Attendu, selon le jugement déféré (tribunal de grande instance de Thonon les Bains, 15 juin 1984), que, les 7 juillet 1975 et 1er avril 1976, M.Bounour a acquis des locaux qu'il s'est engagé à affecter pendant au moins trois ans pour partie à l'habitation, et a, en conséquence, bénéficié, pour les locaux objets de l'engagement, de l'enregistrement au taux réduit prévu par l'article 710 du Code général des Impôts ; qu'en 1980, à l'occasion d'une vérification approfondie de la situation fiscale d'ensemble de M.Bounour au regard de l'impôt sur ses revenus des années 1976 à 1979, le vérificateur a demandé à l'intéressé, des renseignements sur l'affectation des locaux acquis en 1975 et 1976 ; qu'ayant considéré que l'engagement souscrit n'avait pas été tenu, l'administration des impôts a notifié à M. X..., le 24 décembre 1980, un redressement portant à la fois sur l'impôt sur le revenu et les droits d'enregistrement éludés, assortis du droit supplémentaire, puis a émis, le 4 décembre 1981, un avis de mise en recouvrement pour obtenir paiement desdits droits ; que, par le jugement déféré, le tribunal de grande instance a rejeté l'opposition de M.Bounour à cet avis ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :
Attendu qu'il est fait grief au jugement de mentionner qu'il était rendu " vu l'ordonnance de clôture rendue le 19 avril 1984 par M.Alain Maunier, juge de la mise en état " et " vu les réquisitions de M.le Procureur de la République en date du 3 mai 1984 ", alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'en matière d'enregistrement, compétence est attribuée au seul tribunal pour accorder aux parties ou aux agents de l'Administration qui suivent les instances les délais nécessaires pour produire leur défense ; que ces dispositions, dérogatoires au droit commun, excluent que le juge de la mise en état puisse prendre une ordonnance de clôture privant les parties de la possibilité de déposer toutes nouvelles conclusions ; qu'en l'espèce, il résultait des propres énonciations du jugement que l'affaire a été instruite sous le contrôle d'un juge de la mise en état, d'ailleurs distinct des magistrats qui ont composé la formation de jugement, lequel a rendu une ordonnance de clôture d'où il suit que les dispositions des articles R.202-2 du Livre des procédure fiscales et 763 et suivants du Nouveau Code de procédure civile ont été violées, et alors, d'autre part, qu'en matière d'enregistrement, le tribunal doit accorder aux parties les délais nécessaires pour présenter leur défense ; qu'en ne fixant aucun délai au contribuable pour répondre aux réquisitions du Ministère public, postérieures à l'ordonnance de clôture, le tribunal a derechef, violé par refus d'application l'article R.202-2 du Livre des procédures fiscales ;
Mais attendu que l'ordonnance de clôture, qui doit intervenir en matière fiscale comme en toute autre devant le Tribunal de grande instance, n'interdisait pas à M.Bounour de solliciter du tribunal, seul compétent pour les lui accorder, les délais nécessaires pour présenter sa défense ; que le moyen n'est donc fondé en aucune de ses branches ;
Sur le deuxième moyen, pris en ses deux branches :
Attendu qu'il est aussi fait grief au jugement d'avoir statué ainsi qu'il l'a fait, alors selon le pourvoi, d'une part, qu'aux termes de l'article 46 de la loi du 6 janvier 1948, partiellement repris sous l'article L.45 du Livre des procédure fiscales, " un décret pris sur la proposition du Ministre des finances, réorganisera le contrôle fiscal en vue d'assurer l'unité ou la stimultanéité des vérifications de la situation fiscale des contribuables " ; que le décret pris par ce texte n'a pas été émis, que bien au contraire, la loi distingue très clairement les différentes procédures de contrôle et notamment la vérification approfondie de la situation fiscale d'ensemble des personnes physiques au regard de l'impôt sur le revenu prévue à l'article 67 de la loi de finances pour 1976 du 30 décembre 1975 codifiée sous l'article L.12 du Livre des procédures fiscales ; que les dispositions du paragraphe 2 de l'article 46 de la loi du 6 janvier 1948 précitée tendaient seulement, avant la fusion des différentes régies fiscales, à régler la compétence des agents de celles-ci sans leur permettre de procéder indistinctement et simultanément aux vérifications de la situation fiscale d'un contribuable ; qu'en considérant à tort que l'Administration fiscale pouvait retenir pour le contrôle de l'assiette des droits d'enregistrement des éléments recueillis au cours de procédure distinctes spécifiquement prévues pour le contrôle de l'assiette des impôts dus par une société ou du seul impôt sur le revenu dû par le contribuable, le tribunal a violé, par fausse application, les textes précités, et alors, d'autre part, que les contribuables peuvent se faire assister, au cours des vérifications approfondies de leur situation fiscale d'ensemble, d'un conseil et doivent être avertis de cette faculté à peine de nullité de procédure ; que la procédure de vérification doit comporter l'envoi d'un avis de vérification précisant les années soumises aux vérifications ; qu'en l'espèce, il est constant que l'avis de vérification adressé à M.Bounour mentionnait que celle-ci concernait les revenus qu'il avait perçus au cours des années 1976 et suivantes ; que dès lors, l'Administration ne pouvait, sans commettre un détournement de procédure faire usage à d'autres fins, et sans que le contribuable ait été avisé préalablement de la faculté de se faire assister d'un conseil, des informations ainsi recueillies ; qu'en décidant le contraire, le tribunal a violé les dispositions de l'article 1649 septiès du Code général des Impôts issues de l'article 4 de la loi du 29 décembre 1977 reprises sous l'article L.47 du Livre des procédure fiscales ;
Mais attendu qu'à défaut de dispositions légales expresses les règles applicables à la vérification approfondie de la situation fiscale d'ensemble d'un contribuable au regard de l'impôt sur le revenu ne peuvent être étendues à l'exercice du pouvoir de contrôle de l'Administration des impôts en matière de droits d'enregistrement ; que, dès lors, ladite Administration pouvait notifier un redressement en cette matière, en se fondant sur des renseignements recueillis lors d'une vérification approfondie de la situation fiscale d'ensemble d'un redevable, effectuée au regard de l'impôt sur le revenu pour une période concernant celle au titre de laquelle les droits litigieux étaient estimés dus ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Sur le troisième moyen :
Attendu qu'il est encore fait grief au jugement d'avoir condamné M.Bounour à payer la somme pour laquelle l'avis de mise en recouvrement contesté avait été émis, alors, selon le pourvoi, que sauf le cas où la base d'imposition retenue par l'Administration est conforme à l'avis de la commission départementale de conciliation, la charge de la preuve incombe à l'Administration de telle sorte que lorsque l'Administration s'est abstenue de saisir cette commission la charge de la preuve du bien-fondé du redressement lui incombe : qu'en l'espèce où le litige portait sur l'évaluation des locaux affectés à un usage commercial la charge de la preuve incombait à l'Administration fiscale qui s'est dispensée de solliciter l'avis de la commission départementale de conciliation compétente par application de l'article 667 du Code général des Impôts ; qu'en n'indiquant pas en quoi l'Administration a rapporté la preuve du bien fondé de l'abattement de 40 % tel qu'elle l'a pratiqué, le tribunal a privé sa décision de base légale, au regard des articles 710, 1840 G quater, 666 et 667 du Code général des impôts et L.192 du Livre des procédures fiscales ;
Mais attendu que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain que le tribunal, appréciant la portée des éléments de preuve versés au débat, a estimé que la base de calcul des droits déterminée par l'administration des impôts devait être retenue, et ainsi, sans renverser la charge de la preuve, a justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi