Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E... B... C... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 21 janvier 2021 par lequel le préfet du Val-d'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, et d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ou à tout le moins de réexaminer sa situation sous couvert d'une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement à intervenir, et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 2102131 du 14 septembre 2021, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé l'arrêté du 21 janvier 2021 par lequel le préfet du Val-d'Oise a refusé d'admettre M. B... C... au séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours (article 1er), a enjoint au préfet du Val-d'Oise de réexaminer sa demande de titre de séjour, dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement (article 2), a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser à l'intéressé sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative (article 3) et a rejeté le surplus des conclusions de la requête (article 4).
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 15 octobre 2021, le Préfet du Val-d'Oise demande à la cour d'annuler ce jugement et de rejeter la demande de première instance de M. B... C....
Il soutient que le tribunal administratif a entaché son jugement d'une erreur de droit et de fait en considérant que l'intéressé justifie de son lien de filiation avec son enfant de nationalité française.
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 janvier 2022, M. B... C... représenté par Me Kombe, avocat, demande à la cour de rejeter la requête du préfet du Val-d'Oise, à titre principal de lui délivrer le titre de séjour sollicité, à titre subsidiaire de réexaminer sa demande et de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens soulevés par le préfet ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code civil ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... C..., ressortissant congolais né le 23 août 1994 à Kinshasa (RDC), déclare être entré en France en novembre 2017. Il a sollicité le 3 novembre 2020 son admission au séjour en invoquant le bénéfice du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet du Val-d'Oise a, par l'arrêté du 21 janvier 2021, rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sous trente jours et a fixé le pays de destination. Le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a, par un jugement du 14 septembre 2021, annulé l'arrêté du préfet du Val-d'Oise du 21 janvier 2021 en tant qu'il a rejeté sa demande de titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français sous trente jours. Ce dernier fait appel de ce jugement.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. D'une part, aux termes du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté litigieux : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée ; (...) ".
3. D'autre part, aux termes de l'article L. 111-6, alors en vigueur, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, recodifié à l'article L. 811-2 du même code : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil. / (...) ". L'article 47 du code civil, dans sa rédaction alors applicable, dispose que : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. ". Il résulte de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties.
4. Enfin, il n'appartient pas aux autorités administratives françaises de mettre en doute le bien-fondé d'une décision rendue par une autorité juridictionnelle étrangère, hormis le cas où le document produit aurait un caractère frauduleux.
5. Le préfet du Val-d'Oise reprend en appel le moyen selon lequel l'acte de naissance du 3 décembre 2020 de M. A... se disant M. B... C... revêt un caractère frauduleux et qu'il ne justifie pas par les autres documents produits de son identité ni, par voie de conséquence, de son lien de filiation avec l'enfant Jason, né le 2 juin 2019 et de nationalité française, dont il prétend être le père.
6. Le requérant a produit devant le tribunal, outre l'acte de naissance du 3 décembre 2020 légalisé par l'ambassade de la RDC dont l'authenticité est contestée, une copie du passeport qui lui a été délivré par les autorités congolaises le 29 mai 2019 et n'a donc pas été établi sur la base de l'acte de naissance contesté, qui lui est postérieur, ainsi que, en appel, la copie intégrale de son acte de naissance dressé le 17 mars 2021 par le service de l'état civil de la commune de Matete suivant un jugement supplétif rendu le 9 février 2021 par le tribunal de paix de Kinshasa/Matete et son certificat de non appel daté du 17 mars suivant. L'authenticité de ces derniers documents n'est pas contestée et leur caractère frauduleux ne ressort pas des pièces du dossier. Dans ces conditions, M. B... C... établit son identité et, par suite, sa filiation avec l'enfant Jason, né le 2 juin 2019 et de nationalité française, qu'il a reconnu par anticipation le 5 avril 2019, et dont il produit l'acte de naissance du 3 novembre 2020. C'est donc sans commettre d'erreur de droit ni d'erreur de fait que le tribunal administratif a jugé qu'en lui refusant le bénéfice des dispositions précitées du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au motif qu'il n'établissait pas cette filiation, le préfet du Val-d'Oise avait méconnu ces dispositions.
7. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Val-d'Oise n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé l'arrêté du 21 janvier 2021.
Sur les conclusions de M. B... C... à fin d'injonction :
8. Eu égard à la confirmation du motif de l'annulation retenu par le tribunal administratif de Cergy-Pontoise, le présent arrêt n'implique pas nécessairement que le préfet du Val-d'Oise délivre à M. B... C... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ". L'annulation prononcée par le tribunal ayant déjà été assortie d'une injonction de réexamen de sa demande dans un délai de deux mois à compter de sa notification qu'il appartient au préfet du Val-d'Oise d'exécuter, il n'y a pas lieu de réitérer cette injonction en appel. Compte tenu des motifs qui précèdent, les conclusions à fin d'injonction présentées par M. B... C... ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les conclusions de M. B... C..., présentées au titre des frais de l'instance :
9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement à M. B... C... de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête du Préfet du Val-d'Oise est rejetée.
Article 2 : L'État versera à M. B... C... la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions à fin d'injonction présentées en appel par M. B... C... sont rejetées.
Article 4 : La présent arrêt sera notifié adressée au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. E... B... C....
Copie en sera adressée au préfet du Val-d'Oise,
Délibéré après l'audience du 24 novembre 2022, à laquelle siégeaient :
M. Even, président de chambre,
Mme Bruno-Salel, présidente-assesseure,
Mme Houllier, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 décembre 2022.
La rapporteure,
C. D...
Le président,
B. EVEN
La greffière,
C. RICHARD
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
N° 21VE02821 2