Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise :
1°) d'annuler la décision implicite résultant du silence gardé par l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) sur sa réclamation préalable du 12 janvier 2018 ;
2°) de condamner l'AP-HP à lui verser la somme totale de 3 395,82 euros, assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation des intérêts, en réparation des préjudices financier et moral qu'il estime avoir subis du fait de la diminution de son indemnité forfaitaire technique pour les années 2016 et 2017 ;
3°) d'enjoindre à l'AP-HP de procéder à la liquidation des sommes sollicitées dans un délai de dix jours à compter de la notification du jugement à intervenir sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge l'AP-HP la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1805123 du 4 octobre 2021, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés le 3 décembre 2021 et le 26 juin 2023, M. B..., représenté par Me Grimaldi, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler la décision implicite de rejet de sa demande préalable ;
3°) de condamner l'AP-HP à lui verser la somme de 3 395,82 euros, somme à parfaire, ainsi que les intérêts au taux légal afférents ;
4°) d'enjoindre à l'AP-HP de procéder à la liquidation des sommes sollicitées dans un délai de dix jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge du l'AP-HP la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'AP-HP a commis une faute de nature à engager sa responsabilité en diminuant illégalement l'indemnité forfaitaire technique qui lui était attribuée, sans raison relative à sa valeur professionnelle ;
- il demande l'indemnisation de son préjudice financier à hauteur de 3 087,11 euros et de son préjudice moral à hauteur de 308,71 euros.
Par un mémoire en défense, enregistré le 1er avril 2022, l'AP-HP conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. B... la somme de 1 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la requête est irrecevable dès lors qu'elle ne contient pas de moyens d'appel ;
- les conclusions à fin d'annulation de la décision implicite rejetant la demande préalable de M. B... sont irrecevables ;
- l'AP-HP n'a commis aucune faute ;
- M. B... n'a pas prouvé la réalité et l'étendue de son préjudice ; il ne détaille pas les modalités de calcul de son préjudice financier ; il ne démontre pas la réalité de son préjudice moral.
Par ordonnance du 12 décembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 28 décembre 2023 en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le décret 93-148 du 3 février 1993 ;
- le décret n°2013-102 du 29 janvier 2013 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Pham, première conseillère,
- les conclusions de Mme Viseur-Ferré, rapporteure publique,
- et les observations de Me Guardiola, pour l'AP-HP.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B..., adjoint des cadres techniques puis nommé technicien supérieur hospitalier de première classe, affecté à l'hôpital Antoine-Béclère à Clamart, a adressé à la direction de l'AP-HP une demande en date du 12 janvier 2018 tendant à l'indemnisation des préjudices matériel et moral qu'il estime avoir subis du fait de la baisse du taux de son indemnité forfaitaire technique pour les années 2016 et 2017. La direction de l'AP-HP a implicitement rejeté cette réclamation. M. B... relève régulièrement appel du jugement n° 1805123 du 4 octobre 2021 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet de sa demande préalable du 12 janvier 2018, ainsi qu'à la condamnation de l'AP-HP à lui verser la somme totale de 3 395,82 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis.
Sur les fins de non-recevoir soulevée par l'administration :
2. En premier lieu, dans sa requête d'appel, M. B... cite le jugement attaqué dont il demande l'annulation et apporte des pièces et arguments nouveaux permettant d'établir la réalité de la diminution de l'indemnité forfaitaire technique qui lui a été accordée au titre des années 2016 et 2017. Par suite, le ministre n'est pas fondé à soutenir que cette requête doit être rejetée comme irrecevable pour défaut de moyens d'appel.
3. En deuxième lieu, la décision par laquelle le directeur de l'AP-HP a implicitement rejeté la demande indemnitaire du requérant a eu pour seul effet de lier le contentieux à l'égard de l'objet de la demande de M. B... qui, en formulant les conclusions indemnitaires, a donné à l'ensemble de sa requête le caractère d'un recours de plein contentieux. Par suite, les conclusions aux fins d'annulation de cette décision implicite de rejet présentées par M. B... sont irrecevables.
Sur le bien-fondé de la demande :
4. Aux termes de l'article 1er du décret du 29 janvier 2013 relatif à l'attribution d'une indemnité forfaitaire technique aux agents du corps des techniciens et techniciens supérieurs hospitaliers : " Les techniciens et techniciens supérieurs titulaires ou stagiaires régis par le décret du 27 juin 2011 susvisé bénéficient d'une indemnité forfaitaire technique payable mensuellement à terme échu ". Aux termes de l'article 2 du même décret : " Le montant mensuel de l'indemnité forfaitaire technique est arrêté par l'autorité investie du pouvoir de nomination en fonction de la valeur professionnelle de l'agent. / Ce montant est fixé (...) dans la limite de 40 % du traitement mensuel brut indiciaire du bénéficiaire pour les membres du corps classés dans les deuxième et troisième grades (...) ". Pour l'application de ces dispositions, la valeur professionnelle d'un agent s'apprécie en tenant compte notamment de la nature des fonctions qui lui sont confiées, des sujétions qu'elles comportent et de la technicité qu'elles exigent.
5. M. B... soutient que le taux de l'indemnité forfaitaire technique qui lui a été attribuée au titre des années 2016 et 2017 a été diminué sans motif par son nouveau supérieur hiérarchique, arrivé en 2015. Il indique avoir été victime d'attaques homophobes au sein de son service à cette époque.
6. D'une part, il résulte de l'instruction, notamment des arrêtés des années 2002 à 2012 précisant que le taux d'indemnité forfaitaire technique attribué au requérant comme adjoint des cadres techniques puis comme technicien supérieur était de 10 %, du courrier du 8 août 2016 indiquant que ce taux est porté à 2 % et des bulletins de paie du requérant produits en appel, que le taux d'indemnité forfaitaire technique attribué à M. B... au titre des années 2016 et 2017 a été substantiellement diminué par rapport aux taux perçu les années précédentes.. La baisse importante en 2016 du taux de l'indemnité forfaitaire technique attribué à M. B..., auparavant fixé à 10% depuis 2002, est donc établie.
7. D'autre part, il ressort des pièces du dossiers que les évaluations de M. B... pour les années 2016 et 2017 sont élogieuses et sa notation en constante augmentation. Le requérant a par ailleurs produit des documents établissant l'existence d'un conflit avec son supérieur hiérarchique. L'administration n'établit pas l'absentéisme allégué de M. B... de nature à justifier la diminution de son taux d'indemnité forfaitaire technique en produisant un document évoquant un arrêt-maladie et deux courriers du syndicat FO du 4 août 2016 et du 8 août 2016 indiquant que M. B... s'était vu reprocher à tort des absences identifiées, alors qu'il avait présenté tous les justificatifs requis pour démontrer que ces absences correspondaient à des temps d'activité syndicale. Ainsi, en l'absence de motif valable établi justifiant la diminution du taux d'indemnité forfaitaire technique accordé à M. B... au titre des années 2016 et 2017, ce dernier est fondé à demander l'attribution du différentiel entre les indemnités forfaitaires techniques accordées au titre des années 2016 et 2017 et l'attribution d'une indemnité forfaitaire technique au taux de 10 % au titre de ces mêmes années.
8. Compte tenu des éléments versés au dossier, l'AP-HP doit être condamnée à verser à M. B... la somme de 3 066,74 euros au titre de la perte d'indemnité subie.
9. Concernant le préjudice moral, la baisse substantielle du taux de l'indemnité forfaitaire attribué à M. B... pour les années 2016 et 2018, de façon injustifiée et sans qu'on lui en donne aucune explication, alors qu'il entretenait des relations conflictuelles avec son supérieur hiérarchique, lui a causé un préjudice moral dont il sera fait une juste appréciation en fixant l'indemnité réparatrice à la somme de 300 euros.
Sur les intérêts :
10. M. B... a droit aux intérêts au taux légal à compter de la date de réception de sa demande préalable, le 12 janvier 2018.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
11. Le présent arrêt implique nécessairement que l'AP-HP procède à la liquidation de la somme due dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu en revanche d'assortir cette injonction d'une astreinte.
12. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.
D É C I D E :
Article 1er : L'Assistance publique - Hôpitaux de Paris est condamnée à verser à M. B... la somme de 3 366,74 euros. Cette somme portera intérêt au taux légal à compter du 12 janvier 2018.
Article 2 : Il est enjoint à l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris de procéder à la liquidation de cette somme dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... et à l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris.
Délibéré après l'audience du 27 février 2024, à laquelle siégeaient :
Mme Le Gars, présidente,
M. Ablard, premier conseiller,
Mme Pham, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 mars 2024.
La rapporteure,
C. PHAM La présidente,
A.-C. LE GARS
La greffière,
S. de SOUSA
La République mande et ordonne à la ministre du travail, de la santé et des solidarités en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
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N° 21VE03226