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07/01/2025 | FRANCE | N°24VE00147

France | France, Cour administrative d'appel de VERSAILLES, 4ème chambre, 07 janvier 2025, 24VE00147


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... G... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 12 décembre 2023 par lequel du préfet d'Indre-et-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé la Géorgie comme pays de destination de cette mesure d'éloignement et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans, d'annuler l'arrêté du 12 décembre 2023 par leque

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... G... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 12 décembre 2023 par lequel du préfet d'Indre-et-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé la Géorgie comme pays de destination de cette mesure d'éloignement et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans, d'annuler l'arrêté du 12 décembre 2023 par lequel le préfet d'Indre-et-Loire l'a assigné à résidence, d'enjoindre au préfet d'Indre-et-Loire de lui délivrer une carte de séjour temporaire, dans un délai de quinze jours suivant la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Rouillé-Mirza de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2305055 du 21 décembre 2023, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif d'Orléans a annulé la décision du 12 décembre 2023 du préfet d'Indre-et-Loire portant fixation du pays de destination de la mesure d'éloignement prise à l'encontre de M. F... et a rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 18 janvier 2024, M. G..., représenté par Me Rouille-Mirza, de la Selarl Equation Avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il porte rejet de l'arrêté du 12 décembre 2023 par lequel du préfet d'Indre-et-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans ;

2°) d'annuler l'arrêté du 12 décembre 2023 en tant que le préfet d'Indre-et-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans ;

3°) d'enjoindre au préfet d'Indre-et-Loire, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la décision à intervenir, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer un récépissé de demande de titre de séjour pendant le temps de cet examen ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

- il ne peut pas bénéficier, en Arménie, d'un traitement approprié à son état de santé ;

- sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public ; le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation ; en se fondant sur des inscriptions au fichier TAJ, en dehors de toute condamnation judiciaire, le préfet d'Indre et Loire commet une violation grave du principe constitutionnel de respect de la présomption d'innocence ;

- le préfet a méconnu l'autorité de la chose jugée par le tribunal le 5 janvier 2023 ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

- elle sera annulée par voie de conséquence ;

- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision attaquée sur sa situation personnelle ;

En ce qui concerne la décision de ne pas octroyer un délai de départ volontaire :

- c'est à tort que le préfet a estimé que sa présence en France constituait une menace pour l'ordre public ;

En ce qui concerne l'interdiction de retour :

- c'est à tort que le préfet a estimé que sa présence en France constituait une menace pour l'ordre public ;

- il ne peut lui être reproché de s'être maintenu en France compte tenu de son état de santé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 décembre 2024, le préfet d'Indre-et-Loire conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

M. G... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 16 juillet 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Etienvre a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... G... ressortissant arménien, né en 1987, a déclaré être entré en France le 15 mars 2018. Il a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile mais sa demande a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) le 22 novembre 2019 puis par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 28 août 2020. Sa demande de réexamen a été rejetée par l'OFPRA le 5 novembre 2020. Il a fait l'objet le 27 janvier 2020 d'un arrêté portant obligation de quitter le territoire français assorti d'une interdiction de retour. Le recours contre cette décision a été rejeté par le présent tribunal dans un jugement du 18 juin 2020, jugement confirmé par la cour administrative d'appel de Nantes par une ordonnance du 15 octobre 2020. M. F... a également fait l'objet, le 26 juin 2020, d'un arrêté portant assignation à résidence qui a été prolongé. Il a ensuite fait l'objet d'un arrêté portant obligation de quitter le territoire français assorti d'une interdiction de retour sur le territoire français édictée le 18 mars 2021. Le 10 août 2021, la préfète d'Indre-et-Loire a rejeté sa demande de titre de séjour pour raisons de santé. Par un jugement n° 2107018 du 5 janvier 2023, le tribunal administratif d'Orléans a annulé cette décision au motif que M. G... établissait que le défaut de traitement nécessité par son état de santé était susceptible d'entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité et a enjoint au préfet de réexaminer la demande de titre de séjour de M. G... dans un délai de deux mois. Le préfet d'Indre-et-Loire a interjeté appel de ce jugement. Le 7 juin 2023, M. F... a sollicité de nouveau son admission au séjour pour raisons médicales sur le fondement de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par deux arrêtés du 12 décembre 2023, le préfet d'Indre-et-Loire a, d'une part, refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, et d'autre part l'a assigné à résidence. M. F... a demandé l'annulation de ces deux arrêtés. Par jugement n° 2305055 du 21 décembre 2023, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif d'Orléans a annulé la décision du 12 décembre 2023 du préfet d'Indre-et-Loire portant fixation du pays de destination de la mesure d'éloignement prise à l'encontre de M. F... et a rejeté le surplus de sa demande. M. G... relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté sa demande d'annulation des décisions du 12 décembre 2023 par lequel du préfet d'Indre-et-Loire a refusé la délivrance de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français et lui a interdit un retour sur le territoire français pour une durée de 2 ans.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

S'agissant des conditions prévues à l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile :

2. Aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ".

3. La partie qui justifie d'un avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration venant au soutien de ses dires doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.

