CASSATION PARTIELLE SUR LE POURVOI DES CONSORTS X... ET Y..., PARTIES CIVILES, CONTRE UN ARRET DE LA COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE, 5EME CHAMBRE, DU 30 JANVIER 1973, QUI A RELAXE Z... (JOSEPH) DU CHEF D'ABUS DE CONFIANCE ET LES A DEBOUTEES DE LEURS DEMANDES LA COUR, VU LES MEMOIRES PRODUITS EN DEMANDE ET EN DEFENSE;
SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DE L'ARTICLE 408 DU CODE PENAL, DE L'ARTICLE 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, 931 ET 1382 DU CODE CIVIL ET DE L'ARTICLE 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, POUR DEFAUT DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE LEGALE, "EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A RELAXE Z... DES FINS D'UNE POURSUITE POUR ABUS DE CONFIANCE ET DEBOUTE LES DEMANDEURS DE LEUR ACTION CIVILE AU MOTIF QU'EN L'ETAT D'UN DOCUMENT REDIGE DE LA MAIN DE LA DAME A..., EN DATE DU 19 MARS 1968, PAR LEQUEL ELLE LUI FAISAIT DONATION DE TOUS SES TITRES, LE PREVENU QUI, AU MOYEN D'UNE PROCURATION BANCAIRE QU'ELLE LUI AVAIT CONSENTIE, S'ETAIT APPROPRIE DES TITRES ET DES SOMMES D'ARGENT POUR UN MONTANT TOTAL DE 344757877 FRANCS, N'AVAIT PAS COMMIS D'ABUS DE CONFIANCE;
"ALORS QUE, D'UNE PART, LE DOCUMENT DU 19 MARS 1968 QUI NE PORTAIT QUE SUR LES TITRES ETAIT INSUSCEPTIBLE DE RETIRER TOUT CARACTERE FRAUDULEUX A L'APPROPRIATION DES SOMMES D'ARGENT DONT LES PREMIERS JUGES CONSTATENT QU'ELLES NE PROVENAIENT PAS DE LA VENTE DES TITRES, MAIS DIRECTEMENT DU COMPTE BANCAIRE DE LA DAME A...;
"ET ALORS QUE, D'AUTRE PART, L'ARRET NE POUVAIT RETIRER TOUT CARACTERE FRAUDULEUX A L'APPROPRIATION DES TITRES EN RAISON DU DOCUMENT DU 19 MARS 1968 SANS PRECISER S'IL ETAIT ANTERIEUR OU NON A LADITE APPROPRIATION;
QUE, DU RESTE, LA SEULE CONSTATATION PAR LA COUR DE L'EXISTENCE D'UN DOCUMENT PAR LEQUEL LA DAME A... FAISAIT DONATION DE SES TITRES AU PREVENU NE SUFFIT PAS A JUSTIFIER LA DECISION DE RELAXE DES LORS QU'EN NE PRECISANT PAS SI CET ACTE, QUI ETAIT NUL FAUTE D'AVOIR ETE PASSE EN FORME AUTHENTIQUE, AVAIT ETE ACCEPTE PAR LE PRENEUR NI MEME S'IL ETAIT CONNU DE LUI, L'ARRET N'A CONSTATE NI UN TRANSFERT DE PROPRIETE DES TITRES AU PROFIT DU MANDATAIRE, NI QUE L'APPROPRIATION DES TITRES AVAIT ETE FAITE AVEC L'ASSENTIMENT DE LA DAME A...;
QUE, DE PLUS, L'ARRET NE POUVAIT LAISSER SANS REPONSE LES CONCLUSIONS DES PARTIES CIVILES QUI PRECISAIENT QUE, NONOBSTANT LA REVOCATION DE SA PROCURATION BANCAIRE, LE PREVENU AVAIT CONTINUE A VENDRE LES TITRES DE SON EX-MANDANTE;
