Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... B... a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 11 janvier 2018 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.
Par un jugement n° 1800354 du 23 février 2018, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé la décision portant refus de délai de départ volontaire et rejeté le surplus des conclusions de la demande de M. B....
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 5 mars 2018, M. B..., représenté par Me Pusung, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de sa demande et l'arrêté du 11 janvier 2018 du préfet des Hauts-de-Seine en toutes ses dispositions ;
2° d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ou un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 20 euros par jour de retard et, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande de titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est entachée d'incompétence ;
- elle est entachée de défaut de motivation et d'examen particulier ;
- le préfet a commis une erreur de droit et une erreur manifeste d'appréciation eu égard à sa durée de présence en France depuis 2009 et à sa situation personnelle et professionnelle ; en particulier, il vit en concubinage depuis 2013 et sa mère et sa soeur sont en France ;
- la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- sur la décision portant interdiction de retour sur le territoire pour un an :
- elle est entachée d'incompétence ;
- elle est insuffisamment motivée et est entachée d'erreur de droit dès lors que le préfet ne s'est pas prononcé sur les quatre critères prévus par la loi ;
- elle méconnaît son droit au respect de sa vie privée et familiale et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation eu égard à sa situation personnelle et dans la mesure où il n'a jamais été une menace pour l'ordre public ;
- l'arrêté méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative ;
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C... B..., ressortissant philippin né le 26 janvier 1975, déclare être arrivé en France en 2009, dépourvu de tout visa, et s'y être maintenu depuis lors sans solliciter sa régularisation. Alors qu'il se trouvait à Asnières-sur-Seine (Hauts-de-Seine) le 11 janvier 2018, il a fait l'objet d'un contrôle documentaire, au cours duquel il n'a pas été en mesure de justifier de la régularité de son séjour en France, ce qui a conduit à son interpellation. Par un arrêté du même jour, et à la suite de l'audition de M. B... par les services de police, le préfet des Hauts-de-Seine l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il serait susceptible d'être éloigné et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an. Par un jugement du 23 février 2018, dont M. B... relève appel en tant qu'il ne lui a pas donné entièrement satisfaction, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé la décision portant refus de délai de départ volontaire et rejeté le surplus de sa demande.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne les moyens communs aux décisions en litige :
2. En premier lieu, M. B... reprend en appel les moyens qu'il avait invoqués en première instance, tirés de l'incompétence du signataire de l'obligation de quitter le territoire français et l'interdiction de retour sur ce territoire en litige. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus, à bon droit, par le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise.
3. En second lieu, le requérant n'assortit le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé. Il s'ensuit que ce moyen ne peut qu'être écarté.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire :
4. En premier lieu, M. B... reprend en appel les moyens, qu'il avait invoqués en première instance, tirés de l'insuffisance de motivation de la décision susvisée et du défaut d'examen particulier. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus, à bon droit, par le premier juge.
5. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir d'ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, et la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé et de la morale, ou à la protection des droits et des libertés d'autrui ". En application de ces stipulations, il appartient à l'autorité administrative qui envisage de procéder à l'éloignement d'un ressortissant étranger en situation irrégulière d'apprécier si, eu égard notamment à la durée et aux conditions de son séjour en France, ainsi qu'à la nature et à l'ancienneté de ses liens familiaux sur le territoire français, l'atteinte que cette mesure porterait à sa vie familiale serait disproportionnée au regard des buts en vue desquels cette décision serait prise. En l'espèce, M. B... se prévaut de sa durée de présence sur le territoire français depuis 2009, des liens familiaux et personnels en France, ainsi que de son intégration sociale et professionnelle dans la société française. Toutefois, les pièces versées au dossier ne permettent d'établir le caractère habituel et continu du séjour de M. B... en France qu'à partir de l'année 2013. Par ailleurs, si le requérant se prévaut de sa relation avec une compatriote, dont il partagerait la vie depuis 2013, la production de factures d'électricité, de divers courriers administratifs et de ses bulletins de paie de 2013 à 2017 ne permet pas d'établir la réalité de la vie commune alléguée dans le 18ème arrondissement de Paris puis à Asnières-sur-Seine, dès lors qu'au cours de son audition par les services de police, M. B... a déclaré vivre chez sa mère dans le 5ème arrondissement de Paris, et ignorer l'adresse exacte de son amie. De plus, le requérant admet que son épouse, dont il affirme être séparé, est demeurée avec leurs enfants aux Philippines, où il a vécu jusqu'à l'âge d'au moins 34 ans. S'il soutient s'occuper seul de sa mère, qui réside en France, il n'établit pas que sa présence à ses côtés serait indispensable, sa soeur, également établie en France, attestant prendre également soin d'elle. La production d'attestations émanant de personnes présentées comme des connaissances, postérieures à la date de la décision attaquée, et rédigées en des termes proches voire similaires, et très peu circonstanciés, ne permet pas d'établir la réalité de son intégration en France, dont il a déclaré au cours de son audition par les services de police ne pas parler la langue. Enfin, son activité, limitée à quelques heures travaillées comme aide à domicile, ne caractérise pas une insertion professionnelle stable et continue particulière dans la société française. Dans ces conditions, la décision en litige n'a pas porté au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Il suit de là que les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.
En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour un an :
6. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable au litige : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour (...) ".
7. En premier lieu, la décision contestée cite les dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, fait état de la situation personnelle de M. B..., avant d'en tirer que, au cas d'espèce, la durée d'un an ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit de mener une vie privée et familiale normale. Elle comporte ainsi les considérations de droit et les éléments de fait qui en constituent le fondement. Il suit de là que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.
8. En deuxième lieu, M. B... soutient que le préfet a commis une erreur de droit en n'examinant pas sa durée de présence sur le territoire français, ni la nature et l'ancienneté de ses liens avec la France, ni la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement, ni enfin la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. Toutefois, dans leur rédaction applicable à la date de la décision litigieuse, les dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'imposaient nullement l'examen de ces critères. Le moyen tiré de l'erreur de droit ne peut donc qu'être écarté.
9. En dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5, les moyens tirés de la méconnaissance du droit au respect de la vie privée et familiale et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.
10. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté ses conclusions en annulation de l'obligation de quitter le territoire français et de l'interdiction de retour sur le territoire français. Par conséquent, sa requête, y compris les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte et celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doit être rejetée.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
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N° 18VE00857