Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L'EARL Elevage de Chantepie a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 16 avril 2018 par laquelle le maire de la commune de Feucherolles a fait opposition à sa déclaration préalable déposée en vue de l'édification d'un abri pour chevaux sur un terrain sis rue du Valmartin, ensemble la décision rejetant implicitement son recours gracieux contre cette première décision.
Par un jugement n° 1805609 du 23 octobre 2020, le tribunal administratif de Versailles a annulé ces décisions et enjoint au maire de la commune de Feucherolles de prendre une décision de non-opposition à la déclaration préalable de l'EARL Elevage de Chantepie dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 4 décembre 2020, la commune de Feucherolles, représentée par Me Corneloup, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rejeter la demande présentée par l'EARL Elevage de Chantepie devant le tribunal administratif de Versailles ;
3°) de mettre à la charge de l'EARL Elevage de Chantepie une somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les travaux envisagés par l'EARL Elevage de Chantepie méconnaissaient les dispositions des articles N1 et N2 du règlement du plan local d'urbanisme applicable en zone N ;
- ils méconnaissaient aussi les orientations d'aménagement et de programmation n° 10 et 11 du plan local d'urbanisme ;
- elle sollicite en tout état de cause une substitution de motifs, dès lors que ces travaux méconnaissaient les articles 153-2, 153-4, 154-1 et 158 du règlement sanitaire départemental et l'article N 9 du règlement du plan local d'urbanisme.
Par un mémoire en défense, enregistré le 11 janvier 2023, l'EARL Elevage de Chantepie, représentée par Me Le Roy, avocate, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens de la commune ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- les conclusions de Mme Moulin-Zys, rapporteure publique,
- et les observations de Me Calvo pour la commune de Feucherolles.
Considérant ce qui suit :
1. L'EARL Elevage de Chantepie, qui exploite un élevage de chevaux sur le territoire de la commune de Feucherolles sur un espace de pâturage situé rue du Valmartin, a déposé, le 21 mars 2018, une déclaration préalable en vue de la réalisation d'un abri à chevaux d'une surface de 15 mètres carrés sur une parcelle cadastrée section AL n° 31. Par une décision du 16 avril 2018, le maire de la commune de Feucherolles s'est opposé à cette déclaration. L'EARL a formé un recours gracieux contre cette première décision sur lequel le silence gardé par l'administration a fait naître une décision implicite de rejet. La commune de Feucherolles relève appel du jugement du 23 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Versailles a annulé ces décisions et lui a enjoint de prendre une décision de non opposition à la déclaration préalable de l'EARL Elevage de Chantepie dans un délai d'un mois à compter de la notification de ce jugement.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. Aux termes de l'article N 1 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Feucherolles relatif aux occupations et utilisations du sol interdites : " Toute construction nouvelle est interdite en zone N, à l'exception des constructions et installations et aménagements autorisés à l'article 2. / En zone N et Nh, : Toute construction est interdite dans une bande de 6 mètres, le long et de part et d'autre du bord des cours d'eau présents sur la commune (ru des Nouës, ru de Buzot, ru des Pierres, Etang notamment) ". Aux termes de l'article N 2 relatif aux occupations des sols soumises à des conditions particulières du même règlement : " Sont autorisées sous condition : Dans les zones N, les constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs ou à des services publics, dès lors qu'elles ne sont pas incompatibles avec l'exercice d'une activité agricole, pastorale ou forestière et qu'elles ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages ".
3. Aux termes du point 2.1 relatif à la protection des massifs boisés de plus de 100 hectares : " En application du Schéma Directeur de la Région Ile-de-France (SDRIF), dans la bande de protection des lisières des bois et forêts de plus de 100 ha mentionnée sur le document graphique, hors site urbain constitué, toute construction nouvelle est interdite sauf celles liées à une exploitation agricole. Sont autorisées les extensions des constructions existantes à condition qu'elles ne soient pas réalisées en direction du massif forestier sauf : / - celles liées à l'exploitation agricole ; - si la construction concernée est implantée sur une parcelle séparée du massif boisé par une voie ouverte à la circulation routière. / A l'intérieur des sites urbains constitués, mentionnées sur le document graphique, toute construction nouvelle est interdite dans une bande de 15 m des lisières sauf celles liées à l'exploitation agricole ". Ces dispositions, qui se bornent à rappeler les énonciations du schéma directeur de la région Ile de France, sans prise en compte des spécificités de la zone N et répliquées telles quelles dans le règlement applicable aux autres zones du plan local d'urbanisme de la commune de Feucherolles, sans distinction et sans prise en compte des spécificités et des destinations de ces zones, ne peuvent être regardées comme ayant créé une seconde catégorie de constructions nouvelles autorisées en zone N.
