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25/11/2021 | FRANCE | N°21VE01291

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 25 novembre 2021, 21VE01291


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de lui accorder le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire, d'annuler l'arrêté du 1er février 2021 du préfet des Hauts-de-Seine l'ayant obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, ayant fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné et interdisant son retour sur le territoire français pour une durée d'un an, d'enjoindre au préfet compétent de lui délivrer un titre de séjo

ur ou à défaut de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois en le munissant...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de lui accorder le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire, d'annuler l'arrêté du 1er février 2021 du préfet des Hauts-de-Seine l'ayant obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, ayant fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné et interdisant son retour sur le territoire français pour une durée d'un an, d'enjoindre au préfet compétent de lui délivrer un titre de séjour ou à défaut de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois en le munissant, dans l'attente de ce réexamen, d'une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l'expiration de ce délai et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2102570 du 9 avril 2021, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 7 mai 2021, M. A... B..., représenté par Me Boiardi, avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet compétent de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de deux mois sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande de titre dans un délai de deux mois sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) d'enjoindre au préfet territorialement compétent de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour autorisant le travail ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision l'obligeant à quitter le territoire français est insuffisamment motivée et est entachée d'un défaut d'examen sérieux ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît aussi les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le pays de renvoi est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

.....................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Albertini a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., ressortissant mauritanien né le 31 décembre 1978, relève appel du jugement du 9 avril 2021 par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine du 1er février 2021 l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, ayant fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné et interdisant son retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

Sur le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire :

2. Selon l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, susvisée : " Dans les cas d'urgence (...), l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée (...) par la juridiction compétente ou son président. ". Aux termes de l'article 61 du décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 : " L'admission provisoire peut être accordée dans une situation d'urgence, (...). L'admission provisoire est accordée par (...) le président de la juridiction saisie, soit sur une demande présentée sans forme par l'intéressé, soit d'office si celui-ci a présenté une demande d'aide juridictionnelle ou d'aide à l'intervention de l'avocat sur laquelle il n'a pas encore été statué. ".

3. Dans les circonstances particulières de l'espèce, il y a lieu de prononcer l'admission de M. B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire en application de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991, précité.

Sur la légalité de l'arrêté attaqué :

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

4. En premier lieu, il ressort de l'examen de la décision attaquée que le préfet des Hauts-de-Seine, qui n'était pas tenu de faire état de l'intégralité de la situation de l'intéressé, a précisé les considérations de droit et de fait sur lesquelles il s'est fondé pour obliger M. B... à quitter le territoire français et s'est livré à un examen particulier de sa situation. Par suite, les moyens tirés de l'insuffisance de motivation de cette décision et de l'absence d'examen particulier de la situation du requérant doivent être écartés.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. ".

6. S'il ressort des pièces du dossier que l'état de santé de M. B... nécessite une prise en charge médicale spécialisée dont le défaut entraînerait des conséquences d'une exceptionnelle gravité et porterait atteinte à son intégrité physique, il est constant qu'il pourrait être pris en charge en Mauritanie, son pays d'origine, dès lors, d'une part, que son traitement y est disponible, d'autre part, que les hôpitaux régionaux disposent de ce traitement. A cet égard, si M. B... soutient que son traitement n'est disponible dans les hôpitaux qu'en comprimés de 100 microgrammes alors qu'il a besoin de 75 microgrammes et que ce traitement n'est pas accessible dans les officines, il n'indique pas avec une précision suffisante en quoi cette posologie concernant des comprimés sécables, délivrés sur prescription médicale, ne serait pas compatible avec son état de santé, ni pourquoi il ne pourrait pas y avoir effectivement accès dans les hôpitaux régionaux de son pays d'origine. Ainsi, M. B... ne démontre pas en quoi il serait dans l'incapacité de bénéficier effectivement et de manière appropriée de son traitement dans son pays d'origine. Dès lors, il n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

7. Enfin, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

8. Si M. B... soutient, d'une part, qu'il s'est intégré à la société française en travaillant en tant qu'agent de service au sein de l'entreprise Essi Turquoise au mois de janvier 2020 puis au sein de l'entreprise Elior depuis le 1er juillet 2020, d'autre part, qu'il est atteint d'une affection nécessitant une prise en charge médicale spécialisée qu'il effectue en France à raison de consultations et d'actes de biologie réguliers et de la prise d'un traitement hormonal quotidienne, il ressort des pièces du dossier qu'il n'établit pas être dépourvu de tout lien familial ou personnel dans son pays d'origine, où réside son épouse et où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de quarante ans. Enfin, l'intéressé ne justifie pas d'une insertion professionnelle suffisamment stable et ancienne en France, où il est arrivé en 2018, ni de liens personnels intenses noués dans ce pays. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

9. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'établit pas que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait illégale. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de renvoi doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de cette décision doit être écarté.

En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français pendant un an :

10. Il suit également de ce qui précède que M. B... n'établit pas que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait illégale. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision lui interdisant le retour sur le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de cette décision doit être écarté.

11. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors applicable : " (...) III. L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. / (...) / Lorsqu'elle ne se trouve pas en présence du cas prévu au premier alinéa du présent III, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français.(...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français ".

12. En application de ces dispositions, il incombe à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger. Elle doit par ailleurs faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet. Elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifient sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace. En revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément.

13. Si M. B... soutient qu'il a entendu fixer durablement ses attaches en France, qu'il n'a pas fait l'objet d'une précédente décision portant obligation de quitter le territoire français et qu'il ne constitue pas une menace pour l'ordre public, il ressort des pièces du dossier, qu'il ne justifie ni d'une insertion professionnelle suffisamment stable et ancienne, ni d'attaches familiales ou personnelles et qu'il est entré récemment en France, en 2018. Dans ces conditions, et au regard de la durée de sa présence en France, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en prenant à l'encontre de M. B... une décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

14. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Par suite, il y a lieu de rejeter ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DECIDE :

Article 1er : M. B... est admis à titre provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Article 2 : La requête de M. B... est rejetée.

N° 21VE01291 4


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21VE01291
Date de la décision : 25/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. ALBERTINI
Rapporteur ?: M. Paul-Louis ALBERTINI
Rapporteur public ?: Mme BOBKO
Avocat(s) : BOIARDI

Origine de la décision
Date de l'import : 07/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2021-11-25;21ve01291 ?
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