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09/11/2021 | FRANCE | N°20VE01183

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 09 novembre 2021, 20VE01183


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SA Villefranche Immo a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2012, en droits et intérêts de retard, et la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a indûment acquittée pour un montant de 39 708 euros, assortie des intérêts moratoires.

Par un jugement n° 1801870 du 25 février 2020, le tribunal administratif de Montreuil a ré

duit le rappel de taxe sur la valeur de 294 984 euros à 137 660 euros, déchargé la SA V...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SA Villefranche Immo a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2012, en droits et intérêts de retard, et la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a indûment acquittée pour un montant de 39 708 euros, assortie des intérêts moratoires.

Par un jugement n° 1801870 du 25 février 2020, le tribunal administratif de Montreuil a réduit le rappel de taxe sur la valeur de 294 984 euros à 137 660 euros, déchargé la SA Villefranche Immo des intérêts de retard correspondant à cette réduction en droits et rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 avril 2020, la SA Villefranche Immo, représentée par Me Stemmer, avocat, demande à la cour :

1° d'annuler le jugement attaqué ;

2° de prononcer la décharge des impositions laissées à sa charge par le tribunal ;

3° de prononcer la restitution de 39 708 euros de taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a indûment acquittée au titre de l'année 2012 ;

4° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal a omis de statuer sur ses conclusions à fin de restitution ;

- le jugement attaqué n'est pas motivé en ce qui concerne ses conclusions à fin de restitution ;

- c'est à tort que le tribunal a regardé comme inopérant le moyen tiré de ce que la taxe acquittée en 2010 n'ayant pas été collectée régulièrement, il n'y avait pas lieu de régulariser sa déduction ;

- l'opération d'acquisition auprès d'un non-assujetti d'un immeuble achevé depuis plus de deux ans n'était pas soumise à la taxe sur la valeur ajoutée dès lors que les dispositions du A du 1 du 7° de l'article 257 et du 3° de l'article 285 du code général des impôts en vigueur à la date de cette acquisition, le 10 février 2010, étaient incompatibles avec la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006 ;

- elle est fondée à se prévaloir de l'interprétation de la loi fiscale résultant des instructions référencées 3 A-3-10 du 15 mars 2010 et 3 A-9-10 du 20 décembre 2010 ;

- sa demande de restitution est fondée dès lors qu'aucune taxe n'était due lors de la revente, ainsi que l'a jugé le tribunal, s'agissant d'un immeuble achevé depuis plus de cinq ans ;

- compte tenu des déductions qu'elle a opérées, sa demande de restitution porte sur la somme de 39 708 euros.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dorion, présidente-assesseure,

- les conclusions de M. Met, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SA Villefranche Immo, société de droit luxembourgeois qui exerce une activité de promotion et gestion immobilière, a acquis le 10 février 2010 une villa sise à Nice appartenant à un particulier non assujetti, pour un montant de 1,8 million d'euros, dans l'intention de démolir et reconstruire un immeuble d'habitation dans les quatre ans. Elle s'est alors acquittée de la taxe sur la valeur ajoutée sur le prix total pour un montant de 352 800 euros, dont elle a opéré la déduction. Suite à sa renonciation à ce projet, l'acte de vente a été modifié le 25 août 2012 pour substituer à cet engagement de construire un engagement de revente et la cession à un non-assujetti est intervenue le 28 août 2012, pour un montant de 2,76 millions d'euros. Par une proposition de rectification du 31 juillet 2015, le service a remis en cause le régime de la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge sous lequel la SA Villefranche Immo avait placé cette opération et lui a réclamé 294 984 euros de rappels de taxe, assortis des intérêts de retard, correspondant à une taxation sur le prix total de vente. Suite aux observations du contribuable, la rectification a été maintenue par le service au motif que la taxe déduite sur l'acquisition réalisée en 2010, qui avait ouvert droit à déduction sur l'engagement de construire, n'avait pas été régularisée. Saisi de la contestation par la SA Villefranche Immo, le tribunal administratif de Montreuil a jugé que, si l'acquisition en 2010 n'était pas soumise à la taxe sur la valeur ajoutée ainsi qu'il était expressément prévu dans l'acte, la taxe déduite aurait dû être régularisée en 2012, s'agissant d'une immobilisation vendue deux ans après avoir été acquise, à concurrence de 17/20èmes du montant de l'acquisition, soit 299 200 euros de taxe ramenée au montant de la rectification de 294 984 euros, et procédé à une compensation avec la taxe sur la marge déjà acquittée. Par le jugement attaqué, le tribunal a ainsi réduit le rappel de taxe à la somme de 137 660 euros et déchargé la SA Villefranche Immo des droits et intérêts de retard correspondant à cette réduction. La SA Villefranche Immo relève régulièrement appel de l'article 3 de ce jugement, qui rejette le surplus de ses demandes.

Sur l'étendue du litige :

2. Par une décision en date du 7 janvier 2021, postérieure à l'enregistrement de la requête d'appel, le ministre de l'économie, des finances et de la relance a prononcé le dégrèvement de la totalité des rappels de taxe sur la valeur ajoutée restant en litige, en droits et intérêts. Les conclusions à fin de décharge présentées par la SA Villefranche Immo sont par suite devenues sans objet. Il n'y a plus lieu d'y statuer.