"ET ALORS QU'ENFIN, EN ENONCANT QUE LE DELIT N'ETAIT PAS "SUFFISAMMENT CARACTERISE", L'ARRET, PAR CE MOTIF INCERTAIN ET EQUIVOQUE, N'A PAS DONNE DE BASE LEGALE A SA DECISION";
VU LESDITS ARTICLES;
ATTENDU QUE TOUT JUGEMENT OU ARRET DOIT CONTENIR LES MOTIFS PROPRES A JUSTIFIER LA DECISION;
QUE L'INSUFFISANCE DES MOTIFS EQUIVAUT A LEUR ABSENCE;
ATTENDU QU'IL RESULTE DES ENONCIATIONS DE L'ARRET ATTAQUE ET DE CELLES DU JUGEMENT DONT IL A ADOPTE LES MOTIFS NON CONTRAIRES QUE, LE 7 NOVEMBRE 1967, Z... A OBTENU DE X... JEANNE, VEUVE A..., ALORS AGEE DE 80 ANS ET QUI A DU ETRE PLACEE SOUS CURATELLE EN MAI 1969, UNE PROCURATION SUR LE COMPTE ET LE COFFRE BANCAIRES DE CETTE PERSONNE;
QUE, PAR LA SUITE, IL A UTILISE CETTE PROCURATION POUR VIDER LE COFFRE, VENDANT LES TITRES QU'IL CONTENAIT ET FAISANT VIRER LE PRODUIT DE CETTE VENTE AU CREDIT DE SON PROPRE COMPTE;
QU'IL A EGALEMENT ENCAISSE, SOIT DIRECTEMENT EN ESPECES, SOIT PAR VIREMENTS A SON PROFIT, LES FONDS QUI SONT PASSES PAR LE COMPTE DE SA MANDANTE;
QU'IL S'EST AINSI APPROPRIE DES SOMMES S'ELEVANT AU TOTAL A 344757,77 FRANCS PROVENANT A CONCURRENCE DE 207557,77 FRANCS DE LA VENTE DES TITRES ET POUR 137200 FRANCS DU COMPTE BANCAIRE DE DAME A...;
QU'IL A PU AINSI ACQUERIR DEUX APPARTEMENTS, DONT UN, EN VIAGER, DE LA DAME A... ELLE-MEME, UN GARAGE, DES VOITURES AUTOMOBILES ET UN BATEAU;
ATTENDU QUE, POUR RELAXER Z... DES FINS DE LA POURSUITE EXERCEE CONTRE LUI, A RAISON DE CES FAITS, DU CHEF D'ABUS DE CONFIANCE ET DEBOUTER LES PARTIES CIVILES DE LEURS DEMANDES, LES JUGES D'APPEL ENONCENT QUE CE DELIT N'EST PAS "SUFFISAMMENT CARACTERISE" A LA CHARGE DU PREVENU EN L'ETAT D'UN DOCUMENT EN DATE DU 19 MARS 1968, PAR LEQUEL LA DAME A... LUI FAISAIT "DONATION DE TOUS SES TITRES";
QU'EN OUTRE, QUELQUES MOIS PLUS TARD, EN SEPTEMBRE 1968, ELLE AVAIT DEPOSE CHEZ UN NOTAIRE UN TESTAMENT PAR LEQUEL ELLE INSTITUAIT Z... LEGATAIRE UNIVERSEL, CE TESTAMENT AYANT TOUTEFOIS ETE RETIRE LE 3 MARS 1969;
QU'ENFIN, AU COURS DE L'INSTANCE, LE 18 AVRIL 1969, LA DAME A... AVAIT ECRIT AU DEFENSEUR DE Z... UNE LETTRE DANS LAQUELLE ELLE AFFIRMAIT QU'ELLE CONSERVAIT SON AMITIE AU PREVENU ET QU'ELLE N'ETAIT POUR RIEN DANS LES POURSUITES EXERCEES CONTRE LUI;
MAIS ATTENDU QU'EN L'ETAT DE CES ENONCIATIONS, LES JUGES DU FOND N'ONT PAS DONNE UNE BASE LEGALE A LEUR DECISION;
QUE, D'UNE PART, ILS NE POUVAIENT SE FONDER SUR L'AFFIRMATION DE Z... NON VERIFIEE PAR EUX ET QU'ILS SE BORNENT A REPRODUIRE ET A ADOPTER SANS LA DISCUTER ET SELON LAQUELLE "IL NE RESULTE D'AUCUNE PIECE DE LA PROCEDURE QU'IL AIT EU LA CHARGE DE RENDRE OU DE REPRESENTER LES FONDS PASSES ENTRE SES MAINS";
