoire a réparti ses enseignements sur quatre jours de la semaine, dont le samedi, à compter du 1er septembre 2015, alors qu'elle assurait jusqu'alors son service sur trois jours seulement, révèlerait une intention de lui nuire en compromettant sa carrière de concertiste et en l'empêchant illégalement d'assurer, dans le cadre d'un cumul d'activités, des cours le samedi au sein d'une école de musique. Toutefois, une telle décision, qui pouvait régulièrement être prise par le directeur du conservatoire dans le cadre de son pouvoir d'organisation du service, ne révèle pas un exercice anormal du pouvoir hiérarchique. A cet égard, aucune des pièces versées au dossier ne permet d'établir que le motif mentionné dans la décision du 9 juin 2015, à savoir améliorer " l'organisation pédagogique et l'interdisciplinarité des cours ", " la gestion de l'établissement et la cohérence des emplois du temps des enseignants du conservatoire ", serait infondé et que ladite décision aurait été prise pour des motifs étrangers à l'intérêt du service. En outre, il ressort des termes mêmes du courrier adressé à l'intéressée que celle-ci a eu la faculté, dont elle n'a pas usé, de choisir le jeudi comme quatrième jour de cours. Par ailleurs, la requérante n'est pas fondée à soutenir que cette décision est contraire à l'autorisation de cumul d'activités dont elle bénéficiait depuis 2007, alors, au surplus, qu'elle n'établit pas qu'elle bénéficiait d'une telle autorisation au titre de l'année scolaire 2015-2016. Dans ces conditions, la modification de l'emploi du temps de la requérante, qui n'a pas porté atteinte aux droits et prérogatives qu'elle tient de son statut, n'est pas de nature à laisser présumer une situation de harcèlement moral.
12. En troisième lieu, il résulte de l'instruction que la requérante a été placée en congé de maladie ordinaire à demi traitement du 17 décembre 2015 au 20 février 2016 et du 4 mars 2016 au 31 mars 2016. Si elle soutient qu'elle n'a pu faire valoir ses droits à complément financier auprès de sa mutuelle en raison de retards dans le traitement de son dossier par la commune de Saint-Ouen, il résulte de l'instruction qu'elle a été mise en possession dans un délai raisonnable des documents qu'elle demandait. Au demeurant, l'intéressée a été placée rétroactivement en congé de maladie à plein traitement à compter du 17 décembre 2015 dans l'attente de l'avis de la commission de réforme par un arrêté du 12 avril 2016.
13. En quatrième lieu, il résulte de l'instruction que la requérante a demandé au maire de la commune de Saint-Ouen, par un courrier du 6 juillet 2015, la reconnaissance de l'imputabilité au service de ses pathologies et qu'elle a saisi la commission de réforme par un courrier du 14 octobre 2015. Si la requérante soutient que la commune de Saint-Ouen aurait cherché à lui nuire en " déformant " volontairement sa demande, la déclaration de maladie professionnelle datée du 17 novembre 2015 mentionne toutefois " une souffrance au travail avec situation de stress, lombalgies, chute de cheveux, syndrome anxio-dépressif ". Dans ces conditions, aucune dénaturation de la demande ne peut être imputée à la commune de Saint-Ouen. Par ailleurs, si la requérante soutient que l'administration aurait délibérément transmis à la commission de réforme le rapport d'enquête du 2 juillet 2015, qui lui est défavorable, afin d'empêcher la reconnaissance qu'elle sollicitait, il résulte de l'instruction que la commission, par un courrier du 16 octobre 2015 adressé au maire de Saint-Ouen, a demandé la communication de ce rapport, " ayant pour objet de rassembler les éléments nécessaires à la compréhension de la situation ". Il suit de là que le traitement de la demande de Mme D... tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service de la pathologie dont elle est atteinte ne révèle pas l'existence d'agissements constitutifs de harcèlement moral.
14. En cinquième lieu, si la requérante a demandé les 14 et 28 juin 2015 la communication de son dossier administratif et ne l'a obtenue que le 18 mai 2016, cette communication, certes tardive, n'est pas pour autant de nature à faire présumer l'existence d'un harcèlement moral, l'intéressée ayant été invitée à consulter son dossier dès le 1er juillet 2015. En outre, si la requérante soutient qu'elle a constaté des irrégularités dans la tenue de son dossier, tenant au classement des pièces, à l'absence de certains documents, notamment médicaux, ou à la nature de ceux y figurant, il ne résulte en tout état de cause pas de l'instruction que ces manquements auraient fait obstacle à ce que l'intéressée, qui au demeurant avait produit un grand nombre de pièces à l'appui de sa demande du 13 juillet 2015, fasse valoir ses droits en établissant notamment l'existence des agissements qu'elle dénonce.
15. En sixième lieu, il ne résulte pas de l'instruction que les notations dont la requérante a fait l'objet au titre des années 2010 à 2014 seraient entachées d'une erreur manifeste d'appréciation et, alors qu'elles ne sont pas formulées en des termes vexatoires, qu'elles seraient susceptibles d'avoir porté atteinte à la dignité de la requérante. A cet égard, la seule circonstance que la notation de l'intéressée est passée de 16 à 15 en 2014 n'est pas de nature à établir l'existence d'un agissement constitutif de harcèlement. Enfin, les propos discriminatoires et menaçants qui auraient été tenus à son encontre, lors de deux entretiens préalables à sa notation au titre de l'année 2011, ne sont établis par aucune des pièces versées au dossier.