Sur la régularité du jugement :

3. Aux termes de l'article 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".

4. La SA Villefranche Immo fait valoir que le tribunal a omis de statuer sur ses conclusions à fin de restitution d'un reliquat de 39 708 euros de taxe indûment acquittée qu'elle n'a pu déduire, et qu'il n'a pas motivé sa décision sur ce point. Si, en réduisant les rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de la société requérante du montant de la taxe déjà acquittée par application du régime de la taxe sur la marge, le tribunal peut être regardé comme ayant implicitement fait droit à sa demande de restitution par compensation avec les droits maintenus, il n'a pas motivé son jugement sur ce point. La société requérante est dès lors fondée à soutenir que le jugement attaqué est irrégulier en tant qu'il a statué sur ces conclusions.

5. Il y a lieu de statuer, par la voie de l'évocation, sur les conclusions présentées devant le tribunal administratif de Montreuil par la société requérante à fin de restitution de 39 708 euros de taxe sur la valeur ajoutée qu'elle estime avoir indûment acquittée au titre de l'année 2012.

Sur les conclusions à fin de restitution :

En ce qui concerne la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de la demande de restitution :

6. Aux termes de l'article R. 196-3 du livre des procédures fiscales : " Dans le cas où un contribuable fait l'objet d'une procédure de reprise ou de rectification de la part de l'administration des impôts, il dispose d'un délai égal à celui de l'administration pour présenter ses propres réclamations. "

7. La demande de restitution restant en litige porte sur un excédent de taxe sur la valeur ajoutée déductible au titre de l'année 2012. La SA Villefranche Immo, qui a fait l'objet d'une rectification au titre de la taxe collectée sur la même période, disposait d'un délai spécial de réclamation égal à celui de l'administration pour présenter sa réclamation. Il s'ensuit que sa demande de restitution, présentée dans les observations formulées le 19 octobre 2015 sur la proposition de rectification du 31 juillet 2015 et réitérée par sa réclamation du 31 janvier 2017, n'était pas tardive.

En ce qui concerne le bien-fondé de la demande de restitution :

8. Aux termes des dispositions de l'article 261 du code général des impôts, dans leur version applicable : " Sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée : / (...) 5. (Opérations immobilières) : / 1° Les livraisons de terrains qui ne sont pas des terrains à bâtir au sens du 1° du 2 du I de l'article 257 ; / 2° Les livraisons d'immeubles achevés depuis plus de cinq ans. (...) ". Et aux termes de l'article 260 du code général des impôts : " Peuvent sur leur demande acquitter la taxe sur la valeur ajoutée : / (...) 5° bis Les personnes qui réalisent une opération visée au 5 de l'article 261 (...) ". Aux termes de l'article 201 quater de l'annexe II au code général des impôts : " L'option prévue au 5° bis de l'article 260 du code général des impôts s'exerce distinctement par immeuble, fraction d'immeuble ou droit immobilier mentionné au 1 du I de l'article 257 de ce code, relevant d'un même régime au regard des articles 266 et 268 du même code. Il doit être fait mention de cette option dans l'acte constatant la mutation ".

9. Il résulte de l'instruction qu'il est stipulé dans l'acte de vente du 28 août 2012 que la " mutation est exonérée de la taxe sur la valeur ajoutée, conformément aux dispositions de l'article 261, 5-1° du code général des impôts et est soumise à la taxe de publicité foncière au taux de droit commun prévu par l'article 1594 D du code général des impôts, qui est due par l'acquéreur ". N'ayant pas opté pour l'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée de cette opération, la SA Villefranche Immo est fondée à soutenir que la taxe sur la marge qu'elle a acquittée pour un montant de 157 324 euros à raison de cette opération n'était pas due. Elle soutient sans être contredite qu'elle a déduit une fraction de la taxe dont elle s'est acquittée à tort et que subsiste un reliquat non imputé ni remboursé de 39 708 euros. Il y a dès lors lieu de faire droit à sa demande de restitution à concurrence de cette somme.

10. Il résulte de tout ce qui précède que la SA Villefranche Immo est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a, en son article 3, rejeté sa demande de restitution de la somme de 39 708 euros de taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a indûment acquittée au titre de l'année 2012.

Sur les frais de l'instance :

11. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée réclamés à la SA Villefranche Immo au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2012 restant en litige.

Article 2 : L'Etat restituera à la SA Villefranche Immo un crédit de taxe sur la valeur ajoutée de 39 708 euros.

Article 3 : Le jugement n° 1801870 du 25 février 2020 du tribunal administratif de Montreuil est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à la SA Villefranche Immo la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 20VE01183


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20VE01183
Date de la décision : 09/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02-08-03 Contributions et taxes. - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. - Taxe sur la valeur ajoutée. - Liquidation de la taxe. - Déductions.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: Mme Odile DORION
Rapporteur public ?: M. MET
Avocat(s) : TAJ SOCIETE D'AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 16/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2021-11-09;20ve01183 ?
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