Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 23 septembre 2020 par lequel le préfet du Val-d'Oise lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant le pays à destination duquel il pourra être reconduit.
Par un jugement n° 2010128 du 19 novembre 2020, le magistrat désigné du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 17 août 2021, M. A..., représenté par Me Leboule, avocate, demande à la cour :
1° d'annuler le jugement attaqué ;
2° d'annuler l'arrêté attaqué ;
3° d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler sous astreinte de cinquante euros par jour de retard ;
4° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Leboule renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
M. A... soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a jugé que l'arrêté est suffisamment motivé ; le préfet n'a pas apprécié sa situation personnelle et notamment son état de santé ;
- l'arrêté est entaché d'un vice de procédure dès lors que le préfet ne l'a pas mis en mesure de présenter préalablement ses observations, en méconnaissance des principes généraux du droit de l'Union européenne ;
- l'arrêté méconnaît les dispositions de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que le préfet ne justifie pas de l'existence et de la lecture en audience publique ou de la notification de la décision de la cour nationale du droit d'asile rejetant sa demande ;
- l'arrêté méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il réside sur le territoire français depuis 2018, qu'il justifie ainsi d'une insertion sociale dans la société française et de la reconstitution de ses attaches personnelles sur le territoire, et qu'il souffre d'une pathologie grave prise en charge en France ;
- l'arrêté méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il est atteint d'une pathologie dont le défaut de prise en charge médicale pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et dont le traitement n'est pas disponible dans son pays d'origine.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Bouzar, premier conseiller.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant malien né le 31 décembre 1972 à Diboli (République du Mali), est entré en France le 1er octobre 2018. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision du 30 octobre 2019 de l'Office de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par la cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 5 février 2020. Par un arrêté du 23 septembre 2020, le préfet du Val-d'Oise a pris à son encontre une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant le pays à destination duquel il pourra être reconduit. M. A... relève appel du jugement du 19 novembre 2020 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. Aux termes de l'article L. 511-1 alors applicable du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. ' L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / (...) / 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 743-1 et L. 743-2, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité. (...). / (...) / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. (...) / Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger rejoint le pays dont il possède la nationalité ou tout autre pays non membre de l'Union européenne avec lequel ne s'applique pas l'acquis de Schengen où il est légalement admissible ".
3. En premier lieu, la décision par laquelle le préfet du Val-d'Oise a obligé M. A... à quitter le territoire français comporte les considérations de droit et de fait qui la fondent. Elle précise notamment que, compte tenu de la décision de la CNDA du 5 février 2020 notifiée à l'intéressé le 13 mai 2020, il ne peut pas prétendre au renouvellement de l'attestation de demande d'asile prévue à l'article R. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que son épouse et ses enfants résident au Mali, qu'il n'entre dans aucun cas d'attribution d'un titre de séjour de plein droit et qu'il n'établit pas être exposé à des peines ou à des traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ainsi, alors même que le préfet n'a pas fait mention de son état de santé, information dont il n'est pas établi au demeurant qu'elle a été portée à sa connaissance, M. A... n'est fondé ni à soutenir que la décision est insuffisamment motivée ni que le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation. Enfin, à supposer que M. A... conteste également que la décision fixant le pays de destination est insuffisamment motivée, le moyen manque en fait.
4. En deuxième lieu, il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne que le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union. Ce droit implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne.
5. Toutefois, dans le cas prévu au 6° du I de l'article L. 511-1 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, où la décision faisant obligation de quitter le territoire français est prise après que la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire ont été définitivement refusés à l'étranger, ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 743-2, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité, l'obligation de quitter le territoire français découle nécessairement du défaut de reconnaissance de cette qualité ou de ce bénéfice. Le droit d'être entendu n'implique alors pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu à l'occasion de l'examen de sa demande de reconnaissance de sa qualité de réfugié. En effet, lorsqu'il sollicite la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection internationale, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, l'intéressé ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement du territoire français. Il lui appartient, à l'occasion du dépôt de sa demande d'asile, lequel doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles, et notamment celles de nature à permettre à l'administration d'apprécier son droit au séjour au regard d'autres fondements que celui de l'asile. Le droit de l'intéressé d'être entendu, ainsi satisfait avant que n'intervienne le refus de la reconnaissance de la qualité de réfugié, n'impose pas à l'autorité administrative de le mettre à même de réitérer ses observations ou de présenter de nouvelles observations, de façon spécifique, sur l'obligation de quitter le territoire français qui est prise en conséquence du refus définitif de reconnaissance de la qualité de réfugié ou du bénéfice de la protection subsidiaire.
6. En l'espèce, la décision faisant obligation de quitter le territoire français a été prise après que la reconnaissance de la qualité de réfugié a été définitivement refusée à M. A.... Par conséquent, la circonstance qu'il n'a pas été invité à formuler des observations avant l'édiction de l'arrêté contesté ne permet pas de le regarder comme ayant été privé de son droit à être entendu. Ce moyen doit dès lors être écarté.
7. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 743-1 alors applicable du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, dans le délai prévu à l'article L. 731-2 contre une décision de rejet de l'office, soit jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci. (...) ".
8. Il résulte de ces dispositions que M. A... détenait le droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la cour nationale du droit d'asile, qui a eu lieu le 5 février 2020. Par suite, le préfet du Val-d'Oise a pu, sans commettre d'erreur de droit, adopter à son encontre une obligation de quitter le territoire français le 23 septembre 2020, sans que M. A... puisse utilement soutenir que la fiche Télemofpra produite par le préfet devant le tribunal ne saurait établir la date de notification de cette décision.
9. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; ". Si M. A... qu'il est atteint d'une pathologie dont le défaut de prise en charge médicale pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et dont le traitement n'est pas disponible dans son pays d'origine, il ne produit pas la moindre pièce permettant à la cour d'apprécier le bien-fondé de son moyen, lequel doit par suite être écarté.
10. En cinquième lieu, M. A... invoque les mêmes arguments à l'appui de son moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ce moyen doit, pour les mêmes motifs, être écarté.
11. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Si M. A..., entré en France à la fin de l'année 2018, soutient qu'il justifie ainsi d'une insertion sociale dans la société française, de la reconstitution de ses attaches personnelles sur le territoire et qu'il souffre d'une pathologie grave prise en charge en France, ces circonstances, à les supposer établies, ne permettent pas de considérer que le préfet, en adoptant l'arrêté contesté, a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a été pris, alors par ailleurs qu'il ressort des pièces du dossier que l'épouse de M. A... et leurs cinq enfants résident au Mali.
12. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée, y compris en ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
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N° 21VE02457