16. En septième lieu, si la requérante soutient que le blâme qui lui a été infligé le
13 mars 2012 est injustifié et révèle une volonté de lui nuire, elle ne l'établit par aucune pièce. A cet égard, et alors que cette sanction est devenue définitive faute d'avoir été contestée dans le délai du recours contentieux, la requérante n'établit pas que les propos qui lui ont été reprochés, à l'origine de cette sanction, auraient été déformés ainsi qu'elle le prétend.
17. En huitième lieu, si la requérante soutient que le directeur du conservatoire a exercé des pressions sur certains de ses élèves et qu'il a, en particulier, exclu " les deux élèves les plus avancés de sa classe de violoncelle (sans l'en informer au préalable) ", l'administration fait valoir en défense que le directeur du conservatoire a été contraint d'adapter le parcours des élèves concernés qui ne pouvaient matériellement plus remplir l'ensemble des conditions requises pour bénéficier d'un cycle exceptionnel d'enseignement. Il ne résulte pas de l'instruction que cette mesure, ainsi justifiée par l'administration, aurait été prise pour un motif étranger à l'intérêt du service et dans le but de nuire à la requérante comme celle-ci le prétend.
18. Enfin, il résulte de l'instruction qu'à la suite de la mise en cause publique du directeur du conservatoire par la requérante et l'un de ses collègues le 13 janvier 2015, la commune de Saint-Ouen a décidé de procéder à une enquête administrative afin que soit appréciée la réalité des reproches exprimés publiquement par la requérante. Au cours de cette enquête, le directeur adjoint des ressources humaines, le responsable du service de la gestion des conditions de travail et la coordinatrice de la prévention des risques psychosociaux ont entendu quinze professeurs et agents du conservatoire, dont la requérante à deux reprises, les
10 avril 2015 et 3 juin 2015. Dans ses conclusions, le rapport établi le 2 juillet 2015 à l'issue de cette enquête indique que la requérante est l'auteur de nombreux courriers et appels téléphoniques adressés à son administration, qu'elle s'est délibérément placée dans une logique de conflit avec sa hiérarchie et qu'elle éprouve des difficultés à accepter les contraintes liées au " collectif de travail ". Si la requérante soutient que cette enquête a été menée de façon partiale, qu'elle n'a offert aucune garantie d'objectivité, que le compte-rendu de ses deux entretiens a déformé ses propos et que les questions posées à ses collègues étaient orientées, elle ne l'établit pas par les pièces qu'elle produit et, en particulier, par le compte-rendu de l'entretien du 10 avril 2015, établi le 14 avril suivant, qui comporte une mention manuscrite de la requérante en contestant le contenu et indiquant qu'elle souhaite être entendue une seconde fois. De même, le courriel adressé par la requérante à la commune de Saint-Ouen le 20 mai 2015, dans lequel elle conteste le contenu du compte-rendu de l'entretien du 10 avril 2015, n'est pas de nature à établir le bien fondé des critiques qu'elle émet à l'encontre de l'enquête administrative diligentée par la commune. Par ailleurs, si la requérante soutient que le compte-rendu de l'entretien du 3 juin 2015 ne lui jamais été communiqué et qu'elle n'a eu connaissance du rapport d'enquête que tardivement, lors de la consultation de son dossier administratif, ces circonstances ne sont en tout état de cause pas de nature à établir la partialité et l'absence d'objectivité de l'enquête qui a été menée. Enfin, il ne résulte pas de l'instruction que cette enquête aurait été conduite en méconnaissance des dispositions des articles L. 4132-2 et suivants du code du travail qui sont relatives au droit d'alerte et de retrait des travailleurs. Par suite, il n'est pas établi que l'enquête administrative conduite par la commune de Saint-Ouen, eu égard à son objet ou à ses modalités, serait constitutive d'un agissement de harcèlement moral.
19. Il résulte de ce qui précède que les éléments de fait exposés par
Mme D... ne permettent pas de faire présumer l'existence d'un harcèlement moral. Dans ces conditions, elle n'est pas fondée à soutenir que sa carrière professionnelle est compromise du fait d'un harcèlement ou que son état de santé s'est dégradé en raison d'un tel harcèlement, alors même qu'elle produit plusieurs certificats médicaux indiquant que ses pathologies seraient en lien avec ses conditions de travail. Par suite, ses conclusions tendant à ce que la commune de Saint-Ouen soit condamnée à lui verser la somme de 28 320 euros en réparation de ses préjudices doivent être rejetées.
20. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Sur les frais liés à l'instance :
21. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".
22. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Saint-Ouen, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée au versement de la somme que Mme D... demande au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la commune de Saint-Ouen présentées sur le fondement de ces dispositions.
D É C I D E :
Article 1er : La requête présentée par Mme D... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la commune de Saint-Ouen tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
N° 16VE03590 2