Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... C... et M. B... C... ont demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 2 mai 2019 par lequel le maire de la commune du Vésinet leur a délivré un certificat d'urbanisme opérationnel négatif, d'enjoindre au maire du Vésinet de statuer à nouveau sur leur demande de certificat d'urbanisme, dans un délai de deux mois à compter du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et de mettre à la charge de la commune du Vésinet une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1905064 du 3 décembre 2021, le tribunal administratif de Versailles a rejeté leurs demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés le 4 février 2022, le 19 décembre 2022 et le 3 août 2023, M. et Mme C..., représentés par Me Ramdenie, avocat, demandent à la cour dans le dernier état de leurs écritures :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au maire du Vésinet de statuer à nouveau sur leur demande de certificat d'urbanisme, dans un délai de deux mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de la commune du Vésinet la somme de 6 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- l'arrêté est illégal par voie d'exception de l'illégalité du classement de la parcelle AO 254 en zone UG ;
- il est illégal dès lors qu'il se fonde sur l'article UG 5 du règlement du plan local d'urbanisme relatif à la superficie minimale des terrains inapplicable, dès lors que la commune ne peut se prévaloir de l'article L. 151-20 du code de l'urbanisme sans avoir modifié son plan local d'urbanisme et justifié le maintien de cette règle ;
- cet article L. 151-20 du code de l'urbanisme porte en tout état de cause sur une règle de coefficient d'occupation des sols et non sur une règle permettant d'imposer une superficie minimale des terrains pour construire.
Par un mémoire en défense et des mémoires complémentaires enregistrés le 12 mai 2022, le 24 janvier 2023 et le 20 septembre 2023, la commune du Vésinet, représentée par Me Lamorlette, avocat, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 500 euros soit mise à la charge de M. et Mme C... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La commune soutient que les moyens des requérants ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 19 septembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 20 octobre 2023, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Aventino,
- les conclusions de M. Frémont, rapporteur public,
- et les observations de Me Mariage pour les consorts C... et de Me Estellon pour la commune du Vésinet.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme C... ont sollicité le 4 mars 2019 un certificat d'urbanisme opérationnel, sur le fondement du b) de l'article L 410-1 du code de l'urbanisme, en vue de la construction d'une maison à usage d'habitation sur un terrain de 1 116 m², cadastré AO n° 254, situé 12 route de la Plaine au Vésinet, classé en zone UG du plan local d'urbanisme. Le maire du Vésinet a, par un arrêté du 2 mai 2019, délivré un certificat d'urbanisme négatif. Par un jugement du 3 décembre 2021, dont M. et Mme C... font appel, le tribunal administratif de Versailles a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de cet arrêté et à ce qu'il soit enjoint au maire du Vésinet de statuer à nouveau sur leur demande de certificat d'urbanisme.
Sur la légalité de l'arrêté du 2 mai 2019 et les conclusions à fin d'injonction :
2. En vertu d'un principe général, il incombe à l'autorité administrative de ne pas appliquer un règlement illégal. Ce principe trouve à s'appliquer, en l'absence même de toute décision juridictionnelle qui en aurait prononcé l'annulation ou les aurait déclarées illégales, lorsque les dispositions d'un document d'urbanisme, ou certaines d'entre elles si elles en sont divisibles, sont entachées d'illégalité, sauf si cette illégalité résulte de vices de forme ou de procédure qui ne peuvent plus être invoqués par voie d'exception en vertu de l'article L. 600-1 du code de l'urbanisme. Ces dispositions doivent ainsi être écartées, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, par l'autorité chargée de délivrer des certificats d'urbanisme ou des autorisations d'utilisation ou d'occupation des sols, qui doit alors se fonder, pour statuer sur les demandes dont elle est saisie, sur les dispositions pertinentes du document immédiatement antérieur ou, dans le cas où celles-ci seraient elles-mêmes affectées d'une illégalité dont la nature ferait obstacle à ce qu'il en soit fait application, sur le document encore antérieur ou, à défaut, sur les règles générales fixées par les articles L. 111-1 et suivants et R. 111-1 et suivants du code de l'urbanisme.
