Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
I. Par une requête enregistrée sous le n° 2106710, Mme F... B..., Mme M... G..., M. N... C..., M. D... J... et Mme K... L..., ont demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler la délibération n° 2021-30 du 31 mai 2021 par laquelle le conseil municipal de Chevreuse a accordé la protection fonctionnelle à la maire de la commune dans le cadre d'une mise en cause devant le tribunal correctionnel, et de mettre à la charge de la commune de Chevreuse la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative
II. Par une requête enregistrée sous le n° 2106712, l'association " Sauvons les Yvelines " et l'association " Patrimoine Environnement (LUR-NASSEM) " ont demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler la délibération n° 2021-30 du 31 mai 2021 par laquelle le conseil municipal de Chevreuse a accordé la protection fonctionnelle à la maire de la commune dans le cadre d'une mise en cause devant le tribunal correctionnel, et de mettre à la charge de la commune de Chevreuse la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
III. Par une requête, enregistrée sous le n° 2110754, Mme M... G..., M. N... C..., M. D... J..., Mme K... L..., M. H... I... et Mme F... B... ont demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler la délibération n° 2021-40 du 7 octobre 2021 par laquelle le conseil municipal de Chevreuse a accordé la protection fonctionnelle à la maire de la commune dans le cadre d'une mise en cause devant le tribunal correctionnel, et de mettre à la charge de la commune de Chevreuse la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
IV. Par une requête, enregistrée sous le n° 2110755, l'association " Sauvons les Yvelines " et l'association " Patrimoine Environnement (LUR-NASSEM) " ont demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler la délibération n° 2021-40 du 7 octobre 2021 par laquelle le conseil municipal de Chevreuse a accordé la protection fonctionnelle à la maire de la commune dans le cadre d'une mise en cause devant le tribunal correctionnel, et de mettre à la charge de la commune de Chevreuse la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 2106710-2106712-2110754-2110755 du 4 décembre 2023, le tribunal administratif de Versailles a, après avoir joint ces quatre affaires, rejeté les demandes présentées par l'association " Sauvons les Yvelines " et l'association " Patrimoine environnement ", et annulé les délibérations n° 2021-30 du 31 mai 2021 et n° 2021-40 du 7 octobre 2021 par lesquelles le conseil municipal de Chevreuse a accordé à Mme A... O..., maire de la commune, le bénéfice de la protection fonctionnelle.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 2 février 2024, la commune de Chevreuse demande à la cour :
1°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Versailles du 4 décembre 2023 ;
2°) à défaut, subsidiairement, d'ordonner le sursis à exécution du jugement du 4 décembre 2023 en tant qu'il prononce l'annulation de la délibération du conseil municipal de Chevreuse n° 2021-40 du 7 octobre 2021 ;
3°) et de mettre à la charge des intimés la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier en ce que les premiers juges ont écarté des débats ses écritures en défense pour irrecevabilité, sans l'avoir préalablement mise en demeure de régulariser sa représentation ;
- il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions des requêtes n° 2106710 et 2106712, tendant à l'annulation de la délibération du 31 mai 2021, dont la commune a prononcé l'abrogation ;
- en accordant la protection fonctionnelle au maire de la commune, la délibération du 7 octobre 2021 n'a pas été prise en méconnaissance de l'article L. 2123-34 du code général des collectivités territoriales ;
- les membres du conseil municipal ont été destinataires d'une note explicative de synthèse, dans le respect des dispositions de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales ;
- il n'est pas justifié qu'une demande de vote à bulletin secret aurait été présentée lors du conseil municipal du 7 octobre 2021 ; en tout état de cause, celle-ci n'a pas été présentée par un quart des membres présents, comme l'exigent les dispositions de l'article L. 2121-21 du code général des collectivités territoriales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 1er mars 2024, Mme M... G..., M. N... C..., M. D... J..., Mme K... L..., M. H... I... et Mme F... B..., représentés par Me Pitti-Ferrandi, avocat, concluent au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Chevreuse la somme de 5 000 euros à leur verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la requête en sursis à exécution est irrecevable, dès lors qu'elle a été présentée par le premier adjoint au maire, qui ne bénéficie pas d'une habilitation régulière pour ce faire ;
- les moyens soulevés par la commune de Chevreuse ne sont pas fondés, cette dernière n'invoquant aucun moyen de nature à justifier le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par le jugement qu'elle conteste.
L'avocat des requérants a, le 1er mars 2024, désigné Mme G... en qualité de représentant unique sur le fondement de l'article R. 751-3 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Cozic ;
- et les observations de Me Mariette avocat, représentant la commune de Chevreuse.
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article R. 222-25 du code de justice administrative : " Les affaires sont jugées soit par une chambre siégeant en formation de jugement, soit par une formation de chambres réunies, soit par la cour administrative d'appel en formation plénière, qui délibèrent en nombre impair. / Par dérogation à l'alinéa précédent, le président de la cour ou le président de chambre statue en audience publique et sans conclusions du rapporteur public sur les demandes de sursis à exécution mentionnées aux articles R. 811-15 à R. 811-17 ". Aux termes du second alinéa de l'article R. 222-29 du même code : " Dans le cas mentionné au second alinéa de l'article R. 222-25, le président de la cour ou le président de chambre peut décider d'inscrire l'affaire au rôle d'une chambre siégeant en formation de jugement ". Aux termes de l'article R. 811-15 du même code : " Lorsqu'il est fait appel d'un jugement du tribunal administratif prononçant l'annulation d'une décision administrative, la juridiction d'appel peut, à la demande de l'appelant, ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement si les moyens invoqués par l'appelant paraissent, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation ou la réformation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement. ".
2. La commune de Chevreuse demande à la cour, sur le fondement des dispositions de l'article R. 811-15 du code de justice administrative, de prononcer le sursis à exécution du jugement n° 2106710-2106712-2110754-2110755 du 4 décembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté les demandes présentées par l'association " Sauvons les Yvelines " et l'association " Patrimoine environnement " pour défaut d'intérêt à agir, a annulé la délibération n° 2021-30 du 31 mai 2021 par laquelle le conseil municipal de Chevreuse a accordé à Mme A... O..., maire de la commune, le bénéfice de la protection fonctionnelle, et a annulé la délibération n° 2021-40 du 7 octobre 2021 par laquelle le conseil municipal de Chevreuse a abrogé la délibération précitée et de nouveau accordé la protection fonctionnelle au maire.
Sur la fin de non-recevoir opposée en défense par les intimés à la requête en sursis à exécution :
3. Aux termes de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales : " Le maire peut, (...) par délégation du conseil municipal, être chargé, en tout ou partie, et pour la durée de son mandat : (...) 16° D'intenter au nom de la commune les actions en justice ou de défendre la commune dans les actions intentées contre elle, dans les cas définis par le conseil municipal, et de transiger avec les tiers dans la limite de 1 000 € pour les communes de moins de 50 000 habitants et de 5 000 € pour les communes de 50 000 habitants et plus (...) ". Aux termes de l'article L. 2122-26 du même code : " Dans le cas où les intérêts du maire se trouvent en opposition avec ceux de la commune, le conseil municipal désigne un autre de ses membres pour représenter la commune, soit en justice, soit dans les contrats ". Enfin, aux termes de l'article L. 2121-12 du même code : " (...) Le délai de convocation est fixé à cinq jours francs. En cas d'urgence, le délai peut être abrégé par le maire sans pouvoir être toutefois inférieur à un jour franc. / Le maire en rend compte dès l'ouverture de la séance au conseil municipal qui se prononce sur l'urgence et peut décider le renvoi de la discussion, pour tout ou partie, à l'ordre du jour d'une séance ultérieure. (...) ".
4. Il résulte des dispositions précitées que lorsque les intérêts du maire se trouvent en opposition avec ceux de la commune dans un litige donné ou pour la signature ou l'exécution d'un contrat, seul le conseil municipal est compétent pour désigner un autre de ses membres soit pour représenter la commune en justice soit pour signer le contrat ou intervenir dans son exécution. Il s'ensuit que lorsque le maire estime ne pas devoir exercer ses compétences à raison d'un conflit d'intérêts, il ne saurait désigner la personne habilitée soit à représenter la commune en justice dans un litige donné soit à signer ou exécuter un contrat que si ses intérêts ne se trouvent pas en opposition avec ceux de la commune.
5. La requête tendant à ce qu'il soit ordonné le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Versailles du 4 décembre 2023 a été présentée par la commune de Chevreuse, représentée par M. E..., premier adjoint au maire, en vertu d'une délibération du conseil municipal de Chevreuse du 31 janvier 2024 décidant d'engager la procédure de sursis à exécution, et désignant expressément l'intéressé pour représenter la commune dans le cadre de la présente instance.
6. Il ressort des pièces du dossier que les membres du conseil municipal n'ont été convoqués pour cette réunion du 31 janvier 2024 que le 29 janvier 2024. Il ressort en particulier de l'extrait du registre des délibérations de la commune que la décision d'engager la procédure de sursis à exécution devant la cour, et de désigner M. E..., premier adjoint au maire pour représenter la commune dans le cadre de cette procédure, a été prise en vue d'assurer à Mme P..., maire de la commune, le bénéfice de la protection fonctionnelle, décidée par la délibération n° 2021-40 du conseil municipal du 7 octobre 2021, annulée par le jugement du tribunal administratif de Versailles du 4 décembre 2023. Alors que, dans le cadre de la procédure pénale dont le maire fait l'objet, une audience était prévue le 2 février 2024, la commune de Chevreuse a fait valoir le risque pour le maire d'exposer des frais avant même que la cour administrative d'appel de Versailles ne statue sur l'appel formé contre le jugement en litige du tribunal administratif de Versailles.
7. Toutefois, cette seule circonstance ne saurait caractériser une situation d'urgence au sens de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales. En effet, la commune de Chevreuse n'indique pas que Mme P... ne pouvait pas assumer les frais liés à la procédure pénale dont elle fait l'objet et qu'elle ne pouvait pas, de ce fait, assurer sa défense sans le bénéfice de la protection fonctionnelle. En outre, la commune ne justifie pas de la nécessité de délibérer à la date du 31 janvier 2024, dès lors que, d'une part, elle avait déjà délibéré quelques jours plus tôt, le 20 décembre 2023, pour désigner M. E... en vue de représenter la commune dans le cadre de la procédure d'appel formé contre le jugement du tribunal administratif de Versailles du 4 décembre 2023, et que, d'autre part, l'irrégularité de la présentation de la requête de sursis à exécution pouvait être régularisée en cours d'instance, même postérieurement à la date à laquelle la fin de non-recevoir a été opposée par les intimés dans leur mémoire en défense, qui a été communiqué à la commune, et à laquelle cette dernière n'a apporté aucun élément en réplique.
8. Par suite, la délibération du conseil municipal du 31 janvier 2024 est entachée d'illégalité. La présente requête de la commune de Chevreuse est donc irrecevable et ne peut donc qu'être rejetée.
Sur les frais liés au litige :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme G..., M. C..., M. J..., Mme L..., M. I... et Mme B..., qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par la commune de Chevreuse. Il y a en revanche lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Chevreuse la somme globale de 1 500 euros, à verser ensemble à Mme G..., M. C..., M. J..., Mme L..., M. I... et Mme B..., au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la commune de Chevreuse est rejetée.
Article 2 : La commune de Chevreuse versera la somme globale de 1 500 euros à Mme G..., M. C..., M. J..., Mme L..., M. I... et à Mme B..., ensemble, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Chevreuse, ainsi qu'à Mme M... G..., en qualité de représentant unique.
Délibéré après l'audience du 10 octobre 2024, à laquelle siégeaient :
M. Even, président,
Mme Mornet, présidente-assesseure,
M. Cozic, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 novembre 2024.
Le rapporteur,
H. COZICLe président,
B. EVEN
La greffière,
S. de SOUSA
La République mande et ordonne au préfet des Yvelines, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
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N° 24VE00282