QU'EN EFFET, AUX TERMES DE L'ARTICLE 1993 DU CODE CIVIL, LE MANDATAIRE EST TENU DE RENDRE COMPTE DE SA GESTION ET DE FAIRE RAISON AU MANDANT DE TOUT CE QU'IL A RECU EN VERTU DE SA PROCURATION;
QUE SI CE PRINCIPE AURAIT PU SOUFFRIR EXCEPTION EN L'ESPECE, C'EST A LA CONDITION QU'APRES AVOIR CONSTATE L'EXISTENCE DU MANDAT DONT Z... ETAIT INVESTI, LES JUGES AIENT EGALEMENT RELEVE - CE QU'ILS N'ONT PAS FAIT - QUE LA DAME A... AVAIT AUTORISE Z... A UTILISER LES TITRES ET LES FONDS A SON PROFIT;
QUE, D'AUTRE PART, EN ENONCANT QUE, PAR L'ACTE DU 19 MARS 1968, LA DAME A... AVAIT FAIT DONATION "DE TOUS SES TITRES" A Z..., LES JUGES NE POUVAIENT FONDER LA RELAXE TOTALE DE CELUI-CI SUR CE SEUL DOCUMENT QUI, EN TOUT ETAT DE CAUSE, NE POUVAIT JUSTIFIER LE DETOURNEMENT DES ESPECES EGALEMENT REPROCHE A Z...;
QU'EN MATIERE PENALE, LE JUGE DE L'ACTION ETANT LE JUGE DE L'EXCEPTION, IL APPARTENAIT ENCORE AUX JUGES, DEVANT LESQUELS IL ETAIT SOUTENU QUE L'ACTE DU 19 MARS 1968 ENTRAINAIT NOVATION DU MANDAT ORIGINAIRE EN LUI SUBSTITUANT UNE DONATION, DE S'EXPLIQUER SUR LA VALIDITE DE CE DOCUMENT DONT ILS ENONCENT QU'IL PARAIT "CONTESTABLE SUR LE PLAN CIVIL COMME SEMBLE LE CRAINDRE Z..." ET QUI, EN TOUT CAS, ETAIT CONTESTE PAR LES PARTIES CIVILES;
QU'IL LEUR INCOMBAIT EGALEMENT DE CONSTATER L'ANTERIORITE DE CETTE PRETENDUE NOVATION PAR RAPPORT AUX DETOURNEMENTS DE TITRES ET D'ESPECES REPROCHES AU PREVENU, LA NOVATION NE POUVANT PRODUIRE D'EFFET ALORS QUE LE DELIT D'ABUS DE CONFIANCE EST DEJA CONSOMME;
QU'ENFIN, LES AUTRES CIRCONSTANCES RELEVEES PAR L'ARRET QUANT A L'EXISTENCE, A UN MOMENT DONNE, D'UN TESTAMENT EN FAVEUR DE Z... ET QUANT AU MAINTIEN PAR LA DAME A... DE L'AMITIE QUI L'UNISSAIT AU PREVENU, NE SAURAIENT NON PLUS JUSTIFIER L'AFFIRMATION QUE LE DELIT D'ABUS DE CONFIANCE N'EST PAS SUFFISAMMENT CARACTERISE;
QU'EN EFFET CES ARGUMENTS ETAIENT INOPERANTS DES LORS QUE LA COUR D'APPEL N'EN DEDUISAIT PAS QUELS ETAIENT LES ELEMENTS CONSTITUTIFS DU DELIT QUI FAISAIENT DEFAUT;
D'OU IL SUIT QUE L'ARRET ENCOURT LA CASSATION, PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, MAIS SEULEMENT SUR LES INTERETS CIVILS, EN L'ABSENCE DE POURVOI DU MINISTERE PUBLIC, L'ARRET PRECITE DE LA COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE DU 30 JANVIER 1973, ET POUR ETRE STATUE A NOUVEAU CONFORMEMENT A LA LOI, DANS LES LIMITES DE LA CASSATION AINSI PRONONCEE : RENVOIE LA CAUSE ET LES PARTIES DEVANT LA COUR D'APPEL DE LYON