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 151-9 du code de l'urbanisme : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger (...) ". Aux termes de l'article R. 151-17 du code de l'urbanisme : " Le règlement délimite, sur le ou les documents graphiques, les zones urbaines (...). Il fixe les règles applicables à l'intérieur de chacune de ces zones dans les conditions prévues par la présente section ". Aux termes des dispositions de l'article R. 151-18 du code de l'urbanisme : " Les zones urbaines sont dites " zones U ". Peuvent être classés en zone urbaine, les secteurs déjà urbanisés et les secteurs où les équipements publics existants ou en cours de réalisation ont une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter ".
4. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.
5. Il ressort des pièces du dossier, notamment du rapport de présentation du plan local d'urbanisme applicable au projet, que cinq zones urbaines ont été délimitées au sein de la commune du Vésinet, au regard des formes urbaines en présence, à la suite d'une analyse des typologies bâties et des caractéristiques morphologiques du tissu urbain. Parmi ces zones figurent la zone UF et la zone UG. La zone UF correspond aux quartiers pavillonnaires au sein de la ville-parc, avec un secteur UFa en frange du centre-ville et un secteur UFb sur un parcellaire plus resserré. Cette zone reprend pour partie les zones UHb et UHc de l'ancien plan d'occupation des sols mais a été ajustée pour tenir compte de la spécificité de certains grands terrains repérés, ainsi classés en zone UG. Cette zone UG correspond aux quartiers résidentiels les plus emblématiques de cette ville-parc conçue au XIXème siècle. Elle comprend un secteur UGa pour les terrains les plus vastes, aux caractères d'origine de la ville-parc encore présents. Elle se caractérise par la diversité, la qualité architecturale et l'importance des volumes bâtis des maisons, demeures et villas. La trame parcellaire de cette zone comprend de grands terrains sur lesquels des parcs, jardins, espaces verts et arbres remarquables sont présents et à préserver au titre du patrimoine et de la biodiversité. Elle se caractérise également par la composition urbaine des lieux, en lien étroit entre la trame des pelouses, coulées vertes et réseaux de lacs et de rivières. A ce titre, le règlement précise que cette zone comprend " notamment " les terrains situés en bordure de cette trame verte et bleue. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, il n'en résulte pas que pour être classées en zone UG, les parcelles doivent nécessairement jouxter la trame des pelouses, coulées vertes ou le réseau des lacs et rivières.
6. Il ressort des photographies et des plans produits, que la parcelle d'assiette du certificat litigieux cadastrée AO n° 254 d'une superficie de 1 116 m² est issue du détachement d'une propriété plus vaste, accueille un chêne rouvre identifié comme arbre remarquable par le plan local d'urbanisme et s'inscrit au sein d'un secteur situé au sud-est de la commune, qui concentre les parcelles les plus vastes supportant des grandes bâtisses classées, ainsi que des parcs et arbres protégés et pour certaines des jardins " remarquables " protégés au titre de l'aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine. Par suite, compte tenu du parti d'urbanisme retenu et des caractéristiques du secteur au sein duquel la parcelle en litige est incluse, dont elle participe à la cohérence, qui constitue l'un des quartiers les plus emblématiques de la ville-parc, son classement en zone UG n'est ni fondé sur des faits matériellement inexacts, ni entaché d'une erreur manifeste d'appréciation. En outre, la circonstance que la commune aurait également pu retenir un classement en zone urbanisée UF, à la supposer établie, ne peut être utilement invoquée à l'encontre du classement contesté. Il en va de même de la circonstance que cette parcelle était antérieurement classée en zone UHb de l'ancien plan d'occupation des sols de la commune, alors en outre que comme il a été dit au point 5, la commune justifie l'évolution de ce zonage pour prendre en compte la spécificité de certains grands terrains repérés. Par suite, le moyen tiré de l'exception d'illégalité du plan local d'urbanisme de la commune, en ce qu'il classe la parcelle en zone UG, doit être écarté.
7. En deuxième lieu, aux termes des dispositions de l'article UG 5 du règlement du plan local d'urbanisme relatif à la superficie minimale des terrains constructibles approuvé le 13 février 2014 : " 1. Dispositions générales - La superficie minimale des terrains est fixée à 1 200 m2, portés à 2 000 m2 en secteur UGa. (...) ".