4. Il est constant que l'abri pour chevaux envisagé par l'EARL Elevage de Chantepie ne constitue pas une construction ou une installation nécessaire à un équipement collectif ou à un service public, dont la construction pouvait être autorisée sur la parcelle AL n° 31, située en zone N. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal s'est fondé sur les dispositions précitées pour annuler la décision du 16 avril 2018 du maire de la commune de Feucherolles.
5. Toutefois, il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par l'EARL de Chantepie devant le tribunal administratif de Versailles.
Sur la légalité de la décision du 16 avril 2018 :
6. Aux termes de l'article L. 151-2 du code de l'urbanisme : " Le plan local d'urbanisme comprend : / 1° Un rapport de présentation / (...) / ". Aux termes de l'article L. 151-4 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " Le rapport de présentation explique les choix retenus pour établir le projet d'aménagement et de développement durables, les orientations d'aménagement et de programmation et le règlement ". Aux termes de l'article L. 152-1 de ce code : " L'exécution par toute personne publique ou privée de tous travaux, constructions, aménagements, plantations, affouillements ou exhaussements des sols, et ouverture d'installations classées appartenant aux catégories déterminées dans le plan sont conformes au règlement et à ses documents graphiques. / Ces travaux ou opérations sont, en outre, compatibles, lorsqu'elles existent, avec les orientations d'aménagement et de programmation ".
7. Pour s'opposer à la déclaration préalable déposée par l'EARL Elevage de Chantepie, le maire de la commune de Feucherolles s'est fondée sur l'atteinte portée par le projet au cône de vue identifié dans les documents graphiques du règlement du plan local d'urbanisme, sur l'atteinte portée à la réalisation de l'orientation d'aménagement et de programmation n° 11 du plan local d'urbanisme et sur la méconnaissance, par le projet, des dispositions combinées des articles N1 et N2 du règlement de la zone N du plan local d'urbanisme.
8. Il ressort des pièces du dossier que l'abri envisagé, de taille modeste et implanté à l'aplomb des arbres entre deux zones boisées, n'affecte pas le cône de vue sur la plaine de Versailles. Pour les mêmes motifs, il ne porte pas atteinte à l'orientation d'aménagement et de programmation n° 11 du plan local d'urbanisme prévoyant que la parcelle AL n° 31 soit traitée comme champs cultivés en openfield. Néanmoins, il résulte du point 4 du présent arrêt que cet abri, qui n'est pas une construction et ou une installation nécessaire à un équipement collectif ou à un service public, ne pouvait être implanté en zone N en application des articles N1 et N2 combinés du règlement du plan local d'urbanisme. Il ressort des pièces du dossier que le maire aurait pris la même décision en se fondant sur ce seul motif. Dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner la demande de substitution de motifs présentée par la commune, l'EARL Elevage du Chantepie n'était pas fondée à demander l'annulation de la décision du 16 avril 2018 portant opposition à sa déclaration préalable de travaux et de la décision rejetant son recours gracieux contre cette première décision.
9. Il résulte de ce qui précède que la commune de Feucherolles est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a annulé sa décision du 16 avril 2018 et fait droit aux conclusions aux fins d'injonction de l'EARL Elevage de Chantepie
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que l'EARL Elevage de Chantepie demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'EARL Elevage de Chantepie la somme que la commune de Feucherolles demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Versailles du 23 octobre 2020 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par l'EARL Elevage de Chantepie devant le tribunal administratif de Versailles est rejetée.
Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Feucherolles et à l'EARL Elevage de Chantepie.
Délibéré après l'audience du 19 janvier 2023, à laquelle siégeaient :
M. Albertini, président de chambre,
M. Mauny, président assesseur,
Mme Villette, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 février 2023.
La rapporteure,
A. A...Le président,
P.-L. ALBERTINI La greffière,
S. DIABOUGA
La République mande et ordonne au préfet des Yvelines en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
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N° 20VE03252