4. Pour rejeter à nouveau la demande de titre de séjour de M. G..., le préfet d'Indre-et-Loire a estimé que si l'état de santé de l'intéressé nécessitait une prise en charge médicale, le défaut d'une telle prise en charge ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Le préfet se prévaut, à cet égard, de l'avis émis en ce sens par le collège de médecins de l'OFII le 25 septembre 2023. Il appartient dès lors à M. G... d'apporter des éléments de preuve contraires.

5. M. F... indique souffrir de graves troubles psychiatriques en relation avec des évènements vécus dans son pays d'origine en 2006 puis en 2010.

6. Or, il ressort de l'attestation du docteur D... du 18 février 2020 que M. F... présente un état physique marqué par de nombreux stigmates d'actions violentes (cicatrices, séquelles de fracture) compatibles avec les faits de torture qu'il dit avoir subis dans son pays d'origine. Par ailleurs, le docteur C..., psychiatre qui suit le requérant depuis 2018, évoque une psychose post-traumatique avec substrat anxieux majeur comportant un enfermement psychique avec ruminations, repli sur soi, humeur dégradée et dépréciation de l'image de soi. Ce médecin précise que le requérant suit rigoureusement un traitement psychotrope assez lourd et insiste sur la nécessité d'un suivi sous peine d'une aggravation de sa pathologie pouvant mettre en péril son intégrité psychique et physique et évoque un risque auto-agressif corroboré par des idées suicidaires. Le docteur B... E... indique d'ailleurs, dans un certificat du 13 décembre 2023, qu'un " épisode suicidaire a été pris en charge par l'Hôpital de Tours en septembre 2023 ". Enfin, le médecin qui a rédigé le rapport à destination de l'OFII rappelle la nature de la pathologie psychiatrique, ses origines et estime que le suivi spécialisé doit être effectué en France et qu'un retour dans son pays d'origine présente pour le requérant un réel risque pour sa santé. Dans ces conditions, par les éléments qu'il apporte, le requérant établit que le défaut de traitement nécessité par son état de santé est susceptible d'entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité, contrairement à ce qu'a estimé le collège de médecins de l'OFII dont le sens de l'avis a été repris par la préfète d'Indre-et-Loire dans la décision attaquée. Il s'ensuit que le requérant est fondé à demander pour ce motif l'annulation de la décision attaquée.

S'agissant de la menace à l'ordre public :

7. Il ressort des termes de l'arrêté attaqué que si le préfet d'Indre-et-Loire s'est fondé sur ce que le comportement de M. G... constituait une menace pour l'ordre public pour décider de ne pas lui accorder un délai de départ volontaire, il ne s'est, en revanche, pas fondé sur un tel motif ni pour rejeter la demande de titre de séjour de l'intéressé ni même pour l'obliger à quitter le territoire français.

8. Il suit de là que M. G... est fondé, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés, à demander l'annulation de la décision par laquelle le préfet d'Indre-et-Loire a rejeté sa demande de titre de séjour, et par voie de conséquence, des décisions par lesquelles le même préfet l'a obligé à quitter sans délai le territoire français et a édicté à son encontre une interdiction de retour d'une durée de deux ans.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées par M. G... :

9. Le motif d'annulation retenu implique, seulement, qu'il soit enjoint au préfet d'Indre-et-Loire de procèder à un nouvel examen de la demande de titre de séjour de M. G... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

10. M. G... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocate peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce et sous réserve que Me Rouille-Mirza, avocate de M. G..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Rouille-Mirza de la somme de 1 500 euros.

D É C I D E :

Article 1er : L'arrêté du préfet d'Indre-et-Loire en date du 12 décembre 2023 est annulé en tant qu'il porte rejet de la demande de titre de séjour de M. G..., l'oblige à quitter sans délai le territoire français et édicte à son encontre une interdiction de retour d'une durée de deux années.

Article 2 : Le jugement n° 2305055 du 21 décembre 2023 du tribunal administratif d'Orléans est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Il est enjoint au préfet d'Indre-et-Loire de procéder, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, à un nouvel examen de la demande de titre de séjour de M. G....

Article 4 : L'Etat versera à Me Rouille-Mirza une somme de 1 500 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve que Me Rouille-Mirza renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... G..., au préfet d'Indre-et-Loire, à Me Rouille-Mirza et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 17 décembre 2024, à laquelle siégeaient :

M. Etienvre, président de chambre,

M. Pilven, président assesseur,

Mme Pham, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 janvier 2025.

Le président-assesseur,

J.-E. Pilven

Le président-rapporteur,

F. Etienvre

La greffière,

F. Petit-Galland

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

N° 24VE00147002


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de VERSAILLES
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 24VE00147
Date de la décision : 07/01/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. ETIENVRE
Rapporteur ?: M. Franck ETIENVRE
Rapporteur public ?: Mme VILLETTE
Avocat(s) : SELARL EQUATION AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 19/01/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-01-07;24ve00147 ?
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