8. Postérieurement à l'adoption de cet article du règlement du plan local d'urbanisme, les dispositions de l'article L. 123-1-5 du code de l'urbanisme sur lesquelles il se fonde ont été abrogées par le I de l'article 157 de la loi susvisée du 24 mars 2014. Ainsi, à compter de la publication de cette loi au Journal officiel de la République française, le 26 mars 2014, les règles des plans locaux d'urbanisme fixant une taille minimale pour qu'un terrain soit constructible, de même que celles fixant un coefficient d'occupation des sols ne pouvaient plus, en principe, être opposées aux autorisations d'urbanisme déposées à compter de cette date. Toutefois, l'article 158 de la loi du 24 mars 2014 a également modifié l'article L. 123-1-11 du code de l'urbanisme, devenu l'article L. 151-20, afin d'y insérer le premier alinéa suivant qui disposait, à la date de la décision attaquée : " Dans les secteurs bâtis des zones urbaines issus d'une opération d'aménagement d'ensemble d'un domaine boisé, antérieure au XXème siècle, et ayant conservé leur caractère remarquable de parc, le plan local d'urbanisme peut comporter des dispositions réglementant la surface de plancher des constructions en fonction de la taille des terrains si la préservation de la qualité des boisements et espaces verts le justifie. ". Il ressort des travaux préparatoires à leur adoption que ces dispositions, issues d'un amendement parlementaire, visent à protéger le caractère de certains sites remarquables situés notamment au " Vésinet, dessiné par Alphonse Pallu ", " zones ouvertes à tous, promeneurs d'Ile de France et d'ailleurs ", lesquelles " dotées d'un bâti historique d'une cohérence architecturale exceptionnelle constituent un patrimoine qui appartient à tous les Français. " dès lors que " dans certains cas, l'absence de coefficient d'occupation des sols ou de taille minimale peut provoquer des bouleversements dans des zones qui abritent pourtant un patrimoine d'exception ". Il résulte de ces dispositions que certains plans locaux d'urbanisme, dans les conditions qu'elles fixent, peuvent continuer de réglementer la surface de plancher des constructions en fonction de la taille des terrains et partant, en fixant à zéro la surface de plancher constructible en deçà d'une certaine surface au sol, de réglementer la surface minimale des terrains constructibles.
9. Il ressort des pièces du dossier que la zone UG est une zone urbaine bâtie issue d'une opération d'aménagement d'ensemble d'un domaine boisé, antérieure au XXème siècle, ayant conservé son caractère remarquable de parc. En outre, il ressort du rapport de présentation du plan local d'urbanisme que cette règle est justifiée par la nécessité de préserver l'intérêt paysager exceptionnel et unique de la ville-parc, c'est-à-dire ses boisements et espaces verts au sens des dispositions précitées de l'article L. 151-20 du code de l'urbanisme. Il en résulte que, sans qu'il ne soit nécessaire pour le conseil municipal du Vésinet de réviser ou modifier le rapport de présentation sur ce point et de manifester ainsi sa volonté expresse de mettre en œuvre ces mesures facultatives, la règle édictée à l'article UG 5 du plan local d'urbanisme du Vésinet a conservé un fondement légal dans les dispositions de l'article L. 123-1-11 du code de l'urbanisme devenu article L. 151-20 du code de l'urbanisme. Dès lors, le maire du Vésinet a pu, sans commettre d'erreur de droit, se fonder sur cet article UG 5 pour refuser de délivrer à M. et Mme C... un certificat d'urbanisme pour la construction d'une maison à usage d'habitation sur leur parcelle cadastrée section AO n°254, dont la superficie est inférieure à 1 200 m².
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté leurs demandes.
Sur les frais liés au litige :
11. La commune du Vésinet n'étant pas partie perdante à la présente instance, la demande présentée par M. et Mme C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doit être rejetée. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. et Mme C... une somme 2 000 euros au titre des frais engagés par la commune du Vésinet et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme C... est rejetée.
Article 2 : M. et Mme C... verseront une somme de 2 000 euros à la commune du Vésinet en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C... et à la commune du Vésinet.
Délibéré après l'audience du 25 janvier 2024, à laquelle siégeaient :
M. Even, président de chambre,
Mme Aventino, première conseillère,
M. Cozic, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 08 février 2024.
La rapporteure,
B. AVENTINOLe président,
B. EVEN
La greffière,
I. SZYMANSKI
La République mande et ordonne au préfet des Yvelines en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
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N° 22VE00243